Texte intégral
G. Leclerc : Le Front national battu à deux élections cantonales, à Chaville très sévèrement puisque votre candidat ne recueille que 25 % et surtout à Toulon, où pourtant le candidat du Front national était largement en tête au premier tour. Est-ce que ce n'est pas un échec sévère et qui serait dû à la polémique sur vos propos sur les races ?
J.-M. Le Pen : Je crois au contraire que c'est une grande victoire. Avant le Front national, les partis coalisés faisaient 100 % du corps électoral. Dans un cas, ils ne font plus que 54 % et dans l'autre 75. Le Front national fait 46 et 25 %. À Nice, il fait au premier tour 29 % contre le candidat du maire Peyrat, dissident du Front national, plus de voix qu'il n'avait il y a trois ans.
G. Leclerc : Vous êtes quand même isolé, quand même battu. Est-ce que nous ne pensez pas que vous êtes dans une situation difficile ? Vous êtes condamné maintenant par l'ensemble des partis politiques, par les mouvements des Droits de l'homme, par l'Église, par l'épiscopat. Vos propos sur l'inégalité des races ne sont pas passés.
J.-M. Le Pen : C'est un procès d'intention du style de celui qu'on nous fait actuellement mais c'est vrai qu'on ira même jusqu'à l'élimination puisque C. Pasqua a dit hier, « Le Pen continuera de monter et un jour, il faudra bien se décider à le mettre hors d'état de nuire ». Qu'est-ce qu'on va me faire ? On va me gazer comme les Saincené ? On va me mitrailler comme Madame Piat ? On va me bomber comme Monsieur Mazéras ? Qu'est-ce que l'on va me faire ? On va faire une loi qui va forcer les électeurs à voter pour les candidats de la bande des quatre - que dis-je ! - du gang des quatre ou des six parce que désormais cette union des coquins et des copains est un simple syndicat de corrompus, incapable de résoudre les grands problèmes de chômage, d'immigration, d'insécurité de notre pays. Or le Front national est désormais en situation alternative des partis du pouvoir. Je me permettrais de rappeler au RPR que c'est exactement le cas de figure dans lequel les partis de la IVe République s'étaient organisés contre le RPF du général de Gaulle. Mais ils n'avaient tout de même pas été jusqu'à s'allier au parti communiste.
G. Leclerc : À propos de la loi Toubon, vous l'avez déjà qualifiée de scélérate. Le Monde a publié les principales dispositions et notamment le délit pour diffusion de message à caractère raciste. Mais d'une certaine façon, vous ne devriez pas vous sentir concerné puisque vous dites que nous n'êtes pas raciste ?
J.-M. Le Pen : Justement, comme on dit que je suis raciste c'est donc que les opinions que j'émets habituellement sur la défense prioritaire des Français sont considérées comme racistes. C'est bien ces messages qui sont visés. Et comme c'est l'intention et la pensée qui sont visées, il s'agit là d'une loi totalitaire, quelqu'un a dit de guerre civile, je crois que c'est vrai. Et il est à noter que Monsieur Toubon, qui avait combattu la loi Gayssot, est aujourd'hui le présentateur de cette loi qui est d'ailleurs la loi Gaubert, la loi que Pasqua avait préparée et qui n'avait pas été acceptée par le Conseil national des Droits de l'homme, que sais-je encore ? Il est évident que c'est un aveu de faiblesse formidable et dès le vote de cette loi, les Français devront savoir qu'on ne peut plus les défendre, qu'il est interdit de les défendre sous peine de prison, d'amende ou de persécutions diverses.
G. Leclerc : On peut les défendre sans tenir des propos racistes !
J.-M. Le Pen : Je ne tiens pas de propos racistes.
G. Leclerc : Donc vous ne serez pas concerné par la loi...
J.-M. Le Pen : Bien sûr que si, puisque cette loi a évidemment pour but de combattre le Front national. Monsieur Toubon a reconnu que quand j'ai parlé l'autre jour...
G. Leclerc : Sur l'inégalité des races.
J.-M. Le Pen : Que j’ai constaté l'inégalité des races, que tout le monde a constatée aussi.
G. Leclerc : Ce n'était pas un lapsus ?
J.-M. Le Pen : Ce n'était pas un lapsus mais il n'y avait là-dedans ni haine bien sûr, ni mépris, ni quoi que ce soit. Il s'agit là d'un procès d'intention, d'une querelle d'Allemands que le Premier ministre a d'ailleurs aggravée dans des conditions particulièrement condamnables puisqu'il l'a fait dans une école au mépris de la laïcité, en utilisant des injures. Mais comme il aime, lui, les trilogies, moi je dis de lui qu'il est un affairiste, qu'il était antinational et criminel contre l'humanité. Et s'il veut que je lui explique ces propos, eh bien il n’a qu'à écouter le discours que je prononcerai samedi prochain à la fête des Bleu-Blanc-Rouge sur la pelouse de Reuilly car j'ai bien l'intention de combattre et de pousser l'avantage du Front national. Et on entendra reparler du Front national dans les jours et les semaines qui viennent.
G. Leclerc : Vous avez salué la visite du Pape mais n'êtes-vous pas déçu, car le Pape s'est montré très prudent. Il a dit que le baptême de Clovis était celui du roi franc et non pas celui de la France et puis il a prôné une France accueillante. Cela ne va pas dans le sens de vos idées, non ?
J.-M. Le Pen : Pour bien dire la vérité, le Pape n'était pas très combatif. C'est un vieux monsieur très courageux et admirable, je dois dire dans la tâche qu'il accomplit. Et personnellement, j'étais d'esprit et de corps avec les assemblées qui l'ont accueilli.
G. Leclerc : Vous n'étiez pas à Reims, or vous aviez dit que vous iriez !
J.-M. Le Pen : Oui, mais le matin, on m'a dit que c'était bouché, qu'on ne pouvait pas y accéder. Ce n'était donc pas la peine de se déplacer. Ce sont les gens de mon mouvement qui m'ont dit cela. Et je voudrais simplement dire, rappeler au Pape et à ceux qui minimisent le baptême de Clovis, que ce dernier a été baptisé avec 3 000 de ses guerriers. Ce n'était pas du tout un baptême individuel, c'était un baptême collectif. On peut parler aussi dans un certain sens et Saint-Rémi, l'évêque de Reims, l'a bien dit, d'un baptême politique.
G. Leclerc : Il y a huit jours, à une réunion du Front national de la jeunesse vous avez lancé un appel à la révolution, qu'est-ce que cela signifie ?
J.-M. Le Pen : J'ai averti les jeunes qu'ils devaient se tenir prêts à vivre l'effondrement de la Ve République, l'effondrement d'un système impuissant, incapable de défendre les Français, qui consent à la disparition de la France, à la fusion de la France dans l'euromondialisme, et il est évident...
G. Leclerc : Mais il y a un côté insurrection dans la révolution, non ?
J.-M. Le Pen : Non ! Monsieur qui vous a dit cela ?
G. Leclerc : Une révolution, c'est la définition qu'on en a !
J.-M. Le Pen : Non, il y a des révolutions pacifiques et puis, il y a des pouvoirs quelquefois que l’on n’a pas besoin de renverser, il suffit de le ramasser dans le ruisseau, où il s'est placé.
G. Leclerc : Vous pensez que ce sera le cas bientôt ?
J.-M. Le Pen : Je crois que ce sera cela, oui.