Programme du Mouvement des réformateurs pour les élections législatives de 1997, intitulé "La Majorité aura la majorité", avril 1997.

Prononcé le 1er mai 1997

Intervenant(s) : 
  • Jean-Pierre Soisson - ancien ministre, député-maire d’Auxerre, secrétaire général du Mouvement des Réformateurs

Texte intégral

Créé pour accueillir ceux qui, en 1992, ne trouvaient ni à droite, ni à gauche une raison de s’engager ou même de croire à l’action politique, le Mouvement des Réformateurs s’enracine dans une longue tradition politique.

Son nom évoque des chrétiens qui ne se satisfaisaient pas d’une Église institutionnalisée et corrompue par son pouvoir.

Mais les véritables et lointains fondateurs du Mouvement s’appellent Michel de L’Hôpital, Montaigne, Henri IV… Ceux qui plaident le dialogue des factions et l’écoute du peuple au milieu de la guerre civile. On les nommait alors les « politiques ».

Protestants et catholiques, ils plaçaient la France et la paix au-dessus de leur parti.

Cette lignée court à travers notre histoire. Vincent de Paul, Vauban, Turgot, parmi d’autres, l’ont illustrée, chacun à sa façon, sous la monarchie.

Bonaparte lui-même, avant de devenir Napoléon, quand il réconcilia les Français et jeta les bases du Code civil, choisit la réforme pour faire progresser la France.

Les libéraux de 1830, les républicains de 1848, les radicaux de la IIIe République, les gaullistes de 1945 et 1958 ont tour à tour incarné cette lignée réformatrice, constamment vivace au sein des soubresauts de l’histoire. Qu’ils aient été de gauche ou de droite, comme on dit aujourd’hui, importe peu.

La réforme dépasse les clivages politiques.


I. – Le Mouvement des Réformateurs

1. Famille politique et histoire

Mouvement neuf et pourtant héritier d’une longue tradition, le MDR a été créé le 10 octobre 1992 par Jean-Pierre Soisson.

En regroupant tous ceux, hommes et femmes, qui ne se reconnaissent ni de gauche ni de droite, le MDR a la volonté affirmée à œuvrer à l’émergence d’un nouveau paysage politique.

Faisant sienne la diversité des opinions qui composent ses rangs, bien au-delà des stériles querelles qui continuent d’agiter les grands partis traditionnels, le MDR privilégie la réflexion et le dialogue.

Résolument tourné vers l’avenir, le MDR a fixé sa position au centre de la vie politique.

Constituant aujourd’hui l’aile gauche de la majorité présidentielle, le MDR fait entendre la voix de deux qui rejettent aussi bien le conservatisme des puissants que la révolution des plus faibles.

Le Mouvement des Réformateurs veut initier les réformes nécessaires à la mise en place d’une société de liberté, de solidarité et de responsabilité :

- réformer pour retrouver une liberté bridée par les conservatismes des intérêts particuliers de l’emprise paralysante de l’État ;
- réformer pour édifier la solidarité qu’un libéralisme outrancier sacrifie au nom du réalisme ;
-  réformer pour permettre enfin aux citoyens de renouer avec la responsabilité, pour redonner un sens à une tradition politique républicaine et démocratique.

À gauche de ce qu’il est convenu d’appeler la droite et à droite de la gauche, le MDR inscrit ses actions dans la longue tradition politique réformatrice qui a fait progresser la France.

2. Le MDR au centre de la vie politique

C’est en ayant sa place à l’intérieur du pouvoir que l’on peut prétendre engager efficacement les réformes.

Les Réformateurs ont en eux cette culture de mouvement de gouvernement. Lors de la dernière élection présidentielle, le MDR est entré dans la vie publique en se faisant connaître et reconnaître comme le « mouvement qui pose les vraies questions. »

Le MDR a apporté son soutien à l’actuelle majorité présidentielle. Non parce qu’elle constituait un pouvoir, mais parce qu’elle s’engageait sur des réformes préconisées par le Mouvement des Réformateurs : service national, protection sociale, fiscalité, formation et enseignement supérieur… Autant de sujets sur lesquels, en permanence, le MDR a souligné l’urgence de la réforme.

Parti d’ouverture, faisant de l’intérêt commun, du civisme et de l’impartialité de l’État ses principes de base, le MDR, par sa capacité d’écoute, participe à la restauration du dialogue, condition indispensable de la mise en œuvre des réformes dans le respect et l’intérêt de tous.

3. La mission du MDR

Participer aux majorités et ainsi constituer une opposition constructive au cœur de la vie politique : le MDR travaille sur tous les sujets essentiels de notre société pour constituer une véritable force de proposition.

Dès 1993, soit un an après sa création, le MDR présente 51 candidats aux élections législatives.

Aujourd’hui, 11 parlementaires ont rejoint le Mouvement : 5 à l’Assemblée, 6 au Sénat.

Cette représentation politique est capitale. Elle permet en effet aux propositions du MDR d’être entendues et largement discutées par la majorité en place.

Le MRD ne pourra atteindre ses objectifs que s’il constitue une force politique.

La perspective des élections législatives doit lui permettre de continuer ce travail de réflexion et de propositions.

Pour aborder sereinement le nouveau monde qui se profile, des réformes sont indispensables. Elles ne peuvent être possibles que par la mise en commun des idées et des bonnes volontés. Pour l’intérêt général.


II. – Le MDR au sein de la réflexion politique

1. Le MDR face au contexte économique et social

Véritable colonne vertébrale individuelle et collective, élément essentiel dans la cohésion sociale du pays, l’emploi fait partie de toutes les priorités du MDR.

Les réformateurs refusent de croire à la fatalité du chômage et de l’exclusion.

Cependant, la solution ne saurait être exclusivement économique ou exclusivement sociale.

C’est en conjuguant l’une et l’autre que de vraies réformes, et donc de réels changements, sont possibles.

L’emploi et l’action économique

Notre pays doit conserver sa compétitivité et son dynamisme économique sans pour autant laisser pour compte une partie toujours plus grande de la population.

Le marché de l’emploi est devenu trop complexe pour l’appréhender sans tenir compte de ses particularités. Il est aujourd’hui erroné et illusoire de vouloir appliquer des principes identiques à des dynamiques économiques différentes.

En revanche, quelle que soit la taille des entreprises, il nous faut avant tout faciliter leur croissance et encourager leur potentiel de développement.

Les Réformateurs préconisent la réduction des charges sociales, et dans certains cas, pour les emplois les moins qualifiés et pour les entreprises artisanales, par exemple, l’exonération temporaire de ces charges.

De la même façon, une réforme de l’impôt sur les sociétés devrait favoriser l’investissement des petites et moyennes entreprises en fonds propres au détriment des placements spéculatifs.

Deux marchés du travail

Le MDR en est convaincu : de nouvelles formes de travail doivent être explorées.

Désormais, la réforme consiste à accroître le nombre d’emplois offerts grâce à une réduction significative du temps de travail partout où elle est possible.

Mais il faut aller plus loin. À côté de l’économie marchande et de l’économie publique traditionnelle, il est urgent de promouvoir l’économie sociale.

L’économie sociale répond à des besoins nouveaux, clairement identifiés et auxquels l’économie marchande ne subvient que partiellement.

L’aide aux personnes, l’animation, l’organisation des loisirs, la prévention de l’insécurité ou la protection de l’environnement en sont quelques exemples.

Cette économie sociale, qui repose sur l’action des collectivités territoriales et des associations locales, doit voir ses initiatives encouragées et généralisées.

Des sociétés à objet social

À cette nouvelle forme d’activité économique, le MDR propose une nouvelle forme juridique de société. Celle-ci fonctionnerait comme une entreprise privée tout en instituant un contrôle de fonds publics ou associatifs. Cette structure pourrait faire l’objet d’une loi préparée par une commission de juristes et d’économistes.

Une politique de l’emploi revisitée

Les gouvernements se sont succédé et ont créé de nouvelles mesures d’emploi sans pourtant supprimer les anciennes. Le MDR propose de procéder à une mise à plat de ces diverses aides publiques à l’emploi.

Cette sédimentation des politiques de l’emploi a complexifié le système d’embauche. Pesant sur l’économie nationale, elle n’a fait que nuire à leur efficacité. Pire : ces mesures ont contribué à précariser l’emploi sans réduire le nombre de demandeurs d’emploi.

Si certaines d’entre elles ont permis de rendre moins insupportables les conditions de certains demandeurs d’emploi, elles ont eu pour effet pervers de figer la situation de certains autres.

Le MDR propose que ces aides aux personnes sans emploi soient liées à de nouveaux emploi d’utilité sociale.

Ni menaces, ni fatalité, ces mutations doivent être voulues et organisées avec l’ensemble des partenaires économiques et sociaux.

Pour une économie solidaire

La situation en 1997 n’est guère différente de celle des années 1988-1990. La France retrouve la voie de la croissance, mais celle d’une reprise sélective qui laisse sur le bas-côté de la route les jeunes sans qualification et les chômeurs de longue durée. Elle connaît, de nouveau, à la fois l’expansion et l’exclusion. Plus la reprise fera sentir ses effets et plus grandira le sentiment de l’exclusion chez ceux qui n’en bénéficieront pas.

Face à une situation, le projet de loi du gouvernement marque une volonté de lutte contre toutes les exclusions. Il place au cœur des dispositifs d’insertion l’accès aux droits civiques et sociaux, l’accès à l’emploi, l’accès aux soins, l’accès au logement et la lutte contre l’illettrisme. Le projet peut être amélioré et il le sera.

Le MDR croit en un réformisme de la solidarité. Il croit aussi que nous devons repenser les objets et les méthodes de la réforme. Ce n’est pas en prônant un impossible réformisme de la dépense, comme aux temps de la forte expansion, que nous y parviendrons. Ce n’est pas non plus en remettant à l’ordre du jour un réformisme d’en haut géré par les experts.

Enseignement et formation

L’école doit rester un lieu d’apprentissage et d’acquisition d’un certain nombre de savoirs. Elle doit préparer l’enfant et l’adolescent à la société. Elle doit permettre à l’enfant de posséder des savoir-faire intellectuels et manuels, d’appréhender un monde devenu extrêmement complexe, elle doit enfin préparer ce futur adulte à la citoyenneté.

La démocratie exige un collège unique (loi du 11 juillet 1975). Cette pièces maîtresse dans la réforme de notre système éducatif est un atout pour éviter une éducation à double vitesse. Encore faut-il que ce collège soit assez diversifié pour être suivi par tous les élèves. Il faut mettre fin à cette barrière entre lettrés et manuels. Jusqu’à 16 ans, chacun doit bénéficier d’une formation complète, condition nécessaire pour, après, choisir entre les diverses branches proposées : enseignement classique, professionnel ou d’apprentissage.

L’enseignement supérieur doit être pensé en adéquation avec le monde du travail. Il est aujourd’hui fondamental de préparer les étudiants à un métier. Le MDR soutient dans ce sens l’action gouvernemental d’introduire, en accord avec les entreprises, les stages diplômants.

Dans un esprit de démocratisation et d’ouverture, le MDR souhaite que les bourses et les allocations soient augmentées.

Enfin, les hommes et les femmes du MDR souhaitent que la formation ne s’arrête pas avec la fin de la scolarité ou des études universitaires. Pour cela, il est fondamental d’encourager la formation en alternance afin que chacun puisse encore s’insérer dans un monde professionnel aux données toujours plus complexes.

La sauvegarde de la protection sociale

Le MDR reste fondamentalement attaché au système de protection sociale, qui permet d’assurer à tous la sécurité contre les aléas de la vie et de lutter contre l’exclusion.

Ainsi, le projet de loi sur la Sécurité sociale universelle devrait constituer, selon le MDR, un véritable progrès social. La couverture sociale ne sera plus fonction du statut de l’individu (salarié, chômeur, Rmistes, commerçant, professions libérales…), mais de son statut de citoyen français, quelle que soit sa situation professionnelle.

Cette avancée sociale ne doit pas empêcher, au contraire, de mieux penser l’organisation générale de la protection sociale au risque de perdre à long terme tous ces avantages. Notre système social est en danger, une réforme est indispensable.

Le mode de financement de la protection sociale est essentiellement lié aux revenus du travail. Ce système pénalise l’emploi et alourdit les charges sociales. Il nous faut engager une réflexion visant à fiscaliser les cotisations sociales, afin de répartir plus harmonieusement le financement de la protection sociale à partir de l’ensemble des richesses (épargne, produits financiers, salaires, investissements) et, dans le même temps, alléger les charges sociales.

De même, ne réflexion sur la fiscalité s’impose aujourd’hui, notamment sur la généralisation de l’impôt sur le revenu à toutes les catégories sociales. En effet, la fiscalité directe est plus juste que la fiscalité indirecte.

Le Mouvement des Réformateurs propose que tous les Français soient assujettis à l’impôt sur le revenu, afin que chacun contribue, selon ses moyens, à la vie collective.

2. Le MDR face à l’avenir des défis à relever

La justice

Le MDR veut renforcer l’indépendance de la justice, qui doit être efficace et accessible à tous les citoyens, tant dans les relations privées que vis-à-vis des pouvoirs publics.

Les Réformateurs rappellent combien il est primordial de nourrir un projet de réforme sur ce domaine. Ce projet ne saurait concerner seulement les rapports entre le parquet et le ministère de la Justice. Il doit aussi et surtout s’attacher à la modernisation de la justice qui doit devenir plus rapide et plus efficace.

Cette efficacité peut être atteinte en renforçant les cours d’appel. Ce renforcement est profondément souhaitable dans [Illisible] où l’encombrement de la justice [Illisible] les juridictions, pénales, administratives [Illisible].

La proposition du juge unique, énoncée dans le rapport Coulon, bien que limitée dans l’esprit de son auteur aux juridictions de premières instances, semble tout à fait adaptée à cette modernisation. En effet, le juge unique permettra d’accélérer la procédure et l’issue du litige.

Pour le MDR, ce juge unique ne devrait être en charge que de petits litiges matériels. Les contentieux lourds de conséquences devraient être réservés à des juridictions collégiales.

L’environnement

Personne n’a le monopole de l’écologie. Au contraire, cette donnée doit être prise en compte dans tous les dossiers soulevant un problème lié à l’environnement.

La protection de l’environnement est une priorité planétaire. Nous devons assurer le respect du patrimoine de notre pays, le respect des autres, le respect de l’équilibre écologique. L’environnement est à la fois une affaire interne à chaque pays, en même temps qu’un enjeu supranational.

C’est à l’échelon de l’Union européenne que la question doit être posée. La mise en place d’une instance de contrôle en matière d’environnement constituerait une avancée appréciable à la mesure de ce problème sans frontière. Favorisant le respect des équilibres naturels, elle participerait concrètement à la construction de l’Europe.

Les collectivités locales

Le MDR « reconnaît aux collectivités locales un rôle essentiel dans l’impulsion du développement économique et l’aménagement du territoire. Il entend poursuivre la décentralisation et la déconcentration » (statuts du MDR).

Les collectivités locales constituent un véritable enjeu. Elles ont une grande marge de manœuvre dans la lutte contre le chômage en investissant ce que nous avons appelé « l’économie sociale ». C’est sur elles que peuvent reposer une nouvelle politique d’emploi ainsi qu’une économie dynamique au niveau local. Les collectivités locales constituent un pilier indispensable d’une construction du modèle économique et social de demain.

Proches de l’électeur, les régions, les villes, les collectivités territoriales ont un rôle essentiel à jouer dans la construction européenne ; et ce, dans un esprit de coopération. C’est à cet échelon que nous arrivons à conjuguer harmonieusement supranationalité et défense des identités locales et régionales.

L’Europe

Le MDR contribue à conforter, dans le respect de ses principes fondateurs, l’Union européenne, élément essentiel d’un nouvel équilibre mondial.

Ensemble, les pays de l’Union ont un poids déterminant dans le monde aux niveaux économique, diplomatique, politique et militaire. C’est par la mise en synergie des différents États-nations, qui constituent l’Union européenne, que la France, l’Allemagne, l’Espagne… parviendront à compter dans l’ordre mondial.

Dans la mesure où elle constitue un atout fondamental de la sécurité collective, il est aujourd’hui indispensable de renforcer l’Europe. Cependant, un pas supplémentaire est à franchir : l’Union européenne doit être capable de passer d’une sécurité commune à une défense européenne.

Pour le MDR, les pays européens doivent mettre leurs intérêts et leurs atouts en commun en matière d’armement et de défense.

La « supranationalité » apparaît comme la véritable clef du monde de demain. Elle doit concerner le domaine économique (condition du progrès de tous), la sécurité collective (condition de paix), mais doit s’attaquer aussi au domaine social et politique.

Avec l’arrivée de la monnaie unique, l’un des symboles de l’Europe va prendre forme concrète dans quelques mois.

Les Réformateurs ne se contentent pas de cela. Le MDR plaide, plus que jamais, pour l’avancée vers une citoyenneté européenne. Pour cela, l’Europe doit quitter son image de grande institution inaccessible pour se rapprocher des individus et être concrètement abordable. Cette intégration de la citoyenneté européenne se fera dans un esprit de réforme des institutions européennes et de démocratisation de la vie politique. Le MDR propose notamment que le président de la Commission soit élu au suffrage universel. Il s’agit aujourd’hui de favoriser l’émergence d’un modèle européen de société s’articulant entre le citoyen, les États-nations et l’Union.

Si l’Europe est économique, militaire, si elle peut faire émerger une nouvelle citoyenneté, elle doit être aussi sociale. Il est notamment nécessaire que soit respectée la Charte des droits sociaux des travailleurs, élaborée en 1989 à l’initiative de la France.

L’Europe ne va pas de soi et ne s’est pas faite toute seule. C’est par une volonté sans cesse réaffirmée que l’Union européenne prendra toute sa dimension. C’est par la solidité des liens entre Paris et Bonn que l’Europe prouvera sa crédibilité. Le MDR entend bien participer au devenir politique de l’Europe dans un esprit d’ouverture et de citoyenneté.

Le bureau politique

Président d’honneur : Jacques Pelletier, ancien ministre, médiateur de la République ; Secrétaire général : Jean-Pierre Soisson, ancien ministre, député de l’Yonne, maire d’Auxerre ; Trésorier national : Xavier Castaing, Jean Antagnac, Herbert Axelrad, président de la Fédération de Paris, Philippe Bardiaux, Gilbert Baumet, ancien ministre, député du Gard, Gérard Cardin, vice-président du Conseil général de l’Isère, mais de Corps, Jean-Marie Daillet, ancien ambassadeur de France, Bernard Denojean, Alain Ferry, député du Bas-Rhin, Jeanne Gillot-Voisin, Gérard d’Israël, président de l’Association des démocrates, François Lesein, sénateur de l’Aisne, Alfred Muller, député du Bas-Rhin, Bernard Nemitz, adjoint au maire d’Amiens, Jean-Marie Rausch, ancien ministre, sénateur de la Moselle, Dominique Schemla, adjoint au maire de Perpignan, président de la Fédération des Pyrénées-Orientales, Eric Schweitzer, Olivier Stirn, ancien ministre, conseiller général du Calvados, Lionel Thénault, maire de Montsauche-les-Settons, André Vianès, Aloyse Warhouver, député de la Moselle

Organigramme du Bureau national

Secrétariat : Secrétariat particulier : Christiane Malka ; attaché parlementaire : Jean-Michel Goustour

Communication

Secrétariat : Myrlande Jean-Pierre ; relations presse : Marie-Christine Marchand ; directeur de la communication, responsable des élections : Magali Aimé


La majorité aura la majorité - Jean-Pierre Soisson

La majorité aura la majorité : c’est le vieux cri de guerre que j’avais lancé en 1978, à l’approche des élections législatives, comme secrétaire général du Parti républicain. Je le reprends aujourd’hui, avec la même conviction que la majorité, réunie autour de Jacques Chirac selon les principes essentiels de la Ve République, doit entraîner l’adhésion d’une majorité de Français.

Pour notre part, nous contribuerons de toutes nos forces au succès de la majorité. Seule celle-ci est capable de répondre aux attentes de nos concitoyens, et de mettre en œuvre le projet de réforme que j’appelle de mes vœux pour la prochaine législature.

Mais la majorité doit s’élargir et accepter en son sein une aile gauche qui s’attache à secourir tous ceux que l’évolution de notre société laisse sur le bas-côté de la route. La France connaîtra au cours des prochaines années, à la fois d’expansion et l’exclusion. L’expansion ne pourra durablement s’installer dans notre pays si nous ne renforçons pas la lutte contre l’exclusion. On peut réduire les dépenses publiques, mais on ne doit pas oublier l’exigence sociale et la préoccupation du progrès qui s’imposent à toute action publique.

Dans « Le Nouvel Âge des inégalités », Jean-Paul Fitoussi et Pierre Rosanvallon écrivent avec raison que la crise que nous connaissons à la fin de ce siècle est « en dernier ressort, d’ordre structurel et relève d’une dimension anthropologique. Elle est à la fois crise de civilisation et crise de l’individu ». Radicales ou utopistes, refondatrices ou critiques, les analyses développées au cours des dernières années cherchent, au-delà d’une approche économique souvent seule prise en compte, à formuler autrement les fondements de la société. Toutes se rejoignent dans une interrogation sur la valeur du travail.

Un tel débat est légitime : nous souhaitons y participer et, nous éloignant des querelles d’écoles, apporter notre contribution à l’émergence d’une philosophie sociale, dans laquelle les valeurs humanistes trouveraient à nouveau une place déterminante.

Nous devons repenser les objets et les méthodes de la réforme. Nous croyons à l’action locale, au travail effectué à la base de la société elle-même, à la multiplication des centres de réflexion et de décision comme moteur de l’évolution sociale. Le réformiste de la solidarité, pour lequel nous militons, s’appuie sur les réseaux sociaux.

Dans la prochaine majorité, nous le défendrons et nous ferons entendre notre différence. Nous nous battrons pour des mesures qui puissent renforcer la cohésion sociale, nous nous battrons aussi pour créer une Europe sociale. L’union monétaire est nécessaire ; la création de la monnaie unique ne doit pas être retardée, mais les gouvernements, en liaison avec la Commission européenne, doivent, dès à présent, élaborer des règles d’harmonisation fiscale et favoriser des rapports nouveaux entre les partenaires sociaux, qui permettent le dialogue et la participation. L’Europe doit représenter pour tous un progrès.

Plus l’économie s’ouvre sur le monde, plus l’Europe se construit et plus l’homme a besoin de trouver en ses racines la part d’identité qui le maintien debout. Il existe, pour moi, une complémentarité entre la nécessité du grand large et le désir, instinctif en chacun de nous, de préserver nos racines. Ce qui manque à l’homme moderne, ce sont des racines et un horizon.


Éditorial - Jean-Pierre Soisson

Un réformisme de la solidarité

En février 1995, avant le premier tour de l’élection présidentielle, Jacques Chirac vient à Auxerre. Il ne tient pas une réunion politique : il rassemble autour de lui les dirigeants de l’économie sociale, responsables de la mission locale pour l’emploi des jeunes, des associations intermédiaires et des entreprises d’insertion. Il écoute, prend des notes, puis affirme sa volonté de lutter contre l’exclusion et de réduire la fracture sociale.

Le projet de loi sur la cohésion sociale, présenté à l’Assemblée nationale par Jacques Barrot et Xavier Emmanuelli, se situait dans le droit fil des engagements de la campagne présidentielle de 1995. Je souhaite qu’il puisse, après les élections législatives, être repris et à nouveau amendé.

En 1997, la France va retrouver la voie de la croissance, mais d’une croissance qui laisse sur le bas-côté de la route les jeunes sans qualification, les chômeurs âgés et de longue durée. Les conditions nouvelles de l’économie internationale – la mondialisation des échanges et des mouvements de capitaux – entraînent un accroissement des inégalités. Plus la reprise fera sentir ses effets et plus grandira le sentiment de l’exclusion chez ceux qui n’en bénéficieront pas.

Dans ces conditions, je crois à un réformisme de la solidarité. Celui-ci ne peut être, comme aux temps de la forte expansion, un réformisme de la dépense. Il ne peut pas davantage être un réformisme d’en haut, décidé à Paris par des experts ou des hauts fonctionnaires. Il doit s’appuyer sur les initiatives locales, l’action des collectivités et des associations, le foisonnement des réseaux sociaux que connaît à la base notre société. Le projet réformateur, que j’appelle de mes vœux pour la prochaine législature, doit montrer que la majorité, dans sa diversité, est capable d’apporter une réponse concrète aux difficultés de vie et d’emploi de nos concitoyens, de définir une trajectoire collective qui puisse à nouveau les rassembler et, ce faisant, donner un sens – et même une grandeur – à l’action politique.

C’est dans cet esprit que le MDR et le MSP ont conclu un accord de coopération. Les deux formations se sont engagées pour Jacques Chirac lors de l’élection présidentielle avec la même foi et la même volonté. On peut réduire les dépenses publiques, mais on ne doit pas oublier que l’exigence sociale s’impose à tout choix politique. Nous militons pour un réformisme de la solidarité et nous appelons à nous rejoindre tous ceux, dans la majorité ou à ses franges, qui partagent notre analyse sur les risques que fait courir à la démocratie la fracture sociale dénoncée par le Président de la République.

 

Législatives

Jacques Chirac : « Nous avons besoin d’une majorité ressourcée »

Voici les principaux extraits de l’allocution prononcée par le Président de la République le lundi 21 avril

Poursuivre et amplifier les réformes

J’ai acquis la conviction qu’il faut redonner la parole à notre peuple, afin qu’il se prononce clairement sur l’ampleur et le rythme des changements à conduire pendant les cinq prochaines années. Pour aborder cette nouvelle étape, nous avons besoin d’une majorité ressourcée et disposant du temps nécessaire à l’action. Des réformes de fond sont en cours : la protection sociale, les armées et le service national, l’enseignement supérieur, la fiscalité, le secteur public. Ensemble, nous devons réformer en profondeur l’État, afin de permettre une baisse de la dépense publique, seule façon d’alléger les impôts et les charges qui pèsent trop lourdement sur vous et qui, trop souvent, vous démotivent. La baisse des impôts, c’est un choix exigeant, mais c’est un choix majeur que je fais parce que c’est le choix de l’avenir. Ensemble, nous devons encourager, plus fortement qu’on ne le fait, les créations d’entreprises et les initiatives locales qui font notre richesse. Il faut surtout développer le dialogue et la concertation pour trouver une nouvelle réponse au chômage.

L’Europe, c’est la paix

Elle impose parfois des contraintes, c’est vrai. Mais, n’oublions jamais, depuis un demi-siècle, pour nos vieilles nations qui se sont tant combattues, l’Europe, c’est la paix. Aujourd’hui, dans un monde qui s’organise et se transforme toujours plus vite, l’Europe nous apportera un supplément de prospérité et de sécurité, tout simplement parce que l’Europe, c’est l’union et que l’union fait la force. Or, d’importantes décisions seront prises au cours des tout prochains mois : le passage à la monnaie unique, indispensable si nous voulons nous affirmer comme une grande puissance économique et politique, avec un euro à l’égal du dollar et du yen. La réforme des institutions européenne que nous voulons plus démocratiques, plus équilibrées, plus efficaces ; l’élargissement de l’Union aux jeunes démocraties qui appartiennent à la famille européenne, et qui formeront avec nous, la grande Europe. La réforme de l’Alliance atlantique, qui doit permettre aux Européens de mieux assumer la responsabilité de leur sécurité, dans un nouveau partage avec les Américains ; et, surtout, ce qui me tient le plus à cœur, une Union européenne au service des hommes. Un modèle social vivant. Pour aborder ces échéances en position de force, pour construire une Europe respectueuse du génie des nations qui la composent et capable de rivaliser avec les grands ensembles mondiaux, votre adhésion et votre soutien sont essentiels.

Les valeurs qui fondent notre communauté nationale

Des principes essentiels ont été mis en cause : le respect dû à chaque homme, la tolérance, la solidarité la plus élémentaire. Des appels à la haine ont été lancés, et des boucs émissaires désignés. Ensemble, nous devons réaffirmer nos valeurs et les repères civiques et moraux qui sont les nôtres. Ensuite, nous devons dire clairement dans quelle société nous voulons vivre. Les réponses aux grandes questions qui se posent aujourd’hui ne se trouvent ni dans le repli sur nous-mêmes, ni dans l’exploitation des peurs et des ignorances. Les réponses ne se trouvent pas non plus dans un « laisser-faire – laisser-aller » contraire à notre culture et à nos traditions sociales. Les réponses ne se trouvent pas davantage dans des solutions archaïques fondées sur le « toujours plus » d’État, le « toujours plus » de dépenses, le « toujours plus » d’impôts. Ce que je vous propose, c’est l’idéal de notre République. C’est une société apaisée, décrispée, qui anticipe mieux les problèmes et qui les surmonte par le dialogue et la concertation. Rien n’est facile, mais nous devons choisir la bonne voie, celle qui concilie la justice, la solidarité et la modernité. Je veux que nous exprimions sans tarder notre volonté commune d’entrer dans le troisième millénaire avec confiance et avec enthousiasme.


Les candidats du MDR

Les législatives

Cette liste arrêtée avant la date de dépôt officiel de candidature est susceptible de subir quelques modifications

Allier : 4e circonscription : François Michalon

Côte-d’Or : 1re circonscription : Jean-Pierre Gillot

Doubs : 1re circonscription : Michel Helvas

Gard : 3e circonscription : Gilbert Baumet ; 4e circonscription : Max Romanet

Indre : 3e circonscription : Régis Blanchet

Isère : 4e circonscription : Gérard Cardin

Loiret : 4e circonscription : Philippe Clément

Morbihan : 3e circonscription : Patrice Le Borgnic ; 5e circonscription : Jean-Claude Belenger

Moselle : 1re circonscription : Jean-Claude Bonichot

Nièvre : 1re circonscription : Jean-François Daguin ; 3e circonscription : Lionel Thenault

Oise : 3e circonscription : Guy Guioubly

Bas-Rhin : 3e circonscription : Alfred Muller ; 6e circonscription : Alain Ferry

Haut-Rhin : 5e circonscription : Eric Schweitzer

Rhône : 6e circonscription : André Vianès

Paris : 1re circonscription : Jean-Michel Goustour ; 2e circonscription : Herbert Axelrad ; 3e circonscription : Christiane Régnier ; 4e circonscription : Françoise Boyvineau ; 5e circonscription : Patrick Schemla ; 6e circonscription : Marie-Luce Iovane-Chesneau ; 8e circonscription : Georges Maltret ; 9e circonscription : Bernard Mora (sous réserve) ; 10e circonscription : Sylvie Foucault ; 11e circonscription : Catherine Roblin ; 12e circonscription : Catherine Leroux ; 13e circonscription : Laurence Grégoire ; 14e circonscription : Jean-Richard Sulzer ; 15e circonscription : Catherine Bouvier ; 16e circonscription : Maurice Rubin ; 17e circonscription : André Bensoussan ; 19e circonscription : Sandra Piéri ; 20e circonscription : Etienne Dabeedin ; 21e circonscription : Eloi Leticée.

Seine-Maritime : 7e circonscription : Jean-Yves Métayer

Seine-et-Marne : 1re circonscription : Daniel Chalons ; 4e circonscription : Nicaise Elodin-Herelle

Yvelines : 10e circonscription : Françoise Berthet

Var : 2e circonscription : Didier Maïsto ; 6e circonscription : Daniel Di Placido ; 7e circonscription : Patrick Martinenq

Yonne : 1re circonscription : Jean-Pierre Soisson ; 2e circonscription : Jean-Claude [Nom illisible]

Essonne : 6e circonscription : Fred Elisie ; 10e circonscription : Serge Petipermon

Hauts-de-Seine : 4e circonscription : Marguerite Edorh-[Nom illisible] ; 6e circonscription : Sophie Rochas ; 9e circonscription : Catherine Tripon

Seine-Saint-Denis : 1re circonscription : Raymond Emmanuel ; 2e circonscription : Elie Philocres ; 3e circonscription : Alain Lascary ; 4e circonscription : Jean-Yves Ramassamy ; 5e circonscription : Damian Yurkievich ; 6e circonscription : Kléber Martigues ; 11e circonscription : Jean-Philippe Rodony ; 12e circonscription : Cécile-Glwadys Ouali ; 13e circonscription : Serge Bavarin

Val-de-Marne : 1re circonscription : Bernard Loth ; 2e circonscription : Henri Bensahel

Val-d’Oise : 1re circonscription : Jean-Etienne Raphaël ; 2e circonscription : Christian Rivoal ; 5e circonscription : Pierre Malet ; 7e circonscription : Valente Dersion ; 8e circonscription : Roger Anglo

Guadeloupe : 1re circonscription : Edouard Chamougon

Martinique : 1re circonscription : Justin Bonnialy


L’événement

Réforme et Participation : le troisième pilier de la majorité

Le Mouvement des Réformateurs et le Mouvement Solidarité et Participation ont décidé de s’associer en créant Réforme et Participation. Cette alliance entre les Gaullistes de gauche et les Réformateurs n’est pas affaire d’opportunité mais de conviction. Comme le MDR, le MSP a appelé à la candidature de Jacques Chirac. Contribuer à l’émergence d’une aile sociale de la majorité : tel est le défi que se lance Réforme et Participation. Pour que, l’an prochain, une majorité parlementaire rénovée coïncide davantage avec la majorité présidentielle de 1995. Extraits des interventions de Philippe Dechartre et Bernard Bertry lors de la conférence de presse du 25 mars 1997.

Philippe Dechartre, Président d’honneur du MSP

Si je suis le premier à prendre la parole, c’est que, depuis le 18 juin 1940, j’ai assumé, sans hiatus et sans faille, l’aventure du gaullisme de gauche. Nous ne sommes pas un parti forteresse, comme le PS, le PC, l’UDF ou le RPR. Nous sommes un mouvement politique qui a des idées et qui veut les manifester. Et nous sommes ici aujourd’hui pour présenter l’alliance de deux formations qui se situent, sans ambiguïté, dans la majorité présidentielle. Si nous nous sommes rapprochés avec le MDR, c’est que nous avons des idées communes sur le plan social, sur le plan de l’Europe, mais aussi parce que nous sommes liés par un contrat d’amitié et un contrat politique avec Jacques Chirac. Je peux vous dire que ce contrat n’a rien de conjoncturel. En 1958, nous, les gaullistes de gauche, nous étions réunis pour fonder le Centre de la Réforme Républicaine. Un jeune homme était présent, dont certains disaient qu’il avait peut-être un avenir politique. Un d’entre nous lui a demandé de noter le procès-verbal de la création de notre mouvement. Ce jeune homme, c’était Jacques Chirac. Depuis ce jour-là, nous avons toujours été fidèles : lui à nous et nous à lui. C’est pourquoi l’appel de Bernard Bertry, comme l’appel de Jean-Pierre Soisson, n’ont pas été des appels politiciens de circonstance.

Certaines différences nous distinguent des autres formations de la majorité et la première de ces différences, c’est que nous ne renvoyons pas dos à dos le Parti socialiste et le Front national. Le Front national constitue pour nous l’horreur absolue. Quant au Parti socialiste, si nous avons des divergences d’analyse, si nous ne proposons pas les mêmes solutions, nous avons en commun les valeurs de la République : ça n’est pas rien.

La seconde différence avec les autres formations de la majorité concerne notre approche du chômage. Nous pensons que les gouvernements qui se sont succédé depuis des années ont traité ce problème à l’aide de rustines. Il y a certes de bonnes rustines. Mais nous ne sommes pas dans un phénomène de crise, nous devons faire face à un changement de civilisation. Et ce n’est ni le libéralisme à tout crin, ni le mondialisme qui nous aideront à régler ce problème.

Sur l’Europe, nous pensons qu’il faut avant tout un projet politique. Nous ne voulons pas d’une Europe gérée par les marchands et les banquiers, qui n’ont pas de légitimité populaire. Alors, confédération ou fédération, nous n’en sommes pas là. De Gaulle disait d’ailleurs qu’une fédération était une confédération qui avait réussi. Mais ce qui compte, le but à atteindre, c’est la construction d’une Europe sociale. Sinon, tout cela n’aurait aucun sens. Ce qui distingue, presque philosophiquement, les hommes de droite des hommes de gauche, c’est que les premiers pensent que le progrès économique est une finalité en soi. En ce qui nous concerne, si nous estimons que le progrès économique est nécessaire, la finalité, c’est le progrès social.


L’événement

Bernard Bertry, Président du MSP

Pourquoi avons-nous choisi ces deux mots, « Réforme et Participation » ? Parce que nous sommes intimement convaincus qu’ils apportent une vraie réponse aux problèmes d’aujourd’hui. Réforme, car nous assistons à une montée des corporatismes : le pays se crispe, chacun défend ses privilèges, ses droits acquis. Nous pensons que cette crispation est dangereuse pour la France. Il nous faut être plus audacieux et accepter ces mutations nécessaires.

Réformer d’accord, mais dans quel sens ? C’est là que le mot « participation » est important. Certains de nos amis, au sin de la majorité nous disent parfois : « Ça y est, vous nous sortez encore cette vieille lune gaulliste ! » Eh bien oui ! D’abord parce qu’elle est gaulliste, certes, mais surtout parce que ce n’est pas une vieille lune. Être fidèle à la participation, c’est se situer en plein cœur de l’actualité. Le libéralisme n’est pas un projet de société : on ne motivera pas les Français sur le libéralisme. La participation, ça consiste à dire aux citoyens : « Occupez-vous de ce qui vous regarde ! » Bien au-delà de l’entreprise, c’est le moyen privilégié de revivifier la démocratie. L’exemple de Vilvorde est à ce titre hautement significatif. On a dit, après coup : « Oui mais le Gouvernement et les différentes autorités étaient prévenus ». Mais n’aurait-il pas fallu d’abord prévenir les principaux intéressés, c’est-à-dire les salariés ? Finalement, on considère aujourd’hui que la démocratie s’arrête à la porte des entreprises. Comment veut-on faire accepter aux citoyens des changements nécessaires, et parfois difficiles, si on les exclut du jeu, si l’on considère que l’on est dans une zone de non-démocratie ? La participation est également nécessaire dans la construction de l’Europe. Elle constitue un modèle, une espérance. Dans cette période de profonde mutation, les Français attendent qu’on leur propose une vision de la société et non pas simplement quelques mesures techniques. Voilà notre ambition : nous la défendrons au sein de la compétition électorale qui se profile. Parce qu’en politique, les idées ça compte aussi.


En direct de l’Assemblée nationale

Alain Ferry - La place des femmes en politique

S’agissant de la place qui est faite aux femmes en politique, notre pays, ce n’est pas un scoop, est classé avant-dernier au niveau européen. En 1958, 410 femmes sur 5 238 sièges à pourvoir ont été élues député, soit moins de 8 %. Plutôt que de proposer une énième révision de la Constitution ou l’instauration d’un système de quotas et de pourcentages, le député du Bas-Rhin a imaginé un dispositif simple et novateur. Il s’agit, dans le cadre du financement public des partis et mouvements politiques, de mettre en place un mécanisme incitatif.

Ainsi, une prime de 1 million de francs serait accordée aux partis ayant présenté un nombre de candidates supérieur ou égal à 10 % du nombre de sièges à pourvoir ; en outre, Alain Ferry propose qu’une prime – entre 1 et 5 millions de francs – soit versée aux partis, par tranche de dix femmes élues. Plus qu’une déclaration d’intention à la mode, ce système permettrait aux femmes d’accéder aux mandats et non pas à une simple candidature.

« Le Monde » a par ailleurs envoyé un questionnaire aux députés « sur la présence des femmes dans les assemblées représentatives ». Aux trois questions posées par le quotidien, Jean-Pierre Soisson, comme Alain Ferry, ont répondu « non ». Les questions étaient les suivantes :

- Êtes-vous favorable à l’inscription dans la Constitution du principe de la parité entre hommes et femmes dans les assemblées élues ?

- Êtes-vous favorable à l’instauration, au stade des candidatures, d’un système de quotas permettant d’assurer une meilleure représentation des femmes ?

- Le cas échéant, souhaiteriez-vous un référendum pour mettre en œuvre ces réformes ?

Débat sur l’immigration : quand le PS se cherche

Partisan de l’ouverture, Jean-Pierre Soisson n’en a pas moins fustigé l’ambiguïté du Parti socialiste à propos du débat sur l’immigration. « Lorsque j’étais ministre du Travail, a-t-il lancé le 27 février en séance publique, Julien Dray était la gauche du Parti socialiste, et voilà la gauche du Parti socialiste devenue le Parti socialiste tout entier ! » Sans nourrir de polémique excessive, il faut bien convenir que le ralliement du PS aux idées de Julien Dray ne constitue en rien une surprise : en première lecture, il était pratiquement le seul député socialiste présent dans l’hémicycle.

En direct de l’Assemblée nationale

Jean-Pierre Soisson - Des idées pour l’emploi des jeunes

Lors des questions d’actualité du 28 janvier, Jean-Pierre Soisson a proposé à François Bayrou, ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement et de la Recherche, d’étendre les stages diplômants aux administrations de l’État et aux collectivités territoriales. Président du Centre national de la fonction publique territoriale, le député-maire d’Auxerre a par ailleurs suggéré de faire intervenir cet organisme pour assurer l’information des régions, des départements et des communes mais également pour conduire la formation des tuteurs. Une initiative saluée par le Gouvernement, qui y voit une réponse intéressante à l’appel lancé par le Président de la République, tendant à faire de 1997 l’année de l’emploi des jeunes.

Pour une véritable Europe sociale

Fondateur de la Charte des droits sociaux adoptée par le Conseil européen de Strasbourg, Jean-Pierre Soisson a posé à Jacques Barrot, ministre du Travail et des Affaires sociales, une question d’actualité… le 25 mars 1997. Soit quarante ans, jour pour jour, après la signature du Traité de Rome.

« Comment ne pas évoquer cet anniversaire ? Comment ne pas exprimer le sentiment que la construction européenne est déséquilibrée et que nous n’avons pas su édifier le pilier de l’Europe sociale ?

En 1989, lors de la présidence française, j’étais ministre du Travail, occupant les fonctions qui sont aujourd’hui les vôtres. Le Conseil des Affaires sociales a alors élaboré la Charte des droits sociaux, qui a été adopté par le Conseil européen de Strasbourg. Près de dix ans après, les principales dispositions de cette Charte n’ont pas été appliquées. L’Europe boite. Cependant, l’an dernier, le Gouvernement français a proposé un mémorandum qui définit les conditions d’un progrès de l’Europe sociale. Il n’a guère été retenu par la Conférence intergouvernementale. Le temps ne serait-il pas venu de le relancer ?

Après l’annonce de la fermeture de l’usine de Vilvorde, les ministres européens des Affaires sociales se sont réunis. La présidence a proposé une réunion des partenaires sociaux au niveau communautaire. Je crois que la voie de la négociation collective peut représenter, dans le malaise actuel, l’une des chances de l’Europe. Êtes-vous prêt à la proposition de nos partenaires ? »

Défense des consommateurs : OCER, « première »

Christian Rivoal, secrétaire général de la fédération MDR du Val-d’Oise, vient de fonder la première union départementale OCER (Organisation des Consommateurs-Environnement et Réformes). Cette association a pour but, comme son nom l’indique, l’information, la représentation et la défense des consommateurs, « dans tous les domaines et sous toutes ses formes, en intégrant notamment la protection et l’aménagement de l’environnement et du cadre de vie ».

Voilà une initiative à développer rapidement dans tous les départements, afin de créer une union nationale. Christian Rivoal tient des statuts-types à votre disposition.

Initiatives

Accord entre le MDR et le RDC

À l’occasion du Conseil national du RDC (Rassemblement pour la Démocratie et le Civisme) qui s’est tenu le 15 mars à Paris, un protocole d’accord a été signé avec le MDR. Le RDC, qui regroupe les ressortissants des DOM-TOM, souhaite en finir avec « l’héritage colonial » et estime qu’une loi de programmation pour un développement autocentré des DOM-TOM constitue « un préalable indispensable à la mise en œuvre d’une réelle politique d’émancipation ». Alain Lascary, président du RDC, a ainsi affirmé lors du Conseil national : « Le temps est venu de dépasser ce clivage gauche-droite qui paralyse les énergies, sclérose les idées et enferme les esprits dans le carcan étroit de ses idéologies éculées. Disqualifiés, les grands partis traditionnels ne peuvent plus continuer à se relayer dans les instances de décision, se renvoyant alternativement les échecs, cependant que la France s’appauvrit sans cesse. »

À l’instar du MDR, le RDC est une force de proposition ouverte, plurielle, qui défend avec ferveur les valeurs sociales et l’égalité des chances : le rapprochement est par conséquent naturel et les deux formations mettront en œuvre leurs compétences pour présenter des candidats communs aux législatives comme aux régionales.

À lire

Charles le Téméraire, de Jean-Pierre Soisson, aux éditions Grasset

« Hommes du XVe siècle, debout dans votre peur, vous me paraissez si proches de ce que nous sommes », écrit Jean-Pierre Soisson en avant-propos de son livre. Mais quel Soisson a été séduit par Charles le Téméraire ? L’amoureux des terres bourguignonnes ou l’homme de pouvoir ? Les deux, sans nul doute. La finesse de l’analyse, la concision du style et les correspondances subtiles avec la période de mutation que nous traversons, font de cette biographie un ouvrage-clé. Pour qui veut se replonger dans les aventures et les rêves du Duc de Bourgogne. Et entrevoir les défis du millénaire qui se profile.

Provences, de Gérard Israël, aux éditions Lattès

Une saga occitane qui, de l’Antiquité à la Révolution française, permet de mieux cerner cette région qui s’étend des Pyrénées-Orientales aux Alpes-Maritimes. Gaulois, juifs, chrétien, maçons et hérétiques ont appris, dans la fureur de l’Histoire, à vivre en commun leur attachement à cette terre. À lire comme une épopée.

Et aussi…

Le rapport Pour l’école, de Roger Fauroux, aux éditions Calmann-Lévy.

Le Monde

M. Mancel se heurte à la « lepénisation » des militants RPR du Var

L’immigration, dans le Var, n’a pas besoin d’être « clandestine » pour servir de repoussoir. C’est l’immigration tout court que contestent une bonne partie des militants RPR de ce département. (…) Alors que M. Mancel dénonçait la proposition « aberrante » du parti d’extrême droite de renvoyer trois millions d’étrangers en un septennat (…) il était interrompu par ces exclamations : « Et alors ? » ; il habite où Mancel, à Neuilly ? » (…)

Pour autant, le mouvement néogaulliste entretient des ambiguïtés. Il existe à Toulon une section RPR, animé par Marc Bayle, conseiller général (…) qui, dès avant les élections de 1995, avait rompu avec l’équipe municipale sortante de François Trucy (UDF-PR), battue au second tour par le Front national. Engagé à la fois dans la lutte contre l’extrême droite et contre le système affairiste varois, M. Bayle a été prié de passer son tour aux élections législatives. « Si l’on garde les mêmes candidats (Daniel Colin et Louis Colombani, députés (UDF) sortants), on aura deux députés FN à Toulon », a plaidé, en vain, l’un de ses amis, jeudi, devant le comité départemental du RPR.

Le Monde, 15 mars 1997

L’Alsace

La liberté des réformateurs

De passage cette semaine à Strasbourg, le maire d’Auxerre, Jean-Pierre Soisson, s’est réjoui de l’esprit qui règne au sein de son groupe de 23 députés baptisé « République et Liberté », qui réussit la gageure de réunir des élus aussi différents que Jean Royer et Jean-Pierre Chevènement. Sans oublier les députes du Mouvement des Réformateurs, comme les Alsaciens Alfred Muller et Alain Ferry. « Nous sommes des élus libres et indépendants. Pour intervenir lors de sa séance des questions orales, il suffit de le demander au sein du groupe » a confirmé le député de Molsheim-Villé, en soulignant que cet état d’esprit ne règne pas forcément dans les grands partis traditionnels (…) Jean-Pierre Soisson en a profité pour évoquer l’avenir de son mouvement, les réformateurs devant former, selon lui, « la future aile gauche de la majorité présidentielle ». « C’est ce qu’attend le Président de la République », a-t-il ajouté.

L’Alsace, le 10 mars 1997

Sept-Mag Eco

Former, c’est semer

En la personne de Jean-Pierre Soisson, ancien ministre d’État, le CNFPT s’est donné un président d’envergure nationale. Son engagement personnel, qui est une chance pour cette institution, est lié à la conviction que la modernisation de l’administration française passe par le dynamisme des collectivités territoriales. Le cap est donné et la direction claire. L’assainissement financier est largement engagé. L’institution est regroupée en ordre de bataille sur ses deux missions, la formation et la gestion de l’emploi territorial. Enfin, le CNFPT s’est remis à l’écoute des besoins des collectivités, contraintes qu’elles sont de faire évoluer leurs organisations et leurs pratiques pour mieux assurer leur mission de service public et mieux répondre à l’attente des citoyens. (…)

Sept-Mag Eco, février 1997, interview d’Alain Lesueur, directeur régional du CNFPT-Guadeloupe

Le Figaro

Les chantiers de Soisson

Après avoir créé une nouvelle structure baptisée Réforme et Participation (…), l’ancien ministre de Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand entend « contribuer à l’émergence d’une aile gauche de la majorité » en présentant une centaine de candidats aux législatives de 1998. D’ici là, le député et maire d’Auxerre sera présent en librairie, à partir du 10 avril, avec une biographie de Charles le Téméraire, chez Grasset.

Le Figaro, 2 avril 1997

Midi Libre

Gilbert Baumet : portait d’un pyrotechnicien

Demander à Gilbert Baumet si on peut faire de la politique hors des partis, c’est un peu demander à un Ajaccien si on peut être corse et empereur. La question a vite des airs de pléonasme. (…) Qui, mieux que lui – à part l’ami Jean-Pierre Soisson peut-être, membre du groupe faut-il le dire – est plus apte à composer ? « Il est possible que République et Liberté disparaisse après les législatives, dit-il, mais peut-être aussi renaîtra-t-il sous une autre forme. Pourquoi ne ferait-il pas l’équilibre à l’Assemblée ? » (…) Ah, ce n’est pas lui qu’on taxera de godillot, pour sûr. Gilbert Baumet, c’est du chausson de danse : léger, à peine posé que déjà envolé. (…) « Les partis, je les respecte. Mais souvent ce sont des machines à prendre la place de l’autre. Il faut rétablir la primauté du politique dans la nation. Ce sont des gens comme nous qui y aidons. D’ailleurs, je crois de plus en plus à la politique de proximité contre la globalisation et la mondialisation ».

Midi Libre, 19 février 1997

Le Figaro

Philippe Dechartre, le vénérable des élus

La « Fraternelle parlementaire », qui réunit les élus appartenant aux différentes obédiences de la franc-maçonnerie, vient d’élire, à l’unanimité, son nouveau président : Philippe Dechartre. Ministre dans des gouvernements nommés par le général de Gaulle et Georges Pompidou, ancien député de la Charente-Maritime et gaulliste de gauche, Philippe Dechartre, 78 ans, est vénérable d’honneur de la Loge Paris et fondateur du Centre de la Réforme Républicaine. Grand-croix de l’ordre national du Mérite, il vient d’être fait commandeur de la Légion d’honneur. À la tête de la « Fraternelle parlementaire », il entend accroître l’audience de cette association de 300 élus ou anciens élus, notamment au niveau régional.

Le Figaro, 26 février 1997

Les commissions de réflexion du MDR

Commission « justice »

Partageant la volonté réformatrice du Président de la République ainsi que son souhait de mieux assurer l’indépendance de la Justice, la commission Justice du MDR a d’ores et déjà élaboré un pré-rapport, dont nous reprenons ici les grandes lignes.

L’essentiel a été fait en ce qui concerne les magistrats du Siège, grâce à la loi constitutionnelle du 27 juillet 1993, complétée par la loi organique du 5 février 1994. Depuis lors, la carrière des magistrats du Siège ne dépend plus essentiellement du pouvoir exécutif mais du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) profondément rénové dans ses attributions et sa composition.

En effet, aucune nomination de Juge de Siège ne peut intervenir sans l’avis conforme du CSM, lequel en outre dispose d’un pouvoir de proposition pour les postes les plus élevés. Ce pouvoir et cette indépendance doivent être réaffirmés. Concernant la formation du CSM pour les magistrats du Parquet, la question est de savoir si ces pouvoirs – seulement consultatifs – doivent être renforcés, voire alignés sur ceux de la formation Siège.

La commission considère comme normal que le pouvoir exécutif ait un droit de regard plus prononcé sur la nomination des magistrats du Parquet.

Ce ne sont certes pas les formules qui manquent. Par exemple, ne pourrait-on concevoir que pour certains postes du Parquet, parmi les plus importants à définir, le Garde des Sceaux choisisse sur une liste de quatre ou cinq noms proposée par le CSM ?

Car il importe par-dessus tout d’éviter un conflit entre l’exécutif et une autre institution de la République, si celle-ci est amenée à penser qu’il n’est pas suffisamment tenu compte de ses avis.

De même, il est nécessaire de conjurer toute polémique, tout procès d’intention, toute insinuation à propos d’une nomination judiciaire.

La Justice ne doit pas être soupçonnée. Elle ne saurait constituer un enjeu. Pour autant, le Parquet ne peut être complètement autonome au sein des pouvoirs de la République. Entre la subordination absolue et la rupture, d’autres solutions apparaissent plus satisfaisantes et notamment l’insertion, à l’article 36 du Code de procédure pénale, d’une disposition retirant expressément au Garde des Sceaux la possibilité d’ordonner au ministère public le classement d’une affaire. Le lien nécessaire entre pouvoir exécutif et pouvoir judiciaire serait ainsi maintenu en ce qu’il a de meilleur : définition d’une politique pénale, coordination entre les Parquets.

La France est une démocratie. Le pouvoir exécutif est responsable devant le Parlement, qui, lui-même, périodiquement renouvelé par le suffrage universel, rend compte au peuple. Devant qui et de qui serait comptable un Parquet coupé du suffrage universel, sauf à élire des magistrats comme aux États-Unis ? Peut-on écarter le risque, qu’à vouloir encore renforcer l’autonomie des parquets – déjà très actifs – on finisse par les transformer en « machine infernale » ? La Justice, actuellement, exerce normalement son rôle de contre-pouvoir. Il serait néfaste, voire désastreux, qu’elle se transforme en anti-pouvoir. Enfin, d’aucuns estiment que devrait être retiré au Parquet le droit de classer certaines procédures, en raison du caractère inopportun des poursuites. Une telle proposition est totalement irréaliste. Chacun, pour autant qu’il justifie d’un préjudice matériel ou moral, peut, même après classement par le Parquet, déclencher la mise en mouvement de l’action publique (sauf en matière de contravention) : en déposant plainte avec constitution de partie civile entre les mains du Doyen des juges d’instruction, ou encore en saisissant la juridiction par voie de citation directe.

À cet égard, il serait souhaitable d’étendre le champ d’intervention des associations – par exemple des associations de contribuables – en leur permettant de se constituer partie civile et de déclencher ainsi l’action publique.

Membres

André Vianès, avocat ; Claude Cohen, magistrat ; Dominique Schemla, huissier de justice ; Jean Antagnac, avocat, président d’honneur de l’Association des magistrats des chambres des comptes ; Jean-Richard Sulzer, professeur d’université ; Michel Helvas, avocat ; Pierre Malet, avocat.

Cinq questions à Henri Bensahel, coordonnateur de la commission

Avant-Centre : Quels sont les objectifs de vos travaux ?

Henri Bensahel : Notre souci est de répondre aux préoccupations des Français, qui en ont assez des grandes idées et des vastes débats stériles. Nous souhaitons les aider dans leur vie de tous les jours, qu’il s’agisse de « petites tracasseries » ou de problèmes plus importants.

Q. : Une politique de proximité, n’est-ce pas la meilleure façon de lutter contre les extrémismes ?

R. : Nous espérons en effet que cette manière de réfléchir et d’agir incitera les citoyens à se tourner vers nous plutôt que vers les sirènes extrémistes. En ce qui nous concerne, nous nous adressons à tous les citoyens et pas uniquement à une seule catégorie d’entre eux.

Q. : Cette « manière de réfléchir et d’agir » n’est-elle pas un peu laissée pour compte au sein même de la majorité ?

R. : C’est évident, mais cela concerne tout autant l’opposition de gauche. Bon nombre de responsables politiques parlent de proximité, mais les discours sont rarement suivis d’effets. Depuis l’élection de Jacques Chirac, que j’ai soutenu dès le début de la campagne présidentielle, la situation, de ce point de vue, n’a guère évolué. Il faut bien le reconnaître.

Q. : Au-delà des discours justement, n’est-ce pas une affaire de responsabilité personnelle de l’élu ?

R. : Tout dépend effectivement de la volonté des hommes, à quelque niveau qu’ils se situent. Quand on promet la Lune et Mars… on sait d’avance que ce ne sera pas tenu. Mais quand on s’est engagé à mener des actions de proximité, là, on doit honorer son contrat avec les électeurs. Malheureusement, dans les grandes formations, il y a aussi la notion de discipline de vote : un élu parfaitement honnête est en droit de se poser des problèmes de conscience, lorsqu’il s’est engagé dans une voie et que son parti lui demande de voter différemment. Ce genre de problèmes ne se pose pas au MDR !

Q. : Sans préjuger des conclusions de votre rapport, pouvez-vous concrètement nous dire vers quelles pistes vous vous dirigez ?

R. : Pour n’en citer que trois, nous travaillons à la simplification des démarches administratives, à la généralisation du tutorat, ou encore au retour d’une certaine éthique de responsabilité dans nos actions de tous les jours. Car c’est à partir du quotidien qu’on arrivera à nouveau à faire de la politique, au sens noble du terme. À ce propos, je ne crois pas du tout que la prochaine Assemblée nationale sera à l’image de celle de 1993. Et cela me paraît sain, parce que les députés joueront enfin leur véritable rôle et ne seront plus de simples godillots suivant aveuglément leurs édiles. Dans ces conditions, le MDR pourrait vraiment peser dans les décisions et, pourquoi pas, être en quelque sorte la conscience de la majorité.

Le courrier des lecteurs

Quelle est la position du MDR sur l’avortement ?

Si l’avortement ne doit pas être considéré comme un moyen de contraception, il n’est nullement question pour nous de revenir sur la loi Veil. Un avortement est toujours vécu comme un drame et il ne serait pas raisonnable d’ajouter à la détresse des femmes et des familles. Il s’agit là d’un problème de conscience, propre à chacun, mais, dans la France de 1997, il n’est pas concevable qu’une femme avorte dans des conditions médicales et d’hygiène d’une autre époque.

Valérie Portal, Besançon

Que pensez-vous de la médiatisation autour du FN ?

Les manifestations de Toulon et de Strasbourg ont démontré qu’une grande majorité de citoyens est opposée aux thèses du FN : c’est rassurant. Mais en même temps, ce type de rassemblement assure une immense publicité à ce parti, sans lui faire perdre un seul électeur. On ne lutte plus contre le FN en le « diabolisant » et en prononçant de beaux discours incantatoires. En manifestant à plusieurs reprises, les citoyens ont en fait tiré une sonnette d’alarme et malgré tout ce qu’on peut lire ou entendre, ils ont exprimé leur intérêt pour les affaires publiques. Désormais, la balle est dans le camp des responsables politiques, qui doivent se montrer plus proches des Français et leur apporter, au quotidien, des solutions concrètes. C’est le premier objectif du MDR.

Frédéric Magardino, Toulon

Le MRD est-il favorable au « front républicain » pour lutter contre le FN ?

Le « front républicain » a vécu et dans bien des élections, cette union a fait barrage au parti d’extrême droite. On ne peut que s’en féliciter. Pour autant, il n’est qu’un palliatif, un ultime recours, et ne saurait constituer la règle de base. Car désormais le FN joue à fond sur le thème du « seul contre tous » et se pose continuellement en victime. Il faut combattre le FN sur le terrain des idées, par un militantisme quotidien et démontrer que ses thèses sont absurdes, incohérentes et souvent contradictoires. Mais nous espérons aussi que les grands partis – de la majorité comme de l’opposition – qui se réclament des valeurs républicaines sauront tirer des conclusions de Vitrolles, en soutenant, à l’avenir, de meilleurs candidats.

Christophe Rivière, Nîmes


Date : 5 février 1997
Source : non mentionnée

La politique de l’emploi

I. – Le risque d’une asphyxie

Les mesures en faveur de l’emploi se surajoutent les unes aux autres par un véritable phénomène de sédimentation.

Faut-il simplifier ?

Faut-il développer des mesures adaptées à des situations très différentes ?

Tout ministre du Travail a en ce débat à arbitrer avec, sans l’exprimer, le sentiment que les services des Finances profiteront de la simplification pour réduire les crédits publics consacrés à l’emploi.

Le moment est venu de procéder à une remise à plat des aides publiques à l’emploi.

En mars 1996, l’Assemblée nationale a décidé la création d’une commission d’enquête sur les aides à l’emploi présidée par M. Péricard, elle a remis son rapport en juin 1996.

Quelle est sa conclusion ?

« Le système actuel est complexe, coûteux, souvent inefficace. La dispersion des acteurs, l’instabilité des mesures ne font qu’amplifier ce contrat ».

Mais M. Péricard ajoute dans son propos d’introduction :

« Le présent rapport n’est pas un réquisitoire. Personne n’a réussi, depuis 20 ans, à trouver les bonnes solutions ».

Selon la commission (rapport Novelli, p. 39), il existe en France 48 dispositifs d’aides financés par le budget du ministère du Travail et celui des charges communes.

Il en existe 40 en Grande-Bretagne et 38 en Allemagne : une situation assez comparable.

Aux aides nationales s’ajoutent les aides locales (en application des lois de décentralisation de janvier et de mars 1982) et l’intervention du Fonds social européen.

Selon les calculs effectués par la commission Péricard, la dépense publique pour l’emploi s’est élevé à 297 milliards en 1994 (compte tenu du coût des exonérations de cotisations d’A.F. sur les bas salaires).

Elle représente 3,9 du P.I.B. (p. 82).

Au sein de la D.P.E., les dépenses sont réparties en différentes rubriques selon la nature de leur contribution à la résorption des déséquilibres du marché du travail :
    - l’indemnisation du chômage comprend l’ensemble des versements d’un revenu de remplacement aux personnes privées d’emploi, qu’ils proviennent du régime d’assurance chômage ou de l’État ; 41,4 % de la D.P.E. ;
    - l’incitation au retrait d’activité recouvre les dispositifs de préretraite généraux ou spécifiques ; 10,1 % de la D.P.E. ;
    - le maintien de l’emploi désigne les interventions qui ont pour but de préserver, pour une durée limitée en général à quelques mois, le contrat de travail des salariés dont les entreprises connaissent des difficultés (indemnisation du chômage partiel, financement des congés de conversion, des actions de reclassement) ;
    - la promotion et la création d’emploi regroupent les mesures publiques qui ont pour objet de subventionner des embauches (notamment les exonérations de charges sociales) ;
    - l’incitation à l’activité recouvre principalement l’aide à l’emploi des handicapés (notamment par l’intervention de l’AGEFIPH) ;
    - la formation professionnelle, comprend les actions de formation financées par les entreprises, l’État, les régions ; 30,7 % de la D.P.E. ;
    - la dernière rubrique « fonctionnement du marché du travail » correspond au budget de l’ANPE.

Les deux rubriques « indemnisation du chômage » et « incitation au retrait d’activité » comptabilisent les « dépenses passives ». Les autres forment la « dépense active ».

Dépenses passives 51,5 % de la D.P.E. en 1994 en légère décrue au cours des dernières années (56,3 % en 91, 55,1 % en 92, 52,8 % en 93).

Dépenses actives : 48,5 % de la D.P.E. en 1994.

Une politique de l’emploi à bout de souffle.

Un recentrage s’impose sur quelques mesures.

Comment le conduire ?

II. – L’abaissement du coût du travail pour les emplois peu qualifiés (rapport Novelli p. 103-109 + p. 227-231)

Favoriser l’abaissement du coût du travail pour les emplois peu qualifiés :
    - par l’exonération des cotisation d’A.F. (jusqu’à 1,2 SMIC et la réduction de moitié jusqu’à 1,3 SMIC selon la loi de décembre 1993 ;
    - par la réduction progressive des cotisations patronales de S.S. pour les salaires inférieurs à 1,2 SMIC).

Une fusion des deux dispositifs.

« Une politique originale en Europe » (rapport Novelli, p. 106).

Coût budgétaire en 1996 :

A.F. : 17,5 milliards ;

Cotisations S.S. : 19 [ ???]  36,5 milliards.

Selon le rapport du Conseil supérieur de l’emploi, des revenus et des coûts, remis au Premier ministre sur l’allègement des charges sociales sur les bas salaires en mai 1996, 5 millions de salariés (sur les 14 millions du secteur marchand) sont concernés (+ 20 % masse salariale).

La baisse des charges sur les bas salaires ne produira ses effets qu’à moyen terme.

Nécessité d’une mesure stable.

La fixation du seuil est importante.

Jusqu’à 1,2 SMIC, l’abaissement bénéficie essentiellement aux secteurs des services rendus aux particuliers et à certains secteurs industriels (comme l’habillement) ;

En remontant le seuil à 1,3 SMIC, on dilue assez nettement la baisse des charges entre les acteurs.

« Au terme de quelques années, l’effet sur le P.I.B. est quasi nul » (p. 109).

III. – La lutte contre l’exclusion ; l’insertion par l’économie

Plus la reprise fera sentir ses effets et plus grandira le sentiment de l’exclusion chez ceux qui n’en bénéficieront pas.

L’entreprise à elle seule ne peut résoudre les problèmes du chômage.

La logique du tout entreprise conduit à une impasse.

Mais la logique du « tout social » présente, elle aussi, de graves risques et elle s’est souvent traduite par un échec (le taux des bénéficiaires du RMI ayant signé un contrat d’insertion est inférieur à 30 %).

Une politique plus forte de lutte contre l’exclusion dans le cadre d’une économie sociale regroupant le M.I.P., les missions locales, les associations intermédiaires et les entreprises d’insertion 330 millions en 1996.

102 000 jeunes sortis en 1994 du système scolaire sans aucun diplôme ;

Taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans de 24,9 % (contre 12,7 % pour la moyenne nationale) ;

Peut atteindre dans les « quartiers en grande difficulté » 45 % et même 50 %.

IV. – Formation professionnelle

En 1994, 8,2 millions d’actifs ont suivi une formation, soit 1 actif sur 3 ;

913 millions d’heures de formation ont été dispensées ;

Les dépenses de formation se sont élevées à 133,5 milliards de francs, soit 1,8 % du P.I.B. ;

21,8 milliards ont été affectés à l’insertion des jeunes (dispositifs mis en place pour la formation des jeunes de 16 à 25 ans) ;

27,2 milliards ont été consacrés à la formation de demandeurs d’emploi ;

74,9 milliards à la formation des actifs occupés (salariés et non-salariés).

Origine des dépenses :
    57,1 milliards de l’État ;
    7,4 les collectivités territoriales (principalement les régions) ;
    47,3 les entreprises ;
    7,3 l’UNEDIC au titre des conventions de conversion ;
    1,3 les ménages à leur initiative.

Pour la formation professionnelle, deux rapports :
    - mai 1994, celui de la commission d’enquête sur l’utilisation des fonds affectés à la formation professionnelle, présidée par J. Veberschlag ; rapporteur C. Goasguen ;
    - juillet 1996, celui de M. de Virville : « donner un nouvel élan à la formation professionnelle ».

Concevoir l’alternance « comme projet pédagogique global » (p. 29).

« L’alternance doit constituer demain la règle de base d’une formation continue, tout au long de la vie » (AN 2/10/96).

Développer l’alternance :
    - sous statut scolaire ;
    - sous contrat de travail.

L’entreprise doit être actrice à part entière du projet éducatif.

Évaluation vers les actions de formation développées par voie contractuelle entre l’entreprise, l’établissement de formation et le salarié.

Négociation collective :
    - en 1995, 2 accords interprofessionnels, dont celui relatif à l’insertion professionnelle des jeunes ;
    - 21 accords de branche.

Quid des stages diplômants ?

Proposition d’un accueil d’étudiants volontaires dans les entreprises pour une période de 9 [??????] en moyennant une rémunération de 1 000 à 1 700 F.

Sommet sur l’emploi des jeunes le 10 février.

Intervention du CNESER le 20 janvier :

« Développement des stages qualifiants d’une durée adaptée, de l’ordre d’un trimestre pour une année universitaire, pour permettre un contrat effectif avec le milieu professionnel ».

« Une chance pour les étudiants ».

V. – Conclusion

Changer le travail.

La nécessité du grand large et le désir de préserver nos racines.

« Le Nouvel Âge des inégalités », Jean-Paul Fitoussi et Pierre Rosanvallon écrivent avec raison que « la crise est, en dernier ressort, d’ordre structurel et relève d’une dimension anthropologique. Elle est à la fois crise de civilisation et crise de l’individu ».

Radicales ou utopiques, refondatrices ou critiques, les analyses développées au cours des dernières années cherchent, au-delà d’une approche économique souvent seule prise en compte, à formuler autrement les fondements de la société. Toutes se rejoignent dans une interrogation sur la valeur du travail.

Un tel débat est sain, légitime, utile : je souhaite que l’Association des Démocrates et le Mouvement des Réformateurs puissent y participer. S’éloignant des querelles d’école, ils pourraient accepter leur contribution à l’émergence d’une philosophie sociale, dans laquelle les valeurs humanistes trouveraient une place déterminante.

Une nouvelle philosophie sociale pour fonder les politiques sociales du siècle à venir, nous sommes sans doute loin du débat « Changer la République », mais nous sommes au cœur sur la réforme de notre société.

Permettez-moi une dernière observation. Plus les échanges se diversifient et se mondialisent, plus l’économie s’ouvre sur le monde, et plus l’homme a besoin de trouver en ses racines la part d’identité qui le maintient debout. Il existe pour moi une complémentarité entre la nécessité du grand large et le désir, instinctif en chacun de nous, de préserver nos racines.

 

Date : 18 février 1997
Source : non mentionnée

Réforme et Participation

Ensemble, pour faire bouger la France

Le Mouvement des Réformateurs de Jean-Pierre Soisson et le Mouvement pour une Société de Participation de Bernard Bertry ont décidé de s’associer en créant Réforme et Participation.

Cette alliance entre les gaullistes de gauche et les Réformateurs n’est pas affaire d’opportunité mais de conviction. Dès 1994, le M.S.P. a appelé à la candidature de Jacques Chirac ; il a été rejoint au début de 1995 par le M.D.R. Les deux formations se sont engagées dans la campagne présidentielle avec la même foi et la même volonté. Elles partagent la même analyse sur les risques que fait courir à notre démocratie la fracture sociale dénoncée par Jacques Chirac. Elles réaffirment que l’exigence sociale s’impose à tout choix politique. Il s’agit aujourd’hui d’inventer de nouveaux liens de solidarité entre les Français et, plus que jamais, de créer une société dans laquelle le progrès économique s’accompagne nécessairement d’un progrès social.

Renouer avec l’élan qui a porté Jacques Chirac à la présidence de la République, contribuer à l’émergence d’une aile gauche de la majorité : tels sont les objectifs que s’assigne Réforme et Participation. La majorité parlementaire actuelle, issue des élections de 1993, ne peut incarner totalement ces aspirations. C’est pourquoi Réforme et Participation engage le combat pour que, l’an prochain, une majorité parlementaire rénovée coïncide davantage avec la majorité présidentielle de 1995.

Selon les circonscriptions, l’action de Réforme et Participation prendra des formes différentes. Dans certaines circonscriptions, nous apporterons un soutien actif aux candidats qui nous sembleront proches de notre sensibilité, qu’ils soient issus du R.P.R. ou de l’U.D.F. Dans une centaine de circonscriptions, nous présenterons des candidats sous notre propre bannière et avec nos propres propositions.

Quelques mots sur le M.S.P.

Fondé en 1972 par Pierre Billotte et Philippe Dechartre, qui en demeure le président d’honneur, le M.S.P. s’inscrit dans la filiation du « Gaullisme de gauche ». Nombre d’élus et de ministres gaullistes ont milité dans ses rangs ou participé à ses travaux. Aujourd’hui, dirigé par Bernard Bertry, conseiller régional d’Ile-de-France, le M.S.P. est présent sur l’ensemble du territoire à travers X fédérations.

Quelques mots sur le M.D.R.

Le M.D.R. a été fondé en octobre 1992, rassemblant France Unie, l’Association des Démocrates et Performance et Partage. Il est représenté au Parlement par douze députés et sénateurs. Selon les statuts, il réunit les hommes et les femmes qui aspirent à un renouvellement de la vie politique au-delà des clivages partisans traditionnels.

Le témoignage de Jean-Pierre Soisson

Comme ministre du Travail, j’ai apprécié l’action des Comités de bassin d’emploi.

Leur création s’est inspirée de deux idées fortes :
    - organiser le partenariat entre les administrations, les élus locaux, les entreprises et les représentants syndicaux ;
    - l’organiser dans le cadre géographique du bassin d’emploi, qui m’est toujours apparu comme le lieu naturel des solidarités économiques et sociales, l’entité concrète de traitement des problèmes de l’emploi et de la formation professionnelle.

Les Comités de bassin d’emploi représentent, le plus souvent, un lieu actif de rencontres, de débats, de montage d’opérations qui trouvent, grâce à la diversité des partenaires réunis, l’assurance d’un soutien coordonné.

Mais il faillait rassembler les Comités de bassin d’emploi, créer un réseau qui puisse dynamiser le développement local : sous l’impulsion de Gérard Delfau, c’est le rôle irremplaçable que joue désormais le Comité de liaison des Comités de bassin d’emploi.

 

Date : 15 avril 1997
Source : non mentionnée

Pour une économie solidaire par Jean-Pierre Soisson

Il y a cent ans, Léon Bourgeois, qui fut l’un des grands ministres du Travail de la IIIe République, présenta la doctrine radicale dans un petit livre qu’il publia en 1897 sous le titre de Solidarité.

Bourgeois cherche à faire aller ensemble le socialisme et le radicalisme individualiste, à définir une conciliation entre l’un et l’autre. Il n’admet pas un régime de liberté absolue de la concurrence, « qui permettrait à la puissance financière d’abuser de sa force ». Il y a chez lui la volonté de conduire le développement de l’économie et, du même pas, d’assurer la transformation de la société, le refus d’un capitalisme sauvage, qui prendrait aujourd’hui la forme de l’ultra-libéralisme.

Ses idées me paraissent toujours actuelles. Il faut à la France un projet politique qui allie modernisation économique et cohésion sociale, économie de marché et rapports nouveaux au sein de l’entreprise et de la collectivité, qui fonde une économie solidaire.

La France retrouve la voie de la croissance, mais celle d’une reprise sélective qui laisse sur le bas-côté de la route les jeunes sans qualification, les femmes sans travail, les chômeurs âgés. Notre société est de moins en moins homogène, de plus en plus fragmentée : elle connaît à la fois l’expansion et l’exclusion.

L’analyse de la situation de l’emploi en 1996 fait apparaître un accroissement d’environ 85 000 du nombre de chômeurs. Le développement de la précarité se confirme : le nombre des inscrits à l’ANPE, ayant travaillé plus de 78 heures dans le mois, a augmenté l’an dernier de près de 25 %. Les prévisions de l’INSEE pour 1997 laissent espérer une croissance du PIB de 2,5 %, mais font craindre une nouvelle augmentation du chômage, notamment de longue durée. Le taux de chômage à la fin du premier semestre pourrait atteindre 12,9 % de la population active.

La mondialisation des échanges et des mouvements de capitaux entraîne un accroissement des inégalités. Les titulaires de revenus non salariaux, rentes et profits, voient leurs revenus augmenter alors que les salariés enregistrent une baisse de leur pouvoir d’achat. De plus, l’économie internationale incite les pays à se spécialiser dans les productions qui utilisent de façon intensive les facteurs de production dont ils sont le mieux dotés. La mondialisation s’effectue ainsi, pour les pays d’Europe, au détriment des travailleurs les moins qualifiés et, dans les pays d’Asie, en faveur de ces derniers.

De plus en plus, les hommes sans travail et sans qualification sont laissés sur le bord du chemin. L’évolution des marchés et des techniques met en œuvre une dynamique profondément inégalitaire : elle appelle une réaction.

Car, plus la reprise fera sentir ses effets et plus grandira le sentiment de l’exclusion chez ceux qui n’en bénéficieront pas. Dans certains quartiers d’Auxerre, un jeune sur trois n’a pas de travail. Le retour à la création d’emplois doit se conjuguer avec une lutte renforcée contre l’exclusion.


Face à cette situation, quel regard peut-on porter sur la politique de l’emploi conduite en France depuis dix ans ?

Les mesures se sont multipliées et diversifiées sans grand résultat, qu’il s’agisse des actions de formation, de la mise en œuvre du revenu minimum d’insertion ou de la politique de la ville. La politique de l’emploi et de la formation professionnelle est marquée par une véritable sédimentation : les mesures mises en œuvre par les différents gouvernements se sont empilées les unes sur les autres, dans le temps où s’accroissait le cloisonnement des opérateurs. Le moment paraît venu de procéder à une remise à plat des aides publiques à l’emploi.

Cette idée a animé la commission d’enquête sur les aides à l’emploi, que l’Assemblée nationale a créée l’an dernier et qu’a présidée Michel Péricard, alors président de la commission des affaires sociales. Les conclusions du rapport, qui ont été rendues publiques en juin 1996, sont sans ambiguïté :

« Le système actuel est complexe, coûteux, souvent inefficace. La dispersion des acteurs, l’instabilité des mesures ne font qu’amplifier ce constat. »

Michel Péricard ajoute dans son propos d’introduction : « Le présent rapport n’est pas un réquisitoire. Personne n’a réussi, depuis vingt ans, à trouver les bonnes solutions. »

Il existe actuellement en France 48 dispositifs d’aides à l’emploi financés par le budget de l’État. Il en existe d’ailleurs 40 en Grande-Bretagne et 38 en Allemagne. Selon les calculs effectués par la commission d’enquête, la dépense publique pour l’emploi s’est élevée en 1994 à près de 300 milliards de France, soit 3,9 % du produit intérieur brut.

L’indemnisation du chômage représente 41,4 % de la dépense publique, les dispositifs de préretraite 10,1 % : ainsi, les dépenses passives d’indemnisation sont-elles supérieures aux dépenses actives de retour à l’emploi.

La politique de l’emploi est à bout de souffle. Une simplification et un recentrage sur quelques mesures me paraissent s’imposer.


Dans cette recherche d’une politique nouvelle, il me semble que pourrait être plus nettement distingués deux mondes : le monde de l’économie marchande, concurrentielle, ouverte sur l’extérieur, et le monde de l’économie sociale, fondée sur le réseau des missions locales, des maisons de l’information professionnelle, des associations intermédiaires et des entreprises d’insertion. Les solutions applicables à l’un ne peuvent servir à l’autre – et réciproquement.

Pour l’économie marchande, s’imposera de plus en plus une mesure simple d’allègement du coût du travail pour les emplois peu qualifiés, sous forme d’une exonération des cotisations d’allocations familiales et d’une réduction des cotisations patronales d’assurance maladie. Les deux dispositifs viennent d’être fusionnés : ils donnent son originalité à la politique française de l’emploi. Ils ont représenté en 1996 un montant d’aides publiques de 36,5 milliards de francs ; ils ont concerné cinq millions de salariés.

Mais, dans la lutte contre le chômage, l’approche du « tout entreprise », qui a été privilégiée au cours des dernières années, présente un double danger : celui de placer les entreprises devant des responsabilités de société qui ne correspondent ni à leurs moyens ni à leur vocation et, plus encore, celui d’occulter les problèmes de l’exclusion.

Tout ne peut être donné à la seule entreprise et au traitement économique du chômage ; je crois aux vertus d’un traitement social dont la mise en œuvre repose, pour l’essentiel, sur le réseau des collectivités locales et des associations. Ce réseau est celui de l’économie solidaire.

Dans une situation marquée à la fois par le retour de l’expansion et le développement du chômage de longue durée, la précarité doit être combattue par une politique renforcée de lutte contre l’exclusion. Au-delà des problèmes de pouvoir d’achat, se développe la crainte de la marginalité, se profile l’absence de statut social, s’affirme la perte de dignité et de légitimité. Il faut donner à nos concitoyens les plus fragilisés les moyens de prendre confiance en eux-mêmes grâce à un travail générateur de revenus, mais aussi créateur d’une nouvelle dignité.


L’Assemblée nationale commence aujourd’hui la discussion du projet de loi sur le renforcement de la cohésion sociale.

Dès son premier article, le projet proclame que « la lutte contre les exclusions sociales constitue un impératif national fondé sur le respect de l’égale dignité de tous les êtres humains ». Il ne crée pas un droit des exclus, mais il organise l’accès des exclus aux droits de tous, afin d’établir une meilleure égalité des chances. Il place au cœur des dispositifs d’insertion l’accès aux droits civiques et sociaux (articles 4 à 9), l’accès à l’emploi (articles 10 à 12), l’accès aux soins (articles 13 à 17), l’accès au logement (articles 18 à 26) et la lutte contre l’illettrisme (articles 27 à 31).

Il tend à transformer les dépenses passives d’indemnisation du chômage en dépenses actives d’insertion dans l’économie. À cette fin, il créé un nouveau contrat de travail, le contrat d’initiative locale, conclu pour cinq ans avec une aide de l’État, qui permettra aux allocataires du revenu minimum d’insertion, de l’allocation de solidarité spécifique et de l’allocation de parent isolé d’accéder à des emplois proposés par les associations et les collectivités locales. Un programme d’action gouvernementale, qui a fait l’objet d’une délibération du Conseil des ministres, fixe un objectif de réalisation de 300 000 contrats d’initiative locale en cinq ans.

Le projet de loi peut être amélioré – et il le sera. De nombreux amendements ont été déposés par les députés de la majorité et de l’opposition. Je souhaite que le Gouvernement laisse travailler l’Assemblée.

L’article 10 de la loi mérite d’être réécrit : il créé le contrat d’initiative locale sans définir son champ d’application, ni même le nommer pour des raisons qui tiennent à l’exonération, qu’il prévoit, des charges sociales. Il se fonde sur l’article L. 322-4-8-1 du Code du travail. Il s’inscrit ainsi dans la filiation des contrats emploi-solidarité et des contrats initiative-emploi.

Par ailleurs, une cohérence plus grande doit être trouvée, au niveau d’un département ou, dans les grands départements, d’un bassin d’emploi, entre les actions conduites par l’État, les collectivités territoriales, les institutions sociales et les associations.

Lorsque j’ai assuré en Bourgogne la décentralisation de la formation professionnelle en 1983, j’ai privilégié l’accès à une première qualification des jeunes dépourvus de toute formation : ils étaient trente mille dans la région. Rares sont ceux qui font spontanément la démarche de demander une mise à niveau : le déficit de formation est un handicap que l’on cache et que l’on reconnaît rarement comme tel. À supposer qu’on en ait conscience, l’idée de retourner à l’école n’est pas de celles qui font facilement leur chemin. D’où le pari de « l’expérience bourguignonne de formation » de mobiliser, dans les dix-huit bassins d’emploi de Bourgogne, les divers intervenants de la formation professionnelle. Ces bassins d’emploi sont devenus des bassins de formation, dans lesquels chaque jeune en difficulté peut avoir accès à un traitement particulier. Devenu ministre du Travail, je n’ai eu de cesse de condamner et de rejeter les « stages parking », dans lesquels on n’apprend rien et dont on sort plus désemparé encore : on a perçu une rémunération – souvent faible – et on n’a reçu aucune formation. À l’opposé de solutions plus faciles mises en œuvre pour réduire le nombre de chômeurs, j’ai toujours prôné une individualisation des formations qui permette à chacun de devenir acteur de sa propre formation.

La loi reprend et amplifie cette idée : l’article 12 du projet organise un itinéraire personnalité d’insertion professionnelle pour les jeunes de 16 à 25 ans sans emploi et confronté à un risque d’exclusion professionnelle ou sociale.

De plus, le projet renforce le soutien apporté par l’État au secteur de l’insertion par l’économique : associations intermédiaires et entreprises d’insertion.

La discussion du projet de loi au cours des prochains jours risque d’être passionnée. Je souhaite qu’elle marque un progrès dans la lutte contre l’exclusion.

Dans « Le Nouvel Âge des inégalités », Jean-Paul Fitoussi et Pierre Rosanvallon écrivent avec raison que la crise de société, que nous connaissons à la fin de ce siècle, est « en dernier ressort d’ordre structurel et relève d’une dimension anthropologique. Elle est à la fois crise de civilisation et crise de l’individu ».

Radicales ou utopistes, refondatrices ou critiques, les analyses développées au cours des dernières années cherchent, au-delà d’une approche économique souvent seule prise en compte, à formuler autrement les fondements de la société. Toutes se rejoignent dans une interrogation sur la valeur du travail.

Un tel débat est légitime : puissions-nous y participer et, nous éloignant des querelles d’écoles, apporter notre contribution à l’émergence d’une philosophie sociale dans laquelle les valeurs humanistes trouveraient à nouveau une place déterminante.

Je crois en un réformisme de la solidarité. Je crois aussi que nous devons repenser les objets et les méthodes de la réforme. Ce n’est pas en prônant un impossible réformisme de la dépense, comme aux temps de la forte expansion, que nous y parviendrons. Ce n’est pas non plus en remettant à l’ordre du jour un réformisme d’en haut gérer par les experts.

Je crois à l’action locale, au travail effectué à la base par la société sur elle-même, à la multiplication des centres de réflexion et de décision comme moteur de l’évolution sociale. Plus les échanges se diversifient, plus l’économie s’ouvre sur le monde et plus l’homme a besoin de trouver en ses racines la part d’identité qui le maintient debout. Il existe pour moi une complémentarité entre la nécessité du grand large et le désir, instinctif en chacun de nous, de préserver nos racines.


Jean-Pierre Soisson, ancien ministre, député-maire d’Auxerre, secrétaire général du Mouvement des Réformateurs

La majorité aura la majorité

À l’approche des élections législatives de 1978, j’avais appelé la majorité à réunir la majorité. Je souhaite aujourd’hui encore, avec la même conviction, que la majorité réunie autour de Jacques Chirac entraîne l’adhésion des Français. Seule celle-ci pourra répondre à leurs attentes, poursuivre et amplifier le projet réformateur que j’appelle de mes vœux.

Cette majorité doit cependant s’élargir et accepter en son sein une aile gauche qui s’attache à secourir ceux que notre société laisse sur le bas-côté de la route. Au-delà d’une charité trop souvent sélective, il importera à notre majorité ressourcée de renouer le lien social entre les Français, de replacer l’initiative au cœur des comportements.

C’est aussi ce à quoi nous aspirons, une société apaisée que rejoindront tous ceux dans la majorité ou à ses franges qui partagent notre idéal.

87 personnes ont répondu à cet appel, parmi lesquelles 4 sont candidats uniques de la majorité.

Vous trouverez ci-dessous la liste des candidats les plus représentatifs de notre mouvement susceptible de faire un excellent score et même d’être présents au deuxième tour :

Doubs (25) : 1re circonscription : Michel Helvas

Gard (30) : 3e circonscription : Gilbert Baumet (député sortant)

Indre (36) : 3e circonscription : Régis Blanchet

Isère (38) : 4e circonscription : Gérard Cardin

Loiret (45) : 3e circonscription : Philippe Clément

Moselle (57) : 4e circonscription : Aloyse Warhouver (député sortant)

Nièvre (58) : 1re circonscription : Jean-Claude Daguin

Nord (59) : 20e circonscription : Philippe Bardiaux

Bas-Rhin (68) : 3e circonscription : Alfred Muller (député sortant) ; 6e circonscription : Alain Ferry (député sortant)

Haut-Rhin (69) : 5e circonscription : Eric Schweitzer

Rhône (69) : 6e circonscription : André Vianès ; 2e circonscription : Herbert Axelrad ; 14e circonscription : Jean-Richard Sulzer

Var (83) : 2e circonscription : Didier Maïsto ; 3e circonscription : Jean-Claude Grosse ; 7e circonscription : Patrick Martinenq

Yonne (89) : 1re circonscription : Jean-Pierre Soisson (député sortant) ; 6e circonscription : Sophie Rochas ; 9e circonscription : Catherine Tripon ; 3e circonscription : Alain Lascary

Val-de-Marne (94) : 1re circonscription : Jacques Heurtault

Val-d’Oise (95) : 5e circonscription : Pierre Malet