Texte intégral
- Politique -
Les députés entament demain la discussion de projet de loi sur la parité en politique. Mais c'est sur le terrain professionnel que les femmes rencontrent les problèmes les plus lourds.
- « L'égalité homme femme passe d'abord par l'égalité socio-économique ».
Le projet de loi visant à promouvoir par des mesures appropriées l'objectif de parité entre les femmes et les hommes pour un égal accès aux fonctions de la vie publique vient en débat à l'Assemblée nationale demain. Il doit se concrétiser dans une révision constitutionnelle permettant par la suite au Parlement de légiférer comme il l'entend. Sans nul doute, le Gouvernement espère-t-il rencontrer un large consensus parlementaire tant est partagé le constat sur l'insuffisance de la participation des femmes à la vie publique. Pour autant, les débats ne manqueront pas puisque, dès le dépôt du projet, un amendement déposé à l'initiative de Catherine Tasca (PS), rapporteur, vise à renforcer le rôle du législateur. En effet, la perception de la situation profondément inégalitaire que vivent les femmes est aujourd'hui très forte, y compris chez les hommes, et la conscience de la nécessité de s'attaquer à cette question a fait de réels progrès. Un récent sondage CSA réalisé entre les 20 et 22 mai 1998 à l'initiative de la CGT montre que deux tiers des personnes interrogés admettent l'existence d'une telle inégalité, les femmes pour 67 % d'entre elles la dénonçant plus fortement que les hommes (55 %). mais au-delà du constat, les opinions se diversifient sur bien des aspects. Personne ne considère que la parité constitue à elle seule une réponse satisfaisante : 21 % des personnes interrogées la souhaitent, 22 % préfèrent la mise en place de de quotas progressifs, 26 % se tournent vers l'effort volontaire des femmes pour faire progresser la situation.
- La partie facile de l'exercice
Il est donc certain que dans son état actuel, le projet de loi va susciter mains débats dans le pays, ce qui, en soi, est plutôt une bonne chose, car au plan des réalités comme des mentalités, la société française a sérieusement besoin d'évoluer. S'il devait en rester à la seule question de la parité, le débat se cantonnerait à la périphérie des causes de cette insuffisance de la participation des femmes à la vie publique. Car c'est sur le terrain de l'égalité sociale et professionnelle que l'on rencontre les problèmes les plus lourds. Majoritaires parmi les privés d'emploi, les femmes le sont également dans la précarité et particulièrement dans les temps partiel imposés. Elles constituent la masse des bas salaires. Elles représentent la majorité des familles monoparentales qui souffrent de ressources insuffisantes. Quel que soit leur niveau professionnel, les femmes sont victimes d'inégalités de salaires, de déroulement de carrière, de formation, d'atteintes à la dignité. C'est dans cette réalité que résident les obstacles à faire sauter pour donner des signes concrets d'avancée vers l'égalité. Certes, le Premier ministre souhaite une action résolue pour l'égalité dans la vie sociale et professionnelle, mais en la matière, l'énoncé du principe est la partie facile de l'exercice. Dans cette société, historiquement constituée par les hommes et pour les hommes, les luttes conduites par les femmes elles-mêmes ont joué un rôle décisif dans l'évolution de l'état d'esprit des femmes et des hommes. C'est ensemble qu'ils peuvent maintenant impulser un rythme nouveau au mouvement engagé. De ce point de vue, l'effet travail joue un rôle déterminant. Plus elles travaillent, plus s'affirme la perception des inégalités et la volonté d'y mettre fin. L'accès à l'autonomie politique est étroitement lié à une avancée plus nette des femmes vers l'autonomie socio-économique et financière. C'est sur ce chemin que devront reculer les obstacles pour un engagement plus important des femmes dans la vie publique, élément décisif pour que l'on n'en reste pas à une pétition de principe.