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Le Figaro - Dominique de Villepin vous a confirmé l'intention dévoilée par Jean-Louis Borloo d'expérimenter le contrat de transition professionnelle (CTP) dans six régions. Qu'en pensez-vous ?
François Chérèque - L'idée est intéressante, mais elle n'est pas nouvelle. On a déjà avancé sur la convention de reclassement personnalisée (CRP) qui permet aux licenciés économiques de bénéficier d'une indemnisation plus haute et d'un suivi plus fort. C'est le même dispositif que reprend le gouvernement. À l'inverse de ce que beaucoup avaient compris, l'indemnisation garantie par le contrat de transition ne sera pas supérieure à celle de la CRP. Cela va créer de la désillusion.
Le Figaro - Le Premier ministre vous a aussi exposé ses projets de relance de la participation en évoquant le dividende du travail.
François Chérèque - Il ne doit pas y avoir substitution de la participation au salaire. Lorsque nous parlons pouvoir d'achat, c'est pour tout de suite et cela passe d'abord par le salaire. Nous sommes favorables au développement de l'épargne salariale ou de l'épargne retraite, par la négociation collective, gérées en dehors de l'entreprise. Nous ne sommes en revanche pas favorables à ce que cette épargne soit investie dans les seules actions de leur entreprise. Cela nous paraît dangereux. Il n'est pas bon que toute l'épargne des salariés soit liée à l'avenir de leur entreprise.
Le Figaro - Que pensez-vous de l'obligation imposée aux entreprises de négocier un ticket transport ?
François Chérèque - D'abord, nous demandons qu'une négociation nationale cadre le dispositif. Ensuite, nous voulons savoir quelle sera la participation de l'État au financement. Le Premier ministre a promis une aide financière aux transports, mais sans préciser ce qu'il apportait au pot de la négociation. Cela rend difficile l'ouverture de celle-ci.
Le Figaro - Le Premier ministre souhaite aussi avancer sur la représentativité syndicale pour rendre la négociation plus efficace.
François Chérèque - Nous sommes preneurs. La loi Fillon sur le dialogue social est insuffisante. La CFDT est favorable à des élections de représentativité syndicale au niveau des branches. Nous voulons aussi passer vraiment à l'accord majoritaire à la place du droit d'opposition majoritaire.
Le Figaro - Que vous inspire la démarche du Premier ministre qui tente de faire bouger les lignes et qui fixe aux partenaires sociaux, lorsqu'ils engagent une négociation, des délais précis ?
François Chérèque - Qu'un Premier ministre se préoccupe de problèmes sociaux, c'est très bien. Mais qu'on assiste à un « concours de beauté social » entre Villepin, Sarkozy et Borloo, est une situation très difficile. Nous avons parfois le sentiment d'être instrumentalisés, et cela, la CFDT ne l'acceptera pas. Quant aux délais, nous demandons à ce que l'on applique le préambule de la loi Fillon : la négociation d'abord, et la loi si la négociation n'aboutit pas. Le Premier ministre a fait l'inverse avec le contrat nouvelles embauches, puis l'apprentissage à 14 ans. Il nous a annoncé un changement de méthode, nous jugerons sur pièces.
Propos recueillis par François-Xavier Bourmaud et Béatrice Taupin
source http://www.cfdt.fr, le 15 décembre 2005