Interview de M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriuclutre de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement à "France Bleu Bourgogne" le 30 octobre 2015, sur la mise en place d'un fonds d'allègements de charge pour les agriculteurs en difficulté.

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Média : France Bleu Bourgogne

Texte intégral

STEPHANE PARRY
Stéphane LE FOLL, le ministre de l'Agriculture est à Dijon aujourd'hui. Avant d'aller à la Foire internationale et gastronomique, le ministre doit rencontrer des acteurs de la filière agricole. Des agriculteurs seront là pour rappeler leur détresse, ça fait des mois, des années que la crise dure. Ils ne savent plus quoi faire. Justement, Stéphane LE FOLL, ministre de l'Agriculture est en direct avec nous, ce matin, sur France Bleu Bourgogne, avec Maxime BACQUIE. 

MAXIME BACQUIE
Bonjour Monsieur le Ministre.

STEPHANE LE FOLL
Bonjour. MAXIME BACQUIE
Alors, on va rentrer directement dans le vif du sujet. Vous rencontrez ce matin des agriculteurs bourguignons, des agriculteurs au bout du rouleau. Ils sont chaque jour une centaine à appeler Agri'écoute, c'est le numéro d'urgence pour les agriculteurs en détresse. Le mal-être est profond, Monsieur le Ministre, comment les aider à s'en sortir, ces agriculteurs ?

STEPHANE LE FOLL
Bon, le mal-être est très profond, parce qu'on a une crise de marché, sur les trois grandes filières de l'élevage, qui… et elle aussi d'ailleurs, malheureusement, est assez profonde. Sur le lait, c'est un sujet de marché international, sur le porc on est sur une situation européenne, et puis tout ça a des conséquences sur la viande. Comment essayer de répondre à ces difficultés, et puis surtout à la détresse des agriculteurs ? C'est à la fois des mesures d'urgence, c'est-à-dire traiter l'urgence, éviter que des agriculteurs qui ont investi ou qui se sont endettés, ne puissent pas rembourser ou aient des difficultés à payer, à payer tout simplement l'ensemble de leurs cotisations, c'est pourquoi on va et on a mis en place tout un fonds d'allègement de charges, avec 100 millions d'euros, auxquels s'ajouteront les 63 millions de l'Europe, qui a été obtenu, que j'ai obtenus, quand j'ai été négocier au Conseil européen de septembre. 

MAXIME BACQUIE
Oui. Ce plan d'urgence, c'est 600 millions d'euros annoncés au mois de juillet dernier…

STEPHANE LE FOLL
300. 
MAXIME BACQUIE
… pour aider ces agriculteurs. Mais finalement, ça ne représente qu'une goutte d'eau après 300, 400 € par agriculteur. En Bourgogne, l'endettement moyen atteint 184 000 €, ils ont la corde au cou ces agriculteurs, notamment un qui me racontait hier qu'il gagne à peine 10 000 € par an. Vous allez les rencontrer tout à l'heure ces agriculteurs, quel message vous avez pour eux ?

STEPHANE LE FOLL
J'ai deux messages. Le premier c'est que, d'abord, tout le monde ne connait pas quand même des difficultés qui peuvent remettre en cause la viabilité des exploitations. On a aujourd'hui 25 000 dossiers à traiter, d'agriculteurs qui ont déposé ces dossiers dans les cellules d'urgence. Dans tous les bassins d'élevages, bien sûr, c'est là qu'on a le plus de dossiers. 

MAXIME BACQUIE
Ces cellules d'urgence, en quelques mots, c'est cibler les agriculteurs ?

STEPHANE LE FOLL
C'est au niveau de la préfecture, voilà, c'est les agriculteurs, c'est les Chambres d'agriculture, c'est les Conseils de gestion, c'est les banques, c'est l'Etat, pour permettre de traiter les cas des exploitations qui sont en difficultés, voire en grandes difficultés, et mobiliser les fonds qui vont venir aider les agriculteurs. Donc je ne sais pas, j'ai cru voir que vous aviez eu une interview hier, d'un jeune céréalier qui vous a dit que c'était 400 €, c'est pas vrai du tout, ça dépendra des situations, et l'aide qui sera apportée est fonction aussi de la difficulté rencontrée. Ça c'est le traitement de l'urgence, avec l'ensemble des dispositions qui ont été mises en oeuvre. Et puis, il y a les grandes questions pour l'avenir : comment on évite de revenir ou de retrouver ce type de crise ? Vous le disiez pour l'élevage bovin, c'est quelque chose qui est récurrent, chronique, donc on a besoin de revoir aussi la manière dont la filière fonctionne. C'est-à-dire qu'au-delà… 

MAXIME BACQUIE
Ça veut dire que…

STEPHANE LE FOLL
Au-delà du ministre que je suis, aujourd'hui, au-delà de la crise qui est extrêmement profonde, qu'on connait aujourd'hui, il y en a eu d'autres avant. On a un niveau de revenus pour les éleveurs bovins, par exemple, qui est toujours le plus bas, par rapport à tous les autres secteurs de l'agriculture. Qu'est-ce qu'on fait ? Eh bien il y a aussi des sujets et c'est ceux que j'essaie de faire avancer, des sujets sur lesquels il faut que l'ensemble des maillons de cette filière, c'est-à-dire la production, l'abattage, la transformation, et puis la grande distribution, puissent travailler autrement. Parce qu'à chaque fois on aura toujours une pression qui va s'exercer et qui s'exercera uniquement sur les producteurs.

 MAXIME BACQUIE
L'agriculteur dont vous parliez tout à l'heure, qui cultive des céréales, lui il demandait des prix plancher, il dit : c'est ça la solution pour l'avenir, des prix plancher pour les produits. Pourquoi c'est pas possible, ça, aujourd'hui ?

STEPHANE LE FOLL
Parce que ça veut dire que, à ce moment-là, c'est des prix plancher, ça veut dire que c'est plus le marché. A quel niveau on le met ? D'abord, au-delà du fait qu'au niveau européen ça serait impossible, les joies de la concurrence, à la limite, on peut toujours dire « y'a qu'à changer », faire comme certains qui ont le mot facile sur le « y'a qu'à », en politique, c'est extrêmement difficile. Mais vous avez mis un prix plancher. C'est quoi le prix plancher ? Est-ce que c'est pour régler le problème du jeune agriculteur que vous avez vu hier ? Ou est-ce que c'est pour régler tous les problèmes ? A quel niveau aider ? Et puis si on met un prix plancher, qu'après on a plus les débouchés ? C'est-à-dire que personne ne souhaite acheter la production qui est au prix que vous avez défini. Qu'est-ce qui se passe ? 

MAXIME BACQUIE
Ça veut dire que le modèle français, il est obsolète aujourd'hui ?

STEPHANE LE FOLL
Non.

MAXIME BACQUIE
Il faut se… non ?

STEPHANE LE FOLL
Le modèle français, il y a des efforts de réorganisation à faire, dans nos filières d'élevage, j'en suis sûr et convaincu. Et ça, il faut le faire, et je ferai tout pour mettre en oeuvre des organisations de filières qui seront modifiées et qui auront évolué après cette crise. C'est certain. 

MAXIME BACQUIE
Merci beaucoup.

STEPHANE LE FOLL
Avec des objectifs de stabilisation de prix et de contrats structurants entre la grande distribution, les industriels de la découpe, et les producteurs. 

MAXIME BACQUIE
Merci Monsieur le Ministre d'avoir été notre invité ce matin sur France Bleu Bourgogne.

STEPHANE LE FOLL
Merci. MAXIME BACQUIE
Vous retrouvez, les auditeurs, cette interview sur notre site Internet francebleu.fr. Bonne journée Monsieur le Ministre.

STÉPHANE LE FOLL
Merci.

STÉPHANE PARRY
Bonne journée, au revoir.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 2 novembre 2015