Texte intégral
Monsieur le député-maire,
Monsieur le président du conseil Régional, Messieurs les conseillers généraux,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Je veux tout d'abord vous remercier de votre accueil et vous dire tout le plaisir que j'éprouve d'être ici, en ces lieux, dans cette belle ville de Sète que des liens familiaux m'ont faite apprécier dès mon enfance.
Une journée, c'est beaucoup sur un agenda de ministre ! Mais c'est peu au regard des rapports que nous nous devons de tisser avec la réalité. Parce que c'est aussi cela, travailler à une manière nouvelle de gouverner.
En un mot : on ne réconciliera pas les citoyens et la politique si l'on ne croise pas l'avis des experts, de tous les spécialistes de l'économie et de la gestion, avec celui des experts du terrain que sont les élus, les populations, les militants, les organisations et associations qui, au quotidien, se dévouent au plus près du vécu et des besoins.
En disant cela, je n'ignore pas ce que l'on doit au travail, à la compétence des spécialistes, des ingénieurs, des cadres de la haute fonction publique ! (Je suis bien placé aujourd'hui pour le dire). Mais je sais aussi par expérience et par conviction combien les décisions prises après consultation des élus, des salariés, des usagers ont plus de chance de correspondre aux intérêts généraux, que des décisions prises exclusivement dans les bureaux parisiens.
Et puis il y a autre chose que j'ai aussi envie de dire devant vous comme ministre de l'équipement, des transports et du Logement, plus de 110 000 personnes travaillent directement avec mon ministère et plus de 4 millions de salariés sont concernés par les politiques mises en œuvre dans chacun des secteurs dont j'ai la charge.
Agents de l'équipement, des transports, personnels en charge du logement, de l'urbanisme, de la surveillance des côtes, de la météo, du tourisme, du littoral… qui chaque jour œuvrent pour le bien public, pour le service public, méritent eux aussi d’être valorisés !
J’ai vu ce matin le travail des personnels du service maritime ; comment ne pas souligner leur dévouement et leur compétence et comment ne pas leur dire que j'entends, ici comme dans toutes les régions, les demandes légitimes concernant l'emploi.
L'emploi, cette question parmi toutes les questions.
Cette question dont chacun sait - et peut-être plus ici que partout ailleurs, en Languedoc-Roussillon -combien elle est et sera au cœur de la résolution de la plupart des problèmes qui assaillent notre société.
Les derniers chiffres connus nous montrent combien nous devons faire de l'objectif de la création d'emplois l’objectif central, impérieux de la politique nationale.
La relance de l'emploi ne se décrète pas. Cela suppose à la fois le retour de la croissance et donc la confiance, des mesures spécifiques en faveur de l'embauche des jeunes, la réduction de la durée du travail.
C’est pour tout cela que le gouvernement mis en place au mois de juin a décidé de donner une impulsion d'une qualité et d'une dimension nouvelle.
Si je suis là devant vous en qualité de ministre, si d'autres de ma sensibilité politique, Marie-George Buffet et Michelle Demessine, ou de sensibilité différente se retrouvent dans un gouvernement dirigé par Lionel Jospin, c'est parce que les Français ont voulu que la politique de la France s'engage sur une autre voie que celle d'une société qui produit toujours plus de richesse d'un côté en laissant de l'autre une part croissante de l'humanité.
Ils ont donné un mandat à la gauche plurielle et écologiste de faire conjuguer progrès social et économique qui ne sont antinomiques que pour les chantres de la pensée unique, les dogmatiques de l'exclusive loi de la rentabilité financière, de la privatisation et de l'ultralibéralisme.
Comment ne pas ajouter que cette aspiration au changement concernait également l'attitude des gouvernants vis-à-vis des gouvernés ?
Les regards méprisants et hautains de ceux qui détiennent des responsabilités, les comportements suffisants des privilégiés de la richesse, du pouvoir et du savoir, c'est aussi cela que les électrices et les électeurs ont voulu voir disparaître.
Ils l'ont fait dans tout le pays et ils l'ont fait dans notre région et à Sète en élisant une équipe municipale nouvelle et en permettant à mon ami François Liberti de siéger à l'Assemblée nationale !
J’en sais quelque chose, car depuis juin, François ne me lâche pas... !
Alors, bien sûr, tout ne se résoudra pas d'un seul coup, chacun le sait.
Chacun sait que sur la durée, des progrès devront être faits, des réformes positives engagées et réunies.
Mais n'est-ce pas ce qui domine aujourd'hui dans notre peuple : à la fois une volonté unitaire d'une qualité nouvelle et ce sentiment que nous sommes là pour un moment !
Evidemment, quand le gouvernement décide la création de 350 000 emplois-jeunes pour les prochaines années, quand il annonce - respectant la parole donnée - la réduction de la durée du travail à 35 heures :
- quand je rends possible l'embauche de 1 000 cheminots et de 1 000 emplois-jeunes supplémentaires à la SNCF en réduisant de 20 MMF ;
- quand nous renouons avec une politique du logement social y compris en baissant la TVA de 21,5 à 5,5 % pour les travaux de réhabilitation et de gros entretien ;
- quand nous faisons le choix, comme à Air France, de ne pas céder à la privatisation, même si certains parmi des dirigeants patronaux se déchaînent, au point, si j'en crois un candidat à la tête du CNPF, de vouloir tout faire pour déstabiliser le Premier ministre.
Outre que cela décrédibilise ceux qui comme patrons considèrent que la politique ne doit pas pénétrer l’entreprise, cela se heurte aussi au sentiment de nombreux autres responsables qui savent bien que ce n'est pas par l'anathème, la fuite en avant dans la régression sociale, le recul des droits et de la citoyenneté que se réalisera la nécessaire prospérité économique de tous où chacun doit pouvoir trouver son compte.
Puisque les Françaises et les Français ont voulu des changements, et bien c'est un devoir de ne pas laisser les choses continuer simplement comme avant !
C’est un devoir de travailler à des réponses nouvelles, innovantes qui visent à une autre évolution que celle qui a prévalu trop longtemps du partage entre les revenus du travail et ceux du capital, qui visent à s'attaquer aux blocages que la société connaît, qui visent à s'appuyer sur les atouts et les chances qui sont les nôtres, au plan humain, matériel, technologique, culturel, dans notre pays, qui visent à réorienter la construction européenne en faveur du progrès social, de l’harmonisation et de la démocratie.
Vaste chantier ? Oui !
Chantier ambitieux, difficile et possible à la fois !
Chantier nécessaire, qui se construira pas à pas, au plan national et sur le terrain comme vous vous y êtes engagés ici à Sète !
Monsieur le maire, nul mieux que vous ne pouvait - et bien au-delà de la cité - faire entendre la foi des Sétois en leur port.
C’est le même souci qui m'anime pour l’ensemble des ports français. J’ai déjà eu l'occasion de le dire à Calais, Dunkerque, Boulogne, Le Havre, Dieppe, Rouen… Je le dirai prochainement à Marseille et ailleurs, la France doit pouvoir jouer sa carte et sa vocation maritime et ne pas se résigner ou encourager le déclin comme ce fut le cas dans un passé récent.
Dans ce sens, les ports doivent être considérés comme des lieux de vie, chargés d'histoire certes, mais porteurs d'avenir, comme des outils essentiels pour la dynamisation de l'économie, de l'emploi dans les régions littorales.
L'intermodalité que je veux encourager au plan des transports terrestres pour mieux utiliser les atouts de chacun concerne au premier chef les activités portuaires.
C'est pour cela que je suis décidé à mener à bien la réforme par la concertation et le dialogue avec tous, sans emboîter le pas à une démarche de dérégulation et d'ultra-libéralisme.
Sur votre place portuaire prédominent les trafics commerciaux qui génèrent une activité annuelle proche de 4MT plaçant ainsi Sète au 4e rang des ports d'intérêt national de la métropole.
Votre port de commerce s'est développé sur des filières spécialisées : importations de produits forestiers, aliments pour bétail et engrais, exportations de céréales. Il accueille deux implantations industrielles importantes, dans le secteur agro-alimentaire, les usines « Sud fertilisant » et Vamo Mills.
À côté du port de commerce, les activités de la pêche génèrent des apports annuels d'environ 14 mille tonnes.
Sète se situe, également, au cœur d'un bassin de navigation de plaisance très fréquenté.
L'ensemble de la place portuaire sétoise génère plus de 1 000 emplois directs, issus des activités portuaires et un peu plus de 8 000 emplois indirects et induits.
L'activité commerciale du port connaît depuis le début de l'année une progression prometteuse. Il est important que l'État puisse accompagner les efforts de votre place portuaire dans le développement de ses trafics.
Des investissements ont été réalisés. Il convient de les poursuivre. Je vous confirme l'engagement de l'État à hauteur de 11,4 MF pour la construction du quai multivrac ; les travaux doivent pouvoir être engagés dès 1998.
Je souhaite par ailleurs que l'ensemble des partenaires se mobilise et que les problèmes de la concession portuaire trouvent un règlement. Il s'agit de disposer d'une structure de gestion à la mesure des objectifs ambitieux que nous souhaitons tous pour le port. Afin de faciliter le règlement de cette question, j'ai mandaté M. Paufique, ingénieur général des ponts et chaussées, en lui demandant de faire le point de la situation actuelle et d'élaborer des propositions de nature à renouveler et à élargir l'implication de tous les partenaires.
Je vous confirme également - comme vous l'avez souhaité - l'intérêt que porte mon département ministériel à la réalisation de la digue qui permettra d'articuler correctement le canal du Rhône à Sète avec son débouché maritime. Cette opération, prise en compte dans le contrat de plan renforcera la plate-forme intermodale de Sète en favorisant une meilleure utilisation de la voie d'eau, ce qui est essentiel pour le couloir languedocien et la basse vallée du Rhône.
Pour ce qui est des infrastructures routières, je vous confirme que j'ai demandé au préfet de région, d'engager les démarches nécessaires avec les collectivités locales, partenaires de l'État (la région Languedoc-Roussillon et le département de l'Hérault), pour redéployer 69 MF du contrat de plan. Il s'agit de pouvoir reconstruire le pont de la Victoire (25 MF), restructurer l'entrée Est (10 MF) et aménager la RN 300 entre le giratoire du port de commerce et l'autoroute A 9 (à hauteur de 34 MF). Ce redéploiement est cohérent avec la stratégie de redynamisation de l'activité portuaire.
La concertation sur cet avenant au contrat de plan créera les conditions pour que l'aménagement de la RN 300 à 2 x 2 voies puissent être pris en compte dès le prochain plan.
Pour ce qui est de la protection du littoral, vous m'avez fait part des perspectives de réaménagement et de développement économique du triangle de Villeroy. Je suis heureux de constater que le travail réalisé avec mes services a avancé de manière fructueuse. Il me semble aujourd'hui possible d’engager le processus nécessaire pour surmonter les problèmes de sécurité et d'environnement afin de réaménager progressivement le quartier. La route nationale 112, qui n'a plus de vocation structurante au plan national, pourra être déclassée. Le réaménagement du quartier devrait satisfaire tout à la fois le souhait de l'implantation de nouvelles activités avec l'installation des services de l'IFREMER, le souci de préservation de la plage et du cordon littoral et les préoccupations de desserte des activités touristiques. Je souhaite que ce processus permette de régler les problèmes en suspens depuis trop longtemps. La perspective étant éclairée, vous pourrez compter sur l’appui de mes services dans la conduite des différentes étapes du processus.
Parallèlement, vos demandes concernant le logement ont fait l'objet d'un examen attentif avec Louis Besson, secrétaire d'État chargé de l'urbanisme et du logement. Au-delà des programmes financés sur ses crédits déconcentrés, l'État contribuera pour 1,2 MF à la réhabilitation de l'île de Thau et pour 0,240 MF à celle de la cité du Vallon. Le financement de l'opération « la Tonnellerie » située en centre-ville sera également assurée avec un abondement de 11 PLA.
Enfin, j'ai bien noté que la protection du littoral entre Sète et Agde nécessitait des mesures efficaces. J'ai proposé au Parlement de doubler en 1998 les crédits affectés par l'État aux opérations de défense contre la mer. Cette augmentation de crédits budgétaires permettra d'engager les opérations les plus urgentes sur notre littoral méditerranéen.
Monsieur le député-maire, toutes ces décisions sont rappelées dans une lettre que je suis venu vous apporter moi-même et que j'ai le plaisir, si j'ose dire, de vous remettre en « main-propre ».
Je sais que vous saurez en faire bon usage.
Je voudrais en terminant vous dire combien je partage votre volonté et celle de tous les élus du Bassin de Thau de refuser la fatalité du déclin.
Oui, le chantier d'un aménagement du territoire équilibré plus harmonieux, qui tienne compte des hommes et de la nature doit s'ouvrir.
Connaissant votre détermination et votre capacité à conjuguer toutes les énergies par-delà les différences d'opinions, je suis convaincu que nous allons ensemble y parvenir.
Je conclus en vous disant une nouvelle fois mon bonheur d'être ici, chez vous, qui est presque chez moi et d'entendre nos langues, chanter nos accents ! Bien sûr le ministre de la République est le ministre de tous et de toutes les régions de France et il n'est même pas déplacé de pouvoir le rencontrer partout où sa présence peut être utile.
Mais c'est ainsi : l'amitié, comme l'a dit si bien François Liberti, ça compte, et ce n'est pas Georges Brassens qui nous démentirait. D'ailleurs votre ville doit quelque part détenir un secret pour savoir marier les marins et les poètes, comme Valéry, la mer et le théâtre et je pense à Jean Vilar qui écrivit un jour « que la culture devait être compréhensible par tous, populaire donc ».
Je suis sûr, en tout cas pour la démocratie et l'art de gouverner, que ce devrait être un précepte d'avenir pour la citoyenneté moderne.
Je vous remercie de votre attention.