Déclaration de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, sur le rôle de l'OCDE pour le développement de l'emploi et son élargissement à la Russie et aux pays de l'Est, Paris le 22 mai 1996.

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Circonstance : Réunion ministérielle annuelle de l'OCDE à Paris le 22 mai 1996

Texte intégral

Monsieur le président,
Monsieur le secrétaire général,
Mes chers collègues,

Notre réunion annuelle clôture une période riche en événements, au cours de laquelle l’OCDE a su apporter une contribution précieuse à nos Gouvernements.

Tout en préservant sa cohésion, notre organisation s’est élargie, puisque deux membres, la République tchèque et la Hongrie, viennent de nous rejoindre, au terme d’une démarche rigoureuse et volontaire, que la France a appuyée avec détermination.

Je suis convaincu que ces nouveaux partenaires ont une conception élevée et exigeante de notre organisation. Je salue chaleureusement leur présence dans cette enceinte.

La réunion d’aujourd’hui nous offre la possibilité de réfléchir à ce que nous attendons de l’OCDE, à la place et au rôle qui doivent lui revenir, ainsi qu’aux conditions dans lesquelles elle pourra continuer à évoluer.

1) Depuis notre dernière session, les orientations que nos Gouvernements ont fixées ont fait ici l’objet de travaux de fond.

Dans nos sociétés industrialisées, la situation de l’emploi constitue une préoccupation majeure. La réunion du G7 qui s’est tenue à Lille au mois de mars dernier a indiqué que nous n’avions pas à choisir entre l’aggravation du chômage et celle des inégalités de revenu. Il s’agit aujourd’hui de mener à la fois de bonnes politiques macro-économiques et de mettre en oeuvre des initiatives qui permettent un meilleur fonctionnement des marchés de l’emploi. L’OCDE alimenté la réflexion qui a précédé la conférence de Lille ; nous souhaitons qu’elle continue à approfondir ses analyses en liaison avec l’OIT.

De la même façon, l’OCDE a confirmé la compétence qu’on lui connaissait pour examiner les liens existants entre le commerce mondial, le développement, et les normes sociales fondamentales, sujet sur lequel nous sommes particulièrement vigilants. Par ailleurs, au sein de notre organisation se déroule la négociation d’un cadre multilatéral stable pour l’investissement international. Il devrait ultérieurement accueillir les membres de l’OMC.

Notre objectif doit être la mise en place de règles universelles qui ne sauraient être remises en cause par des pratiques unilatérales, et des mesures de portée extraterritoriale visant à des sanctions ou à des embargos déguisés. Ces déviations sont de nature à affecter la confiance des opérateurs économiques dans le système multilatéral. Elles contredisent les modes de comportement que l’OCDE s’emploie à promouvoir depuis plus de trente ans. Avec nombre de partenaires nous avons exprimé les graves préoccupations qu’elles nous inspirent. Je les réitère à cette occasion.

2) C’est dans cet esprit qu’il nous appartient de délimiter la place de l’OCDE aux côtés des autres instances multilatérales.

Les fonctions des institutions de Bretton-Woods sont clairement établies. Elles conservent plus que jamais leur utilité, alors que le besoin de mobiliser des ressources en faveur du développement se fait sentir avec une extrême acuité. Aide substantielle au développement, contribution à la stabilisation des marchés, telles sont les tâches qu’elles remplissent déjà et qu’elles doivent approfondir.

Le prochain sommet du G7 que la France accueillera à Lyon au mois de juin traitera de ces sujets, au même titre que de la réforme des Nations unies et des instances chargées des questions de développement. Cette réflexion vise à améliorer la contribution de toutes les institutions internationales à l’avènement d’un ordre économique mondial stable et équitable.

La volonté de rationalisation doit nous guider pour déterminer le futur de l’OCDE. Celle-ci fait autorité par l’indépendance de ses vues et l’impartialité de ses analyses. Il y a là une exigence de rigueur, dont l’homogénéité de ses membres est une condition essentielle. Sachons préserver cet instrument unique en restant fidèles à ses méthodes consensuelles.

Afin de mieux exercer sa mission, l’OCDE devrait pouvoir améliorer les conditions de son installation. J’ai donc indiqué au secrétaire général, le 18 avril dernier, que la France était prête à mettre à la disposition de l’organisation un terrain sur lequel elle pourrait construire son nouveau siège. J’ai la conviction que cette offre mérite l’attention soutenue des États membres.

3) Vous comprendrez qu’ici je souhaite d’abord rendre hommage à Jean-Claude Paye, qui a occupé pendant douze ans le poste de secrétaire général. Alors qu’il s’apprête à partir après avoir rempli sa tâche avec un talent et une compétence que chacun reconnaît, je salue l’œuvre qu’il a accomplie et qui marquera profondément l’organisation. J’adresse dans le même temps mes meilleurs vœux à M. Donald Johnston qui prendra sa succession. Je sais qu’il s’agit également d’un homme de grande valeur auquel la France apportera son concours, notamment au sein du secrétariat dans lequel nous demandons en tant que pays hôte à rester présents.

La France considère que l’ouverture à de nouveaux membres est inscrite dans l’évolution même de l’OCDE. Nous sommes à cet égard convaincus que la Pologne, la Corée et la Slovaquie se mettront en mesure de nous rejoindre.

La multiplicité des dialogues que l’OCDE entretient avec de nombreux pays non membres témoigne de l’intérêt que suscitent ses avis. Il en est ainsi en Europe centrale du programme spécial conduit avec la Roumanie, la Slovénie et la Bulgarie. Sous des formes appropriées, il est également indispensable de faire fructifier notre relation avec la Russie, qui poursuit résolument sa transition économique.

Nous avons reçu hier une lettre du Premier ministre russe demandant officiellement l’adhésion de son pays à l’OCDE. Cela relève d’une certaine logique dans le cadre des liens déjà établis entre la Russie et l’Organisation.

Nous y sommes a priori favorables. Il conviendra naturellement que les négociations suivent leur cours normal pour aboutir à une issue positive.

Avec de grands partenaires comme l’Inde, la. Chine, ou l’Indonésie, les contacts se développent. En Asie et en Amérique Latine, nous voyons des économies s’affirmant comme des acteurs majeurs nous inviter à renforcer nos relations avec elles. À cet égard je voudrais saluer la démarche faite cette année par le président Menem, qui est venu lui-même nous dire tout l’intérêt que l’Argentine portait à l’OCDE.

Enfin, je souhaite vous exprimer toute la sympathie que la volonté de rapprochement d’Israël avec l’OCDE inspire à la France. Je crois que là aussi il nous faudra être en mesure de répondre aux attentes légitimes qui se font jour.

Pour s’adapter, et s’ouvrir, l’OCDE devra être en mesure de surmonter les difficultés budgétaires qu’elle connaît actuellement. La France pour sa part maintiendra le niveau de sa participation budgétaire. Elle souhaite que l’ensemble des membres contribue ainsi à donner à l’OCDE les moyens de son action pour la coordination et la convergence économiques entre les nations développées.