Texte intégral
ENTRETIEN AVEC « L'AFP » ET « REUTERS » 13 mai 1998
Q — La rencontre Milosevic-Rugova, est-elle une bonne nouvelle, un point positif ? Elle intervient juste avant votre visite en Macédoine et en Albanie.
R — C'est une annonce très positive. Il me semble que cela montre qu'aussi bien le président Milosevic que M. Rugova ont pris acte et tenu compte de l'extrême fermeté et de l'extrême constance du Groupe de contact. Depuis des semaines, il a adressé le même message clair et net, c'est-à-dire que le statu quo est intolérable, que la revendication d'indépendance n'est pas possible à soutenir, et qu'il faut à tout prix entamer un dialogue pour aboutir à une autonomie très substantielle que le Groupe de contact n'a pas à définir de l'extérieur, mais qu'il incombe aux protagonistes de définir directement. Et à plusieurs reprises, à chacun de leurs réunions, encore la dernière fois, pas dans la formation « Groupe de contact », mais dans la formation « G8 », tous les pays qui veulent à tout prix aboutir à une solution et enrayer de nouveaux drames ont envoyé un message très clair qui était : « Ouvrez la négociation sans préalable supplémentaire ». Je suis donc heureux de voir qu'aussi bien le président Milosevic que M. Rugova ont fait ce premier pas. Il s'agit maintenant de poursuivre et de consolider.
Q — Votre visite en Macédoine et en Albanie peut-elle apporter quelque chose de plus ?
R — J'y vais dans le même esprit qu'avant cette indication, c'est-à-dire que cela me permettra de me rendre compte sur place, d'une façon plus directe et plus complète, de la façon dont l'Albanie et la Macédoine analysent la situation et surtout analysent les risques pour les pays qui sont aux avant-postes. Il y a peu de pays, il y a peu de gens en dehors des Kosovars et des Serbes qui aient autant intérêt à ce qu'il y ait rapidement une solution qui arrête l'engrenage très dangereux que nous voyons à l'oeuvre.
ENTRETIEN RADIO TELEVISION MACEDONIENNE : 13 mai 1998
Q — Monsieur le Ministre, vous connaissez bien le dossier sur l'ex-Yougoslavie, en tant qu'ancien proche collaborateur de François Mitterrand. Dans votre livre : « Les mondes de François Mitterrand », vous avez écrit, à la fin du paragraphe consacré à l'ex-Yougoslavie : « aider les ex-Yougoslaves à tourner la page, à se démocratiser derrière de nouveaux leaders pour européaniser les Balkans ». Cette idée est-elle encore actuelle aujourd'hui ?
R — Oui, je crois que c'est une idée qui reste actuelle parce que c'est loin d'être réalisé. Sur une partie de l'ex-Yougoslavie, le processus est en cours. Tourner la page, regarder l'avenir et construire de nouveaux pays plus modernes et très proches de l'Europe… Mais, il y a, malheureusement, vous le savez bien, des conflits.
Q — Récemment, dans l'intervention faite au Conseil de l'OSCE à Vienne, vous vous êtes engagés pour un pacte de stabilité dans le sud-est européen. En quoi consiste cette idée ?
R — En ce qui concerne l'ex-Yougoslavie, la communauté internationale est très mobilisée par l'affaire de la Bosnie et est favorable à la pleine application des Accords de Dayton et, pour aller au-delà de la simple pacification et stabilisation militaire, pour développer les institutions qui engagent toutes les communautés de la Bosnie. D'autre part, il y a la question pressante et terrible du Kosovo, où il s'agit d'étouffer dans l'oeuf toute aggravation supplémentaire. C'est là l'action du Groupe de contact qui est très mobilisé et homogène depuis le début du mois de mars. D'autre part, il y a un certain nombre de pays qu'il faut encourager dans leur consolidation politique, dans leur développement économique et pour un rapprochement avec l'Europe. J'ai pensé, lorsque je suis allé parler devant l'OSCE, qu'il fallait essayer de rassembler ces morceaux épars de pays qui sont dans des situations tout à fait différentes, qui n'appartiennent pas aux mêmes organisations, et essayer de retrouver une vision cohérente régionale ou sub-régionale. Dans cette partie du sud-est de l'Europe, que l'on peut appeler Balkans, mais on peut discuter le terme car ce n'est pas uniquement géographique, c'est également géopolitique, j'ai pensé qu'il fallait réfléchir aux conditions d'une stabilisation, d'une sécurité, de mesures de confiance et reprendre tous les différents chapitres de la sécurité. Cela supposerait qu'il y ait une grande transparence, un raisonnement en terme d'équilibre des forces au plus bas niveau possible, des échanges d'informations, des relations de bons voisinage, des coopérations dans beaucoup de domaines. Mais, évidemment, pour aller plus loin vers l'avenir, dans cette perspective à moyen terme que j'ai développée, cela suppose que l'on ait trouvé une solution dans l'affaire du Kosovo. Sinon, tout va s'envenimer et nous n'en serons plus à parler de l'avenir, c'est-à-dire de l'européanisation des Balkans, mais nous serons repartis plusieurs années en arrière. C'est donc l'urgence.
Q — Au sujet de la crise au Kosovo, que faire maintenant ? On à l'impression que tous les efforts que fait la communauté internationale pour trouver une solution pour le Kosovo ne donnent pas de fruits pour le moment, au moins visibles ?
R — Pour le moment, vous avez raison, malheureusement, nous n'avons pas réussi à enclencher les négociations que nous demandons. Mais, la politique du Groupe de contact est bonne et c'est important de voir que, dès que la crise, qui couvait lorsque nous avons écrit avec M. Kinkel au président Milosevic à ce sujet en novembre 1997, est redevenue violente, on a vu tout de suite que l'unité se faisait, des Etats-Unis à la Russie, en passant par la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et l'Italie, sans parler de tous les autres pays d'Europe, au sens large, ou l'Europe des Quinze ou pays voisins de l'ex-Yougoslavie. C'est très important, car, il y a quelques années, il n'y avait pas d'unité entre les grands pays du monde sur l'attitude à adopter à propos de la Croatie et de la Bosnie. Là, il y a unité, homogénéité. Aucun pays ne soutient la revendication d'indépendance parce que l'on ne peut pas entrer à nouveau dans un cycle de déstabilisations même si, sentimentalement, l'on peut comprendre certaines revendications. Il est clair qu'en termes politiques, en termes géopolitiques, il faut être responsables. On ne peut pas soutenir quelque chose qui irait redétruire la situation dans la région. Aucun pays du Groupe de contact par ailleurs ne trouve la situation actuelle tolérable. La position constante du Groupe de contact depuis des semaines, c'est qu'il faut aboutir à une autonomie substantielle que le Groupe de contact n'a pas à définir, arbitrairement, a priori. Il faut que ce soit la négociation qui le définisse. D'où cette pression qui est faite de part et d'autre, pour que cette négociation s'engage sans préalable supplémentaire et détermine ce statut d'autonomie. Il y a eu des petits résultats. La confirmation de l'accord sur l'éducation, c'est désormais un problème d'exécution, il faut faire attention, quelques ouvertures sur la composition de la délégation, sur la possibilité d'une négociation mais ce n'est pas suffisant. Nous en sommes donc à maintenir nos pressions et les autorités de Belgrade ne doivent pas se faire d'illusions : la communauté internationale ne va pas se démobiliser sur ce sujet. Elle est vraiment homogène, déterminée à trouver une solution, à empêcher l'engrenage de la violence d'où qu'il vienne. C'est trop important pour l'ensemble de la région pour que ce soit traité comme une crise dont on s'occupe pendant quelques semaines avant de penser à autre chose. C'est très important, il ne faut pas qu'il y ait d'erreur à Belgrade et à Pristina sur ce point.
Q — Les pressions économiques seront-elles suffisantes pour résoudre la crise ?
R — Il n'y a pas que des sanctions économiques. Il y a des décisions qui concernent, bien sûr, le gel des avoirs à l'extérieur de la Yougoslavie, le gel des nouveaux investissements à l'étranger. Mais il y a aussi des positions politiques qui sont tout à fait claires et des mesures d'un autre type, comme le refus des visas pour les personnes qui pourraient être impliquées directement dans la répression. Il y a d'autre part, une résolution qui n'est une sanction contre personne, mais qui est une précaution, une résolution sur l'approvisionnement en armes, aussi bien du côté de la Yougoslavie que du côté de certains terroristes albanais. Il y a une série de mesures de nature différente qui se combinent. Ce qui est important, c'est l'addition. Nous allons maintenir les pressions, y compris politiques et diplomatiques. Elles ne sont pas du même ordre puisque, du côté de Belgrade, c'est une vraie pression consistant à dire : « vous avez voulu préparer la réinsertion de la Yougoslavie dans la communauté internationale et en Europe » — et sur certains plans, on peut dire qu'en effet, la Yougoslavie s'est comportée, depuis deux ans, en Bosnie, d'une façon qui commençait à changer le jugement porté sur la politique de Belgrade, on l'a vu à propos de la Republika Sprska, de la Slavonie, il y a eu des éléments convergents dans ce sens — « La Yougoslavie veut-elle poursuivre ce chemin ? Ses dirigeants veulent-ils réinsérer ce pays ? Est-ce vraiment la politique du président Milosevic ? » A ce moment-là, il faut, à propos du problème du Kosovo, considérer qu'il est réel, qu'il est urgent, et doit se traiter par la négociation et cette négociation doit aboutir à un statut substantiel. Il ne faut pas qu'il y ait un simulacre de négociation pour aboutir à un simulacre de solution. Il faut une vraie solution. Voilà ce que nous disons. Nous le disons avec beaucoup de force, avec des mesures de mise en garde, avec des sanctions puisque, malheureusement, il faut en passer par là. Ce n'est jamais une solution. Ce n'est jamais souhaitable. Mais on ne peut pas faire autrement… Et d'autre part, nous disons aux Albanais du Kosovo que nous comprenons leur souffrance et leur impatience, mais il faut également qu'ils aient une revendication raisonnable et qu'ils la défendent dans la négociation.
Q — La crise du Kosovo est grave car elle peut avoir des conséquences difficiles et lourdes pour la région, surtout pour les pays voisins et notamment la Macédoine. Que pensez-vous du mandat des forces de prévention ? Doit-il être prolongé en Macédoine ?
R — Absolument, il faut qu'il soit prolongé. C'est un des éléments de sécurisation, de stabilisation de la région et sur ce point, les choses sont claires.
Q — La France est-elle prête à participer à un nouveau mandat avec ses soldats ?
R — Nous examinerons les demandes qui pourraient être faites par le Secrétaire général des Nations unies à propos de la reconstitution d'une force et donc, pour un nouveau mandat.
Q — Vous êtes le premier ministre des Affaires étrangères de la France qui vient visiter la Macédoine. Pourquoi avoir attendu si longtemps ?
R — A la fois, je suis heureux d'être le premier et en même temps, je reconnais qu'il est dommage qu'il n'y ait pas eu de ministre français avant. J'espère bien que cela va changer. Je souhaite que ma visite ne soit pas uniquement considérée comme une visite dans le cadre de cette question du Kosovo qui nous préoccupe tous, et naturellement la Macédoine voisine mais aussi, comme une visite qui vise à impulser le développement des relations entre la Macédoine et la France, qui sont très bonnes au niveau de nos présidents. Mais nous avons tout un programme devant nous : sur le plan économique, pour l'application des accords que nous avons déjà signés, nous pourrons en signer d'autre notamment au niveau des investissements ; sur le plan de la consultation politique, sur le plan culturel aussi. Je vais m'employer à faire le meilleur travail possible sur le plan de la dynamisation de nos relations.
Q — Les relations politiques sont excellentes, mais au niveau économique, cela ne démarre pas comme l'on veut des deux côtés…
R — Oui, la Macédoine n'est pas assez connue des investisseurs français, des entreprises françaises. Il faut créer un mouvement, amorcer les choses.
Q — Des deux côtés, je pense que c'est assez intéressant, parce que la France se trouve peut-être parmi les derniers pays de la Communauté européenne qui investissent en Macédoine. Y a-t-il des problèmes caractéristiques ?
R — Non, il faut qu'il y ait un bon accord pour cadrer justement les conditions d'investissements. Ensuite, c'est un travail pour solliciter les entreprises, trouver la bonne adaptation entre les besoins de la Macédoine et ce que nous pouvons apporter. D'autre part, du côté de la Macédoine aussi, il faut que l'on s'intéresse plus à la France. Mais cela va venir, je suis optimiste.
Q — On dit que Thomson a été écarté du marché pour l'équipement de l'aéroport de Skopje, quel est votre commentaire ?
R — Je ne sais pas, ce serait dommage.
Q — La Macédoine fait partie de la Francophonie, c'est un bon moyen pour faire connaître la Macédoine en France mais également la culture française en Macédoine ?
R — La culture française et la langue française.
Q — Surtout la langue française ?
R — L'ensemble. Je vois que pour vous, c'est déjà acquis.
Q — La France est-elle prête à aider la Macédoine dans la formation de l'équipement de son armée car récemment, on avait parlé de cette possibilité ?
R — C'est une perspective, en effet, mais c'est plutôt au ministre de la Défense de s'en préoccuper. Ce que je voulais dire c'est que, sur le plan bilatéral, nous ne devons écarter aucun domaine. Cela dépend de ce qui est utile à la Macédoine, bien entendu. Cela ferait partie de relations bilatérales complètes que d'avoir une coopération sur ce plan.
Q — La phase sérieuse de l'euro a commencé. La France a été très critiquée par la presse européenne. Cette critique était-elle normale et justifiée ?
R — Je pense que ce sont des critiques assez injustes. De toutes façons, ce sont des péripéties, car, lorsque l'on pensera à l'euro dans 5 ou 10 ans, même déjà aujourd'hui, quand on réfléchit à l'euro, depuis les Etats-Unis ou l'Asie, ces commentaires ne comptent pas. L'élément historique, c'est que les pays d'Europe ont été capables d'élaborer ensemble une monnaie unique. C'est un élément fondamental, c'est le plus grand changement dans les relations monétaires et économiques internationales depuis 1945, mis à part le changement négatif, selon nous qui avait été la décision prise en 1971 par le président américain de l'époque Richard Nixon de mettre fin à la convertibilité du dollar en or. Sur ce plan, c'est le rééquilibrage le plus important et d'ailleurs, les marchés ne s'y sont pas trompés, ils n'ont accordé aucune espèce d'importance aux commentaires épidermiques de la presse de quelques pays. D'autre part, la France avait rigoureusement raison concernant la méthode de désignation. Les traités sont tout à fait clairs : c'est le Conseil européen qui doit désigner le président de la Banque centrale, ce ne sont pas les gouverneurs qui ont le pouvoir de coopter l'un d'entre eux. Et c'est un élément fondamental qui n'a rien a voir avec les personnes et d'ailleurs, jamais la France n'a attaqué les capacités et les mérites de M. Duisenberg. Jamais, de même qu'à aucun moment, les capacités et les mérites de M. Trichet n'ont pas été attaqués par la presse allemande ou néerlandaise. C'était un problème de principe. Quel type d'institution politique voulons-nous en Europe ? Est-ce la technocratie qui gouverne, y compris dans le domaine monétaire ? Ou est-ce le pouvoir politique légitime ? Le Conseil européen, c'est l'instance la plus légitime, puisque c'est le rassemblement des chefs d'Etats et de gouvernement élus par leur peuple. Donc, il n'y a pas un système plus démocratique. Et c'était aussi important que, dans certains cas, nous ayons des contestations à propos de certains commissaires européens qui se donnent des mandats eux-mêmes, alors qu'il ne peuvent les recevoir normalement que du Conseil des ministres des Affaires étrangères, le Conseil Affaires générales. Donc, nous nous battions en même temps pour une Europe politique. Et cet argument est tellement fort qu'il n'a pas été contesté. Il y a bien eu de la mauvaise humeur ou des critiques comme cela, mais on ne peut pas répondre à cet argument qui est l'esprit même du Traité. Cela n'enlève rien au fait qu'une fois que la discussion légitime a eu lieu, pour la désignation du président — et c'est tout à fait normal que pour une décision aussi importante il y ait un débat —. On le verra pour d'autres nominations en Europe. Une fois que la discussion a eu lieu, même si celle-ci a été vive, le président nommé a tous ces pouvoirs, tous les pouvoirs prévus par le Traité. Cela ne diminue en rien sa capacité, et notamment sa capacité à donner à l'euro la stabilité que nous voulons.
Q — On a dit que les relations entre Paris et Bonn sont difficiles à cause de cette histoire ?
R — Dans les relations Paris-Bonn, on a dit 50 fois que les relations avaient soufferts parce que, sur tel ou tel point, la France et l'Allemagne étaient en désaccord. La relation entre la France et l'Allemagne n'est pas un accord parfait, automatique, idyllique, abstrait sur tous les sujets. Ce sont deux grands pays, très différents, qui ont sur certains points, des intérêts convergents, et sur d'autres, des intérêts divergents. Sur certains points, les mêmes conceptions, sur d'autres, des conceptions différentes… mais il y a dans tous les cas, une volonté franco-allemande de surmonter les différences lorsqu'il y en a, pour continuer à exercer une action dans le même sens, à être ensemble le moteur de l'Europe. Même avec l'Europe à Quinze, et je pense que cela sera encore vrai dans une Europe à 25, rien ne peut remplacer, pour la marche en avant de l'Europe une bonne entente entre la France et l'Allemagne. Donc, si on est d'accord tout de suite, tant mieux ; sinon, on discute, on trouve une solution et les choses continuent. Il faut relativiser cela, il y a autant de sujets d'accord que de sujets de différences. Le fait historique qui restera, je le disais il y a un instant, c'est la capacité à avoir créé une monnaie unique. Rappelez-vous tout ce qui a été dit durant des années, dans toutes sortes d'endroits, sur le fait que cela ne se ferait jamais, que l'on n'y arriverait pas. L'Europe, même à travers des systèmes de décisions qui peuvent apparaître compliqués, a donné un exemple de puissance et de volonté.
Q — En ce qui concerne la prochaine étape dans la construction européenne après l'euro… Y a-t-il une place pour la Macédoine dans cette future Europe ?
R — Ce sont deux choses différentes. Il faut d'abord mettre en place l'euro : le développement de son rôle comme une grande monnaie qui va donner un potentiel économique et donc social à l'Europe, une monnaie qui va devenir une monnaie de réserve, donc, l'une des deux plus grandes monnaies du monde. D'autre part, nous avons devant nous, les négociations financières dites Agenda 2000, pour savoir comment financer l'Union européenne de 2000 à 2005. C'est très compliqué et l'on va, là aussi, se disputer. C'est arrivé plusieurs fois, chaque fois, qu'il faut discuter des finances de l'Europe. Cela se passe comme cela. Il y a aussi la discussion sur l'élargissement sur les cinq pays plus un, avec lesquels nous avons commencé fin mars. Cela va bien nous occuper dans les prochaines années. Il y a en permanence la mise en oeuvre des autres grands objectifs du Traité, la Politique étrangère et de sécurité commune qu'il faut construire pas à pas. C'est encore plus difficile que sur la monnaie. Il faut vraiment faire converger les mentalités, les habitudes, les traditions historiques tout à fait différentes. Mais la volonté est là. Voilà un programme important.
Concernant la Macédoine, il y a un accord de coopération, il faut aller par étape, plus loin, pour que la perspective de la Macédoine soit de se rapprocher, ce qui suppose un certain nombre de choses sue le plan interne en matière de politique économique, sociale, d'organisation administrative. Il faut donc, si je puis me permettre, dans l'intérêt de la Macédoine, avoir une approche de coopération avec l'Union européenne, utiliser au maximum l'accord existant et développer une relation bilatérale forte avec quelques pays clefs en Europe pour préparer l'avenir.
Q — La Macédoine a-t-elle selon vous une chance d'être dans la deuxième vague d'élargissement ?
R — Je voudrais pouvoir le dire, mais honnêtement, on ne peut pas parler sérieusement du sujet aujourd'hui. Nous sommes en 1998. La négociation d'élargissement avec les six premiers pays vient de commencer. Personne ne sait combien de temps cela va durer parce que ce n'est pas une décision politique a priori, cela dépend objectivement des difficultés techniques que l'on va rencontrer. Comme vous le savez, il n'y avait pas six candidats mais onze. Il y a d'autres pays qui sont en liste pour faire partie d'une éventuelle deuxième vague, mais le terme est impropre parce que ce sera un processus continu. Il y a une vocation européenne de la Macédoine, c'est une évidence historique, naturelle, et d'autre part, cela découle d'une volonté. Mais, il faut parler sérieusement, c'est la meilleure façon de respecter les opinions publiques, les gens qui s'intéressent à ce sujet. On ne peut pas dire aujourd'hui quelle forme cela prendra ni quand. La tendance historique, l'objectif, l'orientation est claire, il n'y a pas de doute sur ce point. Le calendrier, on ne peut pas en parler aujourd'hui. C'est trop tôt, mais cela n'empêche absolument pas, et l'Europe de développer sa relation avec la Macédoine, et la Macédoine d'utiliser dans ce sens-là, le mieux possible, cette coopération avec l'Union européenne.