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Démocratie Moderne : Pourquoi un débat d'orientation budgétaire cette année ?
Jean Arthuis : C'est en effet une novation. Ce débat d'orientation correspond à l'engagement pris par le président de la République de revaloriser le rôle du Parlement et, particulièrement, de mieux l'associer à la définition des priorités budgétaires. Ce débat s'inscrit d'ailleurs dans une réforme d'ensemble de la procédure budgétaire : le contexte actuel très contraignant conduit à fixer plus strictement les priorités. Associer le Parlement à ces choix les rend d'emblée plus légitimes.
Démocratie Moderne : Quelles sont les finalités de ce débat ?
Jean Arthuis : Ce débat d'orientation répond au souci de clarté et de transparence qui anime le gouvernement. C'est, d'une façon générale, l'esprit dans lequel est mise en œuvre la réforme de l'État.
Le premier objectif est de retrouver des présentations du budget plus conformes à l'orthodoxie financière : rompre avec les budgets virtuels, distinguer clairement dépenses de fonctionnement et dépenses d'investissement, comme c'est le cas pour le budget des collectivités locales, ne plus financer les dépenses courantes par l'emprunt. N'oublions jamais que le déficit, c'est en fait de l'emprunt. En outre, cette présentation du budget démontre que l'État est obligé d'emprunter pour rembourser les emprunts antérieurs qui viennent à échéance.
Le débat d'orientation a, de plus, à l'évidence un rôle pédagogique : aider à une prise de conscience déjà amorcée à l'occasion de la loi de finances pour 1996 et plus que jamais nécessaire. Un bon budget n'est pas forcément un budget qui augmente ; on ne peut aussi indéfiniment et impunément vivre dans le déficit et le surendettement. L'avenir, c'est la baisse de prélèvements obligatoires et donc l'allégement drastique des dépenses publiques.
Démocratie Moderne : Ce débat engage-t-il vraiment le gouvernement ?
Jean Arthuis : Il va de soi que l'organisation de ce débat témoigne de la volonté du gouvernement de respecter les orientations qui seront ainsi dégagées par la représentation nationale.
La procédure ancienne ne donnait plus entièrement satisfaction dans le contexte très dégradé des finances de l'État que nous connaissons, les parlementaires se trouvaient, en quelque sorte, mis devant le fait accompli. Et la discussion interministérielle portant sur les économies commençait trop tardivement pour être efficace.
La nouvelle procédure, initiée cette année, a le mérite de permettre à la représentation nationale de bénéficier en priorité des informations dont dispose le gouvernement, d'être associée dès l'origine à l'élaboration des choix et d'être en mesure, le cas échéant, d'infléchir les orientations proposées.
Démocratie Moderne : La priorité est à la réduction des dépenses publiques, comment décider des économies à faire ?
Jean Arthuis : Je ne doute pas que les parlementaires, qui ont une expérience irremplaçable, sauront éclairer le gouvernement dans des choix souvent difficiles. Une chose est sûre : il ne peut y avoir de dépense taboue. Si l'on veut réaliser des économies véritables, c'est à une remise en question de toutes les dépenses publiques, de tous les départements ministériels, sans exception, qu'il faudra procéder, avec lucidité et courage.
N'oublions pas que l'un des leviers les plus puissants du redressement économique, c'est la confiance.
Je suis sûr qu'une volonté exprimée avec force par le Parlement contribuera à l'élan dont notre pays a besoin pour surmonter les difficultés actuelles. Le débat d'orientation budgétaire sera à cet égard d'une utilité incontestable.