Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture, sur les mesures en faveur de la bande dessinée, Angoulême le 24 janvier 1997.

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Circonstance : Inauguration du 24ème anniversaire du festival de la bande dessinée d'Angoulême le 24 janvier 1997

Texte intégral

Monsieur le maire,
Messieurs les présidents,
Chers André Juillard
Cher Fred,
Mesdames, Messieurs,

Je suis très heureux d’inaugurer à vos côtés le vingt-quatrième festival de la bande dessinée. Avant de vous préciser les mesures de soutien que je viens de prendre sur proposition du rapport de la mission de notre ami FRED, je tiens en votre nom à tous, à rendre un hommage tout particulier à André FRANQUIN qui vient de nous quitter.

Homme sensible et généreux, dont le graphisme vif et expressif, l’humour inspiré, subtil et intelligent, sa modestie légendaire l’imposait comme l’un des plus incontestables chef de fil de la bande dessinée franco-belge. Il continuera longtemps à faire le bonheur et l’admiration du public.

Il y a un an ici même à Angoulême, j’ai confié à notre ami FRED la présidence de la commission d’aide à la bande dessinée du centre national du livre mais aussi la mission de me soumettre des propositions de développement et de soutien de la profession.

Il a réuni une commission de travail, avec pour rapporteur Patrick GAUMER, historien, critique de bande dessinée, et vient de remettre son rapport sur l’évolution de l’édition, la situation des auteurs dessinateurs et scénaristes, les attentes des responsables d’institutions à commencer par le centre national de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême, des festivals au premier rang desquels celui d’Angoulême, la position du réseau des libraires et bibliothèques.

Cette large consultation montre, même si des avancées essentielles ont été acquises ces dernières années, qu’il reste de nombreux points à développer dans tous les domaines d’activités.

Je tiens à remercier FRED et ses collaborateurs de l’excellent travail qu’ils ont réalisé avec le concours de très nombreux professionnels.

Personne ne conteste l’importance de cette discipline artistique, qui fait preuve d’une créativité des plus riches. Alors même que d’aucuns estimaient que le mouvement en faveur de la bande dessinée allait décroissant avec le vieillissement de son lectorat, les chiffres d’aujourd’hui prouvent le contraire.

L’enquête économique annuelle de la revue Livres-Hebdo est révélatrice, l’édition française a progressé de plus de 3 % en 1996, le secteur de la bande dessinée s’est encore mieux comporté puisqu’il atteint + 4,3 % pour cette même période. Il m’apparaît indispensable que les pouvoirs publics confortent cette position dominante de notre pays, il en va de l’avenir de toute une profession.

A l’analyse des conclusions du rapport de la mission FRED, on constate trois grandes orientations.

C’est, d’abord, la nécessité de soutenir l’édition, sous toutes ses formes d’expression, notamment en étant à l’écoute de nouveaux réseaux de diffusion mis en place par les auteurs eux-mêmes : deuxième approche, celle définie par les créateurs dont beaucoup constatent les difficultés de se faire connaître du grand public du fait de la disparition progressive des revues spécialisées. Ils estiment, aussi, que le relais des émissions audiovisuelles est très déficient.

La deuxième réflexion concerne la précarité de leur statut. La troisième idée forte, c’est l’ardente obligation de développer toutes les initiatives de promotion de la bande dessinée française, aussi bien dans notre pays qu’à l’étranger. Le rôle des institutions et associations qui en ont la charge doit, dès lors, être conforté.

Aux actions engagées par les structures existantes comme le centre national de la bande dessinée et de l’image, l’atelier-école de la bande dessinée d’Angoulême, par les commissions du centre national du livre et du centre national des arts plastiques, par l’ensemble des partenaires économiques : éditeurs, libraires, des partenaires culturels comme les bibliothèques, les festivals, il me semble très important d’accroître leur ampleur, par des mesures concrètes dont le mise en œuvre se fera dès cette année 1997.

Elle se regroupe sous plusieurs chapitres.

Au titre de la diffusion, d’abord.

Il s’agit de renforcer le soutien aux principaux festivals de la bande dessinée, particulièrement dans leur dimension internationale afin de mieux faire connaître la création contemporaine française. Un section bande dessinée devrait être créée dans le cadre de France Édition qui est l’organisme de promotion de l’édition française à l’étranger.

C’est l’aide à la diffusion à l’étranger des expositions pour permettre aux jeunes créateurs d’obtenir des bourses. Nombre d’entre eux reconnaissent qu’une aide publique de ce type est déterminante, pour convaincre un éditeur de partager le risque d’une publication.

Il faut aussi, développer toutes les actions de sensibilisation autour du jeune public avec le soutien du ministère de l’éducation nationale, notamment par le biais des centres régionaux de documentation pédagogique et de la maison des écrivains par la présence d’auteurs dans les établissements scolaires.

Il importe, également, de soutenir toutes les initiatives de production d’émissions audiovisuelles consacrées à la bande dessinée. Un effort important est indispensable, dans ce domaine, qui demeure un lien essentiel avec le grand public.

Je cite, dans le même esprit, l’aide à la production de CD Rom sur la bande dessinée, en partenariat avec des institutions et des partenaires privés. Là encore, la dimension des nouvelles technologies peut contribuer à accroître la diffusion de la création.

J’évoque, à présent, des mesures d’ordre économique.

C’est le soutien des politiques d’exportation avec des aménagements pour l’expédition d’ouvrages à l’étranger.

C’est la mise en place d’une aide à la traduction de la bande dessinée française. La direction du libre et de la lecture est, on le comprendra, l’interlocuteur naturel pour engager cette proposition du rapport FRED.

Il en est de même, lorsqu’il s’agit de soutenir les nouveaux réseaux d’édition et de diffusion organisés par des auteurs. Le rapport insiste beaucoup sur l’émergence de nouvelles approches éditoriales, qu’il est nécessaire de prendre en compte.

J’évoquerai, enfin, des mesures pour les créateurs.

J’ai constaté, à la lecture du rapport, à quel point les auteurs pouvaient être désorientés face à la complexité des démarches administratives et fiscales. Aussi ai-je décidé de la publication d’un guide de l’auteur, dont la rédaction sera assurée par le bureau des auteurs.

Nous allons lancer l’édition d’une brochure de promotion de la création française contemporaine. Il s’agit d’une initiative commune des ministères des affaires étrangères et de la culture.

Nous allons augmenter les crédits d’acquisitions, notamment ceux du fonds national d’art contemporain, pour compléter les collections de planches originales du musée de la bande dessinée d’Angoulême.

Nous allons renforcer les moyens du centre national de la bande dessinée et de l’image, pour la coédition, afin de répondre aux attentes des professionnels pour la publication des revues, d’ouvrages thématiques, sans oublier les possibilités offertes par Internet.

Enfin, je souhaite que soient organisés des moments forts pour la promotion de la bande dessinée sur l’ensemble de notre pays. C’est ainsi que, dans le cadre du salon du livre de Paris, dès mars prochain, la journée de l’exportation mettra en valeur les atouts de la création française.