Article commun de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, et Klaus Kinkel, ministre des affaires étrangères d'Allemagne, dans "Izvestia" et dans "Zerkalo Nedeli" du 15 février 1997, sur la sécurité européenne, intitulé "1997, l'année de la sécurité européenne".

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Média : Izvestia - Presse étrangère - Zerkalo Nedeli

Texte intégral

Quotidien russe Izvestia - 15 février 1997

Article commun du ministre des affaires étrangères M. Hervé Charrette, et du ministre allemand des affaires étrangères, M. Klaus Kinkel, dans le quotidien russe les « Izvestia » à Moscou

« 1997 – L’année de la sécurité européenne ».

Pour l’ensemble de nos pays, l’année 1997 sera une étape importante dans la construction d’une architecture de sécurité européenne adaptée à la nouvelle situation stratégique et visant la reconstitution de la famille des Etats européens. L’Europe est aujourd’hui parvenue à un carrefour. Nos peuples sont appelés à créer ensemble des structures et des institutions pour l’Europe de demain. Cette future architecture de sécurité européenne doit garantir durablement la paix et la stabilité sur la base de la démocratie d’aujourd’hui, chaque Eta a le droit de concevoir sa sécurité comme il l’entend, mais nous avons tous l’obligation d’accorder nos intérêts de sécurité avec ceux des autres Etats.

La France et l’Allemagne ont dans ce domaine les mêmes convictions. L’Europe a trop longtemps souffert de ses divisions, et nous voulons désormais éviter l’apparition de nouvelles lignes de fracture. La sécurité et la stabilité européennes sont pour nous indivisibles. C’est pourquoi nous aspirons à définir un concept de sécurité et de stabilité global pour l’Europe toute entière.

L’année 1997 sera décisive pour trois processus importants qui détermineront l’avenir de l’architecture de sécurité européenne, à savoir :
    - la conclusion de la Conférence intergouvernementale de l’Union européenne et son élargissement ;
    - l’adaptation des structures de l’Alliance atlantique et son ouverture vers l’Europe centrale et orientale ;
    - l’aménagement de l’OSCE en tant que forum sur toutes les questions de sécurité en Europe.

Notre but est la mise en place d’une architecture de sécurité coopérative, fondée sur un réseau de relations étroites entre nos pays et sur les organisations existantes qui en constitueront l’ossature.

Nous souhaitons renforcer l’OSCE en tant que cadre au sein duquel tous les Etats pourront contribuer, sur un pied d’égalité, au développement des règles et des principes de sécurité européenne coopérative. L’OSCE est notamment le cadre approprié pour l’élaboration d’un concept de sécurité coopérative sur la base du débat au sujet du modèle de sécurité pour le XXIe siècle. Le Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement qui a eu lieu au mois de décembre à Lisbonne a donné d’importantes impulsions à la discussion sur le modèle de sécurité ainsi qu’à la future adaptation du Traité FCE. Ce traité doit être consolidé car il constitue l’un des éléments essentiels de la stabilité de notre continent.

Nos deux pays se félicitent de l’entrée de la Russie au Conseil de l’Europe. Cette adhésion a permis à cette institution d’acquérir enfin sa pleine dimension européenne. Le deuxième sommet du Conseil de l’Europe, qui aura lieu cette année à Strasbourg permettra de manifester notre engagement commun au service des fondements démocratiques de la sécurité européenne.

L’Alliance atlantique demeure essentielle pour la sécurité de l’Europe. Elle s’adapte à la nouvelle donne stratégique en Europe en allégeant et en rénovant ses structures, notamment pour tenir compte du développement en son sein de l’Identité européenne de sécurité et de défense, et en assumant des missions nouvelles dans le domaine de la gestion de crise. Les missions de l’IFOR puis de la SFOR en Bosnie sont des exemples de la coopération future qui s’établira entre l’Alliance et ses partenaires.

L’ouverture de cette « nouvelle »OTAN vers l’Europe centrale et orientale vise à augmenter la sécurité et la stabilité dans l’ensemble de l’espace euro-atlantique. L’admission de nouveaux membres n’est dirigée contre personne, mais fait partie d’un processus global destiné à renforcer la sécurité européenne et dont profiteront tous les Etats d’Europe. Elle est indissociable de la mise en place d’un partenariat de sécurité stable et confiant entre l’OTAN et la Russie, reposant sur des consultations régulières et des coopérations militaires concrètes. C’est pourquoi nous œuvrons de concert pour renforcer de manière significative le Partenariat pour la paix, qui est déjà un grand succès. Avec le Conseil de coopération nord-atlantique, il a contribué à renforcer les liens de coopérations des partenaires avec l’Alliance. Nous souhaitons aller de l’avant dans cette voie et nous nous y employons activement dans le cadre des travaux et des consultations en cours au sein de l’Alliance.

Nous souhaitons que le partenariat avec la Russie repose sur une base solide, par exemple sous forme de charte entre l’OTAN et la Russie. En effet, seule une coopération étroite, telle qu’elle est déjà pratiquée actuellement dans le cadre de la mission de paix internationale en Bosnie-Herzégovine, peut conduire à l’instauration d’une confiance mutuelle et ainsi, à l’établissement de relations réellement constructives, au service de la sécurité de tous les Etats européens.

L’Union européenne qui a vocation à s’élargir, garantit la stabilité politique et économique de l’Europe toute entière, aujourd’hui en pleine transformation. L’élargissement de l’Union européenne et celui de l’Alliance font partie de la future architecture européenne, se complètent et se soutiennent mutuellement. Dans son dialogue avec la Russie, l’Union de l’Europe occidentale a, elle aussi, contribué à instaurer des liens de confiance.

En tant que composantes de l’architecture de sécurité européenne, l’OSCE, l’OTAN, l’UE et l’UEO seront à l’avenir appelées à pratiquer une coopération de plus en plus efficace. C’est ce réseau dense de relations qui garantira la sécurité et la stabilité européennes.

L’histoire de l’Europe a été marquée tout au long des siècles par de grandes tensions et de grandes guerres. Aujourd’hui nous pouvons constater avec satisfaction que le risque de conflit n’a cessé de diminuer depuis 1989. Nous pouvons désormais réaliser l’idéal d’une Europe unie et stable. L’Europe est un héritage et une perspective qui nous sont communs. Notre future coopération doit être à la hauteur de ce grand dessein, pour lequel l’année 1997 sera une étape importante. Nous souhaitons nous engager sur cette voie avec la Russie.

 

Zerkalo Nedeli - 15 février 1997

Article commun du ministre des affaires étrangères M. Hervé Charrette, et du ministre allemand des affaires étrangères M. Klaus Kinkel, dans l’hebdomadaire ukrainien « Zerkalo Nedeli » à Kiev

« 1997 – L’année de la sécurité européenne »

Pour l’ensemble de nos pays, l’année 1997 sera une étape importante dans la construction d’une architecture de sécurité européenne adaptée à la nouvelle situation stratégique et visant la reconstitution de la famille des Etats européens. En matière de sécurité européenne, l’Europe est aujourd’hui à un carrefour. Nous sommes appelés à créer des structures et des institutions pour l’Europe de demain. Cette future architecture de sécurité européenne doit garantir durablement la paix et la stabilité sur la base de la démocratie, de l’Etat de droit et dans le respect des Droits de l’Homme. En effet, dans l’Europe démocratique d’aujourd’hui, chaque Etat a le droit de concevoir sa sécurité comme il l’entend, mais nous avons tous l’obligation d’accorder nos intérêts de sécurité avec ceux des autres Etats.

L’Allemagne et la France ont dans ce domaine les mêmes convictions. L’Europe a trop longtemps souffert de ses divisions, et nous voulons désormais éviter que de nouveaux fossés se creusent. La sécurité et la stabilité européennes sont pour nous indivisibles. C’est pourquoi nous aspirons à définir d’un concept de sécurité et de stabilité global pour l’Europe toute entière.

Nous savons que la sécurité et la stabilité revêtent une grande importance, notamment pour l’Ukraine qui a accédé à l’indépendance il y a quelques années à peine. Nous comprenons les intérêts de sécurité de l’Ukraine qui sont légitimes et auxquels nous accordons une attention particulière. La nouvelle architecture de sécurité que nous souhaitons mettre en place permettra de renforcer et de préserver la sécurité et l’indépendance de l’Ukraine. Elle contribuera à renforcer la confiance qui formera la base de la sécurité et de la stabilité sur notre continent à l’avenir.

L’année 1997 sera décisive pour trois processus importants qui détermineront l’avenir de l’architecture de sécurité européenne, à savoir :
    - la conclusion de la Conférence intergouvernementale de l’Union européenne et son élargissement ;
    - l’adaptation des structures de l’Alliance atlantique et son ouverture vers l’Europe centrale et orientale ;
    - l’affirmation du rôle de l’OSCE en tant que forum sur toutes les questions de sécurité en Europe.

Notre but est la mise en place d’une architecture européenne de sécurité coopérative, fondée sur un réseau de relations étroites entre nos pays et sur les institutions existantes, qui en constitueront l’ossature.

Nous souhaitons renforcer l’OSCE en tant que cadre au sein duquel tous les Etats pourront contribuer, sur un pied d’égalité, au développement des règles et des principes de sécurité européenne coopérative. L’OSCE est notamment le cadre approprié pour l’élaboration d’un concept de sécurité coopérative sur la base du débat au sujet du modèle de sécurité pour le XXIe siècle. Le Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement, qui a eu lieu au mois de décembre à Lisbonne, a donné d’importantes impulsions à la discussion sur le modèle de sécurité ainsi qu’à la future adaptation du Traité FCE. Ce traité doit être consolidé car il constitue l’un des éléments essentiels de la stabilité de notre continent.

Nos deux pays se félicitent de l’entrée de l’Ukraine au Conseil de l’Europe. Avec les adhésions nouvelles de ces dernières années, cette institution acquiert enfin sa pleine dimension européenne. Le deuxième sommet du Conseil de l’Europe, qui aura lieu cette année à Strasbourg permettra de manifester notre engagement commun au service des fondements démocratiques de la sécurité européenne.

L’Alliance atlantique demeure essentielle pour la sécurité de l’Europe. Elle s’adapte à la nouvelle donne stratégique en Europe en allégeant et en rénovant ses structures, notamment pour tenir compte du développement en son sein d’Identité européenne de sécurité et de défense, et en assumant des missions nouvelles dans le domaine de la gestion de crise. Les missions de l’IFOR puis de la SFOR en Bosnie, auxquelles l’Ukraine a pris une part importante, préfigurant la coopération qui s’établira, au service de la paix entre l’Alliance atlantique et tous ses partenaires.

L’ouverture de cette « nouvelle » OTAN vers l’Europe centrale et orientale vise à augmenter la sécurité et la stabilité dans l’ensemble de l’espace euro-atlantique. L’admission de nouveaux membres n’est dirigée contre personne, mais fait partie d’un processus global destiné à renforcer la sécurité européenne, dont personne ne sera exclu. Pour nous, elle est indissociable de la mise en place d’un partenariat de sécurité stable et confiant de l’OTAN, avec l’Ukraine ainsi qu’avec Russie, fondé sur des consultations régulières et des coopérations militaires concrètes.

C’est pourquoi nous œuvrons de concert pour renforcer le Partenariat pour la paix, qui est déjà un grand succès. Le Conseil de coopération nord-atlantique a également contribué à resserrer les liens de coopération des pays partenaires avec l’Alliance atlantique. Nous souhaitions approfondir ce processus et nous nous y employons activement dans le cadre des consultations de l’Alliance atlantique avec ses partenaires.

Le partenariat de sécurité que nous entendons mettre en place avec l’Ukraine sera étroit et confiant. Nous en avons déjà posé les fondements avec la déclaration commune du mois de septembre 1995. Il s’agit maintenant de donner corps à ce partenariat, de poursuivre le développement de la coopération et enfin de la formaliser. Ainsi la future architecture de sécurité ne comporte ni lacune, ni « zone grise ».

L’Union européenne, qui a vocation à s’élargir, garantit la stabilité politique et économique de l’Europe toute entière, aujourd’hui en pleine transformation. En concluant également un accord de partenariat et de coopération avec l’Ukraine, l’Union européenne a déjà posé les fondements d’un partenariat appelé à se développer. L’Union de l’Europe occidentale doit elle aussi renforcer sa coopération avec l’Ukraine. C’est ce réseau dense de relations qui garantira la sécurité et la stabilité européennes.

En tant que composantes de l’architecture de sécurité européenne, l’OSCE, l’OTAN, l’UE et l’UEO seront à l’avenir appelées à pratiquer une coopération de plus en plus efficace. La sécurité et la stabilité européennes constituent en effet une tâche commune incombant à tous les Etats et institutions d’Europe.

L’histoire de l’Europe a été marquée tout au long des siècles par de grandes tensions et de grandes guerres. Aujourd’hui nous pouvons constater avec satisfaction que le risque de confit n’a cessé de diminuer depuis 1989. Nous pouvons désormais réaliser l’idéal d’une Europe unie, fondée sur la sécurité et la stabilité. Notre future coopération doit être à la hauteur de la responsabilité que nous assigne notre patrimoine européen commun. L’année 1997 marquera une étape importante sur cette voie que nous souhaitons suivre conjointement avec l’Ukraine.