Interviews de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, à France-Inter et dans "Le Figaro" le 28 octobre 1998, sur la poursuite de l'entente franco-allemande pour la construction européenne et sur sa première rencontre avec le nouveau ministre allemand des affaires étrangères, M. Joschka Fischer.

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Texte intégral

France Inter - mercredi 28 octobre 1998

S. Paoli
France-Allemagne : quel couple formerons-nous désormais alors que G. Schröder vient d’accéder à la Chancellerie et que, dès aujourd’hui, le vice-chancelier et ministre des affaires étrangères, le Vert J. Fischer, commence son mandat par une visite à Paris, qu’il prolongera aussitôt d'une visite à Londres, car dit-il, l'Europe est un polygone. Y a-t-il, là, une nouvelle définition de l'espace européen et, dans cet espace, de la relation franco-allemande ? Y a-t-il pour cette Allemagne réunifiée et aujourd'hui dirigée par des hommes qui n'ont pas connu la guerre la tentation de revendiquer un rôle directeur en Europe et un désir d'émancipation que certaines premières décisions politiques semblent esquisser : l'abandon du nucléaire, l'accord boursier Londres-Francfort, l'alliance industrielle et aéronautique et spatiale qui serait sur le point d'être conclu entre Dealer-Benz et British Aerospace. Restons-nous, M. Védrine, un couple, dans sa définition classique, ou devenons-nous, vous savez ce que certains appellent, un couple moderne avec aventures possibles ?

- « C'est une expression que je n'emploie pas à propos de la relation franco-allemande parce qu'elle est assez impropre et elle prête à… »

S. Paoli
Elle a longtemps été utilisé.

- « Oui, mais on emploie beaucoup d'expressions les unes pour les autres. Je trouve que l'expression la plus exacte c'est “moteur”. Moteur, il y a eu. D'abord c'est moi exclusif, ce qui montre bien que dans certains cas, on trouve des arrangements avec d'autres pays, et cela montre bien que le sens profond de la relation franco-allemande depuis quasiment la fin de la IVe République et encore plus nettement sous la Ve République, c'est d'être le moteur de la construction européenne. Et quand on pense aux grandes figures qui ont incarné cela - de Gaulle-Adenauer, Giscard-Schmidt, Mitterrand-Kohl - on voit tout de suite que cela s'applique à des progrès majeurs dans la construction européenne. »

S. Paoli
Mais est ce que le temps qui passe et le poids de l'histoire ne peuvent pas jouer peut-être un rôle cette fois-ci ? C'est vrai que pour la première fois, voilà des hommes qui accèdent au pouvoir et qui n'ont pas connu la guerre dans une Allemagne qui est réunifiée…

- « Oui, mais cela est vrai partout… »

S. Paoli
… qui change de capitale. Enfin, il y a vraiment un changement de structure.

- « Oui, mais c'est vrai dans toute l’Europe. C'est une évidence chronologique et démographique. »

S. Paoli
Est-ce qu'il n'y a pas chez les Allemands une tentation de dire : « Allez, on est les plus forts et dans ce moteur européen, eh bien, soyons les carburateurs, c'est-à-dire faisons marcher tout le reste » ?

- « Je ne crois pas. Je ne pense pas qu'il y ait dans l'Europe d’aujourd'hui, dans l'Union européenne, la possibilité d'un rôle directeur - je reprend l'expression que vous employez - pour un pays en particulier. Cela ne marche pas comme cela. Et même le moteur franco-allemand qui reste, selon mon analyse, indispensable tout simplement parce qu'on ne voit pas ce qui pourrait le remplacer - à l’heure actuelle on ne voit pas comment la France et la Grande-Bretagne, l'Allemagne et la Grande-Bretagne, l'Allemagne et je ne sais quel autre pays pourrait remplacer ce que la France et l'Allemagne peuvent faire seules ensemble. Ce sont les deux pays qui, par leur poids, leur légitimité historique dans la construction européenne, leur rôle dans l'euro par exemple, sont dans tous les lieux dans lesquels se décide la suite de L’Europe. Si vous regardez bien, il n'y a pas d'alliance bilatérale de remplacement. Ce qui est vrai qu’aujourd'hui, c'est que cette entente franco-allemande qui reste indispensable et irremplaçable ne suffit pas. C'est qu’autour d’elle, il faut construire des arrangements à géométrie variable avec d'autres pays. Je le dis tranquillement, je crois que la suite le montrera. Je crois qu'il n'y a pas de remplacement à cette tâche que nous devons accomplir ensemble. »

S. Paoli
Mais dans cet espace, aujourd’hui, politique qui s'est mondialisé et où l'économique quelque fois prime sur le politique, est-ce qu'il n'y a pas un risque de tentation libérale, vous avez un axe qui serait Berlin-Londres-Washington ?

- « On est plutôt entrain de parler d'une réorientation de l'ensemble de l'Europe du côté social-démocrate. Ce n'est pas exactement cela. Toutes les figures géométriques, à mon avis, ne collent pas par rapport à la réalité d'aujourd'hui. L'Union européenne est à Quinze ; les éléments moteur ont été le résultat d'un travail franco-allemand étendu à d’autres - c'est franco-allemand plus ceci, plus cela, selon les moments. Il y a une géométrie variable complémentaire. On n'a pas jusqu'ici d'éléments de substitution. L'économie est fondamentale mais nous vivons la mise en place d'une décision qui a été une décision politique, par excellence, qui est celle de la monnaie unique. Ce n'est pas parce que cela s'est appliqué au domaine de la monnaie que cela n'a pas été une décision politique. Donc, cette suprématie n'a pas changé. Et si on est sensible en ce moment à un vent nouveau en Europe, c'est un vent nouveau de volontarisme politique. Ce n'est pas l'économie qui prime. L'économie est un domaine d'application parmi d'autres de cette volonté que l’on sent aujourd’hui. Et quand les leaders européens disent aujourd’hui : “nous allons consacrer plus de temps et d'énergie à la croissance, à l’emploi, à une conception peut-être plus volontarisme de l'usage de la monnaie unique, comme le font les Américains eux-mêmes pour le dollar”, c'est bien une démarche politique. Donc, je crois qu'il faut aborder cette nouvelle étape avec une extrême confiance. Du point de vue de la France, nous sommes dans une position qui nous amène, de toute façon - mais c'est une responsabilité, ce n'est pas un privilège - à être dans toutes les configurations essentielles pour faire avancer l’Europe. Cela nous impose de trouver des solutions - avec les Allemands notamment - aux problèmes qui sont devant nous et qui concernent le financement de l'Union européenne. On n'a pas à chercher midi à quatorze heures. Nous devons régler ces problèmes-là. Il ne faut pas se laisser égarer, il ne faut pas se laisser distraire, il ne faut pas se laisser inquiéter par une sorte de poésie géométrique que l'on trouve dans les expressions d'aujourd’hui. Les réalités sont très fortes. C'est à nous de faire tout cela. »

S. Paoli
Revenons au niveau des hommes. Comme cela se passe, j'allais dire, entre vous et lui ? C'est à dire votre homologue qui est aussi d'ailleurs vice-chancelier, qui arrive à Paris tout à l’heure, quel type de rapports avez-vous avec lui déjà ?

- « Cela n'a pas commencé. »

S. Paoli
Vous vous êtes déjà parlé, j’imagine. Non, jamais ?

- « Le Gouvernement n’est en place que depuis aujourd'hui et, avant hier, à Luxembourg, c’est K. Kinkel qui représentait l’Allemagne. L'entrée en fonction du nouveau gouvernement allemand, c'est aujourd’hui. La passation des pouvoirs a lieu ce matin. »

S. Paoli
Je n'arrive pas à croire que vous n'ayez pas encore échangé quelques mots, ne fut-ce que quelques mots, avec l'homme qui va diriger la diplomatie allemande ?

- « Non, pourquoi ? »

S. Paoli
Comme cela, par curiosité. Je ne sais pas : bonjour, comment cela va ?

- « C’est ce que je vais dire tout à l’heure. Je vais lui dire bienvenue. Je suis très content qu'il vienne à Paris juste après son entrée en fonction. C'est un geste tout à fait sympathique. On va voir, on va faire connaissance, on va bavarder, on va discuter, on va faire le tour d'horizon des problèmes qui sont devant nous et sur lesquels nous allons travailler dans les prochains jours et les prochaines semaines. Après on ne va pas cesser de se voir. »

S. Paoli
Alors le moteur - puisque vous dites que sinon un un couple en tout cas un moteur -, vous placer la hiérarchie des importances où ? De quoi avez-vous d'abord envie de parler avec M. Fischer ?

- « Envie ou pas, il y a des sujets qui s'imposent à nouveau. Aujourd’hui, dans l’Europe, nous avons à prendre des décisions sur le mode de financement et le niveau de financement de l'Union européenne de 2000 à 2005. »

S. Paoli
Les allemands trouvent qu'ils payent trop.

- « Exactement. Et aussi bien les Allemands de Schröder que les Allemands de Kohl - ce qui relativise un peu un certain nombre de commentaires sur le changement. Il y a un changement de ton, et de style sur la politique économique, sur la coordination des politiques économiques. Là, il y a manifestement un déblocage allemand qui est très important, qui est très prometteur, comme il y a peut-être - je ne suis pas sûr encore - un déblocage britannique en ce qui concerne la défense européenne. Ce sont les éléments qui changent. En revanche, en ce qui concerne la défense des intérêts allemands dans le financement de l'Union européenne, les Allemands sont les Allemands et ils trouvent qu'ils payent beaucoup trop par rapport aux autres. Et nous, nous n'avons pas spécialement envie de payer plus naturellement. Il y a la question des politiques communes en Europe, la politique agricole, le fonds structurel, ceux qui en bénéficient veulent les garder, ceux qui n'en bénéficient pas veulent les réduire. C'est un schéma classique de début de négociation qui s'annonce difficile. Donc on n'a pas le choix. »

S. Paoli
Cela ne va pas être une première matinée facile alors ?

- « Non, on ne va pas aujourd'hui négocier. Et puis cela concerne les chefs d’État, de gouvernement. Cela nous concernent naturellement puisque nous sommes, selon les traités, coordinateurs dans le travail européen. Mais cela concerne aussi les finances, l’agriculture, l'aménagement du territoire, toutes sortes d'autres membres des gouvernements, dans les deux cas. Mais, c'est pour répondre à votre question : de quoi avons-nous envie de parler ? On doit parler de cela parce que c'est le sujet qui va occuper l’année 1999. Les Allemands vont avoir la présidence européenne semestrielle dans les mois qui viennent, jusqu'en juin, à partir de janvier. Ils voudraient conclure, ils espèrent conclure, et nous espérons avec eux pouvoir conclure sous la présidence. Mais cela ne se décrète pas la conclusion d'une négociation. Il faut la prendre à bras le corps, c'est tout. »

S. Paoli
Et les grands sujets industriels qui, eux aussi, ont un très fort sens politique, par exemple les alliances dans le domaine de l’espace, de l’aérospatiale, de l’aviation, les alliances possibles dont on dit qu'elles seraient sur le point être conclues entre British Aerospace et Demler-Benz. Et nous ?

- « C'est un point important mais qui n'est pas de la responsabilité exclusive des gouvernements. C'est pour cela qu'il faut trier entre ce qui relève des gouvernements, ce qui relève des industriels… Dans l'affaire des Bourses - par exemple - c'est un arrangement direct dans lequel les gouvernements n'ont joué aucun rôle. Il ne faut pas associer cela aux changements de gouvernement en Allemagne. L'association entre Londres et Francfort : ce sont des bourses, ce sont des organismes tout à fait autonomes qui se sont arrangés sur cette base. Les gouvernements allemands et britanniques non pas joué de rôle le par rapport à cela. Donc il faut bien distinguer, surtout dans la société moderne où on parle tellement de la société civile ou des acteurs économiques, il faut bien voir le rôle de chacun. Nous, nous avons en tant que gouvernement, régler des problèmes qui dépendent de nous et que nous sommes les seuls à pouvoir traiter. Et pour le reste, nous allons non pas à nous substituer aux autres acteurs, mais à créer un cadre favorable pour que les choses soient les plus fécondes entre nous. Alors c'est vrai que pour nous, la France, l'élaboration d'une industrie européenne, sur tous les plans, d'une industrie européenne par moment, en particulier c'est un élément très important. Nous avons à faire à des industriels qui depuis des années ont pris l'habitude de raisonner arrangements variables, mondiaux, européens peut-être, pas toujours, pas automatiquement. Donc, il faut faire coïncider ces deux approches. »

S. Paoli
Est-ce qu'il ne va pas falloir aussi composer, j'allais dire - on dit toujours en littérature que le style c'est l’homme -, social-démocratie, très bien : est-ce qu'il y aurait des modèles différents ? Y aura-t-il un modèle Blair ? Y aura-t-il un modèle Jospin ? Y aura-t-il un modèle Schröder ? Et est-ce qu'il n'y aura pas là-dedans une sorte de rivalité, de course à la réforme qui peut peut-être handicaper la construction européenne ?

- « Non, il n'y a pas de rivalité. D’abord, c'est vrai que les sociaux-démocrates à la fois se ressemblent et sont tous différents pays par pays. C'est vrai des conservateurs aussi : ils se ressemblent et ils sont tous différents. La relation franco-allemande, ce moteur dont je parlais, a déjà rebondi après 5, 6, 7 alternances. On a connu toutes les configurations politiques. C'est pour cela qu'on peut aborder les nouvelles échéances avec confiance par rapport à la suite. Ce n'est pas d'hier matin. Et c'est une aventure et c'est un engagement qui n'appartient à aucune force politique en propre. Donc, on peut aborder cela calmement. D'autre part, dans les nuances, chez les sociaux démocrates comme chez les autres, il n'y a pas de rivalité. Rivalité, pourquoi ? Il ne s'agit pas de distribuer un prix pour savoir qui est le plus ceci ou le plus cela. Chacun recherche la meilleure réponse politique aux problèmes de son propre pays, et ensuite quand ils se rassemblent, ils cherchent quel est le dénominateur commun qui leur permet d’avoir la meilleur approche possible pour l’Europe. Il y a des choses qui se décident dans la mécanique de l’Union européenne - et tant mieux si on est convergent, il faut s'y employer - et il y a des choses qui sont des décisions nationales. Il faut créer, simplement pour que l'Europe bouge sur tous les plans, le maximum de compréhension. Il n'y a pas de rivalité. Il n'y a pas de concours. Il ne faut pas raisonner à l’ancienne. Il n'y a pas un pays leader. Précisément, ce qui est fascinant dans l'Union européenne, c’est que tout se fait par négociation, tout se fait par travail en commun, tout se fait par compromis, par consensus. Alors cela paraît laborieux, c'est pénible à décrire pour les journalistes quand ils sont devant un sommet, parce qu'on ne comprend pas où on en est par rapport au sommet d’avant ou au sommet d’après. Mais en même temps, c'est formidable par rapport aux époque historique où un pays pouvait tenter d'imposer sa vue aux autres. C'est un progrès. »


Le Figaro, 28 octobre 1998

Le Figaro. - Vous recevez à Paris votre nouveau collègue allemand, Joschka Fisher. Connaissez-vous déjà ce vieil ami de Daniel Cohn-Bendit ? Attachez-vous une importance à son étiquette politique ?

Hubert Védrine. - Je suis très heureux d'accueillir à Paris et de faire aujourd'hui la connaissance de Joschka Fischer, dont j'ai beaucoup entendu parler. Nous avons des amis communs. J'attache bien sûr une grande importance, non pas tellement à son « étiquette » mais à sa personnalité, à son itinéraire, à ses idées, et j'observe attentivement ses déclarations et ses intentions. Il a déjà commencé à imprimer sa marque à la politique de son pays.

Le Figaro. - Si vous n'aviez qu'un seul message fort à lui faire passer, quel serait-il ?

Hubert Védrine. - Bienvenue, et mettons-nous tout de suite au travail. Nous avons beaucoup à faire ensemble ! Il s'agit rien de moins que de refonder, avec nos partenaires, notre projet commun pour l'Europe à un moment crucial : lancement de l’euro, agenda 2000, réformes institutionnelles, élargissement. Nous devons régler ces problèmes mais voir déjà au-delà : dire clairement ce qu'une Union renforcée apportera à ses membres, à ses citoyens, au monde.

Le Figaro. - Dès la venue de Gerhard Schröder à Paris, le 30 septembre, il était convenu de créer des groupes de travail pour relancer le moteur franco-allemand. Où en est-on ?

Hubert Védrine. - Un groupe bilatéral a, en effet, été constitué avec des collaborateurs du président, du premier ministre, de Pierre Moscovici et de moi-même. Il s'est déjà mis au travail. Relancer le moteur franco-allemand, c'est d'abord trouver ensemble des solutions aux problèmes qui s'imposent à nous, comme l'agenda 2000, pour pouvoir prendre d'autres initiatives.

Le Figaro. - Redoutez-vous que l'Allemagne n'impose à la France un triangle Berlin-Londres-Paris ? Ou ne privilégie, de plus en plus, ses intérêts nationaux ?

Hubert Védrine. - Ne jouons pas à nous faire peur ! Allemagne n'hésite plus à défendre ses intérêts nationaux : et alors ? N'est-ce pas ce que nous faisons, et les Britanniques, et tous les autres ? Cela ne nous empêche pas d'être sincèrement européens. Quant à cette métaphore du « triangle », à la mode ces temps-ci, voilà ce que j'en pense : la France et l'Allemagne ont et conserveront une responsabilité particulière -  voyez l’euro - tout simplement parce que si elles ne pouvaient pas s’entendre, c'est toute la construction européenne qui en serait paralysée. C'est pourquoi je parle de « moteur » franco-allemand.

Il est vrai que dans l'Europe d’aujourd'hui, l'accord entre la France et l'Allemagne demeure irremplaçable, mais il n'est pas suffisant et il doit être prolongé et complété par des relations étroites avec chacun des autres membres de l’Union. Ainsi la France comme l'Allemagne recherche simultanément la meilleur entente possible avec la Grande-Bretagne. Mais cela ne suffit pas pour parler d'un « triangle ». Donc, non seulement je ne redoute rien, mais l'attitude des nouveaux responsables allemands en matière de politique économique débloque bien des choses et crée un contexte prometteur, comme Portschach l’a montré.

Le Figaro. - La place prépondérante que prennent les ministres des finances dans la construction européenne au détriment des ministres des affaires étrangères ne vous agace-t-elle pas ?

Hubert Védrine. - Rôle prépondérant ? Les ministres des finances jouent en effet un rôle croissant dans l’Europe, parce que les domaines qui sont de leurs responsabilités rentrent de plus en plus dans le champ de l’Europe : monnaie, fiscalité, budget, croissance, emploi. Ils font leur travail. C'est une bonne évolution qui traduit les progrès de l’Europe elle-même.

En ce qui concerne les ministres des affaires étrangères, assistés par les ministres des affaires européennes, ils ont deux responsabilités : en premier lieu la coordination de l'ensemble des conseils sectoriels ainsi que la préparation des Conseils européens. L’expérience a montré que quand le conseil des affaires générales assure mal cette fonction essentielle de coordination, c'est toute la machine européenne qui en pâtit parce que personne ne peut assurer ce rôle à leur place. Depuis deux mois, le CAG a entrepris de réformer son fonctionnement pour être plus efficace. En second lieu, ils ont la charge d'élaborer pas à pas, pour l’Union, une politique étrangère et de sécurité commune.

Le Figaro. - S'agissant du Kosovo, justement, qu'attendez-vous de la nouvelle équipe au pouvoir à Bonn ?

Hubert Védrine. - Je suis convaincu que l'Allemagne continuera de jouer un rôle de premier plan au sein du groupe de contact. Ce sera sans doute un de nos premiers sujets de discussion.