Déclaration de M. Philippe Séguin, président du RPR, sur la méthode, le "ton nouveau" et la "remobilisation" de l'opposition , Paris le 20 septembre 1997.

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Circonstance : Colloque intitulé "Quelles propositions pour demain ?" organisé à l'initiative M. Edouard Balladur réunissant les partis et mouvements de l'opposition, à l'hôtel Nikko à Paris le 20 septembre 1997

Texte intégral

Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames, Messieurs,

C’est sur des thèmes forts que vous avez été conviés à réfléchir : progrès économique, solidarité, Europe, avenir de la Nation…

Quel que soit le mouvement, le parti, la formation, le courant de pensée auxquels, les uns et les autres, nous pouvons appartenir ou nous référer, nous devons convenir que ce sont bien là les sujets sur lesquels les Français jugeront, en définitive, de notre capacité de proposition… et donc de notre aptitude à gouverner.

Je suis d’autant plus reconnaissant à Edouard Balladur de m’avoir invité à m’exprimer devant vous dans le cadre de ces travaux.

Plus qu’une contribution en bonne et due forme, que m’interdirait le souci d’un bon déroulement du processus de réflexion dans lequel est engagé le Rassemblement pour la République, et que je ne saurais conclure prématurément, ce sont quelques considérations sur les enjeux de vos débats que je voudrais, modestement, vous livrer…

En rappelant tout d’abord, ce qui paraît aller sans dire – à tort – que dans une démocratie comme la nôtre, le rôle fondamental de l’opposition consiste en a formulation de propositions cohérentes pour l’avenir. Cette fonction de proposition est première. Elle est incontournable. Elles seule, au demeurant – et j’y reviendrai – apporte sa légitimité et son éclairage à la critique.

Cette fonction de proposition – par l’opposition – est, de surcroît, irremplaçable. Car tout gouvernement est pris – aspiré, pourrai-je dire – par les contingences du moment… Et c’est d’autant plus vrai pour ce gouvernement-ci qui en est encore, chacun le voit, à reprendre, à réélaborer ses propositions pour maintenant, puisque le programme sur lequel il s’est fait élire, n’avait pas grand-chose à voir ni avec ce qu’il fait à présent, ni avec ce qu’un gouvernement, quel qu’il soit, peut envisager de faire aujourd’hui.

L’apparente euphorie de ces longs mois d’été, où le pays s’est comme engoncé dans une torpeur muette et, apparemment admirative, ne saurait faire illusion. L’inquiétude, l’angoisse pour l’avenir, les seulement – et provisoirement – estompés.

La phase d’alternances à répétition que nous vivons depuis près de 20 ans ne fait probablement que traduire la recherche par notre peuple de réponses crédibles à son désarroi. Et la stabilité politique, gage de permanence des choix et des stratégies, donc gage d’efficacité, ne reviendra vraiment que lorsque les Français auront pu majoritairement s’identifier à son projet qui s’inscrive dans la durée, éclaire leur chemin, et mette un terme à leurs angoisses. Un projet qui ne se réduira pas à un échéancier de promesses (plus ou moins bien tenues) mais qui traduira une nouvelle conception de notre démocratie républicaine, qui réorientera nos comportements, notre éthique, nos propositions pour l’avenir.

Ce projet n’existe pas encore. Il était clair, dès la déclaration de politique générale du 19 juin, que le Gouvernement et sa majorité ne pouvaient en être porteurs.

C’est ce projet qu’il nous faut forger ensemble pour demain. Et tant que ce travail n’aura pas été accompli, alors, oui, assurément nous ne pourrons espérer que prendre à nouveau notre tour dans une ronde dérisoire sont nul ne pourra prévoir la fin…

Mesdames, Messieurs,

Nous devons bien comprendre que les Français ont aujourd’hui davantage soif d’explications que d’invectives. Et que notre critique aura d’autant plus de chances de se faire entendre qu’elle s’appuiera, qu’elle s’adossera à une véritable alternative. Une alternative globale. Car plus encore qu’à des critiques pointillistes, ce gouvernement s’expose, nous le sentons bien, à une critique de fond, portant sur son incapacité à prendre la mesure précise de la problématique à laquelle est confrontée le pays. Encore faut-il que nous soyons rapidement au clair sur notre propre approche…

Je déplore de ne pas avoir été bien compris, sur ce point, ni par certains amis qui souhaitaient, me semble-t-il me voir ne position plus exclusivement polémique, ni par l’actuel Premier Ministre qui me morigène souvent pur des raisons très exactement inverses. Pour autant, je ne m’éloignerai pas de cette ligne très simple, qui consiste avant tout à satisfaire chez les Français leur souci de la vérité.

Je me plais à constater que c’est également votre souci.

Vous avez compris que ce que veulent nos concitoyens, c’est savoir où nous en sommes, ce qu’il faut faire pour sortir de la situation présente de stagnation, comment nous remettrons le pays au travail, et comment les fruits de ce travail seront partagés. Ils ne croient plus guère, malgré Mme Voynet, à la guérison par les plantes et auraient plutôt tendance à penser, comme son collègue Jean-Pierre Chevènement, que le chômage est aujourd’hui la plus grave pollution qui les frappe. Cette ligne de vérité que les Français attendent de nous, je ne compte pas céder aux sollicitations des uns et des autres en la sacrifiant.

Pourtant, de ce point de vue, l’été aura été fertile en contre exemples… On a beaucoup parlé, et sans doute pas assez pesé et médité.

Je ne crois pas en effet qu’il ait été très raisonnable de déballer devant les Français, à la une des journaux, polémiques et controverses sur une éventuelle fusion des diverses composantes de l’opposition… D’abord parce que je ne suis pas certain que cette question suscite un intérêt soutenu chez nos compatriotes… Ensuite parce qu’elle renforce dans leur esprit, l’idée que les « politiques » ne sont vraiment obsédés que par les questions qui les concernent eux seuls, obnubilés qu’ils seraient par les manœuvres tacticiennes.

Ce qu’attendent les électeurs qui nous ont soutenus, comme ceux qui nous avons découragé, de même que les premiers, les tout premiers déçus de la nouvelle majorité, sans oublier tous ceux que nous ne manquerons pas de regagner bientôt… ce qu’ils attendent, c’est que nous définissions un corps d’analyse, un corps d’explications et, enfin, une direction pour la France. Pour que demain, ensemble, nous soyons capables de la gouverner.

Tout le reste ne sera que vaine agitation.

Le temps de la politique spectacle s’achève. Je ne la pleurerai pas. Ce temps s’achève parce que l’époque est austère. Et le défi à relever plus complexe que jamais.

Ne nous y trompons pas, en effet. C’est bien ce que nous ont déclaré de but en blanc les électeurs en infligeant une défaite moins à une alliance politique qu’à un système dans son ensemble. Et nous devons prendre la mesure de ce bouleversement.

Par leur vote, les Français ont à l’évidence, moins condamné une majorité qu’un système. Il suffit de considérer le taux d’abstention record. Il suffit de mesurer l’étendue du vote protestataire – toutes tendances confondues. Nos concitoyens ont le sentiment que nous avons changé, peu à peu, sans l’avoir voulu, de système politique. Nous sommes passés d’un système démocratique, où le peuple décide librement de son destin, par l’intermédiaire de ses représentants élus, à un système que je qualifierais de technocratique, si le mot n’était si galvaudé, un système où l’on se contente d’administrer, tant bien que mal, des évolutions prétendument inéluctables et indépassables, en court-circuitant le débat politique nécessaire réduit à un théâtre d’ombres.

Entendons-nous bien : disant cela, je ne rejoins nullement ceux qui, par facilité, font des hauts-fonctionnaires les boucs émissaires de notre impuissance. Ce sont les politiques qui ont trop souvent renoncé, et qui sont devenus, eux-mêmes, trop souvent de purs gestionnaires. Parce qu’ils se sont résignés. Parce qu’ils en sont venus à se convaincre que les contraintes – très réelles et de plus en plus pesantes – qui s’exercent sur leur action étaient plus que des contraintes : des obligations absolues, parfois même des mystères qui nous dépassent, qu’il était vain de chercher à maîtriser.

La technostructure, les technostructures, ont donc pris le pouvoir par défaut. Or ce pouvoir, elles n’ont pas vacation à l’exercer. E je ne suis même pas sûr qu’elles souhaitent réellement l’exercer…

En tout cas notre peuple a le sentiment que ses dirigeants se contentent de gérer, tout en amusant la galerie, tandis que les vraies décisions se prennent ailleurs, et qu’on perd ainsi dans l’urgence et la pression toute perspective à long terme pour notre société.

Les responsables de l’ancienne majorité n’ont pas ménagé leurs efforts pour tenter de freiner une telle dérive. Ces efforts n’ont pas toujours été reconnus à leur juste valeur. Les Français ont retenu, assez logiquement somme toute, l’évolution générale. Ils en sont venus à penser que leur vote ne servirait plus à rien, ou presque. Que tous les partis politiques se valaient et proposaient, peu ou prou, la même chose.
Dès lors, ils n’avaient plus qu’une solution : manifester leur indifférence, ou leur mécontentement.

Le résultat, nous le connaissons. Le résultat, c’est la percé spectaculaire du Front national. Sera-t-il demain la seule formation politique à avoir su convaincre un grand nombre de Français qu’il existait encore une marge pour l’action propre des gouvernements ?

Tel est bien en effet le danger. Qu’une formation qui demeure dirigée par un noyau dur issu de l’extrême droite parvienne à donner le sentiment qu’elle seule propose de gouverner, et non pas seulement d’administrer le cours des choses.

Posons la question clairement : comment cette formation a-t-elle bâti son succès ? Croit-on vraiment que ses millions d’électeurs soient, dans leur majorité, fascistes, racistes, intolérants, antirépublicains ? La vérité n’est-elle pas, tout simplement, qu’elle a su les convaincre, par la voix claironnante de son chef, qu’elle était la seule à savoir s’indigner ?

Il ne s’agit donc ni de nous renier, ni de passer je ne sais quel accord – nous n’y gagnerions que le mépris de ceux que nous prétendons entraîner. Il s’agit seulement de rendre à nos idées consistance et crédibilité. Non point certes en se contentant d’envoyer des « signaux », des « messages forts », et d’autres fariboles publicitaires. Il s’agit d’avoir quelque chose à dire, et de le dire clairement. Il ne suffit pas d’écouter : il faut aussi entendre…

Entendre, cela veut dire comprendre, le cas échéant s’indigner. Cela veut dire aussi proposer.

Je viens d’effectuer une série de déplacements en province, pour rencontrer les « militants gaullistes ». Je ne suis pas allé étaler des certitudes. Non… Je suis allé les écouter… et m’efforcer de les entendre.

Beaucoup s’en sont esbaudis ou à tout le moins étonnés. Ce qui donne quelque idée de l’état du débat public en France.

J’ai autant plus souhaité qu’un grand débat interne soit lancé ; pas un débat pour la forme, mais un débat approfondi, sincère, authentique. Un débat où chacun puisse dire, en toute liberté, ce qu’il a sur le cœur, ce qu’il pense de la France, de son avenir, des problèmes des Français, de la manière dont nous pouvons et devons y répondre. Et ce qui m’a frappé, en retour, c’est la vigueur, la franchise des réactions que j’ai recueillies.

Je ne peux, bien entendu, que parler pour mon mouvement. Mais il me semble que ces militants ont bien traduit l’état d’esprit des Français. Cette volonté, encore une fois, d’être écouté – mais écoutés réellement, et non salués d’un hochement de tête distrait, puis remerciés par quelques chiffres invérifiables avec en prime, une poignée de rassurantes paroles apolitiques.

Encore une fois, comme à chaque moment décisif de son histoire, le pays a soif de vérité.

Cela ne nous dispense certes pas de tenter d’analyser les ressorts de l’action gouvernementale.

Car, au risque de me voir à nouveau mis au piquet par M. Jospin, il faut tout de même dire quelques mots sur les faux principes qui agissent en profondeur sur ce gouvernement de la gauche.

On a connu, en 1981, une gauche brouillonne, échevelée, ébahie par un accès aux responsabilités si longtemps différé par le corps électoral, capable du pire, on s’en souvient encore, mais aussi, pourquoi ne pas le dire, souvent, sincère, généreuse, ignorante de l’art de gouverner mais proche de son électorat. Longtemps, l’opinion a fait crédit à cette gauche de ses grandes bévues au bénéfice de son inexpérience.

Puis on a retrouvé, en 1988, une gauche assagie, délestée ses ministres communistes, soucieuse de dialogue avec le corps social, et susceptible, chez les meilleurs – ils n’étaient pas majoritaires, j’en conviens, – de dépasser certains dogmes. Oh ! cela ne dura pas, mais cela exista.

Aujourd’hui, 1997, troisième retour de la gauche, qu’avons-nous en face de nous ? Un réalisme de type 1988 qui tourne à un certain cynisme au service d’une rhétorique et d’une théâtralité de 1981 qui semble parfois une évocation d’un vieux film déjà vu.

Car enfin, la controverse sur les nationalisations aurait dû être tranchée comme elle l’est partout ailleurs à gauche en Europe, y compris chez les anciens communistes italiens du P.D.S. Sans parler de la Chine communiste qui n’a pas les effarouchements virginaux de M. Gayssot… qu’on y songe : nous répugnons à une privatisation alors que les successeurs de Deng Hsia Ping en décident 300 000 d’un coup !

De même l’écologisme répressif et fiscal devrait avoir entamé sa courbe descendante comme il le fait Outre-Rhin. Comme aurait dû disparaître cette stratégie de lutte contre le chômage qui est si évidemment dépassée…

Je ne méconnais nullement les qualité d’homme d’Etat de tel ministre, l’intégrité de tel autre, la sincérité et la froideur d’un troisième. Mais dans tout cela, si on prend un peu de champ, que découvre-ton ? Un gouvernement qui s’est fait élire par surprise en déclarant bien haut que 2 + 2 était égal à 8, qui admet peu à peu que 2 + 2 pourrait être équivalent à 7 et qui bénéficie au ministère des finances d’un oracle souriant qui confie en privé à des journalistes que bientôt 2 + 2 sera proclamé égal à 5 ce qui, faut-il s’en étonner, provoque les applaudissements du Wall Street journal.

Et bien oui, au risque de me faire gronder par Lionel Jospin, ne manquons pas de dire une fois pour toutes que 2 + 2 = 4, et pour assez longtemps.

Lorsqu’un gouvernement prétend combattre le chômage et que :
    1. – il prélève sur les seuls profits des entreprises les impôts nécessaires au risque de tarir l’investissement, et complète maintenant son pactole par un prélèvement sur l’épargne ;
    2. – il distribue des emplois fictifs ou semi-fictifs subventionnés qui, dans le meilleur des cas augmenteront les effectifs de la fonction publique, dans le pire détruiront des emplois préexistants ;
    3. – il continue à se dire – sous bénéfice d’inventaire – dispos à réduire le temps de travail sans perte de salaire ni gains de productivité, seul dans ce cas au monde ;
    4. – il saupoudre le tout d’interdits écologiques tous consommateurs d’emplois et s’apprête comme on le voit dans le Puy-de-Dôme à pourchasse les grands travaux…
    5. – il remet en cause les principes même de notre politique familiale et, en prime, casse le système d’aide à la garde d’enfants à domicile.

… On peut se demander où, quand, comment ce pouvoir sans idées, ni fidélités véritables va s’y prendre pour aller au-devant des vraies préoccupations des Français.

Ce pouvoir qui nous prépare une France frileuse, et vacancière – ce n’est pas incompatible – qui ne croit plus qu’on puisse recréer du travail et de la croissance, qui ne croit plus qu’on obtenir de nos concitoyens des sacrifices volontaires, et qui préfère les en préserver par des tours de passe-passe, qui pense que la politique consiste à satisfaire au jour le jour telle ou telle corporation, la plus criarde, la mieux appuyée par les médias, et qui se projette au mieux dans un avenir de 12 à 15 mois.

C’est assez dire que plus que contre des réformes aussi ouvertement aberrantes qu’elles sont apparemment séduisantes, nous nous devons battre contre l’inaction, contre la temporisation, contre l’absence de décision. Or, cette inaction, cette impuissance même sont des plus périlleuses dans un monde où il importe par-dessus tout d’anticiper. C’est assez dire que l’opposition n’a pas à être ou ne pas être « constructive ». Elle doit, en revanche, construire ses propositions. D’abord, celles qui permettront de répondre aux problèmes qui touchent de près la vie des Français ; ensuite celles qui engagent sur la durée l’avenir du pays.

Il est là, le vrai rôle de l’opposition. Une fois encore, il n’est pas de débattre sur la place publique de tactique ou de stratégie, de manœuvres d’appareils : ce serait la meilleure façon de brouiller définitivement les Français avec la chose publique, alors que notre devoir est au contraire de les réconcilier. Notre rôle est de nous préparer à gouverner, à quel qu’échéance que ce soit.

Il semble que nous ayons un peu de temps devant nous. Mettons-le à profit sans tarder.

Comment ? Sûrement pas en multipliant les slogans et les incantations. Mais en procédant avec modestie, avec constance, avec détermination.

Le problème qui nous es posé est d’abord un problème de méthode. Cessons de réagir par réflexe parlovien, en nous déterminant toujours par rapport aux uns ou par rapport aux autres… Réaffirmons nos valeurs propres, e prenant en considération le monde tel qu’il est et tel qu’il va, et en montrant ainsi la modernité des principes dans lesquels nous croyons.

Ainsi, nous croyons dans la valeur du travail. Mais le travail conçu comme un acte d’émancipation, d’épanouissement individuel, de promotion sociale. Comme une valeur positive. Alors que, quoi qu’ils s’en défendent, les socialistes en sont restés eux, au travail comme source d’aliénation… et c’est pour cela qu’ils en sont toujours aux mêmes vieilles recettes, qui conduisent à le réduire, à le rationner.

De même, nous croyons que l’objectif fondamental de la République – qui est aussi le plus difficile à atteindre – c’est l’égalité des chances. Autrement dit, la faculté pour chacun de s’intégrer et de réussir dans la société en fonction de ses seuls mérites. C’est encore une valeur positive, fondée sur la responsabilité personnelle de chaque individu, mais aussi sur la responsabilité collective qui incombe à la société envers les plus faibles ou les plus démunis. Quoi qu’ils s’en défendent, les socialistes continuent, eux, de croire aux vertus de l’égalité par le nivellement – ce qu’on appelle communément l’égalitarisme –, ce qui explique leur manie continuelle de jouer avec l’Ecole. L’Ecole, cet instrument primordial de l’égalité des chances, qui a besoin de tout, sauf qu’on lui fasse jouer les cobayes perpétuels…

Je pourrais dire encore que nous croyons dans la nation comme espace privilégié de solidarité… Nous avons, j’en suis conscient, des divergences d’appréciation entre nous, dont nous devons débattre avec franchise.

François Léotard et moi, n’avons pas la même conception de notre organisation territoriale. Nous en discuterons loyalement. La synthèse n’est pas facile à réaliser, elle entraîne toutes sortes de questions sur la finalité de Nations après l’Euro, sur notre capacité à garantir ou non le plein emploi, sur l’avenir du travail lui-même.

Le champ ouvert à notre réflexion est donc immense. Et, encore une fois, il ne s’agit pas de disserter à l’infini, de se réfugier dans de vastes abstractions, mais au contraire de préparer des réponses très concrètes à des situations que nous allons très bientôt connaître, que nous connaissons même souvent déjà, et qui sont lourdes de menaces pour l’équilibre de nos sociétés.

D’une certaine manière, l’euro en lui-même est déjà un sujet dépassé… quand ses conséquences, elles, sont déjà à l’ordre du jour. Nous souhaitons être prêts pour ce débat là…

Il y a aussi nos institutions, dont, comme l’a très justement souligné Edouard Balladur, nous devons avoir le courage de reconnaître qu’elles trahissent désormais de sérieuses faiblesses… et donc qu’elles appellent d’importantes évolutions.

Et « l’écologie », préoccupation essentielle pour les Français, que nous avons fort imprudemment abandonnée aux manipulations politiciennes de nos adversaires, comme nous l’avons fait avec d’autres, et tout aussi imprudemment, pour la nation… S’il est bien un pays, en Europe, pour qui la nature, la qualité de l’espace de vie constituent des atouts essentiels, c’est la France. Il me semble que la protection de l’environnement est un sujet encombré de belles intentions et de fausses vérités, et donc un sujet sur lequel nous pouvons formuler des propositions réellement sérieuses – à condition de bannir toute démagogie, toute complaisance médiatique.

Mesdames, Messieurs,

Une méthode intelligente, un ton nouveau, un traitement résolu et ambitieux des questions de fond qui se posent à la société française : tel est, à mon sens, le triptyque qui doit présider à la remobilisation de l’opposition. Le reste, encore une fois, n’intéresse personne, ou viendra de toute façon de surcroît…

Oh, bien sûr, on ne puisera dans cette démarche aucun effet d’annonce fracassant… Mais c’est ainsi que nous aurons bientôt un avis, des positions, une vision de l’avenir solides, réalistes, que nous aurons définis, arrêtés ensemble.

Et je vous assure que c’est ainsi que nous trancherons, réellement, profondément, sur la politique actuelle, et que nous crèverons cette bulle, non pas spéculative, mais contemplative, dont note pays meurt à petit feu. C’est ainsi que là où tant d’autres doutent et hésitent, nous retrouverons nos convictions et, plus encore, notre force de conviction.

Il est là, le vrai bon sens politique, comme le Français l’ont en réalité compris depuis longtemps, eux qui ne demandent, somme toute, qu’une chose toute simple : être entendus, et savoir que, grâce à eux, avec eux, et par eux, la France sera gouvernée.