Déclaration de Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports, sur la politique de la jeunesse et la lutte contre la toxicomanie, Paris le 25 septembre 1997.

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Circonstance : Conférence de presse à Paris le 25 septembre 1997

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,

Dès mon arrivée à la tête de ce ministère, j’ai clairement indiqué que je serai autant la ministre de la jeunesse que celle des sports.

Ministre de la jeunesse, cela signifie d’abord, être l’interlocuteur de tous les jeunes. Pas l’interlocuteur d’un jour, d’un évènement, mais un interlocuteur permanent et disponible.

C’est donc tout à fait délibérément :

– que ma première réunion de concertation a été une réunion avec des jeunes, le 21 juin dernier à Paris ;

– que ma première inauguration a été celle d’une maison de la jeunesse, dans la banlieue parisienne ;

– que mes premiers déplacements en province, aussi bien à La Rochelle qu’à Marseille, ont été l’occasion de rencontrer de très nombreux jeunes, dans leurs quartiers, là où ils s’engagent et témoignent d’une formidable volonté de s’en sortir.

Les Rencontres de la jeunesse se situent dans la continuité de cette volonté.

Le projet de budget traduit d’ailleurs cette volonté avec des mesures nouvelles concernant le soutien aux politiques locales de la jeunesse.

Elles vont se tenir dans toute la France, en octobre et novembre.

Elles seront organisées par le ministère et, dans bien des cas, en partenariat avec des associations de jeunes, des mouvements d’éducation populaire, des mairies et des départements.

Elles connaîtront plusieurs temps forts dans quelques grandes villes du pays.

À partir d’une première liste de ces rencontres, il apparaît que pendant deux mois, ce sont plusieurs milliers de jeunes qui vont se retrouver, échanger, dialoguer, et surtout, comme l’indique l’affiche de ces rencontres, qui vont décider ensemble.

J’insiste particulièrement sur ce point : ces rencontres ne sont pas destinées à établir le énième constat des difficultés, des angoisses et des malaises des jeunes.

Ces problèmes, chacun les connaît. Et il n’est pas besoin de réunir des jeunes pour savoir qu’immédiatement, inévitablement, il sera question des conditions d’études, des difficultés à trouver un emploi et un logement, des discriminations dont sont victimes trop de jeunes dans l’accès à certains loisirs, de l’angoisse qui peut naître d’un avenir en pointillés, et de toutes les dérives possibles que fabrique une société injuste et violente.

Tout cela, des millions de jeunes le vivent. Tout cela, nous le savons. Et c’est précisément parce que ces situations sont insupportables, que notre responsabilité est d’abord de contribuer à changer cela.

Mettre en œuvre une politique de changement par des actes, c’est tout le sens de mon engagement au sein du Gouvernement.

Mais ce changement – j’en suis tout autant convaincue – ne se décrète pas. Il ne peut se construire qu’avec les jeunes eux-mêmes, tels qu’ils sont, dans la diversité des situations sociales et géographiques, des origines, des âges, des aspirations.

Quels qu’ils soient pourtant, quelque chose de fort les rassemble : c’est l’idée qu’il est urgent d’apporter des réponses nouvelles aux grands défis de notre temps. Sur tout ce qui pourrait améliorer leur vie quotidienne, ils ont des idées et des projets.

Qu’ils soient ou non en responsabilités associatives, syndicales ou politiques, ces rencontres leur donnent la possibilité de définir quelques propositions et mesures fortes, concrètes, de nature à améliorer leur condition dans les domaines de l’emploi, de la formation, de la santé, du logement, des transports, des loisirs, du sport.

Il s’agit, en somme, par cette démarche, d’associer très directement les jeunes aux décisions qui les concernent, de creuser ensemble le sillon d’une citoyenneté politique, économique, culturelle, sportive.

À l’issue de ces centaines de rencontres locales, nous dresserons une liste complète de toutes les propositions formulées par les jeunes. Et c’est cette matière vivante, inédite, qui servira de base à la Rencontre nationale de la jeunesse, qui se déroulera les 29 et 30 novembre, à l’INJEP de Marly-le-Roi.

Cette rencontre réunira près de 300 jeunes, ainsi que des adultes de toute la France : jeunes des quartiers et jeunes ruraux, jeunes d’associations, de syndicats, de mouvements d’éducation populaire, qui s’impliquent également dans la vie de la cité, du lycée, du village.

Je peux d’ores et déjà vous indiquer que plusieurs membres du Gouvernement participeront à des débats directs avec ces jeunes, et que le Premier ministre clôturera cette rencontre le dimanche 30 novembre.

Le principal objectif de cette rencontre nationale, sera donc de dégager une série de propositions concrètes liées à différents domaines de la vie des jeunes, et qui donneront lieu, au cours de l’année 1998, à l’adoption de mesures précises, dans le cadre d’un travail interministériel. C’est d’ailleurs en fonction de cet objectif que j’ai souhaité réactiver le comité interministériel à la jeunesse.

Bien évidemment, je compte beaucoup m’impliquer dans ces débats. Je crois en effet qu’une attitude responsable à l’égard des jeunes nécessite un engagement politique au plus haut niveau, et sur tout ce qui peut les préoccuper.

C’est vrai sur l’emploi, l’éducation, le refus du racisme et de l’exclusion, la lutte contre la drogue.

À propos de la lutte contre la toxicomanie, et puisqu’il s’agit d’un sujet qui concerne particulièrement la jeunesse, ma position est claire : je suis opposée à toute dépénalisation de l’usage des drogues. Il est à mes yeux essentiel que la société fixe un interdit à l’égard de tout qui place un individu en situation de dépendance. C’est une question d’éthique et de responsabilité.

J’ajoute, bien que ce ne soit pas l’argument essentiel à mes yeux, que les expériences de libéralisation de certaines drogues menées dans des pays voisins se sont soldées par des échecs. Cela n’a ni réduit le trafic, ni le passage aux drogues dures.

Cela ne veut pas dire que la loi actuelle, qui date de 1970, apporte aujourd’hui les bonnes réponses à un phénomène dont l’ampleur, la gravité et la complexité sont sans commune mesure avec la réalité d’il y a trente ans.

Cette loi peut être révisée, dans un sens qui distingue beaucoup plus nettement les toxicomanes des trafiquants, en sachant que la prison n’est pas la bonne réponse à la drogue.

Une politique efficace de lutte contre la drogue doit reposer à la fois sur une très forte prévention, notamment au milieu scolaire – et nous sommes loin du compte dans ce domaine –, des moyens suffisants en matière d’accueil, de soins et de réinsertion des toxicomanes, et une guerre sans merci aux trafiquants. Je m’engage dans ce débat avec un souci de solidarité, d’humanité et de responsabilité.

Je vous l’ai dit : le dialogue avec la jeunesse doit être continu. Le débat ne s’arrêtera donc pas le 30 novembre au soir. Il aura des prolongements législatifs, et j’envisage de prendre quelques initiatives en ce sens : instituer, par exemple, un Comité consultatif national de la jeunesse qui aurait pour mission de veiller à la mise en place et à la bonne application des mesures adoptées, et serait lieu de propositions.

Instituer aussi une Conférence annuelle de la jeunesse qui dressera le bilan des actions en faveur des jeunes et établira des pistes de réflexion nouvelle.

Bien sûr mais j’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer à ce sujet, le ministère parallèlement à ces rencontres s’investit dans le plan emploi-jeunes.

Voilà, Mesdames, Messieurs, l’esprit, la méthode et l’ambition de ces Rencontres de la jeunesse.

Je vous remercie