Texte intégral
Le Monde : 24 juin 1995
Le Monde : Au lendemain des élections municipales et des succès du front national, comment expliquez-vous que ce soient les artistes qui, les premiers, aient lancé le débat : boycottage ou résistance ?
Philippe Douste-Blazy : Les créateurs sont ceux qui préfigurent notre monde de demain. Ils ont une perception très vive des courants qui traversent la société.
Sous le choc des événements, certains ont décidé de boycotter les manifestations culturelles dans les villes tombées aux mains du Front national. Beaucoup m'ont écrit pour me voir et en discuter. Je les recevrai de vue, et chacun tranchera en son âme et conscience.
Le Monde : Vous vous êtes prononcé clairement contre le boycottage. Pourquoi ?
Philippe Douste-Blazy : Résister ou déserter… Le problème est ancien. Je pense que c'est souvent l'ignorance et la pauvreté qui nourrissent les terreaux des extrémismes. Alors, il faut aider les gens, expliquer, ne pas alourdir le climat d'intolérance, ne pas oublier que la plupart des électeurs n'ont pas voulu ce résultat. On ne peut pas envisager de fermer des établissements culturels, qui sont d'une certaine façon des établissements publics, mais au contraire il faut provoquer des au contraire il faut provoquer des réunions, poursuivre les spectacles, les concerts. C'est le rôle des hommes et des femmes de culture de faire de la résistance contre l'exclusion et discrimination, qui sont des idées mauvaises. Il faut montrer qu'on respecte les autres, montrer pourquoi il est nécessaire de défendre l'esprit d'universalisme qui est dans notre culture. Il ne faut pas répondre aux insultes de M. Le Pen par l'insulte, ne pas tomber dans l'hystérie verbale. Ce ne sera jamais ma vision de la politique. Le Front national constitue un risque. À nous d'être vigilants.
Le Monde : Vous avez, dans le précédent gouvernement, occupé le poste de ministre de la santé. On est un peu surpris de vous retrouver à la culture. Quelles sont les grandes lignes de la politique que vous voulez développer ?
Philippe Douste-Blazy : Elles nous ramènent au débat précédent. Que ce soit au ministère de la culture ou de la santé de la culture ou de la santé, il s'agit toujours de l'homme. Si j'ai demandé à Alain Juppé ce ministère, c'est parce que j'estime qu'aujourd'hui la mission d'un ministre de la culture n'est, en fait, que peu éloignée de ce que j'ai fait à la santé. C'est à dire un ministère qui doit poser un regard sur la société, sur la vie, ou doit régner le débat d'idée. Pour réduire la facture sociale qui menace de s'élargir, la culture peut et doit jouer un rôle important. Comme elle peut contribuer à trouver une solution aux problèmes des jeunes générations. Ce ministère détient une partie de la solution. À la santé, on soigne les corps, à la culture on peut soigner l'esprit. À une condition : que ce ministère ne soit pas uniquement celui des affaires culturelles, du théâtre, du cinéma, des arts plastiques, etc., considérés comme des domaines séparés, compartimentés, étanches. Il doit être aussi celui des expériences. La société politique actuelle ne peut avancer que si elle est expérimentale et expliquée. Si une politique n'est ni l'une ni l'autre, elle s'effondre. Entre la politique dite de la ville et la politique culturelle il doit y avoir des passerelles et des moyens. C'est même une priorité dans un pays comme le nôtre. Je fais partie d'un courant de pensée qui met l'homme au cœur de la société et c'est pour cela que j'ai souhaité ce poste. D'autant plus que j'ai énormément de respect et d'estime pour les créateurs et les artistes.
Le Monde : Pratiquement, quelles sont les grandes lignes de votre action ?
Philippe Douste-Blazy : À la santé, je m'étais fixé des priorités, je n'ai pas réalisé tous mes objectifs, mais j'ai fait une partie du chemin sur chacun d'entre eux. À la culture, je compte également me fixer des axes de travail. D'abord, moderniser l'action culturelle de l'État. Du ministère de la culture dépendent de grandes institutions nationales. Toutes les études montrent que trop peu de gens y ont accès – pas plus de 15 % de la population ! En revanche, au cours des dernières années, les initiatives culturelles originales sont venues des collectivités locales et du tissu associatif. Il y a donc aujourd'hui trois politiques culturelles qui se juxtaposent : celle de l'État, celle des collectivités locales et celle des associations. Or, durant la dernière décennie, les deux dernières se sont largement développées pendant que le ministère de la culture gérait l'action culturelle de l'État. Celui-ci ne doit plus agir seul dans son coin.
La simple juxtaposition de ces trois efforts est insuffisante. Il faut substituer à cette cohabitation douce une politique de coordination volontariste, définir une politique nationale de la culture en étroite concertation avec les régions, les départements, les grandes villes mais aussi les grandes institutions. Il faut donc que l'État concède des moyens pour soutenir, accompagner et orienter les différentes politiques culturelles.
Le Monde : Que proposez-vous pour atteindre ce but ?
Philippe Douste-Blazy : D'abord réactiver le Fonds d'intervention culturelle – le FIC – créé par Jacques Duhamel, un moment oublié. Il devrait constituer l'outil de coordination qui permettra d'accompagner toutes les initiatives d'action culturelle. Ensuite, il faut ouvrir la culture à de nouveaux publics. Celle-ci est un gage de cohésion sociale. Or l'offre culturelle est très réduite dans les quartiers défavorisés et, en général, dans les périphéries. Importante dans les centres-villes, cette offre ne cesse de baisser, en quantité et en qualité, au fur et à mesure qu'on s'éloigne des centres. À dix ans, sur le plan culturel, les enfants sont souvent égaux mais à dix-huit ans ils ne le sont plus du tout. Les activités culturelles peuvent contribuer à combler ce déséquilibre. À condition d'agir. La culture, c'est l'action. Imaginez une France ou il n'y ait que des retransmissions de spectacles. Ce serait le désarroi le plus complet. On ne peut accéder à la culture sans une communion directe, collective, entre une personne et une œuvre.
Le Monde : Mais concrètement ?
Philippe Douste-Blazy : Dès aujourd'hui, je fais plusieurs propositions. D'abord, mettre en place dans les plus brefs délais des équipements culturels sur vingt sites expérimentaux, situés dans les quartiers les plus difficiles.
En y associant le ministère chargé de la lutte contre l'exclusion, le ministère de l'Éducation nationale et celui des sports. Je pense souvent à la phrase d'André Malraux : « La culture ne s'hésite pas, elle se conquiert. » Nous allons créer des salles de musique où les instruments seront prêtés et placés sous la responsabilité de leurs utilisateurs. Des activités théâtrales y seront organisées avec le concours d'artistes, d'acteurs, de musiciens et de chanteurs professionnels qui seront chargés non seulement d'éveiller la conscience artistique des jeunes, mais également de leur faire monter de vrais spectacles. L'idéal serait que, lorsque ces professionnels partiront, les jeunes aient acquis une véritable autonomie d'action.
Deuxième volet : utiliser les équipements culturels existants, notamment les scènes nationales, les bibliothèques, les centres culturels, qui ne le sont pas suffisamment. Troisième élément : la mise en place de l'éducation artistique dans vingt établissements scolaires, toujours en accord avec l'éducation nationale et les sports, grâce à l'aménagement du temps scolaire. Dans ces établissements pilotes, l'après-midi sera réservé à la musique, à la danse, aux arts plastiques, au spectacle vivant, à la lecture et à l'écriture. J'ai beaucoup aimé la déclaration de Luc Ferry sur ce sujet.
Il faut sortir l'enseignement artistique de son ghetto en gratifiant les disciplines artistiques naguère facultatives et sans aucun coefficient. Il faut persuader les élèves que, désormais, ces disciplines « comptent ». Et multiplier les lieux culturels au sein des établissements. Ce qui favorisera l'aménagement culturel du territoire en augmentant la demande, et en favorisant la création d'emplois culturels de proximité.
Si l'expérience est concluante, il devrait y avoir une montée en puissance de cet aménagement du temps scolaire et, dans cinq ans, tous les élèves de ce pays pourraient avoir accès, l'après-midi, à un enseignement culturel de qualité. Enfin, je suis frappé de voir que des enfants peuvent être hospitalisés pour des maladies très longues, et qu'il n'y a, dans les établissements hospitaliers, aucun lieu culturel à leur proposer. Il n'est pourtant pas impossible de trouver, à la marge, un financement et un endroit disponible s pour ce genre d'activités.
Ces propositions ne doivent pas empêcher la multiplication d'autres formes d'accès à la culture. Il faut continuer d'inventer des lieux nouveaux, ouverts, gratuits ou peu chers, ou se rencontrent des expressions artistiques diverses comme à Marseille, l'ancienne manufacture de tabac.
Paris Match – 13 juillet 1995
Paris Match : Votre nomination au ministère de la Culture a surpris. Comment un médecin, un homme de sciences, se retrouve-t-il Rue de Valois ?
Philippe Douste-Blazy : Vous savez, dans le monde du théâtre, un metteur en scène qui vient de terminer une pièce a toujours besoin d'un profane, d'une sorte d'œil neuf, pour lui dire ce qui va et ce qui ne va pas. Je suis un peu cet œil neuf. Ainsi qu'un œil enthousiaste. En cette fin de siècle, en effet, je pense que le ministère de la Culture sa jouer un rôle fondamental. Notre civilisation est en danger. Sans sombrer dans l'anti-américanisme, il est évident que le combat pour « l'exception culturelle » représente un enjeu vital pour l'Europe. Si 90 % de nos enfants regardent des films à 90 % américains, ils deviendront des Américains. Un de mes amis a récemment demandé à son fils de 10 ans ce qu'est un policier. Le bambin a répondu : « C'est un shérif ». Cela me trouble. Je ne vois pas ma tâche uniquement comme une responsabilité technique. Il y a des dossiers, bien sûr, et je vais les étudier. Mais mon rôle est plus fondamental. C'est par sa culture que la France définit son statut dans le monde.
Paris Match : Malraux était passionné de littérature, Michel Guy de théâtre, Jacques Toubon de peinture… Avez-vous un Faible pour un des arts majeurs ?
Philippe Douste-Blazy : Oui, le cinéma j'y vais souvent. Très récemment, j'ai beaucoup aimé « 4 mariages et l'enterrement », de Mike Newell et « La haine » de Mathieu Kassovitz, qui n'est pas un film sur la violence, mais sur les causes de la violence. Je suis emballé par les cinéastes de cette « nouvelle Nouvelle Vague ». À Cannes, j'ai été enchanté du succès de Kassovitz, mais aussi de celui de Xavier Beauvoir, Prix du jury pour « N'oublie pas que tu vas mourir », son film sur le sida. Je trouve passionnant que le cinéma mette le doigt sur les plaies de la société française et, au-delà, de la société occidentale. Ces longs-métrages montrent comment la spirale de la violence se met en place parce que personne ne parle plus à personne. Nos sociétés se déshumanisent. Les syndicats ne jouent plus leur rôle d'intermédiaire. Les parents ne discutent plus avec leurs enfants. Le chômage en est d'ailleurs souvent responsable.
Paris Match : Quels films citeriez-vous parmi vos préférés ?
Philippe Douste-Blazy : À froid, ce genre de question désarçonne. J'ai l'esprit de l'escalier et je trouve les réponses après coup. Mais, enfin, je peux citer « Un homme et une femme », de Lelouch, « Théorème », de Pasolini, « Pierrot le fou », de Godard. Celui que j'ai vu le plus souvent reste quand même « Le dernier métro, de Truffaut. Peut-être parce qu'il permet de porter un regard réfléchi sur une époque toute proche. Pour nous, hommes politiques, la vie va trop vite. Nous faisons des choix sans arrêt, et nous devons les faire sur l'instant. Or, avec le recul, tout est remis en cause.
Paris Match : En littérature, avez-vous des souvenirs de lecture abordant ce thème de l'absence de communication ?
Philippe Douste-Blazy : Évidemment « L'étranger », de Camus, un de mes livres préférés. On ne sait jamais si c'est l'homme qui est un solitaire par nature ou si c'est la société qui l'isole en ne se souciant pas de lui. Ce livre est plus moderne que jamais. Il décrit parfaitement le drame des êtres rejetés aujourd'hui par le progrès, la crise, la vie…
Paris Match : Dans les livres, vous cherchez des réponses aux problèmes de notre époque ?
Philippe Douste-Blazy : Non, pas forcément. Je citais « L'étranger » par passion mais, dans mes livres de chevet, j'aurais pu évoques « Les trois mousquetaire », « L'écume des jours », de Boris Vian, ou « Mort dans l'après-midi » le traité d'Hemingway sur la corrida. Je suis un homme du Sud et ce livre me « parle ». Sans être un aficionado, je suis sensible au rapport entre la vie et l'art qui apparaît dans une arène. À la relation si profonde aussi entre la fête populaire et la mort. Et puis, c'est un hommage à un pays qui respecte non seulement la souffrance mais encore, et surtout, ses traditions, son patrimoine, son passé. Il ne faut pas renier ses racines. J'aime également beaucoup un livre peu connu de Mauriac, « La province », qu'il a écrit dans les années 20. Il échappe à la caricature. Aussi bien celle de la province par les Parisiens que l'autre, celle de Paris par les provinciaux. Tout à coup, on découvre que la province est moins un lieu géographique qu'un état d'esprit ou un concept moral.
Paris Match : De Malraux à Toubon en passant par Michel Guy ou Françoise Giroud, la Rue de Valois a souvent été entre des mains très « parisienne ». Homme de province, ressentez-vous comme une injustice l'extraordinaire attention portée par l'État à la richesse culturelle de Paris ?
Philippe Douste-Blazy : Disons qu'il faut aider la province, c'est sûr. Mais tout le monde en convient – et les parisiens les premiers. Je n'aime pas trop les caricatures. Or, le provincialisme en est une, tout autant que le parisianisme. Les choses changent. Les gens de 40 ans, comme moi, disaient encore : Je vais monter à Paris tenter ma chance. ». C'était le syndrome Lucien de Rubempré dans « Illusions perdues ». Aujourd'hui, c'est presque risible. Les grandes métropoles régionales sont devenues de véritable foyers d'action et de culture. Du reste, je ne crois plus que la vraie rupture soit entre Paris et la province. Ce qu'il faut rééquilibrer, ce sont les villes et leurs banlieues. Aujourd'hui, plus vous vous éloignez du centre, moins vous avez d'offre culturelle. Il faut que cela change ! Prochainement, nous allons créer vingt sites expérimentaux dans les quartiers difficiles où nous ouvrirons des salles de spectacle et où nous favoriserons l'expression théâtrale et les arts plastiques. Des artistes viendront promouvoir ces sites.
Paris Match : Vous passez pour mélomane.
Philippe Douste-Blazy : À 16 ans, à Toulouse, quand j'étais étudiant, je m'étais abonné à l'orchestre de chambre de Louis Avria-Combes. Je suivais aussi les cycles de Michel Plasson qui permettaient d'aller écouter l'orchestre de Toulouse en jean et pull-over. Je me souviens des cycles Beethoven, Suavinski, Mozart…
Paris Match : Vous étiez très « classique » ?
Philippe Douste-Blazy : Oui. Mais cela ne m'empêchait pas d'aimer les concerts de rock. J'ai vu Led Zeppelin à Paris et, lorsque j'étais en terminale, j'ai assisté à un show des Stones, à Londres. Si vous voulez tout savoir, je vis avec mon temps. Je lis les journaux aussi. Je dirais même que je m'immerge dans la presse. Je m'y promène. Je ne me contente pas des sélections faites au ministère. Je suis un papivore. Et je défendrai les Maisons de la presse tout comme les librairies. Pendant des années, j'ai été client chez Privat, une librairie de Toulouse. On y tutoie le patron qui donne des conseils de lecture. C'est irremplaçable. Nous devons tout faire pour éviter que ne se reproduise le drame des disquaires : ils ne sont plus que 300 en France. Voilà un échec qu'il ne faut pas renouveler.
Paris Match : Vous êtes ministre de la Culture mais, en tant que consommateur, quels ont été vos derniers achats culturels ?
Philippe Douste-Blazy : S'agissant de livres, j'ai acheté récemment « L'alchimiste » de Paulo, Coelho (éd. Anne Cancre). Comme C.d., j'ai rapporté à la maison les derniers MC Solaar dont je suis allé écouter un concert à Toulouse. Je suis allé voir « Les Indes galantes » de Rameau, interprétées par Les Arts florissants de William Christie. J'ai aussi beaucoup tourné autour d'une peinture de Marcel Loubchansky. Et puis, j'aime « faire » les brocantes. J'achète des gravures du XVIIIe ou des dessins, qui sont plus dans mes moyens que des tableaux. Mais ne me croyez pas archaïque. J'adore le design. J'ai chez moi un fauteuil de Philippe Stark et un bureau de Jean-Michel Wilmotte. Vous voyez, je ne suis pas complètement un paysan du Sud.
Paris Match : À ce propos, Jean-Marie Le Pen ne vous a-t-il pas traité de « crétin des Pyrénées » ?
Philippe Douste-Blazy : Qu'on ne compte pas sur moi pour faire de la surenchère. Arrêtons avec les invectives, stop à l'hystérie verbale.
O'FM – La Croix : jeudi 27 juillet 1995
Journalistes : Guillaume Tabard, La Croix-L'Événement – Ariane Chemin, Le Monde – Bernard Mazières, L'Express – Henri de Saint-Roman & Christian Delahaye, O'FM
Q. : Tous les ministres de la Culture se sont battus pour le fameux 1 % culturel ; pensez-vous être celui qui va l'atteindre ?
Philippe Douste-Blazy : Nous sommes en pleine discussion budgétaire et je peux vous assurer que je me bats pour avoir le 1 % culturel. Après tout, lorsque le président de la République a fait campagne, il en a parlé, longuement, j'ai eu l'occasion de le voir depuis et je suis persuadé qu'il m'aidera, ainsi que le Premier ministre, pour obtenir le 1 % culturel.
C'est vrai que nous sommes dans une période difficile de déficit budgétaire important, mais je crois aussi que la culture fonde notre identité. La culture, c'est ce que nous avons envie de faire pour sauver notre civilisation. Je crois qu'arriver au 1 % du budget de l'État, ça me parait en cette fin de siècle important. C'est un symbole, un signe fort que nous voulons sauver notre identité.
Q. : Actuellement, on n'est plus très loin du 1 %.
Philippe Douste-Blazy : Oui, il faut donc gagner un milliard, un milliard et demi, deux milliards.
Q. : Si on n'avait pas repris les essais nucléaires, vous les auriez peut-être eus ! …
Philippe Douste-Blazy : Ce qui est vrai, c'est que chaque fois qu'on aura un problème de budget, on nous dira cela. Je voudrais simplement dire que le budget culture, pour ceux qui nous écoutent, ce n'est pas très concret et je voudrais dire ce que c'est. D'abord, ce sont des aides aux différentes associations ; prenons l'exemple d'une association que je connais, où j'ai milité, qui est une association contre l'illettrisme, pour le développement de la lecture. Dans des quartiers difficiles. Eh bien, le ministère de la Culture lui donne de l'argent. On a la chance d'avoir en France un tissu de bénévoles, qui ne demandent pas grand-chose, mais qui y croient, qui sont généreux, passionnés. Le ministère de la Culture peut les aider.
Deuxièmement, bien sûr, c'est l'aide aux équipements. C'est vrai pour l'opéra, c'est vrai pour la Comédie française, c'est vrai pour le Centre Georges-Pompidou, mais c'est vrai aussi pour les théâtres de banlieue et de province, pour les orchestres de province. Bref, c'est l'accès à la connaissance, l'accès à la culture. J'ai envie de dire que le plus beau cadeau pour moi serait qu'on dise un jour que j'ai été un ministre de la Culture pour music m'aperçois qu'il n'y a que 15 % de la population qui va au théâtre, que 18 à 20 % des gens vont au cinéma, ne parlons pas de l'Opéra ! J'ai envie d'élargir ces publics et, en même temps, amener la culture en province, mais pas obligatoirement dans les grandes métropoles, mais aussi en ruralité, dans les banlieues difficiles.
Q. : Comment élargir ces publics ? En baissant les prix et en donnant des subventions ?
Philippe Douste-Blazy : C'est un problème d'argent, mais pas uniquement d'argent. Prenons l'exemple de la Comédie française, nous parlons actuellement avec M. Miquel pour ouvrir une troisième salle, à 18 h 30, sous le Louvre, pour enfin montrer au public des pièces en un acte du répertoire français. Je crois que ce serait important qu'un certain nombre de nos concitoyens puissent aller à la Comédie française à 18 h 30, pour une heure. C'est ça, élargir le public.
L'Opéra, c'est pareil. Mais ce que j'ai envie de faire surtout, c'est prendre des troupes de théâtre, des orchestres de musique et aller dans les quartiers difficiles, parce que je crois que la culture, c'est un lien social. J'y crois. Je crois que nous avons encore beaucoup de bénévoles, de gens très généreux dans ces artistes, ces milliers d'artistes qui m'ont écrit pour me dire : on est d'accord pour y aller.
Je crois qu'au ministère de la Culture, on sauve, on soigne l'esprit et l'âme, comme à la Santé, on soigne le corps. Mais quelque part, on soigne les gens. Ce qui est bien de les attirer pour des MUSCS comme ça.
Q. : Vous n'avez pas le titre de ministre de la Communication, alors que vous avez repris les attributions principales de la Communication; pourquoi ?
Philippe Douste-Blazy : D'abord, je pense qu'il n'est pas anormal que le ministre de la Culture puisse avoir en charge les attributions pour la presse et l'audiovisuel. Je crois que ce qui est dangereux, c'est d'avoir un ministère de l'Information et c'est pour cela que le Premier ministre n'a pas souhaité qu'il y ait un ministère de la Communication individualisé, de peur qu'on dise le gouvernement s'attribue l'information. Après tout, la chance que l'on a dans un pays comme le nôtre, c'est qu'on peut voter pour qui on veut, n'importe qui peut se présenter aux élections et n'importe qui peut faire un journal et n'importe qui peut l'acheter. Moi, le pluralisme, je trouve cela extraordinaire et je pense qu'il n'est pas normal que des pouvoirs publics puissent avoir l'idée un peu saugrenue, à mon sens, d'avoir un ministère de l'Information.
Q. : On a eu l'impression que le gouvernement vous met en avant dans les dossiers difficiles, comme la grève de l'audiovisuel public et qu'en revanche, pour les dossiers plus politiques, vous n'avez pas forcément la haute main…
Philippe Douste-Blazy : Pourquoi je pense qu'il est important que le ministère de la Culture soit en charge de la communication audiovisuelle et presse ? Parce que, qu'est-ce que le service public ? Moi je suis un hospitalier d'origine et, pour moi, l'hôpital public, ça sert à quelque chose. Et bien le service public à la télévision et à la radio, ça sert à quelque chose, à condition, bien sûr, qu'il soit identifiable. Le service public doit répondre à plusieurs missions : d'abord l'accès à la connaissance, l'accès à la culture, l'accès à l'information régionale. Et puis, peut-être aussi et surtout, il faudrait que le service public soit un lieu de rencontre, un lieu de discussion, ouvert, en particulier avec la jeunesse. Parce que, dans ce pays, on n'a suffisamment de lieux où on peut rencontrer la jeunesse. On l'a vu avec l'ancien gouvernement, auquel j'appartenais, avec le CIP, les difficultés à dialoguer.
IL faut que le service public soit identifiable. Il l'est souvent, il ne l'est pas toujours. Je crois qu'en plus le service public doit aider la création française. Au niveau du cinéma, de la chanson française, de la fiction. Je vais prochainement présenter un décret pour montrer qu'il y a une alliance entre le service public et les producteurs audiovisuels.
Q. : Quatre chaînes publiques, comme actuellement, c'est bien ?
Philippe Douste-Blazy : Quatre chaînes publiques existent, ça prouve que le pluralisme existe, il faut qu'elles soient complémentaires. Mais en tant que ministre de la Culture, je suis sensible aux émissions culturelles à l'écran. Je suis persuadé qu'on peut faire des émissions culturelles qui ne soient pas rébarbatives.
Q. : Vous demandez plus d'émissions culturelles ?
Philippe Douste-Blazy : Il ne faudrait pas profiter d'Arte pour dire : après tout, le service public fait du culturel avec Arte et donc, nous on n'en fait plus. Je suis persuadé qu'en deuxième partie de soirée, vers 22 h 30, 23 heures, on peut faire des émissions culturelles de bon niveau de grande écoute, sans reléguer ces émissions à des heures où tout le monde dort. Qu'est-ce qui est important dans la vie publique ? Ce qui est important dans la vie publique, c'est que les gens qui sont en charge des dossiers de la nation comprennent ce qui se passe dans la vie quotidienne des personnes. Si on ne donne jamais un micro à un lycée ou à un étudiant, tous les quatre ou cinq ans, il y a une explosion dans les lycées ou dans les universités. Je crois que nous sommes capables, nous, les hommes politiques, de voir quelqu'un qui avec son authenticité de dix-huit ou vingt ans va dire : écoutez, moi, ça ne va pas, moi je n'arrive pas à joindre les deux bouts. Je crois que le service public devrait le faire.
Q. : Il ne le fait pas ?
Philippe Douste-Blazy : Aujourd'hui il ne le fait pas suffisamment. Il le fait souvent, mais il ne le fait pas suffisamment. J'aimerais qu'il le fasse un peu plus.
Q. : La constitutionnalisation du CSA vous parait-elle une bonne idée ?
Philippe Douste-Blazy : Pour l'instant, ce n'est pas à l'ordre du jour. Ce que je crois, c'est qu'il est bon d'avoir un CSA qui permette, en particulier sur le plan politique, mais aussi sur le plan culturel, de compter les points. Il est important qu'il y ait un pluralisme. Il est important aussi qu'il y ait en dehors du ministre qui a les attributions de l'audiovisuel, quelqu'un qui puisse dire : attention, là, le cahier des charges n'est pas respecté, vous devriez essayer de corriger. Je crois que c'est bon, que c'est quelque chose qui est tout à fait normal dans un pays démocratique. Mais arrêtons de faire des guéguerres entre le CSA et ses partenaires.
Q. : La constitutionnalisation du CSA n'est pas exclue ?
Philippe Douste-Blazy : Pour l'instant, elle n'est pas à l'ordre du jour.
Q. : Est-ce que le ministre peut demander au service public de télévision tel ou tel type d'émission ?
Philippe Douste-Blazy : Non. Le ministre ne peut pas dire qu'il veut telle émission. Mais vous n'empêcherez pas le ministre de la Santé que j'ai été de demander des émissions sur l'éducation pour la santé. Je trouve absolument anormal que sur les chaînes, en particulier publiques, il n'y ait pas d'éducation, ne serait-ce que pour les gosses qui ont seize, dix-sept ou dix-huit ans, sur le sida ou sur l'hépatite B. Maintenant que je suis ministre de la Culture, j'ai envie aussi de me battre pour qu'on puisse écouter des voix magnifiques, des musiques classiques ou contemporaines, des pièces de théâtre.
Je viens de découvrir quelque chose d'extraordinaire dans ce ministère, je viens de découvrir que tous les spectacles vivants de ce pays, le Chatelet, l'Opéra, etc., qui coûtent beaucoup d'argent, qui sont exceptionnels en qualité, ne sont jamais filmés !
Je profite de cette émission pour dire que nous allons mettre en place un nouveau système. Il ne s'agit pas de le faire à grands frais, on n'y arrivera pas, mais qu'au moins l'on puisse avoir trente ou quarante spectacles vivants de très grande qualité par an, que l'on puisse les filmer, les mettre dans des boîtes et les garder ! Car ça fait partie du patrimoine culturel de ce pays ! Il y a très peu de pays qui ont la chance d'avoir des spectacles aussi beau ! Et en plus, il y a des gens qui meurent entre-temps.
J'ai eu la chance de rencontre hier Jérôme Deschamps, qui est quelqu'un de formidable, qui m'a parlé de cela et m'a fait prendre conscience de ce problème. Je peux vous assurer que cela sera réglé très vite.
Q. : Où en sont vos relations avec Jean-Pierre Elkabbach ?
Philippe Douste-Blazy : Moi, je n'ai de problème avec personne. Je crois d'abord que lorsqu'on a des responsabilités connues les siennes, on rentre dans un poste comme celui-là, on travaille avec une équipe et au bout de six mois ou un an on commence à avoir véritablement le résultat.
Aujourd'hui, on commence à voir le résultat justement, qui montre que les chaînes publiques, que ce soit France 2 ou France 3, je dirai France Télévision a connu une augmentation de l'audience et de l'audimat. J'ai envie de parler avec lui en tant que ministre de la Culture pour lui demander s'il est possible d'avoir plus d'émissions culturelles. Récemment, il a donné une information importante : l'Heure de vérité sera remplacée par deux ou trois autres émissions politiques.
Q. : Vous vous en réjouissez ?
Philippe Douste-Blazy : Je me réjouis que le service public soit le lieu d'un débat politique et de citoyens. C'est important que l'on puisse expliquer. Les hommes politiques, la vie politique sont bafoués actuellement. Il est important de pouvoir en parler. Moi j'aimais beaucoup l'Heure de vérité et ce que faisait François-Henri de Virieu, la question n'est pas là.
Ce qui est important, c'est d'avoir dans une émission politique les spectateurs qui regardent la télévision et de l'autre, une vraie règle du jeu, d'authenticité et de vérité. Il y en a d'autres, mieux placés que moi, pour savoir ce qu'il faut faire, des journalistes, des hommes de télévision.
Q. : Arte et la Cinquième ont créé un GIE ; qu'en est-il aujourd'hui ? Peut-on envisager un jour que ces deux chaînes ne soient qu'une ?
Philippe Douste-Blazy : Là, ce n'est pas encore à l'ordre du jour. J'ai rencontré les différents responsables de ces chaînes. Ce qui est vrai, c'est qu'aujourd'hui, la Cinquième doit devenir encore plus la chaîne de la connaissance. Nous parlions tout à l'heure de l'illettrisme, de la lutte contre l'alphabétisation. Je suis persuadé que la Cinquième va pouvoir nous aider à atteindre de meilleurs résultats.
Deuxièmement, Arte, partie il y a trois ans. Quelle magnifique idée ! Montrer que dans un pays il n'y a pas que la politique de la demande, il y a aussi une politique de l'offre. Il ne faut pas être trop élitiste parce que, sinon, il n'y a personne devant les télévisions. C'est ce qui s'est passé un peu début. Aujourd'hui, des efforts sont faits et j'ai demandé à Jérôme Clément de faire des efforts de programmation pour qu'il y ait un peu plus de monde, c'est vrai. Récemment, justement, ils ont fait un direct d'Avignon, pour la pièce de Jérôme Deschamps, et ça a été un succès.
Q. : C'est Arte qui sera chargée de filmer les pièces, comme vous l'annonciez tout à l'heure ?
Philippe Douste-Blazy : Pourquoi pas ? Pourquoi Arte ne s'occuperait pas d'une mission aussi belle de conservation du patrimoine culturel de nos artistes ?
Q. : Votre prédécesseur à la communication N. Sarkozy avait débloqué un budget d'à peu près 300 millions de francs pour aider la presse écrite ; allez-vous en poursuivre l'application, va-t-il y avoir des modifications ?
Philippe Douste-Blazy : D'abord je me bats pour la presse, pourquoi ? Parce qu'il y a un constat entre 1980 et 1990, les recettes publicitaires de la presse ont augmenté de 10 %. Depuis 1990 elles baissent, pourquoi ? Parce que d'abord il y a eu une crise majeure des recettes publicitaires, mais aussi parce qu'il y a eu une fuite vers la télévision. Et je crois que c'est très grave parce que nos journaux, nos quotidiens, qu'ils soient nationaux ou régionaux, sont les garants de la démocratie. Alors c'est vrai que les nationaux ne vont pas bien, il faut d'abord garantir leur indépendance, il faut les aider mais garantir leur indépendance, et en même temps il faut maintenir le pluralisme. Il y a une remarque que je voudrais faire : qu'est-ce qui différencie la France des autres pays ? Après tout, en Allemagne, en Italie, il n'y a pas ces problèmes-là, en Angleterre non plus. Mais si vous prenez l'Allemagne et l'Italie, vous vous apercevez que les quotidiens nationaux ont des bases régionales. Or chez nous, que ce soit Le Monde, Libération, Le Figaro, ils n'ont pas de bases régionales.
Q. : Il y a eu des tentatives d'éditions régionales…
Philippe Douste-Blazy : Oui, mais elles n'ont pas marché. Prenez par exemple le Frankfurter Allgemeine Zeitung qui est un quotidien national, mais avec une base régionale très importante. Et puis pourquoi le cacher, les charges d'impression, de fabrication, de distribution, sont particulièrement chères en France, et vous savez que pour faire le même journal, il faut plus d'argent en France que dans les autres pays. Il faut les aider par des aides directes, surtout peur ceux qui ont le moins de publicité, et il faut aussi les aider par des aides indirectes, par exemple le colportage. Moi j'aime bien recevoir mon journal chez moi. Et nous avons exonéré de charges sociales…
Q. : Ça c'est le plan Sarkozy…
Philippe Douste-Blazy : Oui, c'était le plan Sarkozy, nous voulons exonérer de charges sociales les colporteurs. C'est vrai aussi pour les diffuseurs de presse, le kiosque, la maison de la presse, ça sert d'abord pour l'aménagement du territoire, c'est très triste lorsque dans un village ou dans une petite ville il n'y a plus de diffuseurs de presse. Nous voulons aussi diminuer de 2 000 francs la taxe professionnelle pour les diffuseurs de presse. C'était le plan Sarkozy, je serai heureux d'être celui qui le met en place, tout dépend du budget.
Q. : Plan maintenu et appliqué tel quel ?
Philippe Douste-Blazy : Je ne suis pas en train de vous dire qu'on va le faire, je vous dis que je vais me battre pour le faire, c'est un problème de budget, nous sommes en discussion budgétaire actuellement.
Q. : Quand vous parlez de baisse des recettes pub pour la presse écrite, vous n'échappez pas à une question sur la loi Evin ; faut-il la revoir d'une manière ou d'une autre ?
Philippe Douste-Blazy : N'attendez pas de l'ancien ministre de la Santé qui est cardiologue, de dire qu'il faut faire de la publicité pour le tabac, ce n'est pas possible. Le problème qui existe, et j'en ai souvent parlé avec des responsables, même quand j'étais ministre de la Santé, avec des responsables de la presse. Le problème c'est qu'on peut regarder à la télévision, par exemple lorsqu'on aime la formule comme moi, on regarde un grand prix de formule I et on voit beaucoup de publicité pendant 50 heures par an. Et en même temps on empêche la presse de faire de la publicité. Donc j'ai envie de dire : oui à la loi, à condition qu'elle soit pour tous.
Q. : Autre solution, interdire ou diminuer la publicité sur les chaînes publiques ?
Philippe Douste-Blazy : Ce que je crois lorsqu'on parle de publicité du service public, je crois d'abord que le débat ancien qui consistait à dire « à chaîne publique ressource: publiques, à chaîne privées ressources commerciales » est terminé. C'est terminé parce que c'est un problème d'argent, on peut très bien enlever la publicité, mais il faudrait à ce moment-là augmenter la redevance à un point tel que ce serait pour le consommateur quelque chose d'inacceptable. Par contre c'est vrai que lorsqu'on regarde les autres pays européens on s'aperçoit qu'en Allemagne la présence de la publicité sur les chaînes publiques ne les empêche nullement d'être de vraies chaînes publiques. Et on s'aperçoit aussi que la BBC, qui est pour moi le modèle de chaîne publique, est une chaîne qui commence à regarder vers les recettes publicitaires. Ce qui m'ennuie c'est que, en effet vous avez raison, il y a une contradiction entre le ministre de la culture qui dit « mettons des émissions culturelles assez tôt » et d'autre part qui dit « mais la publicité est inévitable ». Je crois qu'on peut arriver dans ce pays à avoir des chaînes publiques qui pourront remplir leur mission de service public tout en gardant quand même la publicité, peut-être un peu moins, peut-être un peu moins, je suis assez pour, mais quand même garder la publicité.
Q. : La loi Carignon classifie les radios en 5 catégories ; entendez-vous revoir ces classifications ?
Philippe Douste-Blazy : C'est très clair, je ne serai pas un ministre qui fera une énième loi sur la presse ou l'audiovisuel, je pense qu'il faut arrêter. Chaque fois que quelqu'un devient ministre, il veut faire une loi immédiatement. Moi je ne serai pas comme cela, on va se poser, on va écouter, et on va essayer de régler les problèmes au coup par coup et en faisant une politique de fond.
Q. : il n'y aura pas de loi Douste-Blazy sur l'audiovisuel ?
Philippe Douste-Blazy : Sur l'audiovisuel, pas tout de suite, on verra plus tard, je peux rester longtemps.
Q. : Est-ce vous qui serez en charge de la privatisation de RMC ?
Philippe Douste-Blazy : Le gouvernement est en charge du dossier de la privatisation de RMC. Vous savez qu'on en parle depuis maintenant longtemps…
Q. : Elle a été décidée par l'ancien gouvernement…
Philippe Douste-Blazy : Elle a été décidée par l'ancien gouvernement, reportée, et je sais qu'actuellement on y travaille, donc je ne peux pas vous répondre maintenant.
Q. : Les éventuels candidats au rachat ne savent pas à qui s'adresser parce qu'il parait que tout le monde s'en occupe…
Philippe Douste-Blazy : Non je ne crois pas, je crois que c'est très simple. Peut-être que ceux qui ont envie d'acquérir RMC disent ça parce qu'ils ne sont peut-être pas bien placés, mais tout sera transparent, en particulier avec vous, et on vous dira exactement ou en est le dossier.
Q. : C'est pour quand, avant la fin de l'année ?
Philippe Douste-Blazy : Peut-être début 96.
Question posée par le peintre Olivier Debré, invité la semaine dernière du Grand O. O'FM-La Croix : Il est un point qui m'inquiète particulièrement, c'est qu'il est parait-il question que les œuvres d'art soient intégrées dans le calcul de l'assiette de l'ISF et soient donc taxées. Ça serait évidemment la mort du marché de l'art, et ça serait ressenti comme une catastrophe non seulement par les collectionneurs qui n'oseront plus acheter, par les marchands qui ne vendront plus, et par les peintres pour les mêmes raisons. De plus, il y aurait des fraudes et les œuvres d'art partiraient vers l'étranger. La chose a été évitée il y a quelques années, pourquoi est-on en train de revenir là-dessus ?
Philippe Douste-Blazy : D'abord je voudrais rendre hommage à Olivier Debré et à toute son œuvre, il est actuellement au Jeu de Paume et je crois que la plupart des français doit voir cette exposition. Mais pour répondre directement à la question, je veux le rassurer, je suis formel, il est hors de question pour moi d'accepter que les œuvres d'an puissent rentrer dans l'impôt sur la solidarité, car ce serait en effet l'effondrement du marché de l'art en France, et toutes les œuvres d'art partiraient à l'étranger. Donc je suis formel, ça ne se fera pas, cher Olivier Debré, merci de votre question.
Q. : Pierre Méhaignerie a émis des critiques très sérieuses à l'encontre de l'action gouvernementale; il a dit que le gouvernement manquait de courage. Partagez-vous cette analyse ?
Philippe Douste-Blazy : D'abord je le regrette, deuxièmement j'ose espérer que ce n'est qu'un peu de rancœur, et enfin je pense que Pierre Méhaignerie, qui a appartenu à tous les gouvernements de droite et de centre-droit depuis 1974, doit savoir que ce n'est pas dans les trois premiers mois que tout se règle, et que la vie politique, et en particulier la vie d'un gouvernement est un problème de fond à moyen et long terme.
Q. : Quels sont les signes concrets qu'on peut espérer pour que la réunion de la majorité soit effective, alors qu'on la vue sur plusieurs questions, des fractures apparaissent au sein de cette majorité ?
Philippe Douste-Blazy : Vous ne pouvez pas avoir une majorité écrasante à l'Assemblée nationale sans avoir quelques heurts de temps en temps. Ceci étant, chaque fois qu'il y a un vote, je vois qu'il n'y a aucune voix qui manque. Et vous verrez que ce soir et demain matin, il y aura à la fois l'Assemblée nationale et le Sénat qui se mettront d'accord sur un texte unique pour la réforme constitutionnelle. Ce qui permettra lundi 31 juillet de convoquer le congrès. Et donc ça prouve que cette majorité fonctionne, que ce gouvernement fonctionne, et qu'il doit y avoir aujourd'hui un sursaut national pour essayer de faire une cohésion minimale.
Q. : Mais tout de même comment expliquez-vous que ce gouvernement n'a eu aucun état de grâce ; est-ce à cause du temps qu'il a pris pour présenter son programme ?
Philippe Douste-Blazy : D'abord, je pense que, Alain Juppé a présenté son programme au bout de quatre semaines, ça ne me paraît pas être trop long dans la tradition républicaine, deuxièmement je pense qu'il fait quelque chose de très sérieux. C'est vrai que la politique de paillettes n'est pas son style, ce qu'on lui reproche c'est de pas jouer le court-terme, ne pas jouer son image personnelle tout de suite, mais je pense qu'avec du courage, et je crois que les français attendent des hommes politiques du courage.