Texte intégral
Le Point : Après la signature de la 2e convention avec la FFRP pour la période 1996-1999, quel bilan dressez-vous de l’action de votre ministère ?
Corinne Lepage : La reconduction de la Charte officielle du balisage avec la Fondation d’entreprise Gaz de France en 1996, et la participation du ministère de l’Environnement au 50e anniversaire de la FFRP cette année sont la marque de l’intérêt que j’ai toujours porté à la cause du patrimoine des chemins.
Le bilan est très positif. Sur la protection des chemins, la FFRP et les DIREN ont pu avoir une action de coordination constructive ; les plans départementaux d’itinéraires de promenade et de randonnée se sont très largement développés ; l’inventaire juridique et qualitatif des chemins s’est poursuivi. Concernant la sensibilisation du public à la découverte des paysages, le succès de l’implantation des 100 Points info rando confirme l’utilité de toutes les actions locales. Enfin, au chapitre de la création d’emplois, le travail de la FFRP s’est avéré très efficace, en liaison avec les Comités régionaux et départementaux. (…) J’apporte mon soutien à cette association parce qu’elle fait œuvre utile. Une politique deux fois gagnante : d’abord pour l’environnement, en permettant un entretien indispensable de l’espace ; ensuite pour le maintien de la vie dans l’espace rural grâce au tourisme vert.
Le Point : Quelle aide l’État peut-il apporter à l’avenir pour la valorisation des chemins ? Selon quels critères ?
Corinne Lepage : Le soutien du ministère s’est organisé par l’intermédiaire des DIREN (balisage, entretien des sentiers…) et des services de l’État. Une politique qui doit être poursuivie – cela me paraît essentiel – avec, si possible, une aide matérielle dans un contexte budgétaire difficile. Des subventions sont prévues, mais le concours du ministère doit d’abord être technique avec l’assistance de l’ONF. La priorité pour la création ou la réhabilitation de sentiers doit être donnée à des régions où l’activité économique est le plus ralentie, en tenant compte, évidemment, de leur intérêt pour nos concitoyens. La mise en valeur des chemins s’inscrit, en effet, dans une politique globale d’aménagement du territoire au service de la qualité de vie et de rapports humains différents. Randonnées et balades permettent d’aller respirer l’air pur et nous aident aussi à retrouver nos racines.
Le Point : Votre participation au 2e colloque de l’Unesco en octobre 1997 vous donnera une nouvelle occasion d’intervenir sur la question des chemins. Que représentent-ils pour vous ?
Corinne Lepage : Comment ne pas rapprocher l’Unesco, maison de la culture universelle, du symbole du lien que le chemin suggère ? Chemin de promenade ou chemin de vie qui conduit chacun à son rythme. (…) L’aménagement de l’espace a tout sacrifié à ce qu’on a dit être l’efficacité et la modernité. On y a parfois tourné le dos. Vouloir reconstituer les chemins démontre bien qu’ils manquent dans le paysage et dans notre manière de vivre. Il faut donc apprendre à faire coexister l’autoroute et le chemin pédestre. On a besoin des deux. Surtout des chemins !
Le Point : La mise en place d’un Conservatoire des chemins est souhaitée par tous les amateurs de randonnée pédestre. Où en est le dossier ? Peut-il aboutir en 1997 ?
Corinne Lepage : La création d’un organisme qui aura une vue d’ensemble sur la préservation et la réhabilitation des chemins est un thème sur lequel nous allons avancer cette année. J’espère avoir de bonnes nouvelles à annoncer à l’occasion de la célébration du 50e anniversaire de la FFRP. Nous rejoignons sur ce sujet l’évolution de la société où les citoyens souhaitent prendre en charge la gestion au quotidien de leur cadre de vie. La mise en place de cet organisme de coordination va donc dans le bon sens.
Le Point : Selon vous, comment les associations impliquées dans la valorisation des chemins de randonnée peuvent-elles trouver un appui auprès des institutions européennes ?
Corinne Lepage : Je ne crois pas que des actions puissent être menées par voie réglementaire à l’échelon européen ; en revanche, des initiatives menées au sein de l’Union européenne par des associations ou fédérations pour la mise en valeur de politiques sur les chemins ou le tourisme vert sont à encourager par les pouvoirs publics. Je serais prête à soutenir une initiative communautaire conviviale. Pourquoi pas « Les chemins de l’Europe » ?
Le Point : La découverte des chemins à l’école peut-elle s’inscrire dans un programme d’éducation à l’environnement ?
Corinne Lepage : Le respect de la nature s’inscrit dans l’apprentissage de l’éco-citoyenneté. La découverte à pied de la nature et la sauvegarde des chemins vont donc dans le même sens. L’éducation à l’environnement n’est pas dissociable de l’éducation civique. Il faut la généraliser à l’école, notamment dans le primaire.
Lexique :
FFRP : Fédération française de la randonnée pédestre
DIREN : Direction régionale de l’environnement
CDR : Comités départementaux et régionaux
ONF : Office national des forêts