Texte intégral
Télérama : Quelle est votre réaction aux protestations contre cette campagne ?
Élisabeth Hubert : En matière de sida, notre pays doit faire face à une situation épidémique grave, et, si je peux comprendre que l’on soit étonné, voire choqué, par certaines images ou certains messages, je crois que les précautions prises dans le choix des supports afin de ne pas heurter les plus jeunes justifient pleinement cette campagne estivale.
Télérama : Fallait-il aller aussi loin, être aussi précis dans la formulation des messages ?
Élisabeth Hubert : Oui, incontestablement, il fallait changer le ton des campagnes précédentes, qui, à force de vouloir parler à tout le monde sans choquer personne, ne parlaient plus à personne et étaient inefficaces. Nous devons tendre vers le degré zéro de contamination et, pour ce faire, dire les choses comme elles sont. Plusieurs centaines de milliers de nos compatriotes sont touchés par cette maladie. Il faut tout faire pour l’enrayer et rattraper notre retard dans la prévention.
Télérama : Pouvez-vous rappeler à nos lecteurs quel était l’objectif de cette campagne ?
Élisabeth Hubert : C’était de communiquer sur les comportements plus que sur les individus, afin d’aboutir à des modifications d’attitude durables. Il était aussi de faire prendre conscience aux parents, aux familles, aux citoyens que le sida concerne chacun d’entre nous et que nous ne vivons pas dans un monde cloisonné où il suffirait de fermer les yeux pour vivre tranquille.
Télérama : Pensez-vous que cet objectif a été atteint ?
Élisabeth Hubert : L’avenir seul nous le dira. Mais les post-tests que nous commençons à recevoir sont excellents. Les Français apprécient, et c’est ce qu’ils réclamaient, ce ton plus fort, plus direct et plus précis.
Télérama : Quel bilan tirez-vous de cette campagne ?
Élisabeth Hubert : Il y a toujours un aspect positif à toute chose. Les réactions à la campagne me font penser que nous devons convaincre encore davantage de la priorité absolue des messages de santé publique sur des considérations qui n’ont pas leur place dans mon ministère. Nous ne sommes pas là pour juger nos concitoyens, mais pour les prévenir des risques qu’ils encourent à ne pas adopter, dans certaines situations des comportements de prévention de ces risques.
Télérama : Quelles actions de communication comptez-vous mener désormais en matière de prévention contre le sida ?
Élisabeth Hubert : La campagne d’été était spécifique à une période durant laquelle les attitudes se relâchent encore davantage. Elle sera renouvelée l’année prochaine. Entre-temps, nous travaillons sur le terrain, au plus près des populations les plus concernées par l’épidémie de sida : homosexuels, toxicomanes, prostitué(e)s, migrants, jeunes défavorisés. Nous entreprendrons aussi, dès l’automne, une nouvelle campagne de solidarité avec les personnes atteintes par VIH dans la presse et à la télévision.