Texte intégral
Les termes de « professionnels libéraux », longtemps associés dans le public à ceux de « notables, bourgeois ou nantis », ont trouvé, depuis une vingtaine d’années, de nouvelles résonnances – parfois contraires selon les professions concernées – telles que « concurrence et chômage » pour les uns, « excellence et emploi » pour les autres.
Confrontés à des situations matérielles très différentes, les professionnels libéraux voient leurs activités respectives régies par des dispositions également différentes, qu’il s’agisse de leur fiscalité, de leur structure juridique, ou encore de leur réglementation interne. Cette diversité rend d’autant moins aisée toute tentative de définition commune. Cette diversité a retardé l’émergence de la cause syndicale des professions libérales, récemment célébrée par l’Unapi et le président de la République.
Au moment de l’ouverture des frontières, où la crainte d’une concurrence accrue devient réelle, il y a donc urgence et intérêt, pour les professionnels libéraux, à se rassembler autour de certains principes fédérateurs, applicables à leur profession quelle qu’elle soit, puisqu’être un professionnel libéral c’est d’abord et avant tout une certaine manière d’exercer sa profession.
L’identité économique et sociale du « professionnel libéral » est, dans notre société, spécifique.
L’indépendance
Le souci de garantir au public une prestation de qualité conduit les professionnels libéraux à se montrer particulièrement vigilants et exigeants en matière de compétence.
L’entrée dans leur profession est soumise à une condition de diplôme et, de plus en plus souvent, la formation initiale requise se poursuit, en période d’activité, par la mise en œuvre d’une formation continue obligatoire.
Mais la compétence ne serait rien sans son corollaire, la responsabilité individuelle du professionnel libéral qui, alliée à l’obligation d’assurance, offrir au public une totale sécurité, tandis qu’elle confère à l’exercice libéral l’une de ses dimensions les plus spécifiques : celle d’une entreprise privée, lieu d’investissement personnel, humain, intellectuel et financier, gage pour le professionnel d’une indépendance véritable.
Le rattachement récent des professions libérales à la médiation de mon département ministériel consacre la volonté du Gouvernement de soutenir cette dimension entrepreneuriale. Le retard à combler est important ; qu’on se souvienne que le comité interministériel des professions libérales, créé en 1983, s’est réuni pour la première fois en juillet 1996.
Cette indépendance matérielle et intellectuelle du professionnel libéral trouve naturellement écho dans sa relation avec la clientèle. Celle-ci est, en effet, fondée sur un rapport de confiance, lui-même bâti sur le principe du libre choix réciproque et du nécessaire secret auquel est astreint, et attaché, le professionnel.
On ne s’étonnera donc pas de l’attrait que ce défi, ou ce pari, économique, continue à exercer sur les jeunes, désireux d’embrasser la « carrière libérale », en dépit des perspectives nouvelles, plus aléatoires que par le passé, quand elles ne sont pas incertaines.
Pour libre qu’il soit, ce professionnel ne doit pas être, et n’est pas, pour autant, un homme seul.
Sa liberté ne peut s’exprimer avec force et légitimité qu’au travers d’un déontologue professionnelle, partagée avec ses confrères, qui illustre et nourrit sa propre éthique ; et voici qu’apparaît l’apanage de tout professionnel libéral : la mission de conseil.
Lorsqu’il y va de l’intérêt de son client, il doit répondre « non » à la demande de celui-ci, au risque de lui déplaire, voire de le perdre. Il est, certes, à l’écoute de cette demande, mais il ne la fait pas sienne : il l’apprécie et la critique au besoin, quelle que soit la boulimie de sa clientèle, il ne la traite pas en consommateur.
Ce rôle de conseil des professions libérales, traditionnel auprès des particuliers, ne cesse de se développer en direction des entreprises dans les domaines juridiques, financiers et patrimoniaux.
La mission de conseil
Face à la montée de la complexité de nos échanges économiques, la pérennité des entreprises passe désormais par le développement des conseils extérieurs et l’externalisation de plusieurs fonctions du management.
Ainsi les professionnels du droit, avocats-notaires aux côtés des professionnels du chiffre, sortent-ils, chaque jour davantage, le chef d’entreprise d’un isolement imputable à la complexité d’une réglementation croissante, que la simplification administrative ne suffit pas à dissiper. Ainsi, les professions libérales sont-elles plus actuelles que jamais.
Gage de pérennité des entreprises, leurs interventions s’effectuent de plus en plus en amont des difficultés et inscrivent ces professionnels du conseil, dans une véritable stratégie de l’entreprise.
Interlocuteurs privilégiés des entreprises, eux-mêmes acteurs de notre économie, les 500 000 professionnels libéraux français représentent plus de 650 milliards de francs : ils ont démontré qu’ils constituent une chance de développement pour la France. Le ministère des PME, du commerce et de l’artisanat est déterminé à tout mettre en œuvre pour assurer la poursuite de leur développement.
Le discours du président de la République, le 31 janvier dernier, au congrès de l’Unapi, en a tracé les voies de l’avenir autour de trois priorités : améliorer la représentation des professions libérales pour mieux prendre en compte leur poids économique, faciliter les conditions d’exercice de ces professionnels et encourager l’installation des jeunes.
D’ores et déjà, la presque totalité des 20 mesures adoptées le 4 juillet 1996 a trouvé une traduction législative et réglementaire.
Ainsi, reconnaissant le rôle d’entrepreneur et d’employeur des professionnels libéraux, l’Unapi fait désormais partie de la Commission nationale de la négociation collective. Les professions libérales siègent dans les Codef et les Coref, ainsi que dans les conseils d’administration des caisses de Sécurité sociale.
Pour faciliter leur exercice professionnel, un projet de loi règlementera les baux professionnels et encadrera les délais de changement d’affectation de locaux.
Toutes les professions libérales sont désormais éligibles aux garanties Sofaris et Coface, et pour répondre au souhait du président de la République de faire de 1997 l’année de l’emploi des jeunes, la déductibilité des intérêts d’emprunts, dans le cas d’options des sociétés d’exercice libéral à l’impôt sur les sociétés, est en cours d’étude.