Interviews de Mme Martine Aubry, membre du bureau national du PS, à RTL le 24 et France 2 le 30 avril 1997, sur le bilan négatif du gouvernement d'Alain Juppé notamment face au chômage, et sur les orientations de la déclaration commune PCF PS pour les élections législatives.

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Circonstance : Signature le 29 avril 1997 par le PCF et le PS d'une déclaration commune pour les élections législatives

Média : Emission L'Invité de RTL - France 2 - RTL - Télévision

Texte intégral

RTL - 24 avril 1997

O. Mazerolle : Le PS concentre ses attaques sur A. Juppé. Il est plus à l’origine de la politique de la majorité que le Président de la République lui-même ?

M. Aubry : J’allais presque dire que le Président de la République a montré la voie. Croyez-vous vraiment que, s’il avait l’impression d’avoir un gouvernement qui réussit, il aurait aujourd’hui dissout l’assemblée ? Et puis, il l’a dit lui-même : « les résultats sont insuffisants, il nous faut un nouvel élan ». Donc, la réalité c’est que la politique du gouvernement a échoué. Le chômage – plus 400 000 depuis quatre ans –, les taux d’endettement en France n’ont jamais été aussi forts, les Français sentent les prélèvements, et nous savons que les prévisions sont encore plus désastreuses. Donc, la vérité, elle est là : nous ne réussissons pas. Il faut vite aller devant les électeurs avant de redonner un tour de vis. Eh bien, le Gouvernement, le chef du gouvernement, c’est A. Juppé.

O. Mazerolle : La campagne prend une drôle d’allure quand F. Hollande dit que « A. Juppé incarne presque physiquement l’impôt. » Ça veut dire qu’il a un délit de sale gueule ?

M. Aubry : Non, je crois qu’il ne faut pas s’arrêter à cela. Moi, j’ai entendu quand même A. Juppé qui a expliqué, pendant une heure et demie à ses députés, non pas combien il était fier de son bilan, non pas ce qu’il allait faire demain pour faire « ce nouvel élan », mais combien « les socialistes étaient les responsables de tous les maux de la France. » Alors, j’ai été avec d’autres, dont L. Jospin, très tôt, pour dire que nous avons fait des erreurs, que nous n’avons pas tout réussi. Mais quand même, depuis onze ans, les trois dernières législatures, la droite a été au pouvoir six ans, dont les quatre dernières années, avec tous les pouvoirs ! Alors, il faut quand même du culot pour dire que la situation de la France aujourd’hui – quand on a fait passer l’endettement de 2 000 milliards, un des plus faibles d’Europe quand nous sommes partis, à 3 800 milliards, le chômage à + 400 000, des augmentations de la TVA, du RDS, de la CSG, etc. –, il faut du culot, pour dire que les socialistes sont responsables de la situation actuelle. Alors, voilà pourquoi nous répondons à M. Juppé, nous lui répondons, car il n’a pas le courage de défendre son bilan et encore moins la capacité de nous proposer quelque chose !

O. Mazerolle : L. Jospin est un bon leader de campagne ? Beaucoup disent « qu’il est très lent ».

M. Aubry : Écoutez, moi je ne sais pas. L. Jospin ne fait pas « des coups », il ne fait pas des petites phrases, il n’aboie pas comme l’a fait M. Juppé, en attaquant les socialistes. M. Jospin est là pour défendre ses valeurs et pour expliquer à la France, dans une période très difficile puisque si, dans les quatre à cinq années, la France et l’Europe ne sont pas capables de proposer un autre modèle de développement face à l’ultra-libéralisme, qui est toujours bon pour ceux qui sont sur les rails et qui crée sans cesse plus d’exclusion et de chômage, si nous ne sommes pas là pour défendre ce projet, avec d’autres – T. Blair et d’autres – eh bien, l’Europe n’existera plus dans quatre-cinq ans. Voilà pourquoi L. Jospin prend son temps. Nous sommes dans des débats sérieux, nous ne sommes pas dans des petites phrases, dans des insultes. Nous sommes là pour défendre, pas à pas, un nouveau modèle auquel nous croit.

O. Mazerolle : Il est le Premier ministre que vous souhaitez pour la France ?

M. Aubry : Absolument.

O. Mazerolle : Le PS attaque donc beaucoup A. Juppé et le Gouvernement, vous venez de le faire. Mais que propose-t-il finalement ? On a la sensation qu’il a, comme ça, semé des petits cailloux, mais il n’y a pas encore La synthèse, il n’y a pas Le programme. Quelles vont être ses priorités ?

M. Aubry : Vous allez le voir dans les jours qui viennent ; je rappelle quand même que la campagne a commencé il y a deux jours et qu’il y avait quand même des choses à dire sur cette dissolution. Ce que nous proposons, en fait, est simple : les Français, aujourd’hui, ont l’impression qu’on marche sur la tête. Un pays de plus en plus riche, qui crée de plus en plus d’exclusion. Je donne un seul exemple : 5 % des Français détiennent 40 % des richesses nationales et on a 2 millions de personnes qui vivent dans la rue ! Ce n’est plus possible, on marche sur la tête ! Il faut trouver un nouveau système, un nouvel équilibre entre l’État et le marché. Il faut arrêter de nous dire que ce qui est important, c’est uniquement le franc fort et l’euro. L’euro, il faut le faire, mais ce n’est pas l’objectif.

Ce qui est important, c’est de répondre aux besoins des Français et de relancer la croissance, en donnant des clients aux entreprises et en partant des besoins des gens, les besoins directs en logement, en santé, en éducation. Ce sont nos grands programmes de dépenses publiques. Et deuxièmement : tous les services aux personnes à organiser – services aux personnes âgées, garde des enfants –, champs immenses de l’aménagement du territoire et de l’environnement et de la qualité de vie. Et puis, aussi, l’accès à la culture, l’accès à la formation. C’est tout ce nouveau modèle que nous allons mettre en place, en disant, comment nous allons le financer, où nous allons prendre l’argent et comment nous allons l’utiliser.

O. Mazerolle : Alors, précisément : à propos de l’euro, L. Jospin a dit : « si, pour atteindre les critères de déficit de 3 % il faut plus d’austérité, je ne le ferai pas. « Est-ce que ça veut dire que vous avez l’intention, pour relancer la croissance, éventuellement, de laisser filer les déficits budgétaires ?

M. Aubry : Écoutez, je crois qu’il faut revenir deux minutes sur ce qu’est l’euro et appliquer le Traité de Maastricht en totalité dans son esprit. Le Traité de Maastricht disait que ces pourcentages devaient être regardés en fonction de la conjoncture, en tendances. Qu’a fait le Gouvernement depuis deux ans pour renégocier avec nos partenaires ce chiffre de 3 %, et pour le mener à 3,5 ou à 4 % ? Quel sens cela aurait-il de faire un euro après avoir donné un nouveau tour de vis, comme se prépare à le faire M. Juppé s’il est à nouveau Premier ministre, en créant plus de chômage ?

O. Mazerolle : C’est vous qui le dites, lui dit le contraire.

M. Aubry : Il ne dit pas le contraire. Comme d’habitude, il masque la réalité dans un discours agressif et d’attaques, faute d’être capable de dire clairement ce qu’il veut faire. Moi, j’ai une question à poser au gouvernement : si aujourd’hui, comme nous le pensons, les prévisions économiques sont désastreuses et si le Gouvernement, au lieu de changer de politique économique – car si aujourd’hui on ne respecte pas les critères de Maastricht, c’est parce qu’il n’y a pas assez de croissance dans notre pays, c’est parce qu’on a brimé les salariés, c’est parce que la consommation baisse –, donc ma question c’est : dites-nous véritablement quelles sont les prévisions. Ayez le courage d’assumer votre bilan., et dites-nous ce que vous allez faire. Nous, nous renégocierons…

O. Mazerolle : Et vous, M. Aubry, j’en reviens à ma question, maintenant : qu’en est-il des déficits publics si vous arrivez au pouvoir ? Si vous ne donnez pas la garantie que vous allez vous tenir dans les 3 % prévus par le traité ?

M. Aubry : Mais non ! Les 3 % : ce n’est pas la Bible, le Traité de Maastricht ! Maastricht dit lui-même : « Il faut l’apprécier en temps… »

O. Mazerolle : D’accord.

M. Aubry : Nous allons discuter avec nos partenaires pour apprécier différemment ces critères. Deuxièmement, nous allons mettre en place une politique économique, qui donnera plus de croissance et donc plus de recettes à l’État, et donc moins de déficits publics par rapport à ce que fait le Gouvernement aujourd’hui.

O. Mazerolle : Qu’est-ce que vous répondez à ceux qui se disent : mais quand L. Jospin dis cela, est-ce qu’il n’annonce pas que les socialistes vont en revenir à leurs habitudes et laisser filer les déficits ?

M. Aubry : Excusez-moi, là aussi soyons clairs : quand la gauche est partie en 1992, nous avions l’endettement le plus faible d’Europe, 2 000 milliards. Il a augmenté de 70 % depuis quatre ans de la droite. Alors, qui a augmenté le RDS, qui a augmenté la TVA, qui a augmenté la CSG ? C’est la droite. Alors qu’on arrête de dire que l’objectif des socialistes, c’est de monter les impôts. Nous n’augmenterons pas les impôts. Simplement, nous ferons une meilleure répartition entre les revenus du capital et les revenus du salaire, nous relancerons la consommation et nous mettrons en place ce nouveau modèle de développement dont je parlais tout à l’heure.

O. Mazerolle : Et les déficits ?

M. Aubry : Eh bien, les déficits ils ne seront pas plus importants qu’aujourd’hui. Regardez-les, déficits records. Je prends la Sécurité sociale : 10 milliards en moyenne par an quand les socialistes étaient au pouvoir, 50 milliards aujourd’hui malgré le plan de relance. Mais permettez-moi de redire un mot sur l’euro : pour les socialistes, la monnaie unique c’est important. Ça nous donne de l’espace vis-à-vis du dollar, vis-à-vis du yen. Ça évite que les monnaies européennes se fassent concurrence. Mais l’Europe c’est autre chose que cela. Pour nous, l’Europe c’est un nouveau modèle de croissance, c’est pour ça que L. Jospin insiste, avec raison, sur le fait que, comme le disait le Traité de Maastricht, il nous faut un gouvernement économique, il nous faut un pacte de croissance avec nos partenaires. Toute chose qui a été abandonnée par le Gouvernement depuis quatre ans, et par le Président de la République depuis deux ans.

O. Mazerolle : Et la France seule, même gouvernée par les socialistes, peut imposer cela à ses partenaires ?

M. Aubry : Mais la France seule… T. Blair va gagner en Grande-Bretagne, il y a des mouvements importants aujourd’hui en Espagne.

O. Mazerolle : T. Blair n’a pas tout à fait la même coloration que la vôtre.

M. Aubry : M. Kohl, s’est mis d’accord avec M. Mitterrand. Vous croyez qu’il n’est pas capable de comprendre aujourd’hui que l’Europe, c’est autre chose qu’un grand marché libéral ? Moi, je suis convaincue que si la France est forte, si elle défend une autre Europe, eh bien, nos partenaires nous suivront et nous serons capables de présenter au monde un autre modèle que cet ultra-libéralisme qui crée des inégalités, des exclusions, et qui fait que nos pays sont de plus repliés sur eux-mêmes, dans l’intolérance, dans la haine. Toute chose que n’est pas l’Europe et que, surtout, n’est pas la France !

 

Date : Mercredi 30 avril 1997
Source : France 2/Édition du matin

G. Leclerc : Une légère baisse du chômage : moins 4 800 chômeurs, cela fait une baisse de 0,2 %. Dès hier, A. Juppé a affirmé que le chômage a été stoppé. À votre avis ?

M. Aubry : Ce n’est pas mon avis et pas l’avis des Français qui aimeraient bien que le chômage baisse. Je crois que M. Juppé a quand même beaucoup de culot. Le chômage a augmenté de 240 000 personnes depuis qu’il est là, 460 000 depuis que M. Balladur est là. Dans leur famille, chez leurs voisins, partout. Alors oser dire cela, ne pas avoir le courage de dire que l’on n’a pas réussi, je trouve que ce n’est pas moral. Ce n’est pas moral, en plus, dans une campagne électorale. Et, je voudrais poser une question au gouvernement. Après avoir supprimé plus de 400 000 chômeurs en changeant le mode statistique, actuellement on a changé la façon de s’inscrire à l’ANPE, c’est aux Assedic, ce n’est plus à l’ANPE. Cela fait perdre des dizaines de milliers de chômeurs, aujourd’hui, à mon avis, beaucoup plus que la baisse annoncée. Je souhaiterais que M. Juppé réponde à cette question et nous apporte des éléments qu’il s’était engagé à donner à l’Assemblée nationale. Parce que la démocratie, c’est cela, c’est-à-dire la vérité, et ce n’est pas changer les chiffres et les modes de calcul au moment, en plus, où il y a des élections. Donc, qu’il nous réponde là-dessus, cela fait partie du débat démocratique.

G. Leclerc : A. Juppé a traité le texte de la déclaration commune PC-PS de « démagogique, passéiste, dirigiste et verbeux. » Est-ce qu’il n’a pas fait mouche ? La formule est bonne non ?

M. Aubry : Oh, écoutez, franchement, on n’en n’est pas là. Que veulent les Français aujourd’hui ? Ce n’est pas de s’envoyer des injures sur le passé ou sur ce que nous sommes. Ils veulent comprendre ce que nous voulons pour demain. Eh bien aujourd’hui, toutes les forces qui veulent créer une autre société plus solidaire et plus efficace, et non pas cette société libérale qui est toujours plus forte pour ceux qui sont sur les rails et qui crée toujours plus d’exclusion, eh bien toutes ces forces-là – qui vont du Parti socialiste, bien évidemment, au PC, aux Verts – ont décidé de se mettre d’accord sur les grands axes. Les grands axes, c’est quoi ? C’est de faire en sorte que dans notre pays, tout le monde vive mieux : l’accès à la santé et aux soins, la sécurité, l’accès au logement et une éducation qui permette à chacun de s’en sortir. Il faut remettre l’emploi au cœur du dispositif : augmenter les salaires, réduire la durée du travail, créer des emplois de service partout. Voilà ce qu’est cette plate-forme. C’est donc des idées communes pour les gens qui veulent changer et qui pensent que cette société marche sur la tête, comme les Français le pensent actuellement, et qui veulent créer une société plus solidaire, plus forte, pour la France et pour l’Europe.

G. Leclerc : Oui, mais il y a quand même un point majeur sur lequel il n’y a pas d’accord : c’est sur l’Europe. Vous, vous êtes, on le sait, pro-européenne, or, MM. Hue, Chevènement, rejettent Maastricht. Comment gouverner ensemble ?

M. Aubry : Écoutez, je crois que L. Jospin a été très clair à cet égard. Nous, nous voulons appliquer Maastricht en totalité mais dans son esprit, ce que ne fait pas le Gouvernement aujourd’hui. Ce qui veut dire que l’on ne peut pas, au nom de critères – que l’on peut modifier, parce que la conjoncture n’est pas bonne, c’était prévu dans le traité –, ne pas discuter avec nos partenaires. On ne peut pas, au nom de ces critères, faire serrer la ceinture aux Français et préparer pour demain, si M. Juppé est encore là, une deuxième ou une troisième coupe sombre dans les crédits et de nouvelles augmentations d’impôts. Nous, ce que nous voulons, c’est cela. Et c’est, deuxièmement, avoir une vraie politique économique au niveau européen, ce qui est prévu aussi dans Maastricht – le Gouvernement n’en parle plus – une politique de croissance pour plus d’emplois. Donc, une Europe forte et solidaire avec l’emploi et l’homme au cœur. Ce sont cela, les valeurs de l’Europe, et non pas un grand marché financier. Là-dessus, je crois, à gauche, tout le monde est d’accord. Alors qu’à droite, quand on entend M. Séguin, M. de Villiers et M. Pasqua, là nous avons des vrais anti-européens.

G. Leclerc : La droite a également présenté, hier, son programme. On y trouve une baisse d’impôts, la réduction du temps de travail, la décentralisation ? Vous ne pouvez pas être contre tout cela.

M. Aubry : Écoutez, c’est formidable. Le problème, c’est que M. Juppé nous dit : « Je ferai cela en 40 jours. » En 700 jours, il a fait l’inverse. Nous avons aujourd’hui – vous avez vu, cela a été publié hier par les services gouvernementaux – des taux records de prélèvements. Les Français savent bien, aujourd’hui, que c’est la droite qui augmente les impôts. Tous les taux de prélèvements records ont été faits ces dernières années par la droite.

G. Leclerc : Oui mais, ils ont dit c’était pour payer le bilan socialiste.

M. Aubry : Le bilan socialiste, là-aussi, les chiffres le montrent bien. Nous avons terminé avec un endettement de 2 000 milliards de francs. Nous sommes aujourd’hui, avec la droite, à 5 800 milliards. Les déficits de la Sécurité sociale, quand nous étions là, c’était 10 milliards par an, ce qui n’est pas bien, je le reconnais. Aujourd’hui, c’est 50 milliards, malgré la purge, malgré le remboursement de la dette sociale et les baisses de soins qui ont lieu actuellement. Voilà ce que c’est le bilan de M. Juppé. Alors qu’il ne veuille pas en parler, je comprends, qu’il ne veuille pas non plus dire aux Français qu’on va à nouveau se serrer la ceinture quand il sera là, je comprends. Mais qu’il évite au moins les insultes faute d’être capable de nous dire quel changement il veut. Il n’est pas crédible là-dessus. Vous savez, quand je lis, dans la plate-forme, qu’il faudra plus de femmes alors qu’on a viré comme on le sait les femmes, alors qu’il y a au RPR, 8 % de candidates, alors qu’il y en a plus du tiers au Parti socialiste. Où est la crédibilité dans tout cela ?

G. Leclerc : Il y a un autre problème, dans tout cela, si l’on en croit les sondages. Il y a un gros tiers des Français qui sont indifférents, sceptiques. Il y a même un sondage qui dit que les trois quarts d’entre eux sont déçus par la campagne. Cela ne vous interpelle pas ?

M. Aubry : Si, moi cela m’inquiète. Ça m’inquiète parce que nous sommes à un moment clé, aujourd’hui. Ou bien nous allons, en France et en Europe, vers une grande société libérale avec toujours plus d’exclusion et plus de richesse pour ceux qui sont sur les rails, ou bien nous sommes capables, avec les valeurs qui ont toujours été celles de la France et de l’Europe, de solidarité, de justice sociale, mais aussi d’efficacité, de créer une autre société. C’est maintenant qu’il faut le faire. Dans 5 ans, dans 10 ans, il ne faudra pas se plaindre si l’Europe n’existe plus avec ces valeurs et si nous sommes dans un grand modèle anglo-saxon de libéralisme à tous crins. Donc, c’est maintenant qu’il faut faire le choix et je crois qu’il faut que nous arrivions à être crédibles auprès des Français pour leur montrer que notre projet – nous n’avons pas la réponse à tout mais nous savons sur quoi nous avons échoué –, qui est de mettre l’homme et l’emploi au cœur, peut réussir, et nous pouvons modifier profondément les choses.

G. Leclerc : Les Anglais votent demain. T. Blair, le travailliste, est le grand favori. Le seul problème est qu’il est sur des positions conservatrices. A. Madelin dit qu’il est très proche de T. Blair.

M. Aubry : M. Madelin me fait toujours rire. Il avait un modèle en tête : Mme Thatcher. Si M. Blair gagne demain, et j’en suis convaincu, c’est à cause de la politique de Mme Thatcher. Alors M. Madelin court après le succès. Tant mieux si la gauche attire à ce point-là. Là, nous allons quand même extrêmement loin. Mais ce n’est pas sérieux tout cela. T. Blair est un travailliste, c’est un homme qui défend des valeurs de gauche. La gauche gagne des points, cela nous permettra de créer un nouveau modèle.