Texte intégral
Première intervention de M. Jean-Michel Baylet
Monsieur le secrétaire national,
Mesdames, Messieurs,
Peut-être partagez-vous avec moi le sentiment de vivre ce soir un événement politique important.
Voilà bien des années que les partis de gauche ne s'étaient pas rencontres pour discuter de cette manière-là.
À la vérité, certains à cette même tribune ne se sont jamais rencontrés, malgré des parcours politiques déjà bien remplis.
Bien sûr, à chaque congrès ou à chaque manifestation exceptionnelle organisée par les uns et les autres, il est d'usage d'inviter les partenaires du même camp.
Mais le même usage, pour ne pas dire la tradition avec ce que ce terme peut receler de conservatisme, ne permettait pas aux autres partenaires de s'exprimer. Tant d'années passées à se voir sans vraiment se parler. À se rencontrer sans vraiment échanger !
Il fallait inventer une formule sans ressusciter pour autant l'union d'il y a vingt ans.
Je ne sais pas si l'exercice de ce soir. Avec son inévitable formalisme, se révélera la méthode de discussion la plus enrichissante, mais je veux ici remercier chaleureusement Robert Hue pour cette initiative qui, je le répète, parce que c'est vrai, constitue pour la gauche française un événement politique majeur.
Oui, mesdames et messieurs, je suis heureux de participer à ce forum.
Vous êtes, dans cette salle, plusieurs milliers de militants et sympathisants de gauche, dont la majorité est communiste et vous avez devant vous, ici, à cette tribune, les représentants de presque tous les partis de la gauche française.
Des radicaux de gauche à la Ligue communiste révolutionnaire, vous avez devant vous presque tout l'éventail d'une gauche plurielle, riche de sa diversité, et certainement aussi riche de sa complémentarité, mais qui, loin s'en faut, ne partage pas les mêmes objectifs, ni la même vision du changement.
Au premier regard, d'ailleurs, on les voit bien ces différences : une femme et des hommes, des petits et des grands, des gros et des maigres, des frisés et des chauves, des barbus et des imberbes. Bon allez, d'accord, on ne se ressemble pas. S'il ne s'agissait que d'apparences ! Vous l'avez compris. L'essentiel n'est pas là.
Nos différences, elles sont dans notre essence même. En ce qui nous concerne, les radicaux ont toujours mis l'homme au coeur du débat politique, et l'économie au service de l'homme. Notre idéal est fondé sur les valeurs républicaines et citoyennes.
Les radicaux veulent une société où les libertés ne sont pas comptées, une société juste et solidaire, une société où le citoyen reprend ses droits, une société laïque où la République est l'objectif et la démocratie un moyen d'action.
Remettre le citoyen au coeur du débat, offrir une citoyenneté à tous les exclus qui n'en n'ont plus, telle est l'ambition radicale.
Notre gauche croit en la prééminence de la politique et de la culture sur l'économie et la technique.
D'autres, ici, placent l'économie en acteur principal de la transformation sociale.
Quant à l'autre côté, à droite, le libéralisme économique reste l'instrument du conservatisme social, l'homme n'ayant pas sa place face à la loi du marché.
D'ailleurs, l'actualité nous le confirme. Les pays du G7 sont réunis à Lille depuis hier pour discuter d'emploi. Cinq des sept ministres des Finances concernés n'ont pas fait le déplacement, démontrant ainsi que le social n'a pas à intervenir dans les mécanismes économiques du libre-échangisme.
Quant à la subite préoccupation sociale de M. Chirac, il est tout de même permis de se poser des questions.
Au sommet du G7, hier, à Lille, M. Chirac a d'ailleurs indiqué que la France se situait à la pointe du dialogue social, propos qui prend toute sa saveur quelques mois seulement après que nous ayons goûté à la capacité de dialogue social du gouvernement Juppé.
Mais revenons à la gauche.
La gauche a donc des approches diverses des mécanismes économiques.
Je ne vais pas faire ici l'inventaire de nos différences, mais notre histoire respective et notre message politique propre en témoignent aujourd'hui.
Mais si nos visions et nos objectifs divergent, nous sommes au moins d'accord sur ce qui d'ailleurs nous réunit ce soir : la nécessité du changement.
Car si nous avions à définir un objectif commun, ce serait au moins celui-là : mettre un terme à la désespérance de notre société, offrir une alternative au conservatisme et à l'ultralibéralisme au pouvoir aujourd'hui, proposer à nos concitoyens d'autres perspectives que celles du chômage, de la précarité, de l'injustice, et du chacun pour soi.
Car la crise sociale que nous avons vécue en novembre et décembre derniers n'est pas une simple convulsion passagère.
Il s'agit d'un mouvement profond du corps social, qui s'exprime violemment parce qu'il n'est ni entendu ni compris, par un pouvoir conservateur qui cherche à faire passer les acquis sociaux pour des privilèges, et les salariés pour des nantis.
La droite veut adapter l'économie française à l'ultralibéralisme, et milite pour une solidarité sociale minimale, pour une société totalement déréglementée, gouvernée par des impératifs qui ont pour noms : taux d'intérêt, déficits publics.
Le gouvernement n'a pas répondu à l'aspiration sociale des Français. Il a fait preuve de son incapacité sur tous les fronts.
À commencer par celui de l'emploi où aucun résultat significatif n'est apparu depuis trois ans, avec même une aggravation sensible annoncée en 1996.
Dans le même temps, la perte de lien social détruit encore plus chaque jour une société gagnée par le désespoir, l'injustice, la marginalisation, l'exclusion.
Des besoins nouveaux se font jour, notamment en matière de services publics, et le gouvernement n'y répond pas.
Il faut résolument réfléchir à une mise en application de la réduction du temps de travail, pas nécessairement hebdomadaire d'ailleurs, mais, et c'est impératif, dans le cadre d'une nouvelle organisation du travail à inventer.
Pendant ce temps, le gouvernement, lui, s'extasie sur les créations d'emplois aux États-Unis et en Grande-Bretagne.
En réalité, il ne s'agit, pour l'essentiel, que de petits boulots, d'emplois à temps partiel sous-rémunérés qui tendent à généraliser la précarité.
Nous ne voulons pas d'une pauvreté payée, comme aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, ou d'une pauvreté exploitée comme dans les pays d'Asie que notre président de la République aime tant.
Ces formes d'organisation sociale aliènent l'homme et débouchent immanquablement sur la violence. Nous en voyons déjà les effets dans notre propre pays.
Le social et l'emploi ne sont pas les seuls domaines d'échecs du gouvernement.
Il agit avec la même frilosité pour l'Europe, gagnée aujourd'hui par le scepticisme.
Alors oui, je sais bien que je ne vais pas me tailler un franc succès devant vous ce soir en disant cela, mais les radicaux ont toujours été clairement favorables à une Europe fédérale et non à l'Europe des nations.
Il est donc possible, là encore, de mettre l'Europe au service des citoyens et non au service des États.
Sur ce sujet, et sur d'autres, les radicaux ont avancé un certain nombre de propositions.
Car ce que nous pouvons proposer à nos concitoyens est plus important que de dresser l'inventaire des échecs du pouvoir en place.
Je crois que nous en débattrons plus longuement au cours de cette soirée, lorsque nous aborderons le contenu du changement.
Nous avons tous, les uns et les autres, des propositions à faire aux Françaises et aux Français. Parfois, ces propositions se recoupent, parfois elles sont totalement divergentes.
Sur l'Europe, sur la protection sociale, sur l'emploi peut-être aussi, chacun réagira avec sa propre histoire, avec ses propres convictions, conformément à son propre courant de pensée.
Si l'existence de points communs peut légitimement nous réjouir, nos divergences, qu'elles soient surmontables ou insurmontables, ne doivent pas apparaître comme des causes de rupture du dialogue engagé.
Que l'on soit d'accord ou pas d'accord, une chose est sûre : nous n'y perdrons pas notre âme. Les radicaux resteront des radicaux, les socialistes des socialistes, les écologistes des écologistes et les communistes des communistes.
C'est aussi la raison pour laquelle, dans le respect mutuel, je suis certain que ce forum, organisé ce soir, à Bercy, a sa raison d'être, sa nécessité propre.
Il démontre que la gauche est là, bien vivante, bien décidée, après avoir tiré les leçons du passé, à entrer dans une ère nouvelle, celle de la reconquête certes, mais surtout celle d'un réel changement dans ce pays où des millions de gens attendent de nous des propositions originales, simples et concrètes qui leur redonneront l'espoir.
Oui, la gauche porte en elle l'espérance.
Ne la décevons pas.
Deuxième intervention de M. Jean-Michel Baylet
J'ai écouté attentivement les diverses interventions de la salle et des personnalités invitées.
Elles montrent que les préoccupations sont diverses même si on peut relever certaines constantes.
Il me revient, une fois de plus, l'honneur de m'exprimer le premier.
Vous mesurez comme moi la difficulté de l'exercice : comment, en quelques minutes, livrer des propositions programmatiques sans en faire le catalogue fastidieux.
J'ai donc délibérément choisi de n'aborder que quelques thèmes, les principaux à mes yeux, et que les radicaux défendront auprès de nos concitoyens dans les mois qui viennent. Essentiellement, l'emploi, la protection sociale, la fiscalité, l'Europe.
L'emploi, je l'ai évoqué d'un mot tout à l'heure.
Pour remettre l'homme au coeur du débat, les radicaux considèrent que les fonds publics destinés au chômage doivent davantage financer l'activité que l'inactivité.
Nous proposons l'affectation de ces crédits à la création de services publics nouveaux, correspondant, pour la plupart, à des aides à la personne, à des besoins sociaux de notre temps : en matière de soins, de sécurité, de gestion, d'environnement, d'humanisation des banlieues.
Les radicaux souhaitent aussi qu'un effort sans précédent soit consenti pour résoudre le chômage des jeunes.
Nous proposons l'instauration d'un droit au travail pour les jeunes de moins de 25 ans, droit au travail d'ailleurs reconnu par la Constitution.
Les entreprises de plus de 20 salariés pourraient recruter un jeune si deux salariés de plus de 50 ans acceptaient d'exercer un tutorat en alternance à mi-temps en étant payé à 75 % de leur salaire.
Cette mesure dont le coût est élevé, autour de 50 milliards, s'autofinance pour moitié et bénéficierait pour le reste de l'affectation des crédits actuellement inopérants.
Enfin, les radicaux souhaitent que l'expérience de la réduction du temps de travail soit menée en France, mais elle doit s'accompagner d'une nouvelle organisation du travail à inventer, où le temps d'activité serait relayé par des temps de formation, de diversification professionnelle et par des temps de loisirs.
La réduction du temps de travail est une constante de nos sociétés industrialisées. Cette nécessaire évolution a permis à l'homme de s'affranchir progressivement des travaux aliénants. À l'heure de la communication multimédia et de l'explosion des services, nous devons poursuivre sur cette voie.
Concernant la protection sociale, les radicaux sont favorables à un contrôle du Parlement si la politique de santé est préalablement définie par un office permanent de la santé publique où siégeraient tous les partenaires.
Les radicaux souhaitent que le système de soins soit géré par les partenaires sociaux et les professionnels de santé, de manière autonome et décentralisée.
Nous sommes favorables à la création d'une franchise sur le ticket modérateur et sur le forfait hospitalier en fonction des revenus.
Pendant trop longtemps, l'augmentation des dépenses sociales ne s'est pas accompagnée d'une amélioration de la justice sociale. En France, il n'y a pas d'égalité devant la santé : les revenus sont un frein à l'accès aux soins.
À cet égard, le RDS est une mauvaise solution car il fait payer les plus modestes. Il aurait pu être financé par une augmentation de 6 % de l'impôt sur le revenu et de 20 % de l'impôt de solidarité sur la fortune.
En matière de fiscalité, les radicaux, qui sont avec Joseph Caillaux en 1917, à l'origine de l'impôt sur le revenu, souhaitent un retour à un impôt juste et égalitaire, véritablement proportionnel et progressif.
Nous souhaitons donc la fusion de l'actuel impôt sur le revenu, la CSG, le RDS, les cotisations sociales, au sein d'un seul et même impôt, à assiette élargie, à tarif progressif, en réduisant le nombre et le montant des taux, et prenant en compte, non seulement les revenus du travail, mais aussi les revenus du capital et la situation patrimoniale des contribuables.
En matière de logement et d'urbanisme, les radicaux considèrent que l'amélioration de l'habitat et les constructions de logements neufs sont des secteurs prioritaires de création d'emplois.
Nous demandons une vaste réforme visant à simplifier la réglementation sur la construction, et à réformer les modes financiers d'acquisition des logements sociaux.
Le parc actuel de logements sociaux est déjà ancien.
Un vaste plan de démolition et de reconstruction des grands ensembles est à programmer sur le long terme pour redonner aux cités nouvelles les qualités de vie auxquelles elles ont droit.
Le droit au logement doit devenir une priorité majeure de toute politique consciente de ses responsabilités morales et économiques.
Avant-dernier point que je souhaitais aborder devant vous : les services publics.
Ils sont menacés dans notre pays, depuis déjà quelques années. Au nom de la rentabilité, de la productivité. Au nom du libéralisme, la droite a volontairement entamé dans ce pays un mouvement de démantèlement des services publics.
Les radicaux veulent réaffirmer la nécessité de consolider et de renforcer le service public dans tous les secteurs de la société.
C'est bien à un moment de notre histoire où la perte de lien social, les difficultés économiques, les angoisses du quotidien, rendent la vie de plus en plus dure à nos concitoyens, que le service public se doit d'être là, présent partout, renforcé dans ses capacités d'actions en faveur de tous.
Enfin, et le sujet me paraît important tant il occupe les esprits à gauche, je terminerai cette intervention par l'Europe.
La position radicale est simple, elle n'a d'ailleurs pas varié ces derniers temps.
Nous sommes favorables non seulement à la poursuite de la construction européenne, mais encore au passage à terme à une Europe fédérale, dotée de compétences propres, notamment en matière économique, diplomatique, militaire, mais encore en matière sociale parce qu'il est de notre devoir d'arriver à harmoniser par le haut les conditions de travail et les systèmes de protection sociale en Europe.
Bien à tort, l'Europe est devenue le bouc émissaire des pays ayant des difficultés économiques et à bout d'arguments face à leurs opinions publiques.
Le traité de Maastricht est rendu responsable des difficultés actuelles alors que son entrée en vigueur n'a pas encore changé grand-chose.
Qui peut dire d'ailleurs, honnêtement, que telle ou telle disposition du traité est venue ruiner l'économie de tel ou tel pays membre ? Personne.
Les radicaux, ce n'est pas un scoop, sont favorables à la monnaie unique entrant en vigueur en 1999.
La monnaie unique, non seulement simplifiera les échanges, permettra de réaliser des économies dans toutes les transactions, mettra à l'abri nos producteurs agricoles et industriels des mouvements spéculatifs, fera contrepoids au dollar et au yen, et ce faisant, donnera à l'Europe plus d'atouts face aux États-Unis et au Japon.
Les critères de convergence doivent être interprétés avec souplesse, en tenant compte des tendances plus que des chiffres absolus.
Les radicaux sont aussi favorables au renforcement du pouvoir du Parlement européen, à la responsabilisation de la Commission devant le Parlement, et à l'instauration d'une présidence de l'Union, élue pour 3 ans.
L'Europe a besoin d'un visage.
Mais l'Europe, c'est aussi celle des citoyens, pouvant circuler librement.
Il convient d'harmoniser les règles de délivrance des visas, des règles d'immigration, les dispositifs de lutte contre les grands trafics (armes, drogue, capitaux).
Il faut enfin, au niveau européen, défendre les services publics, et instaurer la notion de service public européen que tous les États doivent s'engager à respecter.
Voilà, en quelques mots, la position radicale sur l'Europe.
Je sais que je ne rencontrerai peut-être pas beaucoup d'écho très favorable dans cette salle, mais je porte, ici, le message radical qui, historiquement, a toujours été profondément européen.
Je ne voudrais pas monopoliser la parole trop longtemps même s'il est difficile de synthétiser ainsi un ensemble de propositions qui mériteraient d'être détaillées.
Je vous remercie en tout cas de votre attention.
Troisième intervention de M. Jean-Michel Baylet
Nous voici presque arrivés au terme de ce débat.
Le moins que l'on puisse dire est qu'il fut riche.
On a même entendu de tout ! C'était, je crois, la règle du jeu.
Nous avons abordé ce soir pas mal de sujets, et si les uns et les autres ont répondu à tout ou partie des attentes des Françaises et des Français, nous l'avons fait dans la diversité la plus large.
On voit bien, en effet, que les approches et le contenu des réformes à engager dans ce pays sont souvent différentes.
Bon, on peut aussi s'en féliciter. Après tout, cela prouve que la gauche, dans son ensemble, ne cède pas au concept de la pensée unique, et qu'un bouillonnement d'idées à gauche peut être opposé à un monolithisme de la pensée à droite.
Moi, je trouve cela plutôt sain.
Si vous me passez l'expression, je dirais tout simplement qu'on est quand même plus à l'aise dans une auberge espagnole que dans un séminaire de l'Opus Dei.
Alors, il nous est demandé à présent d'exprimer notre opinion quant aux conditions politiques du changement.
Je trouve bien curieuse cette façon d'aborder le débat.
Alors quoi, dans la même soirée, il faudrait pouvoir vérifier si l'on est bien d'accord sur ceci ou sur cela et s'avancer dans la foulée sur la façon de gouverner. Moi, je dois vous avouer que je n'en sais fichtre rien.
Nous venons à l'instant, dans une extrême diversité, je le répète, de découvrir des contenus programmatiques.
Déjà, on y voit un peu plus clair. C'est un bon point.
Ensuite, nous convenons tous de la nécessité d'un changement, et même d'un changement profond. C'est bien aussi.
Mais moi, je dis : attention !
Ne recherchons pas le changement pour le changement.
Si nous proposons aux Françaises et aux Français une vision commune, ou pour le moins une vision harmonisée du changement, nous devrons nous y tenir. Nous n'avons pas le droit de décevoir.
Il s'agit là d'un point très important qui doit nous faire réfléchir à la lumière d'un passé encore récent.
Alors, tout le monte se demande si l'on va refaire l'union de la gauche, si l'on va rédiger un programme commun, si l'on verra des communistes au gouvernement.
Moi, je dis que ce n'est pas rendre un grand service à la gauche que de poser le problème en ces termes.
Ce soir, nous avons déjà beaucoup appris : on peut maintenant, à peu de chose près, identifier parmi les propositions des uns et des autres celles qui se recoupent, celles qui présentent des divergences surmontables et celles qui présentent des divergences insurmontables.
Aux uns et aux autres de savoir à quelle concession il est prêt à consentir. À commencer par ceux qui sont les plus critiques. Et encore, je ne suis pas certain de la valeur de cette méthode, car elle tend à poser en étalon celui qui fait des propositions médianes. Ce qui lui permet de dire : venez à moi, vous trouverez ici l'acceptable, laissez au vestiaire vos intransigeances.
Alors moi, je voudrais quand même dire qu'il est un certain nombre de sujets sur lesquels les radicaux ne transigeront pas.
Tout d'abord, il n'est pas question de revenir sur la construction européenne, ni de freiner le processus de son évolution.
On peut laisser aux radicaux leur idéal fédéraliste, je le conçois, mais on ne les fera pas renoncer à travailler à un avenir commun au sein de l'Europe.
Deuxième point, les radicaux, par leur tradition humaniste, solidariste, républicaine et laïque, sont viscéralement attachés aux droits de l'homme.
Il n'est pas concevable que nous commencions le siècle prochain de la même façon que nous terminons celui-ci.
Il n'est plus acceptable de voir des personnes spoliées, emprisonnées, torturées, tuées, en raison de leurs opinions politiques ou religieuses, ou en raison de leur appartenance ethnique. En matière de droits de l'homme, la realpolitik, la réal-diplomatie ne doit pas avoir cours.
Les radicaux sont donc favorables à la reconnaissance du droit d'ingérence, comme méthode de prévention des conflits. Là encore, l'Union européenne pourrait être le cadre de ce droit d'ingérence humanitaire.
Nous le revendiquons fortement. C'est aussi, de la part de la classe politique française, dans ce pays qui est celui des droits de l'homme, une question de dignité.
Voilà ce que j'avais à vous dire ce soir.
La gauche a encore du chemin à parcourir.
L'espoir du changement est de notre côté.
Ce seul fait doit être le moteur de notre combat.
À nous de démontrer notre capacité à le gagner.