Interview de M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, de l'industrie et des finances, et de M. Edouard Balladur, député RPR, à TF1 le 16 mars 1998, sur les résultats des élections régionales et sur le retour de la croissance.

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Texte intégral

Q. Comme vous l’aviez promis vous ne vous présenterez pas à la présidence du conseil régional vendredi, tout comme F. Léotard ne le fera pas en région PACA ?

E. Balladur : « Oui, le résultat en Île-de-France est un résultat qui, compte tenu, des prévisions que l’on faisait est plutôt satisfaisant Nous avions 84 ou 85 sièges et nous en avons 83. La gauche en avait 86 ou 87 tout compris, elle en a 86. Donc c’est un résultat qui est plutôt réconfortant et qui montre en tout cas qu’à Paris par exemple nous sommes en tête et nous faisons mieux qu’aux élections législatives de l’année précédente. »

Q. Des sondages vous avaient annoncé en effet à six points derrière M.-P. de la Gontrie et vous la devancez d’à peu près quatre points.

E. Balladur : « Absolument. Alors pour autant, il y a une chose claire et simple c’est que nous n’avons pas la majorité relative au conseil régional de l’Île-de-France - de peu peut-être mais nous ne l’avons pas. Et j’ai toujours dit depuis quatre mois - j’ai d’ailleurs été le premier à le dire - que s’il n’y avait pas de majorité relative pour ce qui me concerne : je ne me présenterai pas à l’élection à la présidence. »

Q. Mais vous allez laisser un autre se présenter et au besoin peut-être bénéficier de voix du FN ?

E. Balladur : « Attendez. Je ferai donc ce que j’ai dit. Je ne me présenterai pas. La question qui est ouverte est de savoir si nous devons - ce qui est désormais l’opposition UDF et RPR au conseil régional et divers droites - présenter ou pas un candidat au premier tour de l’élection. La question est ouverte : elle sera discutée et elle se sera tranchée je pense. Quoi qu’il advienne ce ne sera pas moi. »

Q. Il n’est pas sûr qu’il y ait un candidat UDF-RPR ?

E. Balladur : « Je pense que l’avis général est plutôt pour le fait qu’il y en ait un, au premier tour en tout cas ; et ce sera discuté et décidé je pense demain. Je ne pense pas qu’il ne faut rester dans l’incertitude plus longtemps. Ce qui m’importe dans cette affaire, je voudrais que ce soit bien clair, c’est qu’au-delà des changements qu’il peut y avoir, nous qui représentons la droite républicaine et libérale, nous soyons capables de retrouver une totale identité et crédibilité. Ce qui veut dire que nous avons, nous, un travail qui a été commencé - un travail de rénovation qui a été commencé dans l’opposition, et bien commencé - et qu’il faut poursuivre pour répondre aux aspirations de nos électeurs qui ont eu le sentiment que nous ne tenions pas nécessairement le langage et que nous n’avions pas nécessairement l’action qui correspondaient à leurs vœux. C’est comme cela que nous récupérerons les électeurs de la droite républicaine qui nous ont quittés et ce n’est pas par des accords d’états-majors ou des combinaisons plus ou moins différentes de ce qu’on avait annoncé. »

Q. Deux reproches vous ont été adressés par vos électeurs : que vous n’affirmiez pas suffisamment vos valeurs. Là, je vous pose la question : est-ce que vous souhaitez comme N. Sarkozy que les valeurs de droite soient ainsi affirmées ? Deuxième reproche : que vous n’étiez pas suffisamment unis les uns et les autres.

E. Balladur : « Sur le premier point, je reprends ce que j’ai dit : ce que l’on appelle nos valeurs, ce n’est pas uniquement la liberté, la responsabilité, le progrès. C’est aussi des principes tels que la nation, la sécurité, la famille. »

Q. Au fond, tout cela, vous l’avez presque laissé au FN ?

E. Balladur : « Non, n’exagérons rien. »

Q. En partie.

E. Balladur : « Nous ne l’avons pas laissé au FN. Il y a eu de nombreuses périodes durant lesquelles nous avons défendu tous ces principes. Mais enfin ce qui importe c’est l’impression. Et nos électeurs ont eu l’impression que nous les défendions et que nous les mettions en œuvre moins que nous le devions. Nous avons donc un devoir et une mission de reconquête de l’opinion pour, non seulement, conforter les électeurs de la droite républicaine d’aujourd’hui, mais pour reconquérir ceux qui nous ont quittés. »

Q. Aujourd’hui, cela ne vous gêne plus que l’on vous dise de droite ? Il fut un temps ou certain se pinçaient le nez quand ils entendaient le mot.

E. Balladur : « Non, ils avaient tort. Moi, cela ne m’a jamais gêné. Alors deuxième question. »

Q. Sur l’unité. Parce qu’on a dit que les balladuriens, les chiraquiens, ces gens-là ne s’entendent pas du tout ou ils s’entendent en surface et pas du tout en profondeur.

E. Balladur : « Je pense que sur l’unité le problème est le suivant. Ce n’est pas de forcer, si je puis dire, à la création d’une entité nouvelle qui serait artificielle. Il y a des diversités dans la droite, comme il y en a dans la gauche d’ailleurs, et le problème est d’arriver à la fois à respecter les différences et les originalités tout en observant un minimum de cohérence. Alors c’est ce travail qu’il faut faire désormais qui a été entrepris là aussi et qu’il faut poursuivre. Je voudrais rappeler un exemple. De 1988 à 1993 nous avons - nous étions dans l’opposition à l’époque - organisé - c’était à l’initiative d’ailleurs de N. Sarkozy et d’A. Madelin - ce qu’on avait appelé les états généraux de l’opposition qui nous ont permis de préciser nos principes, nos idées, nos projets. Cela a été une des causes d’une très grande victoire électorale que nous avons remportée aux élections législatives de 1993. »

Q. Et depuis, chacun a fait cavalier seul.

E. Balladur : « Pas toujours cavalier seul. Mais il me semble qu’il faut réaffirmer la nécessité de cette cohérence et de cette unité et c’est ce qu’attendent nos électeurs. Alors je voudrais simplifier le message. Premièrement, il faut rester fidèle à ce qu’on a dit - et c’est ce que je fais. Deuxièmement, il faut reconquérir l’électorat qui nous a quittés - d’ailleurs beaucoup moins qu’on ne le dit puisque finalement les résultats des élections régionales d’hier montrent que nous avons à peu près le même résultat. Et à Paris il est même meilleur que lors des élections législatives, en voix, que l’année dernière. Et troisièmement, il faut proposer les idées de l’avenir. Pour moi, il ne s’agit pas de revenir au passé, à ce qu’on a pu faire de bien ou de moins bien dans les années précédentes, il s’agit d’imaginer un message qui soit à la fois un message de liberté et aussi un message plus conforme aux valeurs, je dirais, auxquelles est attaché notre électorat. »

Q. Pour revenir à la question sur l’unité : vous nous dites pas de fusion, pas de parti unique ?

E. Balladur : « Je n’ai jamais dit cela. »

Q. C’est moi qui vous pose la question. Il y a des gens qui se demandent qu’elle est la différence entre l’UDF et le RPR ? Sur quelles valeurs ?

E. Balladur : « On pourrait se demander quelle est la différence entre le parti socialiste et le parti radical de gauche. Chacun à son histoire, sa sensibilité, son message et son identité qu’il veut préserver. Mais ce qui compte c’est ce qui rapproche et je pense que ce qui nous rapproche tous dans la droite républicaine et libérale - je le répète - ce sont les quelques principes que j’ai énoncés. Maintenant il faut les traduire dans des projets précis et rigoureux. »

Q. Et un intergroupe à l’Assemblée comme le propose B. Pons, cela vous paraît...

E. Balladur : « L’intergroupe à l’Assemblée il existe déjà. Je dois dire qu’il s’est peu réuni. Il me semble qu’il s’est réuni une seule fois. Il y aurait tout avantage qu’on le réunisse plus souvent avant tous les débats importants et c’est ainsi que nous prouverions que nous sommes véritablement à la fois novateurs et tournés vers l’avenir et décidés en même temps à retrouver notre identité profonde. »

Q. Quand vous regardez D. Strauss-Kahn, vous vous dites que finalement gauche plurielle était un bon slogan et qu’une droite plurielle cela aurait pu...

E. Balladur : « Cela sonnerait un peu imitatif, si je peux me permettre de le dire. Il faudrait que l’on trouve autre chose. Il y a une chose de vrai, c’est que la gauche a réussi récemment à combiner la diversité avec un minimum de cohésion. Nous verrons d’ailleurs si elle continue à y parvenir compte tenu de reportages que vous avez fait sur quelques problèmes qui existent. Nous devons faire en sorte nous aussi d’avoir une identité et une unité robuste et en même temps, il ne s’agit pas de caporalisme et de faire que tout le monde ait les mêmes idées sur tout. Moi, je suis extrêmement tolérant et je suis attaché à ma liberté, et donc respectueux de celle des autres. Mais aussi il faut réussir et on ne réussira que si on est uni. C’est la voie que nous avons prise. »

Q. Pour vous, ça ne sonne pas du tout la fin d’une carrière politique. On peut vous retrouver par exemple en piste pour la mairie de Paris ou d’autres élections ?

E. Balladur : « Écoutez, le résultat de Paris est un résultat plutôt bon, et pourquoi voudriez-vous que l’on fasse grief à ceux qui se sont battus dans la difficulté ? Il me semble que ce devrait être le contraire. »

Q. C’est vrai que vous avez été un des premiers à vous lancer dans une aventure ou pas grand-monde ne voulait aller.

E. Balladur : « Oui, pas grand-monde le voulait. C’était annoncé comme difficile. Nous avons fait une partie du chemin ; pas complètement, il faut bien le constater. C’est la réalité d’aujourd’hui. »

Q. D. Strauss Kahn voulait se lancer dans cette aventure et c’est vrai que c’était tentant. Finalement c’est J.-P. Huchon qui a été choisi par vos soins et les troupes du PS. Pas de regret de ce côté-là, vous avez co-conduit cette campagne !

D. Strauss-Kahn : « Si, un peu de regret. Ce n’est pas la peine de revenir là-dessus. J’ai longtemps hésité. J’avais une mission à remplir au Gouvernement, qui est loin d’être terminée, sur l’emploi, la croissance. Et puis, présider la région, si nous devions la gagner - ce que l’on ne savait pas au démarrage - bien entendu était aussi très passionnant : il y a beaucoup de choses à faire. J’ai hésité, et puis nous avons tranché parce que comme vous le savez, et le Premier ministre l’a dit à plusieurs reprises, nous voulons limiter le cumul. Nous voulons que les gens choisissent tôt - et, plus d’un mois avant les élections, j’ai choisi. Maintenant, ces élections sont gagnées. Cela n’était pas joué d’avance, je crois. Et je crois que c’est assez symbolique que nous ayons pu gagner cette région Île-de-France, parce que parmi les autres régions que je voyais tout à l’heure sur votre carte et que la gauche a gagnées, et que la droite dirigeait dans la mandature précédente, ce sont toutes des régions qui, à un moment ou à un autre dans le passé, ont déjà été dirigées par la gauche. »

Q. Ce qui n’était pas le cas de l’Île-de-France !

D. Strauss-Kahn : « L’Île-de-France a toujours été dirigée par le RPR et l’UDF. Et c’est la première fois que la gauche arrive - notamment parce qu’elle était unie, réunie - à l’emporter. Et de ce point de vue-là, comme c’est la plus grande région du pays, la région-capitale, je crois que c’est très symbolique. »

Q. Est-ce que vous n’êtes pas inquiet du fait qu’au fond, 60 % des Français - si je compte les 40 % d’abstentionnistes, les 5 % d’extrême gauche, et les 15 % d’extrême droite - se sentent hors système et vous l’ont clairement dit.

D. Strauss-Kahn : « Oui, tous les démocrates de ce point de vue-là peuvent être inquiets. C’est vrai qu’il y a eu beaucoup d’abstentions à l’occasion de ces élections. Chacun l’a constaté. Il y a eu aussi une poussée modeste, mais quand même qui existe, du Front national, ce qui m’inquiète encore plus. Il est clair que nous avons là des élections qui n’ont pas énormément mobilisé. Mais on a déjà connu cela dans le passé. Il faut voir aussi sans doute : la force d’attraction d’un certain nombre de candidats n’était pas très forte, et peut-être était-ce plus vrai à droite qu’à gauche puisque finalement la gauche l’a emporté dans un plus grand nombre de régions. Je crois qu’il faut rester modeste et humble à l’égard de cette victoire. C’est un soutien au Gouvernement, je le lis comme ça. C’est rare que des élections intermédiaires viennent conforter le gouvernement. Généralement c’est plutôt le contraire. C’est le gouvernement qui reçoit une critique quand il est en place. Cela n’est pas le cas cette fois-ci. Pour autant, vos reportages le montraient, chacun le sait, il y a plus de trois millions de chômeurs dans le pays encore, il y a une tâche immense à accomplir, et donc il n’y a pas de quoi pavoiser. Lorsque nous aurons obtenu - je suis sûr que cela sera le cas - dans six mois, dans un an, des résultats très significatifs - pas simplement des démarrages de résultats : la croissance qui revient, le chômage qui commence à baisser, mais ce n’est pas suffisant - lorsque dans six mois, un an, les résultats seront massifs, alors on pourra sinon pavoiser, du moins vraiment sourire. Aujourd’hui, il n’y a pas tellement de quoi sourire dans un pays dans lequel il y a autant de gens qui sont en difficulté. Il reste qu’après neuf mois de Gouvernement, le style que L. Jospin a voulu donner à son gouvernement, la confiance qui a été regagnée, la croissance qui est de retour, tout ça a sans doute joué sur les choix dans l’ensemble du pays. Je ne parle pas particulièrement de l’Île-de-France, dont je me réjouis un peu - M. Balladur me le pardonnera - mais sans doute, dans les choix dans l’ensemble du pays. »

Q. Le fait qu’une partie de ce peuple de gauche se dise déçue par votre style de parti, disons gouvernementale, c’est-à-dire qui se frotte aux réalités et qui au fond ne donne pas tout à tout le monde, cela vous inquiète aussi

D. Strauss-Kahn : « Non, c’est normal. Il est normal qu’une part de ceux qui sont les plus démunis, qui souffrent le plus, trouve que cela ne va pas assez vite. Et ils l’ont montré à plusieurs reprises, notamment au mois de janvier. Alors, qu’ils se retrouvent ensuite en votant pour des mouvements d’extrême gauche, pour manifester cela par leur vote, c’est tout à fait normal. On va maintenant voir ces élus de l’extrême gauche dans les assemblées, et sans doute cela leur sera-t-il utile pour leur contact avec la réalité. »

Q. Vous nous parliez tout à l’heure de résultats symboliques attendus par les Français. Évidemment on regarde toujours l’indicateur du chômage, et notamment cette barre des trois millions. À quel moment, à votre avis, pourra-t-elle repasser sous les trois millions ?

D. Strauss-Kahn : « Il faut l’espérer avant la fin de l’année. Le processus est en cours, on le sait, la croissance revient ; nous aurons, je pense, au premier semestre, déjà 100, 150, peut-être 200 000 créations d’emplois. C’est très massif, et de ce point de vue, si cela continue sur ce rythme - ce qu’il faut préserver : c’est fragile la croissance - si cela continue sur ce rythme... je crois que les entreprises le veulent ; je m’adresse à elles en disant que le moment est venu de commencer à embaucher, de développer les capacités. On le voit dans l’ensemble de l’Europe, on le voit en France aussi, si ce mouvement se poursuit, alors la France, toute la France, ceux qui sont les plus démunis comme ceux qui ont déjà un emploi et qui trouveront le résultat de cette croissance dans le pouvoir d’achat, eh bien toute la France trouvera bénéfice à cela. Mais ce n’est pas encore gagné. Ce n’est jamais vraiment gagné d’avance. C’est un peu comme les élections. »

Q. Monsieur Balladur : la croissance revient. C’est un mot qui revenait très souvent dans votre bouche quand je vous recevais comme Premier ministre. Vous disiez, elle revient, et d’ailleurs elle revenait, et le chômage baissait. Et après il a remonté. Comment vous interprétez, pour l’instant, l’action du gouvernement de L. Jospin ?

E. Balladur : « Il y a plusieurs phénomènes. Il y a d’abord le fait que la croissance revient en Europe. De façon générale, les choses vont mieux qu’il y a quelques années, et par conséquent les créations d’emplois se développent. Il y a également le fait que contrairement à une idée répandue, le fait de lutter pour réduire les déficits budgétaires, loin d’être un élément contraire à la croissance, est au contraire un élément qui la facilite, D’ailleurs tous les pays du monde en ont fait l’expérience. J’observe d’ailleurs que nous avons encore des déficits budgétaires qui sont beaucoup trop importants, beaucoup plus importants qu’ils pouvaient l’être il y a dix ans, il y a quinze ans, et que nous devons continuer l’effort que nous faisons. Alors, tout le problème est de savoir si l’on consolide ou pas la croissance en diminuant suffisamment les dépenses, et en commençant à diminuer les impôts. C’est le débat à mon avis des années qui viennent, maintenant. Alors, je sais bien qu’il y a beaucoup de chômage et que donc il y a des dépenses qui sont entraînées par la lutte contre l’exclusion, par les dépenses sociales, mais il faut également consolider absolument cette croissance en baissant davantage les impôts et les dépenses. »

Q. Ces impôts, vous allez un jour les baisser, pour que justement il y ait davantage de consommation ?

D. Strauss-Kahn : « La consommation, elle est là. Baisser les impôts, tout le monde peut le souhaiter, il n’y a aucune raison de souhaiter des impôts élevés, il faut en avoir les moyens. Ce que je constate, c’est ce que vous rappeliez à E. Balladur tout à l’heure, qu’il y avait un retour de la croissance lorsqu’il était Premier ministre, en effet, mais en 1995 - après mai 1995, il n’était plus Premier ministre - mais en 1995, ce retour de la croissance a justement été cassé par la majorité précédente, lorsqu’elle a augmenté massivement les impôts avec ces fameux deux points de TVA dont chacun se souvient. Et donc il ne suffit pas d’espérer que la croissance se formera, il faut la créer. Et depuis neuf mois, je crois que ce gouvernement l’a créé. C’est pour ça que nous l’avons. Bien sûr, un peu partout en Europe, le mouvement est plutôt dans ce sens. Mais on peut casser la croissance lorsqu’on ne fait pas attention. C’est ce qui s’est passé en 1995. Et si la croissance est forte aujourd’hui en France, c’est parce que depuis neuf mois, la hausse du SMIC, l’allocation de rentrée scolaire, bref du pouvoir d’achat a créé de la consommation qui fait qu’elle est de retour. Je pense qu’il faut continuer dans cette voie. Il faut faire cela à rythme mesuré. J’écoute ce que dit M. Balladur sur la baisse des déficits. Je pense qu’on est toujours dans le même schéma. Il est plus facile lorsqu’on est dans l’opposition de la réclamer que de la mettre en œuvre lorsqu’on est au pouvoir, lorsqu’on a été au pouvoir. Ce que je constate, c’est que nos déficits baissent, et que c’est d’ailleurs comme cela que nous avons été qualifiés pour l’euro.
Je voudrais revenir d’un mot, si vous le permettez, sur un point qu’E. Balladur a évoqué tout à l’heure concernant l’avenir de la droite dans notre pays. Je ne sais pas, et il ne m’appartient pas de savoir si les droites aujourd’hui divisées doivent se réunir, former un parti unique ou pas, c’est leur affaire. Ce qui me paraît clair c’est que nous sommes, aujourd’hui, encore devant le deuxième tour des régionales : les présidents vont être élus vendredi dans les différentes régions. Il me paraît clair que ce que disait G. Frèche pour le Languedoc-Roussillon vaut pour d’autres régions : ou bien cette droite, dans les endroits où elle n’a pas la majorité relative, saura tenir les engagements qu’elle a pris devant les électeurs et qui l’ont entendu comme cela - comme d’ailleurs l’a dit M. Balladur qui est clair pour ce qui le concerne - et ne présentera pas de candidat pour, profitant des voix du FN, l’emporter ; ou bien elle le fera, et dans ces conditions nous nous trouverons dans une crise politique très lourde, car nous aurions une situation dans laquelle la droite après avoir dit qu’elle ne ferait pas d’alliance avec le FN finalement se laisserait élire par le FN pour battre la gauche qui l’aurait emporté en sièges. Ce serait quelque chose d’assez dangereux et je veux que chacun mesure bien la difficulté qu’il y aurait dans notre pays à nous trouver dans une situation analogue. Je crois que la seule bonne manière pour éviter de se faire piéger par le FN c’est que lorsqu’on n’a pas la majorité relative on ne présente pas de candidat. Moi, j’avais dit cela pour la gauche. J’avais dit : si les listes conduites par M. Balladur l’emportent nous ne présenterons pas de candidats de façon à ce qu’il n’y ait pas de risques. Les listes que je conduisais l’ont emporté, je m’en réjouis. Il faudrait que la situation symétrique puisse se mettre en place. »

E. Balladur : « Comme je remercie M. Strauss-Kahn de ses bons conseils ! N’est-ce pas le bon apôtre ? Les choses sont parfaitement claires : la droite républicaine et libérale a pris ses décisions, pardonnez-moi, sans y être incitée par vous, puisqu’elle les a prises la première. Et dans ces conditions l’avenir de la droite républicaine et libérale dépend de sa fidélité aux principes qu’elle a affichés - et je suis très confiant là-dessus - et à la façon dont elle saura les mettre en œuvre. Pour le reste je fais confiance à M. Strauss-Kahn pour régler les problèmes de la gauche plurielle qui ne sont pas absolument inexistants. »

D. Strauss-Kahn : « N’ayez crainte, nous avons montré au cours des dernières semaines, que nous savions les régler en tout cas de manière à ce que les Français l’approuvent. »