Texte intégral
Le 18 mars dernier, lors d'une précédente séance de la sous-commission des salaires de la Commission nationale de la négociation collective, j'avais demandé que soit examinée la situation des négociations salariales dans les 274 branches de plus de 5.000 salariés, qui regroupent plus de 12 millions de salariés. Sur cette base, j'avais souhaité que soient relancées les négociations dans les branches pour lesquelles on constatait soit un retard important dans l'actualisation des grilles de salaire et de classification, soit des minima de branche inférieurs au SMIC.
Nous nous retrouvons aujourd'hui, comme je m'y étais engagé, pour en dresser un premier bilan.
Vous connaissez mon attachement au dialogue social. En la matière, les négociations sur les salaires et les classifications dans les branches jouent un rôle important. Ce sont des sujets essentiels pour l'équilibre des relations sociales dans les entreprises et la compétitivité de notre économie. Ce sont aussi des éléments structurants des conventions collectives.
Voilà pourquoi je m'étais engagé à mettre en œuvre les moyens qui sont les miens pour que, là où c'était nécessaire, les négociations salariales puissent reprendre et, si possible, aboutir. Car, je le rappelle, si la négociation salariale dans le secteur marchand relève de la compétence des partenaires sociaux et s'il n'appartient pas au Gouvernement de décider à leur place du niveau et de la composition des salaires, il est en revanche de la responsabilité du Gouvernement de veiller au bon déroulement des négociations, de jouer un rôle de facilitateur et de catalyseur et de veiller au respect du code du travail.
C'est dans cet esprit que j'ai souhaité examiner les négociations salariales et les relancer là où c'est apparu nécessaire.
C'est dans cet esprit que je souhaite aujourd'hui faire un bilan de l'opération engagée en mars dernier.
Je vous propose d'organiser nos débats de la manière suivante :
1/ je vais d'abord demander au directeur des relations du travail de nous rendre compte du travail réalisé en commun ces derniers mois et d'en présenter les premiers éléments de bilan ;
2/ puis je vous ferai part de mon analyse de ce bilan et des enseignements que j'entends en tirer ;
3/ je vous passerai ensuite la parole pour un tour de table afin que nous puissions échanger sur les différents points.
[Parole à JD Combrexelle]
Je vous remercie, Monsieur le directeur, pour cet exposé à la fois très clair et très complet.
J'en profite pour vous remercier pour le travail réalisé par vos services. Je n'en méconnais ni la complexité, ni la charge qu'il a représentée. Il mérite d'être salué.
Mes remerciements vont aussi à chacun d'entre vous pour votre implication qui, je le sais, a été forte au sein du groupe de travail. Je crois en effet que, depuis 9 mois, nous avons pu élaborer ensemble un diagnostic aussi précis que possible de la réalité des négociations salariales dans les branches et nous fonder ainsi sur les éléments objectifs susceptibles de relancer les négociations là où cela était nécessaire.
Du bilan que vient de nous présenter le directeur des relations du travail sur les 274 branches examinées depuis le 18 mars, je crois possible de tirer à la fois de premiers enseignements et des lignes d'action pour l'avenir.
Les premiers enseignements
A ce stade, je tire 5 premiers enseignements positifs.
J'observe d'abord que, sur les 274 branches examinées, 84 ont justifié la mise en place d'un suivi particulier au regard des critères d'examen (existence d'accords récents ou de négociations régulières, conformité des minima au SMIC, actualisation ou refonte récente des grilles de classification). Pour les autres, la négociation salariale y a été jugée effective et souvent productive, voire innovante. Et c'est, pour le ministre en charge du travail que je suis, un premier motif de satisfaction.
Je constate ensuite que, sur la base de ce diagnostic, la mobilisation de l'Etat s'est directement traduite dans les faits.
L'appel à la négociation s'est partout concrétisé par l'ouverture de négociations. Dans les 84 branches faisant l'objet d'un suivi particulier, toutes ont effectivement ouvert des négociations salariales, même là où le dialogue social paraissait durablement bloqué.
Dans ce cadre, les commissions mixtes paritaires ont pleinement joué leur rôle. Ainsi, parmi les 20 branches pour lesquelles une ouverture rapide de négociations était demandée, 12 nouvelles CMP ont été mises en place. De même, sur les 29 branches déjà en CMP appelant une surveillance particulière, les CMP ont toutes été réactivées.
Comme l'indiquait le DRT, l'intervention de l'Etat a donc conduit, partout, à une relance ou à une accélération du calendrier des négociations.
J'observe par ailleurs que ces négociations ont, dans un nombre significatif de cas, abouti à la conclusion d'accords salariaux.
A ce jour, sur les 84 branches justifiant une attention particulière, 30 accords ont d'ores et déjà été signés. Quatre autres sont par ailleurs actuellement ouverts à la signature.
Ce constat appelle trois précisions :
d'abord, j'observe que les branches qui sont parvenues à un accord ou à un projet de texte représentent des effectifs de plus de 2 millions de salariés, soit près de la moitié du total des effectifs des 84 branches suivies ;
ensuite, le rythme des accords conclus s'est accéléré ces derniers mois. Lors de notre précédente réunion de juin, seuls 5 accords avaient été conclus. Cela témoigne à mes yeux d'une dynamique ;
enfin, des accords ont été conclus dans des branches dans lesquelles la négociation salariale était bloquée depuis plusieurs années ou dans des branches confrontées à un contexte économique dégradé. Je pense ici par exemple au textile, à la chaussure ou à l'industrie pharmaceutique.
Ce bilan serait encore conforté si la conclusion d'un accord dans les HCR, et je me réfère à la réunion de CMP de lundi dernier, se confirmait. Un projet d'accord est ouvert à la signature. Je ne ferai donc pas d'autre commentaire.
Je note également que, là où des accords n'ont pas encore été signés et sauf exception, les négociations se poursuivent.
A cet égard, je voudrai, là encore, apporter trois précisions :
d'abord, vous le savez, une négociation salariale n'est pas un long fleuve tranquille. C'est une négociation difficile, qui prend du temps, qui est d'autant plus difficile si les grilles de salaires ont accusé des retards importants ;
ensuite, pour certaines branches, il n'a été demandé qu'assez tardivement d'ouvrir des négociations, les dernières réunions de votre groupe de travail remontant à octobre et novembre. Il est donc naturel que ces négociations n'aient pu encore se traduire par des accords :
enfin, certaines branches ont souhaité d'abord revoir leur grille de classification avant de négocier sur les salaires sur la base des nouvelles classifications. Cette démarche n'est pas illégitime, mais elle requiert probablement plus de temps.
La relance des négociations salariales dans les branches professionnelles.
Le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes a présenté une communication relative à la relance des négociations salariales dans les branches professionnelles.
La défense du pouvoir d'achat des salariés constitue une priorité de l'action gouvernementale. Après avoir assuré la convergence puis la réunification des SMIC mensualisés et horaire par une forte augmentation du SMIC horaire (17,4 % en progression nominale, soit 11,4 % en gain de pouvoir d'achat), le Gouvernement a réactivé les négociations salariales de branche, en particulier en ce qui concerne les grilles de salaires minima.
1. L'engagement de l'État a été constant et déterminé
Les partenaires sociaux ont été invités, le 18 mars dernier, à établir un diagnostic de la situation des 274 branches professionnelles nationales et régionales de plus de 5 000 salariés. Pour une majorité d'entre elles, la négociation salariale a été jugée effective et souvent productive, voire innovante. Toutefois, 84 branches ont justifié la mise en place d'un suivi particulier. L'appel à la négociation qui leur a été adressé s'est concrétisé par l'ouverture de négociations, même là où le dialogue social paraissait durablement bloqué. Les commissions mixtes paritaires, présidées par un représentant du ministère en charge du travail, ont pleinement joué leur rôle dans 90 branches sur 274.
2. Le bilan de ces négociations, présenté le 21 décembre, est positif
Dans un nombre significatif de cas, les négociations ont abouti à la conclusion d'accords salariaux. A ce jour, sur les 84 branches justifiant une attention particulière, 31 accords ont été signés et cinq autres sont actuellement ouverts à la signature. Les négociations se poursuivent là où des accords n'ont pas encore été signés.
3. Les objectifs pour les mois à venir
Le Gouvernement entend suivre les quelques branches qui connaissent des blocages et il demandera à celles qui poursuivent les négociations de conclure avant la fin mars 2006. A la fin du mois de mars, un bilan définitif de la négociation salariale de branche sera établi.
Le dispositif d'alerte et de suivi mis en place sera pérennisé. Parallèlement, un dispositif d'alerte pour les branches de moins de 5 000 salariés sera mis en place, reposant sur la saisine au cas par cas par les partenaires sociaux.
4. Ces efforts se sont globalement traduits par une évolution positive du pouvoir d'achat des salariés
Après un creux conjoncturel lié à la situation économique, le pouvoir d'achat des ménages est en effet reparti à la hausse : + 0,5 % en 2003, + 1,6 % en 2004 et + 1,9 % prévu pour 2005. Cette amélioration tient pour une part importante à l'évolution des salaires. L'inflexion à la hausse du salaire moyen de base est sensible depuis le début de l'année : au troisième trimestre 2005, la progression annuelle du salaire moyen dans le secteur privé est de 2,8 % et de 3,1 % pour les ouvriers. Cette augmentation est la plus forte enregistrée depuis 1993.
Le Gouvernement entend aussi améliorer le revenu des salariés au-delà du seul salaire. Il ne s'agit pas de substituer aux accords salariaux et aux salaires de nouveaux dispositifs mais d'accroître le pouvoir d'achat des salariés. Tel est le cas avec la revalorisation et la mensualisation de la prime pour l'emploi (+ 50 % au niveau du SMIC, sur deux ans).
De nouveaux outils permettront aux entreprises d'améliorer le pouvoir d'achat des salariés :
- le chèque emploi service universel peut être distribué aux salariés depuis le 1er janvier : les comités d'entreprise disposent ainsi d'un outil de rémunération qui développe l'emploi dans notre pays ;
- la prise en charge des coûts de transport des salariés sera améliorée ;
- sera également mise en chantier une loi sur la participation et l'actionnariat salarié : la participation financière contribue à la politique globale de rémunération des salariés en facilitant la redistribution des profits.