Déclaration de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, sur les missions de la police et sur la contribution des forces de sécurité au bon déroulement de la Coupe du Monde de Football, à Paris le 19 août 1998.

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Circonstance : Commémoration de l'appel des policiers parisiens à l'insurrection en août 1944, à Paris le 19 août 1998

Texte intégral

Monsieur le préfet de police,
Monsieur le maire de Paris,
Mesdames, Messieurs,


Pour la deuxième année consécutive le 19 août, je suis présent parmi vous, à la préfecture de police, pour commémorer l'anniversaire de l'insurrection qui voyait, voici cinquante quatre ans, les policiers parisiens s'engager dans la rude et décisive bataille de la libération de Paris, après plus de quatre années. En se rassemblant dès le 19 août 1944, à l'aube, sur la place du parvis de Notre-Dame de Paris, en pénétrant dans la préfecture de police puis en occupant celle-ci, en faisant de ces bâtiments le coeur du soulèvement parisien, les policiers ont montré la voie du courage et du renouveau.

Ainsi que nous le faisons chaque année depuis ce moment fort de notre histoire, il nous revient de rendre aujourd'hui un vibrant hommage au patriotisme de ces policiers qui a redonné vie aux valeurs de la République, et rendu ses couleurs à la France.

Au nom du Gouvernement, je salue, avec émotion la mémoire des 167 policiers héroïques tombés au combat au cours de ces journées. Le mémorial devant lequel nous nous inclinons, plaques commémoratives scellées autour de l'enceinte de la préfecture de police, témoignent du courage de ces hommes.

Je tiens aussi à renouveler à tous les acteurs et témoins de ces heures glorieuses et difficiles, dont plusieurs se trouvent parmi nous, l'assurance constante de notre attachement et notre fidélité.

Fonctionnaires de police de Paris, vous devez vous montrer fiers de ceux de vos aînés, qui, par leur héroïsme, ont lavé la honte de l'occupation et vous ont permis d'arborer cette fourragère rouge, signe distinctif des corps d'élite, symbole de la Légion d'honneur attribuée à la préfecture de police par la décision du général de Gaulle du 12 octobre 1944. Je sais que vous avez à coeur de défendre chaque jour le digne héritage de ces grands anciens, avec la même exigence morale et la même volonté de servir fidèlement et loyalement la France et la République.

Aujourd'hui comme hier, la République et la Démocratie doivent être défendues, certes d'une autre manière, mais qui sollicite tout autant votre courage et votre dévouement.

La police nationale, et la police parisienne en particulier, se trouvent encore en première ligne pour répondre aux attentes légitimes de nos concitoyens. C'est bien souvent la police, en effet, qui incarne la présence de la puissance publique lorsque les autres institutions font défaut. Une responsabilité éminente lui incombe, dans la grande tradition de dévouement et de civisme qui est la sienne, pour réduire les incivilités et les violences urbaines, pour faire reculer la délinquance et pour maintenir les fondements de notre cohésion sociale et nationale.

L'exercice des prérogatives de la puissance et de l'autorité publiques s'effectue parfois au péril de la vie des policiers eux-mêmes. Nous avons ainsi tous, malheureusement, en mémoire l'événement tragique survenu le 27 janvier dernier, 15 boulevard de la Chapelle dans le 10ème arrondissement, cet accident qui a coûté la vie aux trois jeunes fonctionnaires Laurent DELOS, Wilfrid BOURDON et Jérôme DELVA. Nous nous souvenons aussi du décès en service, le 21 mai dernier, de M. Jocelyn GRANDU, gardien de la paix affecté, dans le ressort du Secrétariat général pour l'Administration de la Police de Paris, à la Direction de la sécurité publique du Val-de-Marne.

Ces événements dramatiques viennent nous rappeler, combien la mission et le devoir d'assurer, à tout instant et dans toutes les conditions, la paix et la sécurité publiques comporte de risques. Cette triste réalité est malheureusement trop souvent perdue de vue par nos concitoyens. Ce prix du sang, que paye lourdement la police, c'est celui de la confiance que la population française lui accorde. Cette confiance, la police doit la faire fructifier là où elle existe, la créer là où elle fait défaut. Ceci implique bien des qualités, toutes nécessaires pour accomplir la mission délicate de protéger nos concitoyens : l'initiative et le professionnalisme indispensable, la distance et l'objectivité nécessaires, le sang-froid, la correction, la courtoisie, bref la maîtrise des situations et d'abord de soi-même.

Au cours de ces dernières semaines, le grand événement international qu'a constitué la Coupe du Monde de football (durant lequel le gendarme mobile Daniel NIVEL a été très grièvement blessé) est venu mettre en évidence la tâche difficile des forces de l'ordre de Paris. Je tiens à rendre hommage au remarquable travail accompli dans la capitale, à cette occasion, sous l'autorité de Monsieur le préfet de police.

La préparation largement anticipée et minutieuse de cette fête mondiale, le maintien de l'ordre public dans les conditions les plus difficiles, l'attention de tous les instants portée à la sécurité des spectateurs, la gestion des flux de circulation et l'encadrement des foules immenses qui ont accompagné de leur enthousiasme les exploits de leurs équipes favorites ont nécessité, je le sais, une forte capacité de mobilisation, un savoir-faire et un dévouement total.

Les forces de l'ordre n'ont cessé de se trouver en permanence au premier rang des difficultés et ont contribué, heureusement, à la réussite de cet événement majeur dont notre pays avait la charge. Je revois en pensée avec vous la nuit du 12 au 13 juillet qui a vu 1 500 000 personnes fêter la victoire de l'équipe de France, et cela malgré le coup de folie d'une automobiliste qui appartient vraiment au domaine de l'imprévisible. Je revois la remontée triomphale des Champs Élysées par l'équipe de France victorieuse le 13 juillet, le beau défilé du 14 où la police s'est à nouveau illustrée aux yeux de tous, sans oublier les six rencontres organisées au Parc des princes ou encore les concerts organisés à Paris à cette occasion.

Je vous renouvelle donc bien volontiers, aujourd'hui, l'hommage chaleureux et mérité que vous adresse la Nation.

Monsieur le préfet de police, je suis certain qu'au cours du second semestre et avec le même enthousiasme et le même professionnalisme, la préfecture de police va s'attacher à (...) dernière main à la préparation et à la mise en oeuvre de la réforme dont j'ai (...) les grandes lignes à l'ensemble de vos cadres le 9 avril dernier. Cette réforme qui nécessite esprit d'innovation et capacité d'adaptation renforcera l'efficacité du travail de police de proximité qu'attendent les Parisiens.

Je souhaite que la concertation déjà engagée avec l'ensemble des acteurs concernés se poursuive, que l'information la plus large soit donnée à tous les personnels, afin que la mobilisation de tous concoure au succès de cette réforme qui fera date dans l'histoire de la préfecture de police.

Je fais toute confiance à Monsieur le préfet de police pour en achever au cours de ces prochains mois les travaux préparatoires et permettre à ce projet ambitieux, mais nécessaire, de voir le jour au tout début de l'année 1999. Je ne doute pas que la préfecture de police saura relever avec succès ce nouveau défi.

Avant de conclure mon propos, je souhaite, Monsieur le préfet de police, Monsieur le maire de Paris, Mesdames et Messieurs, renouveler mes vives et sincères félicitations aux récipiendaires des Ordres nationaux ainsi qu'aux titulaires de la Médaille pour acte de courage et de dévouement que nous avons eu le plaisir de décorer au cours de cette cérémonie, ainsi qu'à leurs familles.

Je tiens aussi à exprimer la reconnaissance du Gouvernement à l'ensemble des hommes et des femmes qui servent à la préfecture de police pour leur engagement sans relâche au service de nos concitoyens et pour leur dévouement quotidien et exemplaire dans l'exercice de leur mission. "Faire en tous domaines retour à la République", tel est le programme du Gouvernement. Une police républicaine rencontrera toujours le soutien populaire et puissant qui lui est indispensable. Vos aînés qui ont combattu, ici, le 19 août 1944, l'ont trouvé dans le peuple de Paris libéré. A leur exemple, vous le trouverez aussi dans la considération et la reconnaissance de nos concitoyens qui, n'en doutez pas, récompenseront votre sens élevé du devoir au service de la République, au service de la France.