Texte intégral
Olivier Mazerolle : Jean-Pierre Delevoye à la présidence du RPR n’a réussi qu’un score moyen au premier tour, c’était pourtant le candidat appuyé par l’Élysée, c’est un désaveu pour Jacques Chirac ce résultat ?
Christian Poncelet : Je vous laisse bien sûr la responsabilité de cette appréciation…
Olivier Mazerolle : C’était une question qui vous est adressée !
Christian Poncelet : En ce qui concerne Jean-Pierre Delevoye, candidat de l’Élysée. Permettez-moi de vous faire observer que l’on ne pourra plus écrire, ni dire maintenant que le RPR est un mouvement monolithique. En effet, il y a eu plusieurs candidats pour concourir pour la présidence du RPR. Le débat s’est déroulé dans un climat serein, il n’y a pas eu d’agressivité entre les candidats, c’est un point extrêmement positif, qui répond d’ailleurs à une volonté de nos adhérents et de nos militants. Et puis, il y a un second tour. Ce second tour, c’est les conséquences du processus démocratique.
Olivier Mazerolle : Vous êtes pour qui au second tour ?
Christian Poncelet : Eh bien, je ne vous surprendrai pas en vous disant que je soutiens la candidature de Jean-Pierre Delevoye. Je l’ai soutenu au premier tour, je le soutiens au second tour. Il est en tête de ce qu’on appelle couramment le ballotage, donc je le soutiens. Jean-Pierre Delevoye est un homme de qualité, vous le savez, puisqu’il est président de l’Association des maires de France. Et les maires ont la réputation d’être des hommes d’expérience et des sages. Par conséquent, pour présider une assemblée aussi importante que celle-ci, il faut être un rassembleur, il faut être bien sûr un fédérateur. C’est précisément ce dont nous avons besoin au sein du RPR.
Olivier Mazerolle : Comment expliquez-vous que le fait d’être soutenu malgré tout par l’Élysée ne suffise pas à emporter la conviction des militants du RPR ?
Christian Poncelet : Vous avez certainement bien regardé les professions de foi des candidats, vous avez regardé le résultat. Eh bien, je veux vous dire aujourd’hui que les trois-quarts de nos militants soutiennent le Président de la République. Les trois-quarts ! Par conséquent, ils sont attachés à sa personne et ils considèrent à juste titre que c’est notre meilleur candidat pour les grandes élections de demain.
Olivier Mazerolle : Donc, élire Mme Alliot-Marie, cela ne serait pas dire « non » à Jacques Chirac ?
Christian Poncelet : Mais Mme Alliot-Marie, je ne crois pas qu’elle se soit, dans sa profession de foi, opposée à Jacques Chirac !
Olivier Mazerolle : Aujourd’hui, vous allez parler devant l’Association des maires de France. Vous allez évoquer un sujet sensible qui est la responsabilité pénale des élus locaux et notamment des maires. Qu’est-ce que vous souhaitez là-dessus ?
Christian Poncelet : Vous me permettez de faire observer que cette question qui arrive à l’ordre du jour aujourd’hui est la conséquence des états-généraux dont j’ai pris l’initiative et qui se tiennent dans plusieurs régions de France où je rassemble tous les élus locaux d’une région. D’abord en Alsace, ensuite dans le Nord-Pas-de-Calais, plus récemment en Basse-Normandie, prochainement en Aquitaine. J’ai visité par ailleurs, en président, les assemblées de maires : plus de vingt départements. J’ai donc constaté qu’il y avait un très grave malaise qui conduisait à un tarissement des vocations. Ce problème, quel est-il ? Les maires sont actuellement, en permanence, quotidiennement dans une sorte d’insécurité pénale. Il y a deux choses. Il y a la faute volontaire, soit dans le cadre de passations de marché, soit dans le cadre d’opérations d’enrichissement personnel. Cette faute volontaire doit être sanctionnée. Et s’agissant des élus, dès l’instant où il y a atteinte à la probité, eh bien la sanction doit être exemplaire. Il y va de la crédibilité et de l’honneur des élus. Point ! Deuxièmement, il y a la faute involontaire, non-intentionnelle. Dans la faute intentionnelle, non-intentionnelle, il faut faire un tri. Il faut bien sûr constater la faute qui est la cause directe du dommage causé et la faute qui est la cause indirecte du dommage causé.
Olivier Mazerolle : Par exemple, le poteau de basket qui tombe sur la tête d’un élève.
Christian Poncelet : Je vais vous donner un exemple. Un maire entreprend des travaux d’adduction d’eau, il creuse une tranchée dans la voirie. Cette tranchée n’est pas suffisamment signalée, il y a un accident. Eh bien, le maire a commis une faute qui est directement la cause de l’accident, parce qu’il y a une mauvaise signalisation. Il y a une excellente signalisation et il y a un imprudent ou un excès de vitesse ou autres qui va faire qu’il va verser dans le fossé. Il y a, là, manifestement la faute et la cause indirecte très, très éloignée du dommage causé. Donc je souhaite…
Olivier Mazerolle : Vous souhaitez que l’on puisse distinguer entre les différents cas.
Christian Poncelet : Je souhaite un tri dans la faute non-intentionnelle. Et, à ce sujet, permettez-moi de vous dire que nous ne nous contentons pas de faire un constat, de relever les difficultés auxquelles sont confrontés les maires, mais nous avons fait des propositions. Et je me propose d’inscrire à l’ordre du jour du débat du 27 janvier la proposition de loi Fauchon, qui n’est pas totalement parfaite, mais qui aura le mérite à mes yeux d’ouvrir le débat et d’entendre le Gouvernement sur les propositions qu’il a à faire sur ce sujet.
Olivier Mazerolle : Hier dans Le Monde, Jean Tibéri, le maire de Paris a publié une chronique dans laquelle il semble avoir une vision un peu plus extensive que vous de la responsabilité pénale ou de l’exonération de responsabilité pénale. Il évoque ses collègues mis en cause dans « les affaires », dit-il et il ajoute : « J’ai entendu l’angoisse des maires mis en examen personnellement sur des points liés à leur gestion ».
Christian Poncelet : Je ne connais pas la nature exacte des reproches qui sont faits à M. Tibéri. S’agit-il d’une faute volontaire ou d’une faute involontaire ? Je ne la connais pas ! Par conséquent, je n’ai pas les éléments pour apprécier le comportement de M. Tibéri. Mais je sais que certains maires se trouvent heurtés par le fait qu’ils soient traduits au pénal pour des fautes qui manifestement…
Olivier Mazerolle : Oui, mais quand on parle d’affaires de gestion… là, on ne déroute pas vers l’amnistie ?
Christian Poncelet : En ce qui concerne la gestion, il y a un contrôle qui est exercé sur la gestion des maires. Qu’a dit la Cour générale des comptes en ce qui concerne la gestion de Paris ? M. Tibéri a peut-être jugé utile de présenter ses observations au moment où s’ouvre ce grand débat devant les maires concernant la repsonsabilité des maires.
Olivier Mazerolle : Le Parti socialiste a mis en congé de parti des responsables mis en examen. La droite n’envisage-t-elle pas de faire la même chose ?
Christian Poncelet : M. Tibéri est mis en examen ?
Olivier Mazerolle : Oui !
Christian Poncelet : Le mouvement aura à y réfléchir, mais c’est une question qui n’a pas encore été abordée. La mise en examen, si vous démissionnez, c’est donc qu’implicitement vous reconnaissez que vous avez commis une faute. Et, dans le même temps, nous demanderions à ce que soit protégée la présomption d’innocence.
Olivier Mazerolle : Mais le PS le fait !
Christian Poncelet : Le PS n’est pas, en la matière, pas un donneur de vertu. Nous pourrions trouver des exemples où il nous avait donné quelques leçons. Et aujourd’hui, je crois qu’il doit être beaucoup plus prudent en ce qui concerne les leçons qu’il est tenté de donner en matière de comportement.
Olivier Mazerolle : La Corse : les rapports parlementaires sont mis en cause par M. Chevènement qui parle de polémique ridicule et d’irresponsabilité des élus qui mettent en cause les services anti-terroristes.
Christian Poncelet : Je ne sais pas pourquoi on complique les choses. Elles sont très simples. Le Parlement a joué son rôle. Il a accompli une mission essentielle : exercer le contrôle du fonctionnement du Gouvernement. C’est clair ! Donc, il y a eu une commission d’enquête qui a été créée à l’Assemblée nationale, une commission d’enquête qui a été créée au Sénat ? Elles sont de compositions différentes. À l’Assemblée nationale, c’est la majorité plurielle qui est majoritaire de cette commission ; au Sénat, c’est l’opposition qui est majoritaire dans cette commission. Ils arrivent tous les deux aux mêmes conclusions. Que constatent-ils ? Qu’il y a en Corse des dysfonctionnements très graves, très, très graves. Par conséquent, il y a au moins un point d’accord sur le constat que l’on fait en ce qui concerne la situation en Corse. Je crois qu’un tel point d’accord doit conduire le Gouvernement à ouvrir un débat. D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle, ce matin, j’ai demandé au président de la commission du Sénat, M. Courtois et au rapporteur, M. Le Garrec, de venir me voir pour me donner quelques explications concernant les faits qu’ils ont relevés. Qu’ils ont relevés à l’unanimité de la commission. Par conséquent, je souhaiterais pour ma part, s’il y a consensus sur le constat, que très rapidement il y ait consensus pour la recherche d’une solution à apporter au fait que l’on a constaté, et qui appelle à un redressement. Aucun Gouvernement n’a réussi à régler les problèmes corses. Aujourd’hui, puisque nous sommes d’accord sur les maux dont on souffre, on va peut-être pouvoir se mettre d’accord sur les remèdes à y apporter.