Texte intégral
35ÈME ANNIVERSAIRE DU TRAITÉ DE L’ÉLYSÉE DISCOURS DU MINISTRE - 22 janvier 1998
Monsieur le Ministre, Monsieur le Maire, Monsieur le Préfet, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Mesdames et Messieurs les Députés, Mesdames et Messieurs, Chers Amis,
C’est pour moi un honneur et un plaisir de vous recevoir à Montbéliard, en ce jour du 35ème anniversaire de la signature du Traité de l’Élysée.
J’ai souhaité placer cette commémoration solennelle sous le signe de l’amitié et de la convivialité, en vous accueillant, aux côtés du sénateur-maire, dans cette ville qui m’est chère, sur ces terres si riches d’histoires entre nos deux peuples, et donc particulièrement désignées pour nous offrir le cadre de cette rencontre.
Je rappelle en effet, que le 13 novembre dernier, nous avons célébré ensemble, Allemands et Français, les 600 ans de relations entre le Würtemberg et le pays de Montbéliard.
Responsable ministériel, parlementaires, élus locaux, et citoyens, nous avons tous puisés, à Montbéliard, et le comte Eberhard de Würtemberg, beaucoup d’inspiration pour notre action d’aujourd’hui.
Nous nous retrouvons maintenant pour célébrer un autre pacte fondateur, même s’il ne peut à l’évidence être mis sur le même plan. Certains y verront peut-être le goût immodéré des Français pour le culte du passé, comme si l’avenir faisait trop peur. Cette rencontre, à mes yeux, a un tout autre sens. Nous, Allemands et Français savons, sans doute plus que d’autres, combien l’histoire et la géographie façonnent les peuples, imprègnent leurs identités, orientent les choix de demain. Car tel est bien le sens de cet évènement qui nous rassemble : faire une pause dans le rythme du quotidien, nous tourner un instant vers notre passé partagé pour y trouver des clefs et des forces et, mieux agir au présent pour préparer l’avenir.
Dans cet esprit, je voudrais d’abord, si vous le permettez, évoquer rapidement ces années écoulées depuis la signature par le chancelier Adenauer et le général de Gaulle du Traité qui s’inscrivait lui-même dans le sillon ouvert, un certain 9 mai 1950, par Robert Schumann lançant à l’Allemagne et à la France un appel à fusionner leurs charbonnages et leurs aciéries, de Gaulle, Adenauer, Robert Schumann, mais aussi François Mitterrand et Helmut Kohl : voici cinq Européens qui, par-delà les amitiés et les divergences politiques, accompagnent quotidiennement mon action, par leur présence, en photo ou par un buste dans bureau (avec un photo aérienne du pays de Montbéliard…).
Le chemin que nous avons parcouru depuis trente-cinq ans est impressionnant. L’Europe et le monde sortaient en 1963 d’une période particulièrement délicate. La crise de Cuba avait fait craindre, l’année précédente, le déclenchement d’un conflit nucléaire entre l’Amérique et l’Union soviétique. Le processus de construction européenne n’en était qu’à ses premières étapes, avec ce qu’on appelait alors le Marché commun.
A une époque où l’Europe occidentale devait mobiliser toutes ses forces pour assurer sa survie, le rapprochement franco-allemand apparaissait comme une manifestation d’amitié, mais aussi comme une obligation dictée par les circonstances. D’ailleurs, certains observateurs ne sont pas privés de déceler chez les uns et chez les autres des arrière-pensées, parfois au détriment des convictions profondes sur l’avenir de l’Europe et de nos deux pays qui inspiraient, j’en suis convaincu, le général et le chancelier.
En 1998, notre continent n’est plus divisé en deux blocs antagonistes. Sa géographie est réconciliée avec son histoire, et la notion d’Europe occidentale a perdu de sa pertinence. L’Union européenne est sur le point de s’élargir à une échelle sans précédent. L’Allemagne elle-même s’est profondément transformée : elle a retrouvé son unité et peut légitimement prétendre jouer un rôle accru sur la scène internationale. L’amitié franco-allemande apparaît, quant à elle, comme une réalité incontestable, fait partie du paysage. Elle est, en même temps, sans cesse mise à l’épreuve de nouveaux enjeux.
Au fil du temps, les fondements de cette relation ont pu sembler se conjuguer selon des équilibres variables : volonté de sceller la paix et la réconciliation entre nos deux pays ; alliance face aux périls menaçant l’Europe occidentale ; le tout uni dans une même détermination à inscrire les destins des deux peuples dans un horizon européen.
35 ans après, la poursuite et le renforcement de nos relations, dans le sillage du Traité de l’Élysée, ont clairement montré que l’amitié franco-allemande n’était pas seulement le produit de circonstances dictées par la nécessité. Pour nous, aujourd’hui, il ne fait pas de doute que l’amitié franco-allemande est un choix réfléchi, une volonté d’agir en commun transcendant nos intérêts respectifs, sans évidemment les effacer.
Notre première responsabilité est aujourd’hui de continuer à faire partager ce sentiment profond à nos compatriotes. Ce jugement me conduit à aborder les difficultés que nous ne devons pas nous dissimuler. A mon sens, elles proviennent d’une double situation. D’un côté, la relation franco-allemande fait partie, je le disais, du paysage ; elle est considérée comme acquise, ce qui a une contrepartie : elle est en quelque sorte banalisée, identifiée à des rencontres périodiques dans lesquelles certains ne voient que rites et cérémonial. De l’autre côté, l’Europe, notre projet commun, est confrontée à une série de défis sans précédent que nous avons tous en tête : réussir la monnaie unique, réaliser et maîtriser l’élargissement, adapter nos institutions, et surtout créer un espace de paix, de croissance et de solidarité sociale.
Ainsi l’idéal de la construction européenne qui nous lie, de même que nos liens si uniques, n’ont pas perdu de leur pertinence, bien au contraire, dans un contexte international transformé en profondeur. Il nous revient d’apporter des réponses à des questions qui constituent autant de défis pour la relation entre nos deux pays. Quel doit être le rôle de l’économie européenne et de son modèle social à l’heure de la mondialisation ? Quelle doit être la place de l’Europe sur la scène politique internationale alors que la disparition des blocs crée des obligations, comme l’a montré le conflit yougoslave, mais aussi des chances à saisir ? En résumé, comment construire l’Europe puissance ?
Dans le passé, nos deux pays se sont montrés à la hauteur. Je rappellerai que l’idée d’un Système monétaire européen, lancée en 1974, et plus récemment celle d’une Union économique et monétaire sont des exemples parmi d’autres de notre rôle moteur. Le SME lancé par le chancelier Schmidt et le président Giscard d’Estaing préfigurait en quelque sorte l’Union économique et monétaire que nous avons voulue avec le Traité de Maastricht. Ce Traité, tout comme la préparation de l’élargissement de l’Union, ont été les fruits de notre volonté commune. Ces accords exprimaient notamment la conviction du chancelier Kohl que l’unité allemande et l’unité de l’Europe s’inscrivaient dans une même dynamique.
La France et l’Allemagne coopèrent aussi en dehors du cadre institutionnel européen. Elles dialoguent avec la Pologne dans le cadre du Triangle de Weimar. Elles développent un dialogue franco-germano-russe. Nos deux ministres des Affaires étrangères ont récemment effectué un voyage commun à Sarajevo. Telles sont quelques illustrations parmi beaucoup d’autres.
Ces initiatives bilatérales ne sont pas des gestes conçus en fonction de nos seules perspectives nationales. Elles touchent à des questions essentielles pour l’avenir de l’Union européenne, telles que la place de la Russie en Europe et la stabilité dans les Balkans. Elles se veulent un exemple de ce que devraient retenir les relations entre les capitales européennes.
Je me félicite à cet égard de la volonté de l’Allemagne d’œuvrer en faveur d’un engagement européen croissant en Algérie. Cette volonté, ajoutée à l’intérêt naturel de la France pour nos amis d’outre-Méditerranée, ont joué essentiel dans l’élaboration de la décision européenne de développer le dialogue avec Alger.
Notre coopération culturelle bilatérale, mise en relief à l’occasion du Sommet de Weimar, a également valeur d’exemple pour nos partenaires européens. Elle montre le type d’initiatives que les États peuvent adopter pour permettre une meilleure connaissance de l’autre et renforcer l’amitié entre les peuples.
Il est vrai que la France et l’Allemagne ont parfois des approches spécifiques. Elles n’ont, par exemple, pas toujours la même vision du rôle qui devrait être celui de l’Europe sur la scène internationale, et notamment des modalités de coopération souhaitables avec les États-Unis. Aujourd’hui encore, nous pouvons avoir des visions un peu différentes sur les grands dossiers de l’heure – l’élargissement, la réforme institutionnelle, l’avenir des finances communautaires. Nous en avons parlé ce matin, avec Werner Hoyer. Nos deux pays partagent toutefois la conviction que l’Union européenne doit se voir reconnaître sur la scène internationale un rôle à la mesure de son poids économique et de sa capacité de contribution financière à la résolution des grandes crises. Et puis, nous savons, en chaque occasion, surmonter nos contradictions pour relancer le fameux « moteur franco-allemand » sans lequel l’Europe serait en panne.
C’est le Traité de l’Élysée qui a été l’acte fondateur des relations développées depuis lors entre nos deux pays. Des rencontres au sommet ont lieu au moins deux fois par an, de nombreuses rencontres plus informelles entre hauts responsables français et allemands, sont organisées afin de surmonter les obstacles. Voici les efforts, voici la volonté qui, de part et d’autre, ont permis d’arriver aux résultats que nous connaissons aujourd’hui, à donner de la chair à ce texte.
A mesure que se forgeait notre amitié et que se créait cette communauté d’intérêts et de destin, notre coopération s’est étendue bien au-delà des trois domaines prévus initialement par le Traité (Affaires étrangères, Défense, Jeunesse et Éducation). Le cadre à la fois souple et ambitieux du Traité a été peu à peu rempli par les gouvernements allemands et français successifs. Il y a dix ans, le président Mitterrand et le chancelier Kohl ont ainsi imprimé une nouvelle dimension à la concertation en décidant de l’instauration d’un Conseil de défense et de sécurité commun et d’un Conseil économique et financier.
Je vous invite maintenant à regarder l’avenir, en tirant quelques enseignements de notre expérience commune.
Le Traité de l’Élysée, au-delà de sa haute valeur symbolique et politique, constitue aujourd’hui une référence qui autorise le développement d’un dialogue diversifié, nourri, sur tous les grands thèmes d’intérêt commun, et favorise le « réflexe franco-allemand » qui toujours nous guide.
Démarche au départ bilatéral, elle a su rester pertinente, dans le cadre européen, car nos deux pays, forts de leurs responsabilités, ont toujours su en faire bénéficier l’entreprise européenne dans son ensemble. Cette approche est, là aussi, plus actuelle que jamais car la relation franco-allemande ne signifie en aucune manière exclusion des autres partenaires. Elle offre au contraire un cadre inclusif, ouvert à tous, susceptibles de favoriser l’émergence du consensus communautaire.
Aujourd’hui, alors que l’ordre ancien a disparu et que l’Europe connaît une mutation profonde, des esprits chagrins mettent en doute notre détermination commune. Pour aller de l’avant, sachons garder la mémoire de ces trente-cinq années de coopération ! Durant cette période, des obstacles sont parfois apparus, pourquoi le nier. Nous avons toujours démontré que nous savions les surmonter. Les tâches que nos deux pays doivent aujourd’hui assumer son immenses et exaltantes. C’est la construction de l’Europe, c’est notre identité et la place de notre continent dans le monde qui est en jeu. C’est aussi, ne l’oublions pas, le rapprochement de l’Europe et des peuples, sans lequel notre construction resterait désincarnée, et fragile. Je pense évidemment à la nécessité de lutter contre ce fléau qu’est le chômage, et qui mine nos sociétés.
Je suis persuadé que nos deux pays sauront se montrer à la hauteur de l’évènement et dignes de leur passé, marqué, il y a trente-cinq ans, par le général de Gaulle et le chancelier Adenauer.
Je suis fier et ému de célébrer aujourd’hui l’Histoire parmi vous. Je pense à ce grand homme politique allemand, Ernst Reuter. Celui-ci, maire de Berlin après la guerre, considérait que le sort de la démocratie repose sur la foi dans l’histoire. C’est pourquoi j’ai le sentiment d’être, avec vous, de plein pied dans les enjeux les plus actuels, en me remémorant ce moment fort qui appartient à tous.
ARTICLE DANS LA REVUE DE L’ASSOCIATION FRANCO-ALLEMANDE DE SCIENCES-PO (Paris, le 23 janvier 1998)
* Le rôle du tandem franco-allemand dans la construction européenne.
Pour entrer immédiatement dans le vif du sujet, je voudrais vous faire part de ma conviction profonde sur ce thème, qui alimente à l’infini les débats des experts et les analyses des journalistes. Elle repose sur un double constat. Tout part en Europe de l’entente franco-allemande. Elle est aujourd’hui plus nécessaire que jamais.
Tout part en Europe de l’entente franco-allemande. C’est finalement un constat banal. Si banal que certains ont fini par croire qu’elle avait le statut d’une loi de nature, tant qu’au moindre désaccord entre l’Allemagne et la France il est immédiatement question de crise. En réalité, l’entente franco-allemande c’est du politique concentré. C’est parce que nous l’avons voulu qu’il y a eu la réconciliation franco-allemande, qui fonde, depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, notre relation. Je crois que l’idée de mettre au cœur de nos relations la volonté de surmonter notre histoire et de s’émanciper de ses séquelles, pour construire ensemble notre avenir, garde une portée universelle.
Pourtant les différences entre nos deux pays restent nombreuses. Je ne connais guère de sujets sur lesquels, au départ les positions soient identiques. Il y a une complicité latine entre la France et l’Italie, une sympathie marquée de réserves avec l’Espagne, une entente parfois avec la Grande-Bretagne, une courtoisie lucide, une alliance de raison ou un accord de circonstance avec tel autre de nos partenaires. Il y a rarement connivence spontanée entre Français et Allemands. Demandez à n’importe quel homme politique, industriel, artiste : les clichés ont la vie dure tant les différences sont profondes. Beaucoup sépare Français et Allemand sauf, et c’est décisif, parce que cela change tout, l’essentiel, c’est-à-dire leur volonté irréductible de rapprocher les positions pour faire prévaloir l’intérêt européen sur les antagonismes nationaux. Résultat de notre volonté politique commune, l’entente entre nos deux pays n’est pas un acquis. Elle se construit en permanence. Ce faisant, nous produisons, si j’ose dire, de la convergence. Et bien souvent, sur la base de ce travail de synthèse, l’accord de l’ensemble des partenaires est alors possible.
Des doutes pourtant s’insinuent de manière récurrente. La France et l’Allemagne ne seraient plus capables de porter un projet européen mobilisateur. Avec la fin de la guerre froide, les différences seraient devenues des divergences indépassables. L’Europe à l’heure de la mondialisation n’aurait plus guère besoin de s’affirmer comme union politique. Je ne partage pas ces critiques, mais les inquiétudes qu’elles manifestent ne doivent pas être considérées illégitimes.
Au cours de ces dernières années, nous avons trop souvent donné l’impression que l’Europe que nous faisions était une énorme machinerie molle et technocratique. Nous avons débattu de l’euro, aussi décisive que soit la question de la convergence économique, en oubliant que la monnaie unique était en même temps un projet politique, porté d’abord par l’Allemagne et la France, qui visait à tremper définitivement l’unité de l’Europe. Nous nous sommes concentrés sur la question de la nécessaire stabilité monétaire en oubliant que pour nous, Allemands – avec l’économie sociale du marché – et Français – avec notre modèle social – l’enjeu était bien la croissance et l’emploi, la cohésion et la solidarité sociale.
Je dis, nous, Allemands et Français, parce que j’ai la conviction que la perception d’un certain essoufflement du projet européen est une responsabilité partagée. D’abord, nous sommes les seuls à pouvoir, ensemble, faire avancer l’Europe. Il n’y a naturellement pas de directoire franco-allemand, mais deux États singuliers, conscients de leurs responsabilités et de leurs intérêts, conscients que leur partenariat a permis la construction européenne. C’est une relation étroite, ouvert et non-exclusive. C’était vrai à Six, ce l’est plus encore à Quinze. Cette idée a trouvé sa traduction dans le nouveau traité d’Amsterdam avec « les coopérations renforcées » qui permettront à tous ceux qui veulent continuer d’entreprendre de le faire sans être arrêtés par les hésitants ou les sceptiques. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’initiative sur cette question est venue dans nos deux pays.
Ensuite, nous avons été à tour de rôle sur la réserve. Pendant des mois l’insistance de notre partenaire allemand à mettre en place un système quasi mécanique de sanctions et des contraintes automatiques sur les politiques budgétaires pour assurer la stabilité monétaire a pu faire accroire que la politique a été évacuée. Quand nous parlions alors de gouvernement ou de pôles économiques, pour tenter de réintroduire l’autorité politique, nous étions soupçonnés de vouloir remettre en cause l’indépendance de la future banque centrale européenne. Ce débat, autour de la lecture du Traité de Maastricht, avait une allure d’autant plus étrange et surréaliste qu’à l’origine c’est François Mitterrand qui avait rejeté l’idée d’Helmut Kohl selon laquelle il aurait fallu introduire les dispositions institutionnelles pour permettre à l’Union politique d’avancer au moins aussi vite que l’Union économique et monétaire. Ce chassé- croisé a pu alimenter un double malentendu.
Je crois que, après le sommet de Weimar et la Rencontre de Münster, nous avons remis la politique au poste de commande. Il était temps parce que les échéances à venir, qui sont cruciales pour la construction européenne, exigent une détermination forte de nos deux pays. Vous les connaissez. Il y a le passage à l’euro et surtout, désormais, comment vivre avec la monnaie unique. C’était l’enjeu du débat sur la nécessité d’une coordination des politiques économiques, qui, à la suite de l’accord franco-allemand, sera tranché au prochain Conseil européen de Luxembourg. Il y a l’élargissement, les questions financières, les politiques communes, la réforme institutionnelle. Le calendrier européen est chargé.
Je suis convaincu que l’euro provoque et continuera de provoquer un choc fédérateur, permettant à la fois la mobilisation des énergies et l’affirmation de l’Europe, comme communauté et comme puissance. Mais il ne s’agit pas d’un effet mécanique dont l’issue serait garantie, tout au plus pouvons-nous dire que le climat est à nouveau favorable. Nous serons jugés sur notre capacité à prendre des initiatives, à faire preuve d’audace et d’imagination, à rester la force inspiratrice de la construction européenne. Ce n’est pas seulement devant nos partenaires que nous aurons à répondre mais devant les opinions et les peuples d’Europe. La paix et la réconciliation, la réunification allemande, l’extension de la démocratie à notre continent, la solidarité, tout cela est à verser au crédit de l’Europe, et donc aussi au nôtre, pour la part que nous y avons prise. Mais nous sommes aussi comptables de l’impuissance devant les tragédies internationales, plus encore quand elles touchent notre continent, de la montée du chômage et de la pauvreté, du retour des nationalismes et de la xénophobie.
Un sondage, que j’ai fait réaliser en septembre, montrait qu’elles étaient les attentes de l’opinion, française. Elle veut plus d’Europe, plus vite. Certes c’est un sondage qui concernait les Français, mais je n’ai pas de doute que l’immense majorité des citoyens d’Europe reste profondément attachée au projet européen. Les méandres et les hésitations de la construction européenne nourrissent leurs déceptions et leur scepticisme. C’est à ces attentes que nous devons répondre. L’histoire de la relation franco-allemande témoigne de la force de ce partenariat singulier. Pourquoi baisserions-nous les bras aujourd’hui face aux échéances cruciales de l’Union européenne ? Je suis convaincu que notre détermination à cheminer ensemble, inspirée par notre compréhension respective que notre avenir commun est l’Europe, ne fera pas défaut. Et puis, avons-nous le choix ? L’Allemagne et la France ont une obligation vitale de résultat.