Texte intégral
Q - Elisabeth Guigou annonce des conséquences politiques très dures pour les élus qui feraient échec à son projet de loi sur la justice. Comment réagissez-vous à cette mise en garde ?
J.-L. DEBRÉ Nous ne céderons jamais au chantage. Cette méthode qui consiste à tenter de faire peur aux élus est déplaisante. Elle va même à l'encontre des intérêts du gouvernement, qui se livre dans cette affaire à un étrange marchandage. En réalité. Lionel Jospin n'apporte pour l'instant, aucune solution sérieuse aux problèmes quotidiens des justiciables. Sous la pression de l'opposition, son ministre de la Justice a bien avancé quelques propositions, mais personne n'est dupe : voilà plus d'un an que nous attendons des solutions concrètes aux dysfonctionnements de la justice. En catastrophe, on nous colle sous le nez une copie bâclée. Pis, on menace les élus qui ne se plieront pas aux diktats du gouvernement.
Q - Irez-vous jusqu'à voter contre le projet de réforme du CSM ?
Le groupe RPR se réunira courant janvier, au moment de la rentrée parlementaire, pour faire le point. D'ici là, rien n'est joué. La copie du gouvernement est décevante. L'issue d'un scrutin dépend donc du gouvernement.
Q - Mais le RPR a voté la réforme du CSM en première lecture. Comment pourrait-il se déjuger ?
Nous aviens alors dit que cette réforme devait s'intégrer dans un ensemble comprenant des dispositions sur la responsabilité des magistrats, la défense de la présomption d'innocence, la délicate question de la pénalisation excessive de la vie publique...
Q - Le président de la République ne risque-t-il pas de voir le gouvernement lui imputer la responsabilité de cette réforme, qu'il a lui-même souhaitée ?
Il avait pris l'engagement de convoquer le Congrès. Il a respecté sa parole. La suite dépend des rapports entre le gouvernement et les parlementaires. Le président de la République insiste également sur la réforme d'ensemble de la justice.
Q - Ne serait-il pas souhaitable d'ajourner la réunion du Congrès ?
Certains le réclament. Je pense que c'est maintenant au gouvernement de témoigner de sa bonne volonté.
Q - Mais qu'attendez-vous de concret ?
Nous réclamons des parades efficaces pour mieux lutter contre la lenteur de la justice, des propositions précises pour éviter la présomption de culpabilité et faire respecter la présomption d'innocence. Nous attendons également des initiatives concrètes pour enrayer les lenteurs de la justice administrative et civile, une des causes de la pénalisation inquiétante de la vie publique.
Voilà les vrais problèmes auxquels sont confrontés chaque jour les citoyens ! Or le gouvernement a choisi d'éluder ces questions. Va-t-on, oui ou non, les inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée ? Que je sache, c'est le premier ministre qui en a la maîtrise. Les promesses verbales de Mme Guigou ne l'engagent en rien. Lui, en tout cas se garde bien de les reprendre à son compte.
On nous vend du virtuel, on fait de la surenchère verbal pour emporter notre vote. Nous ne nous laisserons pas abuser. Le gouvernement fait semblant, sème l'illusion et se paie de mots.
Il nous faut du concret et un échéancier précis pour l'examen au Parlement des propositions que doit encore nous faire le gouvernement. Le premier ministre lui-même doit prendre ces engagements.