Texte intégral
Q - Monsieur le ministre, bonjour.
R - Bonjour.
Q - Alors nous l'avons vu tout à l'heure dans le journal, à Londres et à Washington, on se dit très satisfaits des résultats de l'opération en Iraq. Saddam Hussein, de son côté, crie victoire. C'est tout de même rare ce genre de conflit dont tout le monde sort vainqueur.
R - Oui, enfin, il faut interpréter les déclarations. En tout cas, si les Américains et les britanniques pensent que l'opération a atteint certains des buts qu'ils avaient annoncés, c'est une raison de plus pour réfléchir, comme la France le propose, à un nouveau chapitre dans la façon dont l'ONU gère la question iraquienne. Cela fait maintenant sept ans que les contrôles de l'UNSCOM ont permis de démanteler des programmes d'armes en Iraq, et en plus il y a ces frappes. Nous pensons qu'il serait temps de passer à un dispositif qui serait plus tourné vers le risque de danger à l'avenir, plutôt que sur l'examen systématique de ce qui s'est déroulé dans le passé. On a sans doute fait le tour de ce sujet-là.
Q - Avant parler d'avenir, tout de même, parlons de la position de la France dans cette crise, la France qui a soigneusement évité de prendre partie. Une position qui, d'ailleurs, a provoqué la colère de l'Iraq. Le vice-Premier ministre, Tarek Aziz, avait même parlé d'opportunisme, voire d'hypocrisie.
R - La France a une position extrêmement claire dans cette affaire, comme elle l'a ailleurs sur l'Iraq depuis des années, des mois et des semaines. Nous avions dit, à l'avance, que nous ne pensions pas que des frappes militaires puissent régler le problème. Le problème étant de savoir comment nous pouvons avoir, dans l'avenir, un Iraq qui ne soit pas un danger dans le cadre du Moyen-Orient.
D'autre part, nous avons déploré que le Conseil de sécurité ne puisse pas examiner le rapport Butler. Nous avons déploré des conséquences pour les populations civiles, nous avons déploré l'engrenage qui a conduit à cela, mais nous avons dit que Saddam Hussein en portait la pleine responsabilité.
Les choses ont donc été extrêmement claires. Je ne vois pas du tout là où il y a eu la moindre incertitude sur la position française. En même temps, nous avons eu une position qui ne visait pas simplement l'instant immédiat mais également le lendemain et le surlendemain. Pourquoi ? Parce que nous voulons participer à l'élaboration d'une nouvelle politique sur l'Iraq.
Q - Jacques Chirac justement a fait, hier une série de propositions. Est-ce que le plus urgent maintenant, ce n'est pas justement de rediscuter de l'embargo pour les populations civiles en Iraq ?
R - Cela fait plusieurs semaines, qu'au sein du Conseil de sécurité, nous travaillons à ce que serait un contrôle continu. Le président en a donné quelques éléments hier précisément. Nous y avons travaillé parce que nous pensons que les contrôles sur le passé devraient pouvoir se terminer. En revanche, trouver un dispositif de détection pour être sûr que l'Iraq ne redevienne pas dangereux à l'avenir, dispositif de contrôle d'armement et dispositif concernant l'utilisation des revenus financiers, pour qu'ils ne soient pas détournés de leur objet et qu'ils ne servent pas à racheter des armes. Nous pensons que c'est le moment puisqu'il y a eu les contrôles, les frappes. Il faut donc tourner la page de cet épisode et sans doute adapter l'UNSCOM pour ces nouvelles tâches. Voilà sur quoi la France a travaillé dès avant le conflit puisque, dès avant la dernière crise, nous étions sur cette ligne. Ce contrôle précis continu devrait permettre de reposer la question de la levée de l'embargo.
Q - Adapter l'UNSCOM, est-ce que ça veut dire notamment changer de patron, Richard Butler ?
R - Ce n'est pas le problème le plus central, ni le plus immédiat. Il faut surtout redéfinir sa fonction. Si on redéfinit sa fonction, détection donc de nouveaux risques à l'avenir, ce qui n'est pas tout à fait la même chose, il pourrait être logique que la composition des modalités, - bref toute une série de choses –, soit modifiée.