Texte intégral
DAVID DOUKHAN
Bonjour Marc FESNEAU.
MARC FESNEAU
Bonjour.
DAVID DOUKHAN
Ministre MoDem, je le précise, parce que, que se passe-t-il, Marc FESNEAU, entre les deux partis de la majorité, La République en marche, le MoDem ? Vous gouvernez le pays ensemble, mais alors, quand il s'agit des municipales de l'an prochain c'est chacun pour soi. La République en marche investit en ce moment ses candidats sans tenir le moindre compte de votre avis.
MARC FESNEAU
Il y a un dialogue entre le Mouvement Démocrate et La République en marche. On est dans les phases, qui sont toujours difficiles quand on est sur des affaires municipales, il y a 36.000 communes, 1000 communes de plus de 10.000 habitants, ça fait quand même autant de sujets et de terrains sur lesquels on peut avoir des accords ou aussi des désaccords, on est dans une phase de discussions entre les responsables de deux formations politiques. Il y a manifestement un certain nombre d'endroits où nous ne sommes pas aujourd'hui, nous n'avons pas encore atterri sur un accord. Moi ce que je pense, sur ces affaires de municipales, un c'est qu'il faut être conforme à l'esprit de 2017, et qu'on a vu aussi, d'ailleurs, quand on a fait la liste Renaissance aux Européennes, c'est un esprit de rassemblement et de dépassement.
DAVID DOUKHAN
Ce n'est pas du tout ce qui se passe Marc FESNEAU. Je prends l'exemple de Bordeaux, investiture de Thomas CAZENAVE, proche d'Emmanuel MACRON, alors que le MoDem gouverne aujourd'hui la ville avec Nicolas FLORIAN, qui a succédé à Alain JUPPE, et le MoDem pensait, et l'a dit, qu'il fallait mieux soutenir Nicolas FLORIAN. Donc, vous n'avez pas été entendu du tout sur ce cas. Il y a d'autres cas, Clermont-Ferrand, Dijon.
MARC FESNEAU
On n'a pas encore abouti, mais en tout cas nous ferons valoir, et je pense qu'à La République en marche on y est très attentif aussi, la nécessité de montrer, d'envoyer des signes, non pas faire de la politique comme on a pu en faire trop souvent, mais de la politique en disant après tout, est-ce que tel maire a un bon bilan, est-ce que tel maire, sans lui demander de s'enrégimenter, est capable de se rapprocher de ce que nous voulons faire à la fois au niveau national et au niveau local, c'est vrai que l'exemple bordelais ne nous paraissait pas un bon exemple et un bon signal qui est envoyé….
DAVID DOUKHAN
Vous n'avez pas du tout été entendus.
MARC FESNEAU
Oui, mais on peut ne pas être entendu, dans une discussion…
DAVID DOUKHAN
Mais est-ce que vous avez déjà été entendus sur un cas, parce que j'ai le sentiment qu'ils ne vous écoutent pas du tout !
MARC FESNEAU
A ma connaissance il doit y avoir 30 investitures qui ont été déployées sur 1000…
DAVID DOUKHAN
A ce stade.
MARC FESNEAU
De plus de 10.000 habitants.
DAVID DOUKHAN
Bon, vous gardez espoir de pouvoir travailler ensemble.
MARC FESNEAU
Oui, mais je pense qu'on a besoin, sur ces affaires municipales, d'envoyer les signaux d'un rassemblement et d'être ouverts à ceux qui, à droite, à gauche, et au centre, on envie de travailler avec nous localement, et donc tout signal un peu négatif ne va pas forcément dans la bonne direction, mais je suis sûr qu'on sera entendus. Il faut donner le temps. Il ne faut pas non plus d'ailleurs, je le dis au passage, forcément se précipiter, parfois il faut laisser les situations locales se décanter. J'ai été secrétaire général du MoDem, je sais comment les choses se passent, parfois on a des choses qu'on pense être justes au mois de juillet, et puis au mois de septembre/ octobre on se rend compte que les équilibres se font de nature différente, et donc c'est un appel au dialogue, mais je crois que le dialogue se fera
DAVID DOUKHAN
Là encore, ce n'est pas l'état d'esprit de La République en marche qui semble vouloir aller vite, par exemple à Paris. Alors, j'ai une question à vous poser. On a le sentiment d'un manque de respect. On apprend dans Le Parisien ce matin qu'un séminaire s'est tenu, à La République en marche, samedi, pour former les candidats novices du parti majoritaire pour les élections municipales, avec un jeu de rôles organisé, et dans ce jeu de rôles il y avait des personnages types affublés de surnoms, alors par exemple l'éventuel candidat MoDem c'était Marielle ORANGE, l'actuelle présidente de la commission des Affaires étrangères à l'Assemblée nationale, Marielle de SARNEZ, appréciera, et puis le candidat LR, qui possiblement pourrait rejoindre la majorité c'était Jean BRUTUS. Comment pouvez-vous vous faire confiance avec un tel séminaire ?
MARC FESNEAU
Mais moi j'en ai parlé avec Stanislas GUERINI, je pense que ça relève d'une maladresse, mais il faut faire toujours attention aux symboles et aux gestes, et parfois, dans la vie politique c'est les petites choses, des choses qui relèvent de la symbolique, parce qu'au fond tout ça n'a aucune importance, et celui…
DAVID DOUKHAN
Oui, mais le respect c'est important.
MARC FESNEAU
C'est ce que j'allais dire ; celui qui a commis ce genre de jeu de rôles aussi simpliste, y compris dans la terminologie qui est employée, aurait mieux fait de réfléchir avant de le faire, mais je crois que nous partageons, avec Stanislas GUERINI, l'idée que tout geste, tout sentiment, qu'il y aurait une forme de dénigrement, y compris au travers d'un jeu de rôles, est un mauvais geste, et je pense que les uns et les autres on est conscient de ça. Moi je serai toujours de ceux qui, et je l'ai fait longtemps comme responsable de formation politique, et je reste en responsabilité aussi de ça même si je suis par ailleurs ministre, faire en sorte que les attitudes, parce que dans la politique les attitudes ça compte, ce soit des attitudes qui soient ouvertes et des attitudes respectueuses. Et donc, chez nous, et chez les autres, on est en droit d'espérer et d'estimer qu'il faut avoir des attitudes respectueuses.
DAVID DOUKHAN
Je vous lance un défi Marc FESNEAU, vous faites une réponse en un mot.
MARC FESNEAU
Essayez pour voir, en un mot.
DAVID DOUKHAN
Je vous lance un défi, une réponse en un mot. A Paris, le MoDem, qui ne présentera pas de candidat, soutiendra Benjamin GRIVEAUX ou Cédric VILLANI, qui a votre préférence ?
MARC FESNEAU
Je suis désolé de ne pas pouvoir vous répondre en un mot, parce que…
DAVID DOUKHAN
La désignation aura lieu la semaine prochaine, qui a votre préférence ?
MARC FESNEAU
Non mais, d'abord c'est des désignations internes à La République en marche…
DAVID DOUKHAN
Vous avez une préférence.
MARC FESNEAU
Je ne formulerai aucune préférence, c'est au MoDem de Paris de se déterminer…
DAVID DOUKHAN
Défi non relevé.
MARC FESNEAU
Défi non relevé, parce que là vous êtes, et vous connaissant c'est un peu étonnant, vous êtes un peu trop simpliste à me demander un oui ou un non, ou un non.
DAVID DOUKHAN
Eh bien si, vous pouvez avoir une préférence politique, vous êtes en responsabilité, qui est le meilleur candidat, Benjamin GRIVEAUX ou Cédric VILLANI ?
MARC FESNEAU
Non mais, notre préférence elle est simple, c'est de trouver, avec La République en marche, les voies et moyens pour faire en sorte que Madame HIDALGO ne soit plus Maire de Paris en 2020.
DAVID DOUKHAN
Venons-en à un sujet de fond qui occupe aujourd'hui les débats à l'Assemblée nationale, la loi contre la haine sur Internet, qui est en ce moment discutée. Est-ce que vous pensez, Marc FESNEAU, qu'on combat le racisme en lui interdisant de s'exprimer ?
MARC FESNEAU
Non mais, rappelons les faits. Le seul espace dans lequel vous pouvez tenir des propos racistes, menacer quelqu'un de mort, tenir des propos homophobes, tenir des propos sexistes, tenir des propos violents à l'endroit de telle ou telle personnalité, c'est l'espace d'Internet. Si dans la rue vous avez des attitudes racistes, ou homophobes, ou autres, vous êtes condamné, et si vous le faites sur une plateforme, de différentes natures, sous le couvert de l'anonymat, vous pouvez dire absolument n'importe quoi, enfreindre la loi sans qu'aucun moyen ne soit mis en oeuvre pour l'empêcher. Le racisme il ne se combat pas par ce texte de loi, on fait rentrer la loi dans l'espace numérique, qui y avait échappé jusqu'alors, et moi je pense que de ce point de vue-là c'est une bonne loi. D'ailleurs les débats se passent, je trouve, dans de bonnes conditions, puisque, comme ministre des Relations avec le Parlement…
DAVID DOUKHAN
Vous y siégez.
MARC FESNEAU
Je veille toujours en tout cas, au premier sens du terme d'ailleurs, à regarder la façon dont se passent les débats, je crois que tout le monde reconnaît que cet espace Internet ne peut pas être l'espace de l'impunité, parce que c'est le dernier refuge de ceux qui peuvent dire n'importe quoi, et enfreindre la loi, sans être inquiétés. C'est le rôle des plateformes, c'est leur rôle à eux de ne pas dire « ah ce n'est pas moi, c'est la liberté d'expression », on ne peut pas dire n'importe quoi sur Internet, comme on ne peut pas dire n'importe quoi dans la rue. Après, la question de, comment on fait évoluer une société pour qu'elle soit – pour ceux qui le sont – moins homophobe, qu'elle soit moins raciste, ça c'est un travail de pédagogie, mais c'est…
DAVID DOUKHAN
Mais est-ce que vous le menez ? Parce que c'est ça la vraie question.
MARC FESNEAU
Non, ce n'est pas ça, c'est une autre question, mais…
DAVID DOUKHAN
N'est-elle pas plus importante…
MARC FESNEAU
Ne nous cachons pas derrière ce n'est pas facile de lutter contre le racisme ou le sentiment de xénophobie, pour dire je ne fais pas condamner ou retirer sur Internet des contenus ou des propos qui seraient de cette nature-là, parce que sinon on ferait un défaut. S'il y a une loi pour interdire les propos injurieux, les propos racistes, les propos antisémites, c'est bien parce que c'est un des moyens, pas le seul, mais c'est un des moyens pour faire en sorte que ces propos-là ne se répandent pas.
DAVID DOUKHAN
Le fait qu'ils ne puissent plus s'exprimer les fait-il disparaître ?
MARC FESNEAU
Mais ce n'est pas…
DAVID DOUKHAN
Les gens continueront à penser ce qu'ils pensent.
MARC FESNEAU
Oui, mais c'est un deuxième sujet. L'un n'exclut pas l'autre, on peut à la fois…
DAVID DOUKHAN
Mais souhaitez-vous vous en saisir ?
MARC FESNEAU
Mais on s'en saisit tous les jours, on essaye tous les jours d'avoir une parole qui permette à chacun de réfléchir en conscience et de ne pas aller dans les caricatures qui mènent souvent au racisme.
DAVID DOUKHAN
Alors venons-en à un autre sujet d'actualité. Il y a des grévistes correcteurs à l'Education nationale, qui retiennent des notes, le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel BLANQUER, a assuré que les résultats seraient donnés demain. Il a trouvé une parade, ceux, des élèves dont les notes n'auraient pas été transmises, se verraient attribuer leur moyenne de l'année…
MARC FESNEAU
Au contrôle continu, oui.
DAVID DOUKHAN
Au contrôle continu, temporairement, jusqu'à ce que la note obtenue lors de l'examen soit donnée, et si cette note-là était supérieure au contrôle continu elle serait donc, du coup, retenue. Est-ce que c'est une rupture d'équité ? Est-ce que, comme le disent certains responsables syndicaux de l'Education nationale, c'est une rupture d'équité dans le baccalauréat 2019 ?
MARC FESNEAU
Moi d'abord, et je connais bien cette profession, et je connais leur esprit de responsabilité, il n'est pas normal… on peut avoir des différends avec un gouvernement, on peut avoir des revendications – je rappelle que ce gouvernement a quand même stabilisé les crédits en termes d'Education nationale, qu'on en a fait une priorité, qu'on a fait le dédoublement des classes en primaire, donc on a quand même avancé, on a quand même plutôt donné des signaux pour améliorer les choses…
DAVID DOUKHAN
Il y a tout de même 2000 postes en moins l'année prochaine, il ne faut pas l'oublier, dont des professeurs.
MARC FESNEAU
Non mais, le volume de financement c'est aussi… La réduction du nombre d'élèves c'est un fait démographique, il y a moins d'enfants aujourd'hui qu'il n'y en avait peut-être il y a 5 ou 10 ans, donc c'est un fait démographique.
DAVID DOUKHAN
Sur l'équité.
MARC FESNEAU
Alors, je pense que, un, moi je fais confiance aux professeurs pour faire la tâche qui leur incombe, c'est-à-dire de noter, ça ils l'ont fait, et d'envoyer les notes, c'est ça qui est en jeu. La deuxième question, ce n'est pas une rupture d'équité puisqu'on est sur un dispositif provisoire, le temps que les notes arrivent, ce n'est pas un dispositif définitif, mais c'est au moins pour ne pas laisser des jeunes – parce que moi je pense à eux aussi et à leurs familles – qu'on laisserait pour quelques pourcent, ou quelques dizaines de milliers, sans note et dans l'attente de note parce que des professeurs, par des modes d'action, qui ne sont pas des modes d'action, alors ils ne sont pas classiques, mais je pense qu'ils sont… c'est dangereux de rentrer dans cette logique qui en fait vise à pénaliser une classe d'âge, ou des jeunes, alors qu'ils attendent les résultats du bac, mais ce n'est pas une rupture d'équité. Les responsables syndicaux ils ont raison d'être vigilants sur l'équité, mais l'équité c'est que tous les professeurs, d'abord, envoient les notes et corrigent les copies.
DAVID DOUKHAN
Abordons un dernier sujet. Cette semaine la loi visant à interdire les violences éducatives ordinaires, on dit la loi qui interdit la fessée, a été définitivement…
MARC FESNEAU
Oui, ce qui est un peu caricatural.
DAVID DOUKHAN
Voilà, mais pour que nos auditeurs comprennent de quoi on parle ; la loi a été définitivement adoptée cette semaine. C'est une proposition de loi MoDem, à l'origine cette proposition de loi, c'est intéressant parce qu'on se souvient de François BAYROU en 2007, il est devenu connu de nos concitoyens, et respecté par nos concitoyens, avec cette gifle, vous vous en souvenez, pendant la campagne présidentielle…
MARC FESNEAU
Je m'en souviens très bien.
DAVID DOUKHAN
Il lui avait dit « tu ne me fais pas les poches », à un petit garçon qui essayait de lui prendre son portefeuille, il lui met une gifle, « tu ne me fais pas les poches. » Toutes les gifles sont à bannir, Marc FESNEAU ?
MARC FESNEAU
Mais c'était de l'ordre du réflexe, c'était il y a 17 ans, la société a évolué, c'était 2002…
DAVID DOUKHAN
2002, pardon, bien sûr 2002, je pensais 2002, bien entendu, vous avez raison, évidemment.
MARC FESNEAU
C'était il y a 17 ans quand même, le temps passe, et quand vous en parlez avec François BAYROU, il n'en faisait pas un motif de gloire, il avait dit qu'il avait été comme dans un réflexe, d'un enfant qui effectivement lui faisait les poches, mais je pense que ce texte il permet aussi… moi je reconnais volontiers, j'ai été président de groupe quand le texte a été déposé, que j'étais assez dubitatif, quand Maud PETIT m'a proposé cette PPL, je me demandais si on n'allait pas rentrer dans les caricatures qu'on a pu voir. Et au fond il pose un débat qui est assez juste, c'est pour ça que je suis heureux que ce texte aboutisse, et y compris dans l'unanimité, de l'Assemblée et du Sénat, il pose le rapport à la violence, et le rapport à la violence sous les différentes formes dans lesquelles elle peut s'exprimer dans le processus éducatif. Et je pense que c'est une loi qui d'abord, au-delà d'être un élément coercitif, est une loi qui vise à la pédagogie, et à chaque fois qu'on porte la main sur un enfant de se poser la question de la justification et des dégâts que ça peut produire chez un enfant, et donc de ce point de vue là c'est une avancée démocratique. On n'est pas très en avance, on est 56e pays à voter cette loi, donc il était temps peut-être qu'on porte ce regard différent, et après c'est toute une évolution de société qu'il faut essayer de porter…
DAVID DOUKHAN
Marc FESNEAU, le ministre des Relations avec le Parlement, merci d'avoir été mon invité ce matin.
MARC FESNEAU
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 juillet 2019