Déclarations de M. Hervé Gaymard, secrétaire d'État à la santé et à la Sécurité sociale, sur l'industrie du vaccin, la politique de sécurité sanitaire et la création du pôle immunologique de l'Agence du médicament, Lyon et Marcy l'Étoile (Rhône) le 19 juillet 1996.

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Intervenant(s) : 
  • Hervé Gaymard - Secrétaire d'État à la santé et à la Sécurité sociale

Circonstance : Inauguration des laboratoires de l'Agence du médicament à Lyon et commémoration du bicentenaire du vaccin, Pasteur Mérieux sérums et vaccins, à Marcy-l'Etoile (Rhône) le 19 juillet 1996

Texte intégral

Inauguration des laboratoires de l’Agence du médicament (Lyon, vendredi 19 juillet 1996)

Monsieur le Premier ministre,
Monsieur le ministre et cher collègue,
Monsieur le préfet,
Monsieur le sénateur,
Monsieur le président de l'université,
Monsieur le président du conseil d'administration
Monsieur le directeur général,
Mesdames, Messieurs,

Je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour l'inauguration du site lyonnais des laboratoires de contrôle de l'Agence du médicament.

Cette inauguration est l'aboutissement d'un long processus qui vise à renforcer notre dispositif de sécurité sanitaire. À l'origine, la décision de développer le pôle lyonnais de contrôle des vaccins en le réinstallant dans de nouveaux laboratoires est issue de la mobilisation des autorités scientifiques rhônalpines et des collectivités locales, en partenariat avec l'État.

Les travaux du comité de pilotage, que vous avez présidé, monsieur le préfet, ont abouti à la signature le 21 octobre 1994, par mon prédécesseur, Philippe Douste-Blazy, de la convention de localisation de l'Agence du médicament à Lyon.

Je suis heureux de souligner l'exemplarité du partenariat entre les collectivités locales, l'université et l'État, ainsi que la responsabilité particulière du conseil général du Rhône dans cette réalisation. L'Agence dispose aujourd'hui de laboratoires bien équipés, dans un bâtiment de grande qualité architecturale et dans un environnement scientifique favorable.

Ce pôle de contrôle des médicaments immunologiques est de nature à conforter l'industrie rhônalpine, en pointe dans le domaine de l'immunologie et d'accompagner la politique dynamique menée par les collectivités locales dans les domaines scientifique et sanitaire.

Tout le monde connaît la renommée de l'école lyonnaise en médecine, la place de l'enseignement de la pharmacie dans cette ville, le dynamisme de l'industrie pharmaceutique en Rhône-Alpes, et le privilège d'héberger sur les rives du Rhône le premier fabricant mondial de vaccins.

En effet, la portée d'une activité comme celle de la recherche et de la fabrication des vaccins tient à l'ensemble des politiques et activités menées de concert par l'ensemble des partenaires : la politique vaccinale des pouvoirs publics et des organisations internationales – notamment de l'OMS et de l'UNICEF – la recherche et le développement de nouvelles approches vaccinales, l'évaluation et la mise sur le marché des vaccins, le contrôle et la libération des lots de ces vaccins attestant de leur qualité.

Je voudrais m'attarder un instant sur la politique vaccinale. Notre pays doit se fixer des objectifs d'excellence. C'est le cas dans beaucoup de domaine. Toutefois, j'ai constaté qu'un effort peut encore être fait, concernant notamment la vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole.

La couverture vaccinale collective n'est actuellement pas suffisante pour pouvoir envisager l'élimination de ces maladies ou tout au moins d'en prévenir les complications.

Aussi, j'ai décidé d'inscrire dans le calendrier vaccinal une deuxième vaccination rougeole, oreillons, rubéole à l'âge de 11 ou 13 ans.

Cette deuxième vaccination, entre 11 et 13 ans, recommandé par le comité technique des vaccinations et le Conseil supérieur d'hygiène publique de France devrait permettre :
    - de protéger 5 à 10 % des enfants n'ayant pas eu de séroconvection après la première dose ;
    - de renforcer l'immunité des enfants vaccinés dans la petite enfance, d'autant que leur protection s'atténue du fait de la diminution de circulation des virus sauvages ;
    - d'offrir une protection aux enfants ayant échappé à la vaccination et à la maladie ;
    - d'améliorer la couverture vaccinale pour ces trois maladies et éviter l'apparition d'épidémies chez les jeunes adultes.

Le site lyonnais de l'Agence du médicament que nous inaugurons aujourd'hui participe à l'évaluation des dossiers de demandes d'autorisation de mise sur le marché des vaccins. Comme vous le savez, les projets sont nombreux en ce domaine.

Il assure la libération des lots en application de la procédure européenne établie par la directive de 1989 pour 11 vaccins et en application des règles de l'OMS pour les vaccins exportés hors de l'Union européenne. L'Agence a, bien sûr, été reconnue comme ayant la capacité scientifique, le système d'assurance qualité et l'indépendance lui permettant de participer au système de reconnaissance mutuelle des laboratoires. Cette fonction sera confortée par la création de laboratoires plus modernes.

L'Agence doit également réévaluer les dossiers de vaccins, en application de cette même directive, permettant d'harmoniser les résumés des caractéristiques des produits et d'établir une documentation pharmaceutique standard pour tous les pays de l'Union.

Elle participe à la rédaction et à l'actualisation des monographies européennes et françaises concernant les vaccins, et a un rôle moteur dans l'établissement des guidelines permettant d'étendre la procédure européenne de libération des lots à de nouveaux types de vaccins.

La sécurité sanitaire repose sur la cohérence d'une chaîne de compétence qui commence lors des essais cliniques et débouche sur l'évaluation préalable à l'autorisation de mise sur le marché (AMM) pour se poursuivre par des inspections et des contrôles en laboratoire.

L'Agence du médicament est investie par la loi d'une compétence de contrôle d'ensemble du médicament.

Elle est d'ailleurs l'une des seules agences en Europe à disposer d'une telle compétence.

Mon récent voyage à Washington et mes entretiens avec la FDA m'ont conforté dans la conviction que la fonction de sécurité sanitaire est très sensible et précieuse dans nos sociétés modernes. Pour être bien assurée, elle doit constituer la mission principale voire exclusive de l'autorité qui en est investie.

Dans ce contexte, la création de ces laboratoires de contrôle de vaccin à Lyon s'inscrit pleinement dans la politique de santé publique que je souhaite conduire.

Je me réjouis que l'Agence du médicament soit progressivement dotée des moyens qui lui permettront de tenir une place éminente au sein du réseau européen des laboratoires de contrôle, et qui renforceront ses collaborations avec l'université, les hôpitaux et les organismes de recherche de la région Rhône-Alpes.

Je vous remercie.

 

Bicentenaire du vaccin Pasteur Mérieux sérums et vaccins (Marcy-l’Étoile, vendredi 19 juillet 1996)

Monsieur le préfet,
Monsieur le président directeur général,
Mesdames, Messieurs,

1) Ma présence parmi vous, pour la rencontre scientifique ayant pour thème la recherche et le contrôle des vaccins, pour le bicentenaire du premier vaccin, me donne l'occasion de rappeler le rôle des autorités sanitaires dans la prévention des maladies infectieuses.

La vaccination est une politique particulière de santé publique puisant ses techniques aux sources de la génétique et de la biologie moléculaire, mais se déclinant, à l'autre extrême, vers des actions de terrain dans les pays en voie de développement. Les politiques de prévention doivent être prises en charge par les pouvoirs publics au même titre que les politiques de soin.

En cela, une politique de vaccination peut être exemplaire, à la condition qu'elle soit accompagnée de campagnes d'information de la population, car il ne saurait exister de politique de santé publique que partagée par ceux qui sont directement concernés.

Dans le monde, la politique vaccinale peut s'articuler autour de 3 objectifs :
    1. Il faut, pour des coûts peu élevés, entreprendre dans les années à venir l'éradication de maladies comme la poliomyélite ou la lèpre ;
    2. Il faut s'attaquer aux maladies anciennes telles que la tuberculose et le paludisme, qui posent des problèmes nouveaux de pharmaco-résistance au insecticides ;
    3. Il faut développer des approches vaccinales contre les maladies émergentes, sida, Ebola..., afin de réagir rapidement aux flambées d'infections nouvelles.

On peut se féliciter qu'aujourd'hui 8 enfants sur 10, dans le monde, soient vaccinés contre 6 maladies infectieuses : diphtérie, rougeole, tétanos, coqueluche, poliomyélite et tuberculose.

Le gouvernement entend soutenir le potentiel de recherche et de développement, qui existe en France dans ce domaine. La collaboration entre l'industrie privée et les institutions publiques de recherche pourrait être utilement renforcée à cette fin.

Le rôle de la vaccination dans la prévention des maladies se mesure en nombre de vies sauvées et de souffrances évitées, mais également en économie au titre des pathologies ainsi évitées.

Dans les pays développés, nous sommes appelés à une meilleure maîtrise des dépenses de santé.

Nous avons entrepris de les traiter par une réforme ambitieuse qui impose à tous les acteurs de la santé, y compris bien sûr les industriels, de nouvelles règles du jeu, qui, en même temps, consolideront notre industrie.

2) Ma présence parmi vous a également pour objet de rappeler que l'inauguration du pôle immunologique de l'Agence du médicament à laquelle nous avons procédé ce matin a également une signification industrielle.

La constitution de ce pôle permettra de consolider l'industrie française du vaccin, représentés par Pasteur Mérieux sérums et vaccins ainsi que les autres producteurs comme SmithKline-Beecham, Pierre Fabre, Cassenne et Solvay, qui couvrent les besoins du marché français du vaccin.

La stratégie pertinente de croissance externe menée par votre groupe, monsieur le président, entamée avec le rachat de Pasteur vaccins et de Connaught est poursuivie avec le développement, depuis mai 1993, d'une co-entreprise spécialisée dans les vaccins avec Merck.

Cette co-entreprise développe notamment des vaccins multivalents pédiatriques à injection unique, ce qui permettra d'améliorer significativement la couverture vaccinale tout en réduisant le nombre d'injections et, par conséquent, le coût de la vaccination.

Ce développement des vaccins multivalents pédiatriques peut être d'autant plus rapide que cette co-entreprise est la première société européenne à pouvoir utiliser les brevets de tous les antigènes nécessaires.

En effet, l'heure est au développement des combinaisons vaccinales, qui permettent un meilleur accès et une meilleure couverture vaccinale, au développement d'une approche vaccinale dans le traitement de plusieurs pathologies, au renforcement de la vaccination des adultes, et à la recherche d'une immunisation plus précoce chez l'enfant.
 
Votre entreprise travaille sur de nombreux projets : une approche vaccinale du sida avec l'institut Pasteur, un programme de recherche en thérapie génique contre la mucoviscidose, des vaccins contre certaines infections respiratoires, contre la malaria, la maladie de Lyme.

Le rôle de l’Agence du médicament est fondamental pour garantir la qualité, l'efficacité et la sécurité des vaccins. Interlocuteur rigoureux et exigeant de l'industrie, elle assure la protection de la santé publique mais, vous le savez, cette rigueur et cette exigence sont des labels de qualité pour toutes les entreprises pharmaceutiques opérant en France.

Les entreprises qui assurent un effort considérable de recherche-développement ont ainsi besoin d'autorités sanitaires nationales dotées des meilleurs outils d'évaluation et de contrôle, mais aussi d'une politique vaccinale ambitieuse, domaine dans lequel notre pays a toujours joué un rôle de pionnier.

La reconnaissance internationale d'autorités d'évaluation et de contrôle efficaces ne peut que conforter la recherche et la mise sur le marché de nouveaux vaccins.

Je terminerais mon intervention en félicitant ceux qui, comme le docteur Charles Mérieux et Alain Mérieux, ont implanté ce site à Marcy-l'Étoile, soulignant ainsi le lien entre médecine humaine et vétérinaire, donnant également à ce village de l'ouest lyonnais une aura internationale. Je voudrais également remercier les ouvriers, les techniciens, les cadres scientifiques et administratifs et le président Jean-Jacques Bertrand pour le travail exemplaire réalisé en ce lieu pour la santé publique.