Interview de M. François Hollande, secrétaire national et porte-parole du PS, dans "Enjeux les Échos", d'avril 1997, sur les défauts de la loi Robien sur la réduction du temps de travail et les propositions du PS en matière d'emploi.

Prononcé le 1er avril 1997

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Média : Energies News - Les Echos - Les Echos

Texte intégral

Enjeux : La loi Robien est-elle une bonne ou une mauvaise loi ?

François Hollande : La loi Robien et une mauvaise loi qui part d’une bonne idée : favoriser la négociation en matière de réduction du temps de travail pour aller vers les 32 heures. Comme vous le savez, c’est une idée… socialiste !

Mais les contreparties demandées sont trop déséquilibrées. Pour les entreprises, la contrainte est très faible (deux années d’obligation sur l’emploi pour sept années de réduction de charges !) ; pour l’État, elle est financièrement très forte ; pour les salariés aussi, souvent amenés à accepter une baisse significative de leurs rémunérations. Ce déséquilibre altère l’idée de la réduction du temps de travail. Les entreprises prennent la loi pour une « pompe à subventions ». Le budget redoute le dérapage des finances publiques. Les salariés risquent d’être dégoûtés de la réduction du temps de travail.

Enjeux : Que ferez-vous de cette loi, si vous gagnez les élections de 1998 ?

François Hollande : La politique de l’emploi coûte cher. Cet investissement doit être le plus rentable possible en termes de création d’emplois. Or les dispositifs successifs d’aides à l’emploi n’ont pas eu d’effet massif. En revanche, ils ont suscité effets d’aubaine et de substitution. La loi Robien n’évite pas cet écueil. En outre, elle tue toute velléité de négociation par branche. Dans la sphère publique, il est préférable de créer directement des emplois pour les jeunes, c’est plus efficace. Dans le privé, il faut redonner vie à la négociation de branche en fixant un objectif : les 35 heures, dans un délai de deux ans. Seule une généralisation du dispositif peut éviter l’écueil des effets pervers. L’échec de la loi Robien ne doit pas devenir celui de la réduction du temps de travail