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Le Parisien : Que vous inspirent les résultats de cette nouvelle étude ERPURS ?
Dominique Voynet : Elle vient à point confirmer ce qu’on sait déjà. Elle démontre surtout que l’impact de la pollution sur la santé est une réalité de tous les jours et pas seulement lorsqu’il y a des pics. Il n’existe pas de seuil en-deçà duquel tout va bien. Il est donc urgent d’agir car les politiques de lutte sont toujours longues à mettre en place. Plus on attend, plus on court le risque d’enregistrer de nouveaux décès.
Le Parisien : Quelles sont les mesures d’urgence qui permettraient de revenir à un air plus sain ?
Dominique Voynet : La plus importante est de réduire la circulation automobile. Mais il faut aussi des transports en commun plus propres, redonner à la ville une qualité de vie, notamment en créant des réseaux verts, tout un tracé de rues uniquement réservées aux personnes non motorisées, aux vélos, aux piétons.
Le Parisien : Comment expliquer la réticence des Français à laisser leur voiture au garage ?
Dominique Voynet : Ils n’imaginent pas pouvoir vivre autrement. C’est un obstacle culturel. Notre pays possède un parc automobile ancien et important, et un secteur de travaux publics (routes et autoroutes) très développé. Mais ce sont des freins à l’amélioration de la qualité de l’air. C’est un tort de ne rien vouloir modifier pour des raisons économiques. Car la pollution coûte cher : elle coûte en vies humaines, en hospitalisations, en absentéisme au travail. Lors de la première étude ERPURS, le coût de la pollution par les fumées noires en Île-de-France avait été estimé à 20 milliards de francs.
Le Parisien : Comment faire changer les choses ?
Dominique Voynet : Au niveau politique, la prise de conscience est réelle. 1999 sera l’année de la fiscalité écologique. La vignette, par exemple, pourrait être calculée selon la puissance de la voiture sans le favoritisme actuel du diesel par rapport à l’essence. L’achat de voitures propres sera encouragé. La directive européenne « auto-oil », longtemps bloquée par la France, va enfin pouvoir être appliquée. Les nouveaux modèles de voitures devront réduire d’un tiers leurs émissions de polluants d’ici à 2000 et d’un nouveau tiers à partir de 2005.
Le Parisien : Et la pastille verte ?
Dominique Voynet : Elle fait partie de toute une série de mesures que je compte annoncer d’ici à la fin du mois. Trois décrets vont paraître prochainement concernant les plans régionaux de lutte contre la pollution, la définition de nouveaux seuils à ne pas dépasser, et l’agrément donné aux réseaux de mesure dans les agglomérations. Principalement les particules fines et le benzène. Quant à la pastille verte, nous avons eu des difficultés pour en définir les bénéficiaires, mais il semble que la solution soit acquise : comme le prévoit la loi, seules les voitures propres pourront rouler au niveau 3 de la pollution, et il y aura restriction de la circulation dès le niveau 2.