Déclarations de M. Jean-Paul Roux, secrètaire général de la FEN, et Francis Carrié, secrétaire national de la FEN, notamment sur le processus de construction de l'UNSA, à Paris les 12 et 13 décembre 1997, parues dans "FEN Hebdo" du 22 décembre.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Session extraordinaire du conseil fédéral national de la FEN des 12 et 13 décembre 1997

Média : FEN Hebdo

Texte intégral

L’intervention de Jean-Paul Roux

L’enjeu de notre débat syndical

Nous ouvrons aujourd'hui une nouvelle étape de notre débat statutaire. Ce CFN - il est extraordinaire dans le sens où nous consacrerons la majeure partie de notre réflexion à cette question - sera tout à l'heure saisi des propositions de la commission des structures - en ce qui concerne la FEN - et du groupe de réflexion de l'UNSA - en ce qui concerne les évolutions de notre centrale. Ces propositions feront l’objet des rapports de Francis tout à l'heure.

Mais je voudrais au préalable lancer un appel et procéder à une brève analyse des élections professionnelles et prud'homales de ces derniers jours.

Notre devoir de mémoire

Demain matin à 8 heures, nous serons à la Crypte de la Sorbonne pour honorer la mémoire de nos collègues victimes de leur engagement contre le nazisme et le pétainisme. Cette tradition à laquelle nous sommes très attachés, car elle est ancrée au plus profond de nos convictions et de nos valeurs, se fait pour la première fois - hasard de calendrier - au cours d'un CFN, c'est-à-dire devant la représentation la plus large de l'organisation entre deux congrès. J'en suis très heureux et je souhaite réellement que nous participions tous à cette cérémonie simple, silencieuse, brève mais qui prend à cette époque un relief particulier.

Au moment où se déroule le procès Papon, où le fasciste Le Pen renouvelle ses provocations ignobles à propos des camps de concentration, nous avons, nous, éducateurs syndicalistes, plus que tout autre, obligation d'honorer notre devoir de mémoire. À demain matin 8 heures très précises. Je voudrais maintenant procéder à une brève analyse des élections qui se sont déroulées ces derniers jours.

Notre syndicalisme tient la route

Nous sommes pratiquement en campagne électorale permanente. Dans notre secteur d'abord. Entre octobre 97 et juin 98, ce sont près de 300 000 collègues qui ont été ou seront concernés. Tous les résultats confirment la bonne tenue de nos syndicats nationaux avec une loi d'airain : plus nous sommes présents, plus nous faisons de voix !

Le syndicat de l'administration et intendance dans les CAP de l’administration centrale conforte ses scores de 1994. À noter que dans la CAP des attachés, une coalition hétéroclite FO-CGT-CFTC perd 6,5 %.

Le SIEN se maintient sur la barre des 66 % (4 sièges sur 5). Il est donc le syndicat largement majoritaire, face à tous les autres. En face, le SGEN perd 3 points au profit de la FSU, la bipolarisation se confirme. Dans les CAPA, le SIEN obtient 3/4 des votes et 75 sièges sur 98.

Le SNPTES maintient aussi sa position de syndicat majoritaire avec plus de 51 % des voix bien que la FSU, qui n'avait présenté que deux listes sur 11 en 1994, en ait aligné cette fois ci 10. À noter que la participation passe de 50 à 58 %.

Le syndicat des enseignants confirme sa première place aux CAPA des PEGC dans 10 académies. Avec 38,24 % des voix progressant de 1,36 % face à toutes les autres organisations qui régressent.

Aux CAPA des corps de second degré des académies en Guadeloupe, Guyane et Martinique, académie nouvelle, le syndicat des enseignants progresse dans tous les corps. Sur l’ensemble des enseignements scolaires, il est désormais majoritaire dans les trois académies.

Aux CAP des adjoints d'enseignement et des chargés d'enseignement - chasse gardée de la FSU - le syndicat progresse de 1,25 % au niveau national et de 4,41 % au niveau des CAPA.

Aux commissions paritaires consultatives des Ml-SE, présents pour la première fois dans 28 académies sur 30, le syndicat progresse de plus de 5 %.

Je voudrais relever tout particulièrement notre présence dam les IUFM. Nous avons mis en place à la rentrée une stratégie - la FEN y a contribué en termes de moyens - qui porte désormais ses fruits. Dans le collège des usagers, sur 21 IUFM, le syndicat des enseignants obtient 32 sièges soit une progression de 5 sièges. La FSU en perd 5 et la CFDT 3. La bipolarisation FEN-FSU s'accentue dans le cadre d'une forte progression de la participation. Cette bataille (qui est annuelle) et la bataille de l'avenir, elle se situe au cœur de notre secteur de syndicalisation. Son enjeu dépasse la seule représentativité du syndicat des enseignants, elle est un enjeu pour l'avenir de toute la fédération.

D'autres échéances approchent.

La semaine prochaine, nous aurons le résultat du référendum au ministère de la culture où les syndicats de la FEN et de la FGAF se sont présentés ensemble sous la bannière de l'UNSA.

En mars 1998, les élections au sein du personnel ATOSS concernent le SNAEN, le syndicat de l'administration et de l’intendance et le SNASEN. La bataille là aussi est déjà engagée. La FEN y participe au travers du 8 pages qui est paru dans le précédent FEN-ACTUALITES, un 4 pages figurera dans celui de février 98 et une émission d'expression directe sera consacrée à ces personnels, si le tirage au sort des dates au CSA le permet.

En mai, ce sont tous les personnels hors de France de I'Agence et en coopération qui seront consultés.

Au cours de la même période, sera renouvelé le CNESER dans l'enseignement supérieur.

Chacune de ces élections passées ou à venir engage la FEN tout entière.

Je viens de parler de la FEN, notre représentativité conforte bien entendu celle de l'UNSA dans les fonctions publiques. Mais l'UNSA vient de mener une bataille cruciale dans le secteur privé. C'est un secteur en devenir où se joue l'émergence de notre centrale. Il est encore trop tôt pour faire une analyse fine de ces élections dont nous avons comptabilisé les résultats au cours de l'avant-dernière nuit.

Néanmoins, quelques constats s'imposent :

L'accroissement du taux d'abstention me paraît particulièrement inquiétant même s'il faut tempérer cette remarque de la présence pour la première fois de secteurs traditionnellement peu mobilisables.

Le score du Front national - 2,2 % - est exorbitant et inquiétant. Certes, les comparaisons ne sont pas raisons puisqu’il faut les mettre en relation avec l'importance numérique des collèges où les listes sont présentées. Néanmoins, le ver est dans le fruit. Cela nous interroge tous et devrait conduire à la réflexion, les confédérations traditionnelles.

Dans le secteur des confédérations, se dégage une stabilité d'ensemble. Une hausse significative néanmoins de la CFDT qui se compense des pertes de la CFTC et de la CGC. La CFDT est désormais la première organisation de l'encadrement. La CGT et FO restent stables mais Blondel connaît un échec personnel car la liste qu'il menait sur Paris est au-dessous de la barre des 10 % et perd 3 %. En ce qui concerne l'UNSA, le premier succès est d'avoir pu présenter plus du double des listes que nous avions escomptées.

Un travail militant remarquable a eu lieu sur le terrain en liaison étroite avec l'équipe nationale de l'UNSA. Je tiens à saluer ici ce travail.

Globalement, présents sur un nombre restreint de secteurs, nous recueillons 0,7 % des voix alors que le groupe des « 10 » n'en recueille que 0,4 %. À titre de comparaison, les composantes de l'UNSA, il y a 5 ans, s'étaient présentées au sein du groupe des « 10 ». On peut estimer en pourcentage que nos amis représentaient à l'époque environ 0,3 %. Sous la bannière de l'UNSA, ils ont donc fait plus que doubler leur représentativité. La comparaison en nombre de sièges sera importante.

D'ores et déjà, nous pouvons dire que cet ensemble de résultats devrait faire bouger les choses.

Voilà donc un enchaînement tout trouvé pour aborder l'enjeu syndical de notre débat statutaire d'aujourd'hui.

L’enjeu de notre débat syndical

Statutairement pour la FEN, les choses ont déjà été largement cernées lors du CFN de septembre. Il nous faut donc procéder aux derniers ajustements pour mandater clairement la commission des structures. Il appartiendra à celle-ci de rédiger - y compris de façon alternative - les propositions qui seront soumises au congrès. Pour l'UNSA, la réflexion du groupe de travail n'est pas encore terminée. Nous ne sommes pas seuls sur ce terrain. Les organisations qui constituent l'UNSA sont suffisamment diverses, hétérogènes pour que nous prenions le temps, jusqu'à la mi-février, d'arrêter les dernières propositions qui seront soumises au congrès.

Mais dès aujourd'hui, les grands enjeux sont désormais cernés, les propositions essentielles formulées. Nous devons en débattre afin de mandater nos représentants à la commission. Ce mandat ne peut être impératif. Il faut encore laisser la place aux ajustements donc aux compromis avec nos partenaires au sein de l'UNSA. Ce sera donc un mandat d'orientation. L'objectif est bien de franchir tous ensemble cette étape de notre évolution afin d'être plus nombreux après qu'avant et non l'inverse !

Là encore, à terme le congrès tranchera souverainement afin que - pour reprendre une formule de notre CFN de septembre - nous soyons « clairement mandatés dans la FEN pour la FEN, dans la FEN pour l'UNSA ». Mise en œuvre de notre processus de refondation dans l'année qui vient avions-nous dit à Rennes ?

Le pari sera tenu. Du moins sera-t-il tenu en ce qui concerne les structures. Il nous reste à faire émerger, sur le terrain, cette organisation à la fois jeune et enracinée dans l'histoire. Nos évolutions statutaires ne prennent de sens que mises en perspective de notre ambition pour le syndicalisme français en France et en Europe.

Je voudrais donc rappeler cet objectif. Il ressort clairement de nos textes de congrès : congrès de Clermont-Ferrand en 1991, congrès de Perpignan en 1992, congrès de Tours en 1994 et enfin congrès de Rennes, c'était hier.

Un objectif constant.

Nous poursuivions un objectif : « constituer, au plan confédéral, une organisation syndicale réformiste avec tous ceux qui dans les confédérations, fédérations, syndicats partageaient cette orientation syndicale et les valeurs de laïcité, de solidarité, de progrès social, d'humanisme et de défense des droits de l’Homme.

L'UNSA était donc une étape au service d'un objectif plus large. L'objectif n'a pas changé. Mais l'étape prend aujourd'hui une dimension nouvelle. Dans 2 mois, l'UNSA aura 5 ans.

C’est peu au regard de l'histoire des organisations syndicales françaises. C'est beaucoup si l'on considère le chemin parcouru pendant ces 5 années.

Le moment est propice, aujourd'hui alors que les choses bougent dans le syndicalisme français, pour faire le point.

En février 1993, nous avons contribué à rassembler au sein de l'UNSA des organisations, jusqu'alors éparses dans le syndicalisme autonome « sur la base de valeurs communes et d'une conception réformiste du syndicalisme ».

Une construction par étapes.

En 5 ans, l'UNSA a changé. Elle a grandi. Elle est devenue la quatrième organisation syndicale française derrière la CGT, la CFDT et FO. Le Conseil d'État, par une décision en date du 14 novembre 1997 vient de déclarer que l'UNSA « peut-être regardée comme représentative des salariés ». Après sa reconnaissance par le Premier ministre en juillet 1994, c'est un pas de plus.

Onze organisations nouvelles sont venues rejoindre les 5 organisations constitutives de l'Union, puis suivies très vite par trois autres. En tout, près de 8 000 adhérents supplémentaires. Pour l'essentiel, des syndicats du secteur privé qui adhèrent à noire démarche, à nos pratiques et à notre conception du syndicalisme.

Cette première étape de renforcement de l'Union prouve que nous sommes attractifs, qu'on se tourne vers nous, que notre démarche intéresse et que nous sommes désormais, nous l'UNSA, modestement mais réellement un point de repère.

Dans les confédérations, les choses bougent aussi. Des militants s'interrogent dans la CGT sur le rôle du syndicat : force de contestation exclusivement ou force de proposition aussi ? La CGT n'est plus le bloc monolithique qu'elle fut même si aujourd'hui la ligne traditionnelle reste bien ancrée dans l'orientation de l’organisation. Dans les derniers mois, l'UNSA a d'ailleurs rencontré la CGT à plusieurs reprises.

Depuis longtemps, le dialogue et la discussion sont engagés avec ceux que nous appelons « nos amis dans FO » qui ne se reconnaissent plus dans la ligne tracée par Blondel. Cette ligne, ce discours, ce langage sont en rupture totale avec l'histoire de Force ouvrière, dont les valeurs et l'orientation syndicale, sont proches des nôtres, issues de la même origine.

Des fractures internes se dessinent de plus en plus précisément. Ceux qui dans FO, veulent maintenir le cap d'un syndicalisme responsable, se tournent vers nous ; il faut répondre présents. Nous en avons discuté ici même à plusieurs reprises.

Il faut nous tenir prêts à assurer, à assumer une nouvelle étape, dont personne ne connaît aujourd'hui pleinement le calendrier ni l'ampleur mais dont chacun mesure bien l'importance pour les organisations syndicales concernées, certes, mais surtout pour les salariés de ce pays. Un premier signe concret vient d'être donné par nos camarades dans la fédération FO de la SNCF. Plusieurs centaines de militants viennent de la quitter. Ils demandent leur adhésion à l'UNSA et veulent constituer avec nos camarades de la FMC une organisation « cheminote » couvrant l'ensemble du champ de l'encadrement et de l'exploitation.

Une nouvelle étape

S'ouvre donc une nouvelle étape, une étape de plus vers l'objectif que nous nous sommes fixés : une centrale syndicale pluraliste qui rassemble le syndicalisme responsable de ce pays. Chaque étape est nécessaire, aucune n'est une fin en soi. Aucune ne doit être un obstacle à la poursuite de notre démarche vers l'objectif.

Notre démarche est désormais connue, elle est reconnue, elle intéresse des militantes et des militants d'autres organisations. J'ai parlé tout à l'heure de la CGT. Personne ne s'étonnera qu'un certain nombre de ceux qui s'y sentent mal à l'aise regardent avec intérêt nos initiatives.

Notre démarche commence aussi à être connue dans l'opinion publique. Un article de presse du « Canard Enchaîné » fait état de nos contacta réguliers avec nos amis dans Force ouvrière et aussi de discussions avec la CFE-CGC.

Des militants et des responsables de cette organisation s’interrogent aujourd'hui, comme tous ceux qui se sentent concernés par la situation du syndicalisme français et sa nécessaire évolution, Eux aussi, se tournant vers l'UNSA pour débattre.

Quant à la CGC elle-même, son communiqué du 3 décembre dernier précisait qu’elle « se préoccupe de l’évolution de l’offre syndicale au passage du siècle ». Nous aussi. La CGC vient de confirmer cette position lors de sa déclaration de la nuit de prud’homales puisque son secrétaire général a lancé un appel à une « redéfinition syndicale » qui passerait par une réflexion avec d’autres organisations dont « l’UNSA par exemple ». Cette « redéfinition » vaut « pour l’encadrement » mais aussi « pour l’ensemble des salariés », a-t-il précisé.

Nous sommes ouverts à la discussion et à la réflexion avec tous ceux qui, préoccupés par la situation d’un syndicalisme français en position de faiblesse dans l’Europe qui se construit, veulent améliorer sa représentativité, sa capacité d’intervention, de proposition et d’action.

La CFE-CGC est un partenaire avec lequel nous travaillons depuis longtemps dans la fonction publique.

Certes, au plan général, des désaccords existent sur nombre de sujets.

Nous en sommes, à ce jour, à discuter ensemble, à analyser les évolutions possibles.

Pour constituer cette centrale syndicale responsable qui est notre objectif, il faudra rassembler des forces dans leurs diversités.

Pour constituer cette centrale syndicale responsable qui est notre objectif, il faudra rassembler des forces dans leurs diversités.

Cette organisation nouvelle sera pluraliste. Elle devra être cohérente.

Pluraliste car regroupant des salariés d’horizon divers venus d’organisations différentes.

Cohérente car rassemblée sur des valeurs incontournables qui seront le dénominateur commun, d’une organisation identifiée clairement dans le camp du progrès social et de l’Humanisme, celles qui fondent le pacte républicain.

Les évènements nous poussent d’ailleurs à ne pas baisser la garde au moment où des thèses d’exclusion, de racisme et de xénophobie veulent pénétrer le mouvement syndical.

L’objectif demeure

Dans les relations sociales aujourd’hui, la CFDT est une organisation incontournable.

Elle est en terme d’adhérents la première organisation syndicale du pays. Elle démontre au fil du temps sa capacité de négociation, sa capacité d’action et de syndicalisme de terrain.

Elle démontre aussi sa capacité à assumer la défense de l’intérêt général et celle des intérêts particuliers des salariés. Deux exemples récents :
    - sa capacité d’action et de négociation dans le conflit des routiers ;
    - sa capacité de mobilisation pour l’emploi à Luxembourg où nous étions aussi.

Elle est aujourd’hui – nous le disions au CFN de septembre – au centre du jeu social.

Elle est pour nous depuis un certain nombre d’années le partenaire privilégié. La première, elle a reconnu l’UNSA comme organisation à part entière dès sa constitution.

Tant dans la fonction publique, qu’au sein du « Comité de Vigilance de la défense de la sécurité sociale », que sur le terrain des libertés et des Droits de l’Homme, nos analyses et prises de position convergent.

Nos objectifs à terme convergent aussi. Nous ne pourrons pas aboutir, nous sans elle, et, de plus en plus, dans un certain nombre de secteurs, elle, sans nous. C'est pourquoi, il faut veiller à ce que chaque étape que nous franchirons ne constitue ni un frein ni un blocage dans nos relations. L'unité du syndicalisme responsable ne peut se réaliser d'un coup, l'objectif reste le même mais pour qu'il puisse être atteint, nous agissons avec pragmatisme et pratiquons par étape. Nous sommes convaincus que nous sommes ceux qui sont en capacité de jeter les ponts nécessaires entre les différents partenaires pour parvenir à cet objectif.

L'UNSA, renforcée, devra donc développer avec la CFDT une stratégie de coopération sur les grands dossiers de la compétence de notre Union.

Voilà le point de la situation aujourd'hui pour « planter le décor » du débat sur notre avenir et celui de l'UNSA par le biais de nos réformes statutaires. Car les statuts et les structures sont au service du projet syndical et non l'inverse.

Notre orientation pour l'évolution du syndicalisme français est une ligne droite mais la ligne droite est ponctuée d'étapes. Des étapes qui ne sont pas des pauses mais des moments où l'on prend des forces nouvelles pour atteindre le but plus fort et plus performant.

Un mot pour conclure

Une correspondance en provenance d'Italie nous apprend que le 8 février prochain marquera une étape importante dans l'histoire des trois grandes centrales italiennes : la CGIL, la CISL et l'UIL. À l'occasion du congrès de cette dernière sera annoncée la mise en place d'une commission chargée de rédiger le statut d'une future centrale unitaire qui rassemblerait sous une même bannière les 11 millions de membres de ces trois organisations.

Ainsi après une longue période d'étroite coopération sur le terrain, les trois centrales, qui toutes pratiquent un syndicalisme responsable, vont tenter de franchir ensemble l'étape ultime de leur unification. Réussiront-elles ? L'avenir le dira. Mais après tout, on ne perd jamais que les combats qu'on ne mène pas. Serons-nous moins bons que nos camarades italiens ?

Allocution de Francis Carrié

Rapport complémentaire (F. Carrié)

L'UNSA doit évoluer, mais il faut que toutes les composantes actuelles se retrouvent dans l'UNSA après le congrès. Il ne servirait donc à rien de vouloir contraindre et ainsi prendre le risque que certains ne suivent pas.

Des réalités incontournables

Les modifications doivent être proposées puis votées par les composantes actuelles. Mais, pour que des propositions de modifications statutaires puissent être mises en débat, il faut qu'elles soient proposées les deux tiers de l'exécutif soit 20 sur 29. Dans cet exécutif, la FEN dispose de 7 voix. Le groupe de travail UNSA a recherché un consensus basé sur la conviction et non sur la contrainte. Il faut en outre que l'UNSA puisse également accueillir d'autres syndicats qui le souhaiteraient.

Notre objectif est clair :
    - construire une organisation interprofessionnelle ;
    - concevoir un fonctionnement simple et original permettant à chacun de conserver son identité ;
    - proposer des instances représentatives sans être pour autant hypertrophiées.

Il faut également avoir présent à l’esprit que dans une organisation interprofessionnelle, on peut rapidement avoir plusieurs centaines de syndicats d'entreprises qui demandent à adhérer.

La totalité des organisations adhérentes de l’UNSA doivent être présentes au congrès, ce qui signifie, obligatoirement, plusieurs centaines de délégués.

Sauf à considérer que le Conseil national et le Bureau national regroupent plusieurs centaines de délégués, il est indispensable de prévoir des regroupements.

Nous proposons que ces regroupements s'effectuent par grands secteurs d'activité que nous avons pour l'instant appelés « pôles d'activité ». Ces pôles doivent permettre une représentation, selon des modalités à définir, des organisations syndicales au Conseil national et au Bureau national.

Ils doivent être aussi des lieux de rencontre, des lieux fonctionnels, permettant ainsi que les sensibilités des différents secteurs d'activité puissent s'exprimer dans toutes les instances. Il faut également que l'UNSA s'organise au plan interprofessionnel au travers des structures territoriales : unions régionales, unions départementales, unions locales si nécessaire. Toutes les unions régionales doivent être présentes au congrès et au Conseil national.

On peut s'interroger sur la présence de toutes les UR en tant que titulaires au Bureau national ou bien présence d'une partie des UR titulaires et les autres suppléantes.

Proposition d’organisation et de fonctionnement

Adhésions : fédérations et syndicats non fédérés.

Organisation générale :
    - au plan professionnel : les pôles d'activité ;
    - au plan interprofessionnel : les structures territoriales ;
    - au plan transversal : les regroupements (retraités, fonctionnaires, ingénieurs et cadres).

Instances

Congrès :
    - représentants des organisations adhérentes ;
    - représentants des unions régionales ;
    - représentants des regroupements transversaux avec voix consultative ;
    - membres du bureau ou du conseil (en débat).

Conseil national :
    - représentants des pôles ;
    - représentants des UR ;
    - secrétariat national ;
    - regroupements transversaux avec voix consultative.

Bureau national : Même principe de composition que le conseil national.

Secrétariat national : 10 à 12 membres : élus.

L’UNSA et ses évolutions

Le Conseil fédéral national a consacré une matinée à débattre des propositions de la FEN pour le devenir de l'UNSA : statuts - vie au plan local - évolutions possibles.

Elections prud’homales

Les premiers résultats connus des prud'homales montrent une forte mobilisation des militants de l'UNSA et parmi eux des militants de la FEN : l'UNSA obtiendrait au moins 25 conseillers prud'homaux et ferait plus en pourcentage que ne faisaient ses composantes, en 92, sous leur propre étiquette.

Statuts de l’UNSA

La représentation de toutes les Unions régionales au Bureau national de l'UNSA est une demande forte.
Il faut donc intégrer cette demande dans une discussion où la FEN n'est pas seule à décider.
Au plan local, l'UNSA pourrait être organisée en Unions régionales, départementales, locales, mais avec nécessité de laisser au terrain une large liberté pour trouver les modes d'organisation les plus pertinents en fonction du contexte local.

Les valeurs

Nombre d'intervenants ont tenu à rappeler qu'il n'était pas de syndicalisme sans valeurs. Ces valeurs doivent constituer des références pour les adhérents des composantes de l'UNSA.
Ceux-ci sont divers, de par leur origine, leurs responsabilités, leurs secteurs d'activité.

L’UNSA : évolutions futures

Chacun s'est accordé pour dire que l'UNSA a un rôle essentiel pour faire émerger dans le pays un syndicalisme de transformation sociale avec tous ceux qui le souhaitent : non-syndiqués, militants d'autres organisations qui partagent nos conceptions du syndicalisme, organisations syndicales qui veulent faire prévaloir un syndicalisme de construction, de proposition et d'action, fondé sur des valeurs.

Pour un fonctionnement plus dynamique de la FEN

Le Conseil national a discuté des propositions que la commission des structures aura à rédiger, à formuler et qui seront soumises au Bureau fédéral. Ces modifications des statuts et du règlement intérieur seront ensuite soumises à toutes les composantes de la FEN et discutées dans les congrès départementaux. C’est le congrès national qui décidera.

Lors des conseils fédéraux de juin et de septembre, certaines propositions avaient fait l'objet d’un vote indicatif afin d'arriver au congrès extraordinaire avec des propositions alternatives, si nécessaire.

Les grandes indications données par les précédentes instances ont été traduites concrètement de façon rédactionnelle.

Quelques questions appellent néanmoins des réponses.

Adhésion à l’UNSA

Notre affiliation à l'UNSA sera introduite dans les nouveaux statuts.

Réunion des instances

Leurs réunions se tiendront aussi souvent que la situation l'exigera en évitant de prévoir un nombre figé de réunions et en permettant toute adaptation en fonction du contexte.

Composition du BFN et du CFN

Le CFN et le BFN conservent leur rôle et leurs missions. La seule modification concerne leur composition qui augmente le nombre de composantes sans pour autant accroître le nombre de participants.

Il existe des transferts de responsabilités entre nos instances, en particulier du CFN vers le BFN, liés d'une part à la périodicité des réunions et d'autre part, à la composition du BFN où seront présents tous les syndicats nationaux et toutes les régions.

Le Secrétariat national sera une équipe élue sur un projet de fonctionnement. Chaque membre du Secrétariat national aura l'agrément de son SN.

Résolution générale

Son système d'élaboration est à simplifier, il était trop lourd. Il faut que l'avant-projet soit l'émanation d'une instance pour être soumis au débat. Il appartiendra donc au BFN d’établir cet avant-projet et de définir la méthodologie la plus efficace et la plus cohérente pour coller au plus près à notre fonctionnement.

Instances territoriales

Les trois niveaux de fonctionnement, régional, départemental, local, doivent continuer d’exister. Il faut, par contre, mieux les articuler en imaginant des fonctionnements souples, adaptés à la réalité du terrain, débarrassés des formalismes.

Préparation du congrès

Les 2 niveaux, départemental et régional doivent être concernés par la préparation du congrès national. Il faut définir un système qui permette l’expression des niveaux départemental et régional.
Les mandats pourraient être attribués à la région, en fonction de ses effectifs et ensuite transformés en mandats régionaux répartis entre les sections départementales et les syndicats nationaux présents dans la région. Il convient donc de formaliser cette proposition afin de pouvoir la discuter dans le cadre de la commission des structures.

Intervention de Jean-Paul Roux au débat général

Point de la situation

Au terme de ce premier trimestre de l'année scolaire, je souhaite que nous mettions en perspective de notre analyse les rendez-vous qui nous attendent à partir de début janvier.

Quel contexte économique et social ? Quel contexte politique ? Quelle stratégie du gouvernement ? Quelle démarche revendicative de la Fédération ?

Nous avons hier largement analysé la situation syndicale de notre pays. Nous l'avons fait lucidement et avec ambition :
    - l'ambition que nous plaçons dans l'UNSA, dans son devenir, pôle de rassemblement pour une nouvelle étape vers l'unité du mouvement syndical responsable, pôle d'une coopération renforcée avec ceux qui partagent notre volonté ;
    - l'ambition que nous mettons dans la FEN, dans sa refondation largement avancée, dans sa capacité à être le pivot de cette émergence nouvelle de l'UNSA.

Appel à la raison !

Car l'urgence est extrême. L'école a perdu sa boussole, elle s'étiole des conservatismes conjugués du ministre Bayrou et d'une fédération concurrente aujourd'hui profondément secouée par une crise interne qui participe autant des contradictions de sa naissance que de la nature ambiguë dans ses rapports avec le précédent ministre.

Les personnels, désorientés par certaines méthodes de leurs ministres, leurs provocations, indisposés par ce « tout médiatique » et les dérives populistes qui peuvent en résulter, incrédules face à une activité brouillonne, une avalanche d'initiatives qui tue l'initiative et rend opaques les choix de priorité et les orientations, les personnels s'interrogent tentés par les replis frileux ou les sirènes de la démagogie conservatrice. Ainsi les choix fondamentaux qui sont bons - répétons-le -, qui prennent appui sur ce que nous proposons quelquefois depuis 10 ans, sont-ils en passe d'être noyés sous cette activité désordonnée qui pourrait passer pour une fuite en avant. L'immobilisme conservateur des années précédentes n'a-t-il pas fait prendre au système éducatif un retard lourd de conséquence ? Certes oui ! Raison de plus pour ne pas se disperser, pour faire émerger les urgences, les choix de priorité, pour mobiliser sur une orientation identifiable.

Il serait dramatique que deux stratégies radicalement différentes, celle de Bayrou, le conservateur apathique, et celle d'Allègre le progressiste boulimique, aboutissent au même résultat : ancrer l'Ecole dans l'immobilisme qui ne serait en fait qu'un recul permanent.

On voit comment les syndicats conservateurs s'engouffrent dans la brèche. La FSU ressoude ainsi artificiellement une unité improbable par la bonne vieille grève de 24 heures « fourre-tout », comme au bon vieux temps !

Que les ministres arrêtent de jouer aux apprentis sorciers au risque de fédérer tous les mécontentements.

Ces inquiétudes, ces critiques de méthode, je propose que nous les exprimions aujourd'hui, c'est l'objet du texte qui vous est proposé.

Et si nous revenions aux choses sérieuses ! L'avenir de l'école par exemple, le travail fourni depuis le mois de juin dans les concertations ouvertes avec les ministres sur quelques sujets prioritaires qui, assurément, constitueront un test décisif pour le gouvernement.

Nous avons demandé une audience au Premier ministre pour le mois de janvier :
    - la réflexion qui s'ouvre sur le lycée ;
    - les conclusions à venir de la commission Pair sur la démocratisation du système éducatif ;
    - l'application du plan Soulas ;
    - la négociation sur le plan social étudiant.

Par ailleurs dans certains secteurs, les tensions sont grandes, vous le direz tout à l'heure. Je n'en donnerai qu'un exemple, car il est significatif par son ampleur : la question de l'intégration des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles. Sur ce dernier sujet comme sur tous les autres, qui concernent directement les syndicats nationaux, la FEN apportera un soutien sans faille.

L’évolution de l’emploi et du chômage à l’horizon de la fin 1998

Le maintien d’un rythme soutenu d'augmentation de la productivité du travail et l'existence d'un sous-emploi important des actifs occupés expliquent la faible croissance de l'emploi malgré le retour de la croissance. Toutefois, la poursuite de celle-ci pourrait entraîner une accélération de l'emploi en fin d'année compte tenu de la flexibilisation croissante du marché du travail et du recours fréquent aux formes précaires d'emplois. Compte tenu de la forte croissance de la population active, cela ne permettrait qu'une stabilisation du chômage. Les prévisions d'augmentation de l'emploi dans le secteur privé, s'appuient sur un scénario d'accélération de la demande interne, de l'investissement des entreprises et de la consommation des ménages. Toutefois, la crise asiatique, - j'y reviendrai tout à l'heure - le risque de baisse du dollar, l'intensification de la concurrence en Europe et les frilosités suscitées par le passage aux 35 heures pourraient freiner l'investissement productif. Dans ce domaine, la stratégie actuelle du patronat pèsera sur l'avenir. Certes, on aimerait croire que les élections à la présidence du CNPF passées, le baron Ernest-Antoine Seillière reviendra à un langage... républicain car ses propos sur la déstabilisation du Premier ministre pourrait passer, de la part d'une organisation professionnelle, pour séditieux ! Mais ces propos de tribune en disent long sur l'état d'esprit du patronat français, que ledit baron caresse dans le sens du poil. Le conflit des routiers a été éclairant à ce sujet ! Éclairant aussi sur l'état d'un certain syndicalisme ! Par contre, la CFDT a fait la preuve de sa capacité à mobiliser et à aboutir par la négociation. Une belle démonstration dans un secteur professionnel où le syndicalisme est globalement ultra minoritaire.

La progression de la précarité de l'emploi associée à celle de la proportion des salariés faiblement rémunérés pourraient minorer la croissance de la consommation. Une croissance moins dynamique que prévue n'est donc pas à exclure qui freinerait d'autant l'ampleur attendue des créations d’emplois. La mise en œuvre du plan emploi-jeunes est conforme aux engagements pris. Mais la question de la pérennisation, à terme, des nouvelles fonctions et activités ainsi pourvues reste entièrement posée comme demeure posée, dans l'attente de l'examen du projet de loi et des négociations qui devraient s'en suivre, la question centrale des 35 heures - dont la fonction publique ne peut être exclue - et du nombre d'emplois qui seront réellement créés.

L'effet positif de ces mesures s'amplifiera d'autant plus que la croissance sera forte et durable et si elle s'accompagne d'une profonde réorganisation du temps de travail. C'est en effet la clé d'une redistribution des revenus et du temps de travail mutuellement avantageuse pour les salariés en place et les chômeurs.

Crise asiatique : quels risques d’effets en Europe ?

J'évoquais tout à l'heure la crise asiatique et ses conséquences en Europe. Il y aura peu d'effets à court terme, mais des effets indirects à plus long terme sont à craindre.

D'où l'importance de la construction européenne - par la création de l'Euro en particulier. D'où l'urgence surtout d'un véritable projet social européen. Les mouvements erratiques de capitaux, la plupart du temps spéculatifs, en l'absence d'un système monétaire mondial régulé continuent à mettre en péril les économies surtout les plus fragiles. Ils rejettent dans la misère des parties importantes des populations qui ne profitaient déjà que peu du « miracle économique » des pays asiatiques dits « émergents ».

Sommet de Luxembourg : esquisse d’une Europe sociale

Une méthode nouvelle en matière de politique européenne de l’emploi est-elle en train de naître ? Fixer un cadre d'actions au niveau européen ; laisser les pays prendre les dispositions d'application nécessaires au plan national. Ni sanctions ni mesures contraignantes, seulement des « recommandations » en cas de « manquements ».

Des 4 objectifs fixés à Luxembourg, seule la formation des chômeurs comporte un engagement chiffré. L'introduction de souplesse dans l'organisation du travail doit être négociée et favoriser la création d'emplois. La prise en charge par le budget communautaire de la recherche-développement et des grandes infrastructures représente un progrès vers le développement durable concerté. Elle ne remplace pas l'instauration d'une véritable politique industrielle.

Les aides communautaires accordées aux entreprises, soit par les États, soit directement par l'Union, doivent être conditionnelles notamment vis-à-vis de l'emploi et surtout contrôlées : le non-respect des directives doit être sanctionné.

Les propositions progressistes du Parlement européen doivent trouver un écho pour contrebalancer les dispositifs essentiellement monétaristes et libéraux de la Commission.

Nous réclamons qu'au-delà de l'esquisse tracée à Luxembourg on sorte de la langue de bois et que l'Europe parvienne à des solutions tangibles contre l'exclusion sous toutes ses formes.

Les enjeux dans la fonction publique

Les négociations salariales devraient s'ouvrir au début du mois de janvier. Je dis « devrais » car le gouvernement n'a pas définitivement fixé son « entrée » dans la négociation. Les conditions de l'ouverture sont désormais réunies puisque le préalable sur la possibilité de discuter de l'apurement de 1996 a été levé. Nous sommes en train depuis le début décembre de caler les choses tant en direction du gouvernement (Premier ministre, ministre de l’économie et des finances, ministre de la fonction publique) qu’en direction des « décideurs » politiques en particulier du Parlement. Vous y avez participé auprès des députés et sénateurs de vos départements. Nous tentons aussi de faire l'unité revendicative entre les fédérations. Sur ce terrain, elle est en bonne voie entre les « 4 » fédérations, elle est complète avec la CFDT, et toujours aléatoire – un jour oui, un jour non – avec les fonctionnaires FO.

Quant à nous, nous sommes au clair. Nous demandons :
    - l'apurement du contentieux de 1996 sous forme de 6 points indiciaires uniformes pour tous ;
    - le maintien du pouvoir d'achat en niveau en 1997, en 1998, voire 1999, si cette année fait partie de la négociation ;
    - une revalorisation significative du bas de la grille qui mette indiciairement au-dessus du SMIC et de façon durable le minimum de rémunérations avec la répercussion sur les échelons supérieurs ;
    - la prorogation du CFA en 1999 (sa prorogation er 1998 est acquise) et son amélioration. Nous demandons également l'amélioration de la CPA ;
    - la poursuite en 1999 de l'effort pour l'action sociale interministérielle prévue pour 1998.

Reste la question de la réduction du temps de travail. Que le gouvernement ne compte pas sur nous pour la passer par profits et pertes. Certes, la question dans la fonction publique est délicate, complexe, en particulier dans beaucoup de secteurs que nous représentons. Il n'est donc pas indispensable que nous jouions les premiers violons du bal ! Mais nous souhaitons que l'engagement de calendrier et de méthode soit discuté dans le cadre de la négociation salariale.

La proposition du ministre de nommer une personnalité chargée de faire l’inventaire des situations – ô combien diverses – est une bonne idée à condition qu’elle ne serve pas de prétexte à enterrer le dossier. On ne nous fera pas une nouvelle fois le coup du rapport Blanchard ! Nous voulons une discussion qui allie réduction du temps de travail et son aménagement, nous voulons que cette opération soit génératrice d’emplois publics. Les emplois-jeunes ne peuvent s’y substituer. À bon entendeur salut !

Les questions de société

Bien entendu, nous ne ferons pas ici le tour exhaustif de ces questions.

Mais je ne peux pas ouvrir ce dossier sans dire ici l’indignation que suscite à nouveau auprès de nous, c'est-à-dire auprès de tous nos adhérents, les propos ignobles - qui ne sont qu'une récidive - de Le Pen. En renvoyant une fois de plus l'horreur des camps de concentration, crimes contre l’humanité entre tous, au rang des points de détail de l'histoire, il s'affirme une fois de plus comme le leader d'un néofascisme à la française. Qu'une certaine droite se complaise à envisager quelques alliances électorales que ce soient en dit long sur l'état de décomposition avancée dans lequel se trouve l’ancienne majorité. Répétons-le sans cesse, dans ce travail incessant, toujours recommencé contre ces idées, notre rôle d’éducateur est central. Je vous invite à vous mobiliser sans relâche.

Dans notre pays, l’Assemblée nationale a adopté une nouvelle loi sur la nationalité. Désormais, tout enfant né de parents étrangers sera automatiquement français à sa majorité. À 13 ans, il pourra manifester son désir d’être français. La FEN approuve cette loi comme elle avait soutenu le projet en ce qu’elle concilie heureusement droit automatique à la nationalité et droit de l’enfant qui pourra choisir lui-même d’anticiper sur sa majorité. Signalons également l’heureuse initiative d’un titre d’identité pour les mineurs étrangers qui devraient par exemple éviter les obstacles au séjour scolaire à l’étranger hors de France.

Par contre, le débat qui s’amorce à propos du projet de loi sur l’immigration – débat qu’il ne faut pas confondre avec le précédent – suscite en nous un malaise. Le gouvernement se trompe de stratégie. Toute sa démarche est fondée depuis l’origine sur l’idée qu’on puisse aboutir à un consensus dans notre pays sur la question de l’immigration. Cette analyse est erronée car il s'agit là d'un sujet où existe un clivage profond au sein de la société française.

Que l’on me comprenne bien. La démagogie n'est pas notre fait. Et nous sommes favorables à une législation humaine, rigoureuse, responsable, digne de notre pays et de son histoire. Il fallait donc abroger les lois dont nous avions combattues nombre de dispositions et remettre à plat un empilement législatif incohérent qui prend sa source en 1945.

Sous cet éclairage qui aurait renvoyé la droite dans ses cordes, un vrai débat aurait pu alors être mené sur le thème de la dignité et de la responsabilité qui aurait mis en difficulté les démagogues qui se manifestent à bon compte aux franges de la « majorité plurielle ». Faute d'un engagement convenable du débat, je redoute quant à moi un enlisement propice aux excès de tous bords et dont les immigrés feront les frais. Nous l'avons dit, nous n'avons point été entendus. Nous ne changerons pas d'avis.

Je ne voudrais pas terminer ce balayage rapide sur les questions de société sans évoquer les nouvelles flambées de violence dans les banlieues qui se manifestent en particulier par des agressions dans les transports. Je vous demande surtout de ne pas faire le moindre lien entre cette question et la précédente. Seule la brièveté de mon propos me contraint à un voisinage qui n'est que rédactionnel.

Je veux ici d'abord exprimer notre solidarité aux travailleurs qui subissent cette violence alors que leur mission est d'apporter dans ces lieux souvent relégués un peu d'humanité au travers des services publics. Reste que ces manifestations sont le produit d'un malaise qui a été largement analysé. Les jeunes en sont les protagonistes et expriment ainsi un refus du présent et de l'avenir qu'on leur offre. Il faut agir très vite sur les causes, l'exclusion scolaire, le chômage, les difficultés parentales... Il faut restaurer les droits, il faut restaurer le pacte social et imposer les devoirs. Car toutes les personnes qui sont en situation difficile n'agressent pas les autobus. Concernant les mineurs, la FEN a toujours mis en avant le droit à l'éducation mais celui-ci ne saurait signifier l'absence de rappel à la loi et à la sanction. Le droit à la sûreté est un des droits fondamentaux de la personne humaine, le droit à la libre circulation aussi d'ailleurs. Ces droits doivent aussi être réalité pour celles et ceux qui supportent le plus le poids de l'exclusion.

Dans l'UNSA, la Commission « Politique de la ville » travaille à la difficile question des mineurs délinquants. La FEN s'y investit pleinement, elle a des mandats, elle a beaucoup travaillé sur la violence à l'école. Signalons enfin que nous tiendrons le 30 avril un colloque au conseil économique et social sur les relations justice/éducation qui n’en doutons pas traitera aussi de ces problèmes.

Je voudrais aussi insister sur la situation algérienne. Nous nous sommes mobilisés dans une manifestation d’une grande dignité le 10 novembre pour exprimer notre solidarité avec celles et ceux qu’on assassine dans un pays qui nous est cher. Nous organisons en janvier un séminaire à l’intention de 15 militantes algériennes du SATEF. Que les choses soient claires, nous ne ferons rien à la place des Algériens qui doivent maîtriser leur destin. Nous constatons simplement que l'élection présidentielle que nous avions saluée en son temps comme un pas possible vers la démocratie n'a pas produit son avènement. On l'a vu après les élections municipales contestées par les partis démocratiques. La solidarité internationale qui s'exprime n'a pas pour objet de remettre en cause la souveraineté nationale d'un pays mais de l'aider à construire la démocratie, seule susceptible de s'opposer aux menées de ceux que notre amie Khalida Messaoudi appelle « les fascistes verts ».

Quelques réflexions enfin à propos de la conférence climatique de Kyoto dont l'objet était de réduire l'effet de serre qui provoque un réchauffement de la planète. Accord historique titrait « Le Monde » daté du 12 décembre. Notre enthousiasme est plus mesuré. Certes, un accord a été trouvé, il était improbable au début de la conférence. Et l'arrogance des pays pollueurs a été quelque peu ramenée à la raison. Quand je parle de pays pollueurs, je pense aussi bien aux États-Unis qu'à la Chine. Certes, l'Europe dans sa cohésion a tenu bon et a présenté une image positive de ce que pourrait être sa force demain dans d'autres domaines. Mais les résultats sont loin de l'attente, loin surtout de l'urgence que tous les scientifiques proclament depuis des mois. Quelle planète allons-nous laisser aux générations futures ? Tant que les peuples ne se saisiront pas de cette question, il n'y aura pas de renversement significatif de la logique productiviste. Les peuples du tiers-monde sont les plus menacés. Certains sont frappés par la désertification, d’autres risquent d’être inéluctablement submergés. Qu’importe puisqu’ils constituent de plus en plus la poubelle commode des pays développés.

Notre communication

Une publication naît une autre renaît. Le premier numéro d'« UNSA Magazine » sortira fin janvier. C'est un mensuel de 16 pages, en deux couleurs qui sera adressé individuellement à environ 10 000 militants des composantes de l'UNSA. Il sera diffusé largement à l'extérieur pour faire connaître l'UNSA.

« La Conjoncture », revue du CRES, qui avait interrompu sa parution en 1995, va renaître, fin février, dans une nouvelle formule, avec une nouvelle équipe, mais en conservant la même finalité : donner aux militants une information économique et sociale qui prend en compte les préoccupations humanistes qui sont les nôtres et celles de la mouvance qui nous environne.

La FEN est fortement impliquée dans l'une et l'autre publication.

Quant à notre communication fédérale, nous avons entamé un travail de mise en cohérence tout en faisant évoluer l'image et la forme. Ainsi FEN-ACTUALITES entre le numéro que vous venez de recevoir et celui de février aura changé de maquette et de forme rédactionnelle. Nous commençons à travailler sur la transformation de FEN-HEBDO pour tenir compte de son changement de rythme de parution. Deux publications spécialisées vont être, soit transformées, - c'est le cas de « Regard »·qui est destiné aux élus, soit créées pour populariser les productions du centre Henri Aigueperse. Par ailleurs, il faut que nous passions à une nouvelle étape de notre communication rapide qui nécessite de mettre en cohérence Fax, Internet, 3615. Ce travail d'ensemble prend du temps mais vous en percevrez progressivement les effets. Voilà en quelques mots dans quel contexte s'ouvre notre trimestre d'activité syndicale. Sur ce contexte, sur nos perspectives de négociations et d'action, je souhaite maintenant vous entendre.

Débat général

Emplois-jeunes

Nous avons choisi de relever le pari des « emplois-jeunes ». L'enjeu est de faire émerger de nouveaux emplois solvables. Un appel est lancé à chaque SN d'être présent, de syndiquer et de soutenir les jeunes concernés.

Fonction publique

Nous avons quelques raisons d'être inquiets sur l'ouverture des négociations salariales.

La position du gouvernement n'est pas encore claire. On peut espérer une négociation portant sur 97-98-99 et une discussion sur le contentieux 1996. Il semble que l'on puisse avancer sur le CFA et la revalorisation spécifique du bas de la grille indiciaire.

En tout état de cause, après chaque étape de la négociation menée par I'UNSA fonctionnaires, chaque organisation composante sera consultée. Nous devons faire preuve d'une grande fermeté sur l'avenir de la politique contractuelle dans la fonction publique.

Retraites

Peu d'informations tangibles ont filtré sur la politique du gouvernement en matière de fonds de pensions.

Il faut vérifier si les mots utilisés ont bien le même sens. Nous jugerons sur pièces et non sur les annonces médiatiques.

La question du code des pensions est à surveiller de très près.

Droits et libertés

Le débat a porté sur les conditions d'attribution du « droit du sol » auquel nous sommes très attachés. Nous avons la volonté de considérer l'enfant comme un être autonome. Nous sommes donc d'accord pour que le jeune puisse donner son avis dès l3ans.

Immigration

La stratégie du gouvernement n’est pas bonne. Il aurait dû remettre à plat tous les dispositifs et donc abroger les lois Pasqua-Debré.

L'immigration n'est en aucun cas porteuse de tous les maux de la société. Il est par contre normal qu'elle soit organisée. Les flux migratoires sont et doivent rester une chance pour notre société.

Action

La FEN soutiendra toute action de ses syndicats nationaux. La FEN rappelle sa volonté de travailler également avec d'autres organisations dès lors qu'il y a accord sur les positions de fond.

Jean-Paul Roux a également invité à manifester notre soutien, par l'envoi de messages aux deux collègues qui vont comparaître devant le tribunal de grande instance du Rhône pour avoir dénoncé les agissements d'une directrice d'école candidate aux législatives sur une liste Front national.

Texte voté

La FEN souhaite de la cohérence pour travailler en confiance

Les personnels ont besoin de sérénité et de confiance pour travailler. Ils attendent de leurs ministres des engagements crédibles et financés. Le système éducatif ne se pilote pas au gré des mouvements d'opinion par une gestion médiatique des dossiers. Il faut au contraire une méthode lisible et compréhensible de l'action s'appuyant sur un travail préalable de dialogue et de réelle concertation avec les organisations représentatives. La Fédération de l'éducation nationale prend acte de la volonté des ministres de l'éducation nationale de faire évoluer en profondeur le système éducatif français. Elle estime que celui-ci a moins besoin d'une nouvelle réforme que d'une mise en œuvre des objectifs et dispositions contenus dans la loi d'orientation en phase avec les réalités du terrain. Il en va de l’intérêt des personnels. Il en va de l'intérêt des élèves, des étudiants et des adultes en formation qui, en tout état de cause, doivent être placés réellement au centre du système éducatif.

Les rencontres bilatérales et les tables rondes qui se sont multipliées depuis juin sont utiles. La FEN met néanmoins en garde es ministres contre les effets d'annonce, l'empilement des initiatives qui finissent par occulter les choix de priorité et la lisibilité des grandes orientations. Une évolution maîtrisée et réussie du système éducatif dépend de la méthode mise en œuvre pour réaliser les transformations engagées. C'est dans ces conditions que la FEN sera un interlocuteur constructif et exigeant C'est à ces conditions seulement que les personnels garderont confiance.

Francis Carrié