Interview de M. Michel Barnier, ministre délégué aux affaires européennes, dans "Midi Libre" le 23 janvier 1997, sur la campagne d'information nationale intitulée "Dialogue pour l'Europe".

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Circonstance : Déplacement de M. Barnier dans l'Hérault à l'occasion du 13ème forum régional du "Dialogue pour l'Europe" organisé à Montpellier le 23 janvier 1997

Média : Le Midi Libre - Midi libre - Presse régionale

Texte intégral

Midi Libre : Vous animez, aujourd'hui à Montpellier, le 13e des 26 forums régionaux sur l'Europe organisés d'ici l'été. Pourquoi de tels forums ?

Michel Barnier : Notre ambition est que l'on parle de l'Europe normalement, régulièrement, et pas seulement quand il y a une crise, comme celle de la vache folle, ou une guerre, comme celle de Bosnie.

La question européenne est tellement quotidienne qu'il faut en débattre quotidiennement. L'Europe, c'est maintenant, ce n'est pas plus tard. Et l'Europe, c'est près de nous : les fonds structurels, par exemple, 500 millions de francs par an pour le Languedoc-Roussillon, sont des crédits européens qui concernent la vie quotidienne de ses habitants.

Les forums ne constituent qu'une partie du Dialogue national pour l'Europe que nous avons lancé dans toute la France cet automne et qui s'achèvera, dans sa forme actuelle, au début de l'été. Dans chaque région, en effet, l'imagination peut prendre le pouvoir et, clans le cadre organisé, sur le plan opérationnel, par le préfet et le président de la région, tous ceux qui veulent organiser un débat ou lancer une initiative peuvent le faire et recevoir le label « Dialogue national ».

Midi Libre : Quels enseignements pouvez-vous, d'ores et déjà, tirer des trois premiers mois de ce Dialogue ?

Michel Barnier : Ce Dialogue me renforce dans la conviction qu'il n'y a pas de rejet, du tout, de l'idée européenne dans le peuple français. Il y a des doutes, des critiques, des questions et un énorme besoin d'explications – sur ce qu’apportera la monnaie unique, sur la manière dont cela va fonctionner concrètement, sur le fait de savoir si mon pourra aller travailler dans un autre pays,… – qui n'avait pas jusqu'à présent reçu de réponse, mais l'idée européenne – certains sondages récents l'ont prouvé – est considérée comme une idée juste.

Midi Libre : Vous évoquez certains sondages mais d'autres montrent, néanmoins, que les euro-sceptiques sont de plus en plus nombreux, en France comme en Allemagne…

Michel Barnier : Les Français et les Allemands ont les mêmes problèmes : ils sont touchés par le chômage et par une crise qui ne s'arrête pas, ils cherchent donc quelque part des raisons à cette crise ou a leur inquiétude.

Mais, quand on parle aux Français et qu'on leur explique les choses, je crois qu'on arrive à leur faire comprendre que l'Europe, dans cette période difficile, est plutôt une réponse et une sécurité par rapport à la mondialisation.

L'Europe a créé une zone de stabilité économique qui est plus favorable à l'initiative des entreprises et à l’emploi.

Midi Libre : Chaque forum aborde-t-il un thème ?

Michel Barnier : Il y a un thème principal, choisi en concertation par la préfecture de région et le Conseil régional – à Montpellier, c'est celui de l’élargissement de l'Union européenne, un grand projet pour une Europe enfin réunie après avoir été séparée par le Rideau de fer pendant 50 ans – mais il n est pas exclusif.

Midi Libre : Sur quoi ces forums vont-ils déboucher ?

Michel Barnier : Ces forums constituent pour moi un moment d'explications et d'écoute sur l’état d’esprit des citoyens français à l’égard de l’Europe. J'écoute donc beaucoup et, pour écouter, je me suis entouré de trois personnalités – la présidente du Centre national des jeunes agriculteurs, Mme Lambert, le président de l'Association des maires de France, M. Delevoye, et l'ancien ministre Hubert Curien – avec lesquelles nous allons, au terme du Dialogue, faire un rapport au président de la République sur l'état de l'Europe en France. Un rapport qui ne sera pas complaisant mais objectif.