Interview de Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement, dans "Libération" du 2 janvier 1997, sur l'étude épidémiologique sur le taux de leucémie dans la région de La Hague et la mission de M. Claude Mandil sur l'avenir du combustible Mox.

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Libération : Comment sera conduite la nouvelle étude épidémiologique ?

Corinne Lepage : Son cahier des charges, son suivi et le recrutement des chercheurs seront effectués par un comité scientifique présidé par le Pr Charles Souleau, président de la commission environnement du comité d’hygiène et de santé publique de Paris et doyen de la faculté de pharmacie de Châtenay. Ce comité comprendra des représentants de l’Inserm, de l’IPSN et du CNRS (1), ainsi que deux épidémiologistes étrangers (un Anglais et un Allemand). En seront également membres le Pr Jean-François Viel, professeur d’épidémiologie et de biostatistiques à la faculté de médecine de Besançon, le Dr Sylvia Médina, de l’Observatoire régional de santé de Paris, et le Pr Guy Leverger, pédiatre. Je souhaite que le registre des cancers de la Manche, qui existe depuis décembre 1994, puisse être consolidé et développé, et que les équipes locales soient associées à l’étude. Hervé Gaymard, secrétaire d’État à la santé, et moi-même demandons enfin que les premiers résultats de l’étude nous soient communiqués en juin. Tout ceci sera, bien sûr, rendu public.

Libération : Cinq mois, n’est-ce pas très court ?

Corinne Lepage : L’objectif est d’apporter un certain nombre d’éléments le plus rapidement possible, mais l’étude prendra, évidemment, plus de temps. Il ne s’agit pas d’entreprendre une analyse critique des résultats du Pr Viel, mais bien de réaliser une étude complète.

Libération : Selon nos informations, le gouvernement planche, par ailleurs, sur les conséquences du cycle nucléaire déchets radioactifs, retraitement des combustibles usés…

Corinne Lepage : Une mission sur ce thème vient, en effet, d’être confiée à Claude Mandil, directeur de l’Énergie au ministère de l’Industrie, et Philippe Vesseron, directeur de la protection et de la prévention des risques à l’Environnement. L’objectif est d’établir un bilan économique et écologique de la filière Mox (combustibles au plutonium qui pourraient être utilisés, à terme, dans plus d’une vingtaine de réacteurs EDF, ndlr). La procédure est ici différente. Il ne s’agit pas de mettre en place une commission indépendante (comme ce fut déjà le cas pour le centre de stockage de déchets radioactifs de la Manche avec la commission Turpin et pour le surgénérateur Superphénix avec la commission Castaing, et comme c’est le cas aujourd’hui avec la commission Souleau), mais de demander un rapport à l’administration afin d’orienter la stratégie des pouvoirs publics et des acteurs industriels du nucléaire : EDF, le CEA, Cogema, Framatome et l’Andra (Agence nationale pour les déchets radioactifs). Tant le Parlement que la Commission nationale d’évaluation de la recherche sur les déchets radioactifs ont souligné la nécessité de rendre plus claire et plus cohérente la stratégie poursuivie à long terme sur l’aval du cycle nucléaire.


(1) Respectivement, Institut national de la santé et de la recherche médicale, Institut de protection et de sûreté nucléaire et Centre national de la recherche scientifique.