Déclaration de M. Philippe Vasseur, ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, sur l'enseignement supérieur agricole, notamment l'école vétérinaire de Nantes et le rôle et l'évolution de l'enseignement vétérinaire (réforme des études), Nantes le 25 novembre 1996.

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  • Philippe Vasseur - ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation

Circonstance : Déplacement à Nantes et Rennes le 25 novembre 1996. Visite de l'école vétérinaire de Nantes

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,

Je suis heureux, à l'occasion de ce déplacement dans l'Ouest, à Nantes ce matin et à Rennes cet après-midi, d'avoir pu visiter l'école vétérinaire de Nantes, après celle d'Alfort et avant, je l'espère prochainement, celles de Lyon et Toulouse.

L'école vétérinaire de Nantes est la plus jeune de nos quatre écoles : moins de 20 ans d'existence, alors que tout à l'heure, à Rennes, je célébrerai le centenaire de l'École nationale supérieure agronomique.

Mais l'une comme l'autre ont le même dynamisme et apportent une contribution tout aussi essentielle au dispositif d'enseignement supérieur du ministère de l'Agriculture.

La création de l'école vétérinaire de Nantes doit beaucoup à notre président de la République, Jacques Chirac.

C'est lorsqu'il était ministre de l'Agriculture que fut décidé le principe d'une quatrième école vétérinaire et c'est lui-même, alors Premier ministre, qui arrêta le choix de Nantes.

Ce fut une décision éclairée qui, 20 ans après, démontre sa pertinence, car en 20 ans, vous avez, les uns et les autres, construit une école en tous points remarquable et qui n'a vraiment rien à envier à ses trois consoeurs.

L'école vétérinaire de Nantes est une réussite à tous points de vue : au plan pédagogique, aux plans technique et scientifique, au plan immobilier aussi. Le bâtiment « informatique » dont nous avons posé la première pierre, viendra renforcer ce patrimoine et démontre la dynamique de cette école, qui n'a cessé de se développer, depuis 20 ans, puisqu'elle accueille aujourd'hui un flux annuel de plus de 100 élèves, tout en menant des activités de recherche et d'accueil du public.

Le choix de Nantes était aussi pertinent, car nous nous trouvons ici au coeur d'une grande région d'élevage, de pêche et d'industrie agro-alimentaire.

Les Pays de la Loire représentent, avec la Bretagne, le quart de notre potentiel agro-alimentaire. C'est la première activité de la région et l'implantation d'une école vétérinaire au coeur de ce bassin de production s'imposait.

Le choix du Grand Ouest pour l'implantation d'une école vétérinaire était évident. Encore fallait-il que ce pari, toujours difficile, de créer une école réussisse, et c'est le cas.

La réussite de l'école vétérinaire de Nantes, nous la devons aux femmes et aux hommes qui ont su l'animer depuis sa création, à tous ceux qui y travaillent, qu'il s'agisse des agents techniques ou administratifs, des enseignants, des chercheurs.

Tous ont la même motivation pour cette école, souvent la même passion pour le métier de vétérinaire et ont mis toute leur énergie à mériter la confiance que l'État avait placée en eux, il y a 20 ans.

Ils ont aussi bénéficié d'un encadrement de grande qualité, au travers de tous les directeurs qui se sont succédé, de Pierre Cuq à Maryse Hurtrel, aujourd'hui à la tête de cette école depuis un an et qui était la plus qualifiée pour occuper, avec brio, cette lourde responsabilité. Vous mettez au service de Nantes, Mme Hurtrel toutes vos compétences en matière d'enseignement vétérinaire, un enseignement dont vous avez conduit la réforme en 1994.

L'école vétérinaire de Nantes a aussi bénéficié de l'appui permanent des élus et des collectivités locales : de la ville, du département, de la région, et je les remercie tous pour avoir accompagné le ministère de l'Agriculture avec détermination depuis 20 ans.

L'école vétérinaire de Nantes conforte ainsi la vocation universitaire de cette ville et de cette région. Il y a 100 ans, lorsqu'il s'agissait de déménager l'école d'agriculture de Grand-Jouan, devenue aujourd'hui l'ENSA de Rennes, c'est la capitale de Bretagne qui avait été retenue, justement pour son potentiel universitaire, qui faisait défaut ici.

Aujourd'hui, la situation est bien différente. Nantes, c'est en effet 35 000 étudiants et 2 000 chercheurs, c'est une véritable vocation scientifique et technique qui vient d'être encore confortée par l'implantation d'une école des mines.

(…)

Les écoles vétérinaires jouent un rôle essentiel dans notre dispositif d'enseignement.

Avec 170 000 élèves dans près de 1 000 lycées d'enseignement agricole, publics et privés, 130 000 stagiaires en formation continue, 20 000 apprentis et 10 000 étudiants dans les grandes écoles vétérinaires ou agronomiques, le ministère de l'Agriculture dispose d'un ensemble exceptionnel de formation : un ensemble qui répond parfaitement aux besoins des professionnels et de la société, qui place les jeunes sur le marché du travail et qui associe de façon exemplaire les élus, les professionnels et les familles.

L'enseignement vétérinaire joue, dans cet ensemble, un rôle particulièrement déterminant.

Les vétérinaires sont au coeur des grands enjeux pour le ministère de l'Agriculture : des enjeux économiques, mais aussi et surtout des enjeux de société, qu'il s'agisse des vétérinaires de ville, de ceux qui sont impliqués dans la production agricole ou de ceux qui travaillent dans l'industrie.

Ces enjeux, ce sont la santé des animaux de compagnie, la santé et le bien-être des animaux de ferme, enfin et surtout l'hygiène alimentaire.

J'ai coutume de dire que je suis également le « ministre des chiens et des chats ». Cela fait parfois sourire. Mais on imagine mal l'importance que peut prendre, dans la vie de nombre de Français, un animal de compagnie.

J'ai récemment présenté les grandes orientations du projet de loi sur les animaux de compagnie, que je défendrai l'an prochain au Parlement, et qui leur garantira une meilleure protection. Mais au quotidien, c'est le vétérinaire qui doit assurer cette protection, veiller à la santé de nos compagnons, et leur rôle est particulièrement important.

Il l'est tout autant dans la filière agro-alimentaire. Je dirai même qu'il va devenir absolument central.

Nous sommes en effet, en tant que consommateurs, de plus en plus sensibles à la qualité de ce que nous mangeons, la crise de l'ESB l'a rappelé douloureusement. La première exigence est d'abord celle de la sécurité et de l'hygiène. C'est une attente forte, à laquelle les vétérinaires devront être de plus en plus capables de répondre, depuis les élevages jusqu'aux usines de transformation.

Mais ce n'est pas notre seule attente : nous sommes également de plus en plus sensibles au bien-être des animaux, à leur santé et là aussi les vétérinaires ont un rôle central à jouer pour répondre à ces attentes.

C'est naturellement valable pour les vétérinaires libéraux, pour ceux qui travaillent dans les entreprises, mais aussi, je ne les oublie pas, pour les vétérinaires inspecteurs du ministère de l'Agriculture, auxquels je voudrais également rendre hommage.

Le ministère de l'Agriculture compte 4 000 agents dans les services vétérinaires (dont 500 vétérinaires inspecteurs et 300 vétérinaires vacataires) qui assurent, avec un professionnalisme et une rigueur exemplaires que personne ne conteste, le contrôle de l'hygiène de nos aliments et de la santé des animaux.

Si la France est aujourd'hui le champion de la qualité alimentaire, c'est à eux que nous le devons. Plus que jamais, les vétérinaires occuperont une place centrale dans les services du ministère de l'Agriculture, de la pêche et de l'alimentation.

Leur mission est essentielle pour la crédibilité des pouvoirs publics en matière de sécurité des consommateurs. Ils agissent en toute indépendance et ils disposeront, très prochainement, de moyens d'action supplémentaires, grâce au projet de loi sur la qualité sanitaire des aliments que je présenterai mercredi en Conseil des ministres. C'est un projet ambitieux, qui reconnaît la compétence de nos vétérinaires et leur donnera des prérogatives nouvelles, dans l'unique souci de la sécurité du consommateur. De plus, 47 postes de vétérinaires inspecteurs seront créés en 1997, soit une augmentation de 10 % par rapport à l'effectif actuel.

(…)

Préparer l'avenir, répondre aux attentes des consommateurs et des citoyens, donner à la filière agro-alimentaire les moyens d'y faire face, c'est mon ambition à travers ce projet de loi sur la qualité sanitaire.

C'est aussi, plus globalement, l'ambition du projet de loi d'orientation sur l'agriculture, l'alimentation et la forêt, qui sera prêt à la fin de l'année.

L'enseignement doit jouer un rôle central dans ce projet, car c'est aujourd'hui que nous préparons ceux qui, demain, seront les acteurs de cette filière.

Il nous faut une grande ambition pour l'enseignement supérieur, particulièrement pour l'enseignement vétérinaire.

Notre enseignement vétérinaire doit être, demain, celui des médecins des animaux et des spécialistes de l'hygiène alimentaire, et il doit être reconnu comme tel.

C'est une vaste ambition que nous pouvons, j'en suis certain, concrétiser avec nos écoles vétérinaires.

Nous avons l'un des meilleurs enseignements vétérinaires en Europe et dans le monde. Nous devons faire en sorte qu'il soit reconnu et qu'il puisse développer ses compétences, vers la recherche et dans le domaine de l'hygiène alimentaire.

Nous avons déjà pris plusieurs initiatives en ce sens. Je pense en particulier à la réforme des études vétérinaires.

Mais je pense aussi, car j'y suis très attaché, à la spécialisation vétérinaire, dont j'ai donné le coup d'envoi en janvier dernier. J'avais fixé comme objectif de démarrer les premiers certificats de spécialisation dès la rentrée de 1996 et je me réjouis de voir que cet objectif a été tenu.

C'est notamment le cas à Nantes, avec le certificat en « gestion de la santé et de la qualité en production laitière ». Il ne faut pas s'arrêter là et je souhaite que d'autres diplômes de spécialisation puissent se mettre en place dès la prochaine rentrée.

Mais la crédibilité, au plan international, de notre enseignement vétérinaire, ne passe pas seulement par cette spécialisation à vocation professionnelle.

Il passe aussi par la mise en place de doctorats dans les écoles vétérinaires.

C'est désormais le dossier prioritaire : nos écoles vétérinaires doivent pouvoir délivrer le doctorat. J'ai demandé à mes services de tout mettre en oeuvre pour que nous puissions, dès l'an prochain, parvenir à l'habilitation de nos quatre écoles.

Le doctorat de troisième cycle doit être votre priorité.

Avec la réforme des études vétérinaires de 1994, avec la spécialisation, avec les doctorats, nous disposerons d'un enseignement vétérinaire de très haute qualité, reconnu comme tel en France, en Europe et dans le reste du monde et je vous rappelle l'ambition que j'avais fixée au début de l'année : celle de se voir reconnu dans le monde entier et notamment par l'administration américaine, de la même façon qu'Utrecht, aux Pays-Bas. C'est ce que nous devons viser et je suis persuadé que nous pouvons y arriver.

Nous devons nous en donner les moyens, et les écoles vétérinaires ne pourront pas y parvenir si elles sont isolées.

Elles doivent renforcer les liens avec leur environnement : entre elles, naturellement, et je crois que nous disposons aujourd'hui d'un bon réseau, mais aussi avec les centres de recherche et avec les autres grandes écoles du ministère de l'Agriculture. Comme je l'ai dit, les écoles vétérinaires sont aujourd'hui au coeur des enjeux de la filière agro-alimentaire et elles ont des liens naturels à tisser avec les écoles agronomiques ou agro-alimentaires.

Déjà, les coopérations sont nombreuses avec l'ENITIAA toute proche, mais je suis convaincu, comme je l'ai dit à l'ENITIAA et comme je le redirai tout à l'heure à Rennes, que l'avenir, c'est Agrena et la fédération des grandes écoles de l'Ouest qui en résultera.

En regroupant ces écoles, dans le respect de l'identité de chacune, en y associant étroitement les instituts de recherche, nous serons capables de mettre en place un ensemble d'enseignements visible au plan international, complet, puisqu'il touchera l'ensemble des disciplines des sciences du vivant et performant.

Bien entendu, cela n'empêchera nullement chaque école de tisser ses propres liens avec des homologues en France ou à l'étranger. C'est une bonne chose et je me réjouis du nombre et de la qualité des relations internationales qu'a nouées l'école vétérinaire, mais je suis sûr que dans ce domaine l'union fait la force, si chacun trouve son compte dans cette association.

Je vous encourage donc à participer pleinement à l'évolution d'Agréna, dont cette école peut et doit être un des piliers.

L'école vétérinaire de Nantes est une belle école que je suis fier d'avoir sous la tutelle de mon ministère. Une école jeune, moderne, mais qui a déjà atteint la maturité.

En moins de 20 ans, vous avez mis en place une école parfaitement intégrée dans son environnement local et professionnel, une école utile pour toute la filière agro-alimentaire de l'Ouest et pour tous nos concitoyens, une école où il fait bon vivre ; en un mot, une école d'avenir.

Cet avenir, c'est à vous de le construire. Soyez assurés du soutien permanent du ministère de l'Agriculture pour le construire avec vous.