Interview de M. Jack Lang, député européen, membre du bureau national du PS, dans "L'Express" du 20 février 1997, sur les propositions du PS sur le cumul des mandats.

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L’Express : De 1989 à 1993, vous avez été ministre et maire de Blois. Comment faisiez-vous ?

Jack Lang : Je le dis franchement, ce n’était pas aisé. Heureusement, j’étais ministre depuis huit ans : je maîtrisais la machine. Au prix d’un certain surmenage, je parvins à concilier les deux fonctions. Mais il n’est pas normal que certains ministres ne le soient qu’à mi-temps.

L’Express : Les propositions du PS contre le cumul sont-elles suffisantes ?

Jack Lang : Si l’on réalise tout ce qui est prévu, ce sera une petite révolution ! Le plus important, c’est de limiter le cumul des exécutifs. Qu’il soit plus facile pour un ministre que pour un parlementaire de cumuler les mandats est anormal. Avec notre réforme, les parlementaires pourront rester dans les conseils municipaux, généraux ou régionaux et garderont ainsi une attache locale. Mais le cumul, c’est le petit de la lorgnette. Il faut, en fait, rééquilibrer les fonctions. S’ils devaient choisir, nombre de députés maires quitteraient l’Assemblée nationale, car notre Parlement est sans vrai pouvoir.

L’Express : Comment faire ?

Jack Lang : Il faut en finir avec le système inventé par Michel Debré : presque tout, dans la Constitution de la Ve République, vise à contenir le Parlement. Ainsi, qu’un ministre ne retrouve pas automatiquement son siège de député s’il quitte le gouvernement est stupide. Craindrait-on comme sous la IVe, que les députés ne renversent les gouvernements pour devenir ministre chacun leur tour, La stabilité est aujourd’hui assurée : la démission d’un ministre ne devrait plus rendre indispensable une législative partielle pour qu’il retourne à l’Assemblée. Gauche et droite sont d’accord sur ce point : changeons au moins cela.

L’Express : Le cumul est répandu parce qu’un mandat permet souvent d’un décrocher ou d’en sauver un autre : le maire devient député.

Jack Lang : Tout à fait. En 1993, je n’ai été réélu député que parce que j’ai « municipalisé » l’élection. Dans le cadre de l’actuel mode de scrutin législatif, uninominal, un député est souvent contraint de consacrer plus de temps à son ancrage local qu’à sa fonction de législateur. Seul un scrutin de liste départementale ou régionale permettrait aux députés de se dédier entièrement à leur mandat parlementaire.