Texte intégral
FREDERIC METEZEAU
Bonjour Marc FESNEAU.
MARC FESNEAU
Bonjour.
FREDERIC METEZEAU
Ministre chargé des Relations avec le Parlement, membre du MoDem. Marc FESNEAU, Nicolas HULOT écrit aux députés, il leur demande de voter contre le traité commercial Canada – Union européenne, le CETA, c'est France Info qui révèle le contenu de cette lettre. « Ayez le courage de dire non », dit Nicolas HULOT. Il a raison l'ancien ministre de l'Environnement de s'adresser ainsi à la majorité ?
MARC FESNEAU
J'ai l'impression qu'il y a le courage de dire et puis il y a le courage de faire aussi. Et je ne partage pas le point de vue Nicolas HULOT, au fond d'ailleurs il prolonge ce qu'il avait dit il y a quelques semaines qui était de, finalement de dénoncer l'ensemble des traités internationaux de commerce, en disant que finalement l'ensemble de ces traités portait atteinte à l'objectif que nous partageons tous qui est celui de lutter contre le dérèglement climatique. Or il me semble qu'au travers de cet accord, ça n'est pas le cas de tous, on se donne pour la première fois les moyens, dans un accord international, en particulier dans ce cas avec le CETA, avec le Canada, de faire en sorte de faire évoluer le modèle économique du pays avec lequel on décide de commercer. Prenons l'inverse. Si nous n'avions pas d'accord avec le Canada, ça veut dire qu'il n'y aurait pas de filière bovine dédiée, sans antibiotiques, sans produits qui sont interdits en Europe, qui se construirait au Canada, ça voudrait dire que le Canada continuerait quand même à commercer avec les Etats-Unis et le Brésil, et ça veut dire que le Canada ne rentrerait pas dans la logique qui est celui, celle de respecter les Accords de Paris. Et donc, là où je ne partage pas du tout le point de vue, je pense que les outils du commerce international ils doivent être transformés, c'est une première étape avec le CETA pour faire en sorte qu'ils respectent les objectifs mondiaux qu'on peut se fixer en termes de Dérèglement climatique. Au fond, les Allemands ils ne respectent pas non plus aujourd'hui les Accords de Paris, puisqu'ils sont…
FREDERIC METEZEAU
Au charbon.
MARC FESNEAU
… au charbon. Et qu'est-ce qu'on fait ? On arrête de commercer avec les Allemands ? Donc moi je préfère qu'on essaie de faire évoluer le modèle au travers du commerce plutôt que d'être à regarder les choses et à dire : on ne commerce pas. On ne commerce pas, par ailleurs la France, d'un point de vue assez solitaire d'ailleurs, a refusé d'engager les négociations avec les Etats-Unis en termes de commerce, parce que justement les Etats-Unis ont décidé de sortir de l'Accord de Paris. Donc il faut aussi entendre raison et ce n'est pas qu'une question de raison, c'est une question pragmatique et pratique, et le gouvernement est à l'oeuvre là-dessus.
FREDERIC METEZEAU
Mais, Marc FESNEAU, Nicolas HULOT explique que quand il était ministre, il n'a pas réussi à obtenir les garanties nécessaires sur les OGM et sur les farines animales, il dénonce aussi, je le cite, « l'influence des géants de la chimie comme BASF ou BAYER MONSANTO, dans les ministères ». Il ne parle pas de nulle part Nicolas HULOT.
MARC FESNEAU
Non, il ne parle pas de nulle part, mais je ne partage pas ce point de vue là. Moi j'ai été parlementaire, je sais ce que peut être le poids des lobbies et en même temps la capacité qu'ont les politiques de s'en abstraire, et je pense qu'il ne faut pas nourrir à chaque fois qu'on n'est pas d'accord avec quelque chose, une espèce de sentiment que tout serait sous la contrainte ou sous la force des lobbies. On a décidé en France de sortir plus rapidement que la plupart des pays européens et même tout court du glyphosate, c'était donc contre la contrainte éventuelle des lobbies. Ce que je regrette, c'est qu'on ne soit jamais capable en France de regarder ce que sont les avancées que nous avons portées. Nous avons porté… c'était avec Nicolas HULOT, ce que je regrette c'est qu'il y ait renoncé, d'une certaine façon, à agir. Nous avons porté la sortie du glyphosate en 3 ans, nous avons porté la fin des centrales à charbon, nous avons porté la fin de l'exploitation des hydrocarbures, ça est des faits concrets, et moi, ce qui compte pour moi, c'est les faits concrets et pas ce que l'on dit et ce qu'on peut raconter dans des tribunes.
FREDERIC METEZEAU
Deux enquêtes internes semblent disculper François de RUGY de dépenses exagérées pour désigner dîners professionnels et pour des travaux dans son appartement au ministère. Si c'est le cas, pourquoi n'a-t-il pas attendu les résultats de cette enquête au lieu de démissionner ?
MARC FESNEAU
Je crois que c'était sa décision personnelle, et reconnaissons que depuis 10 jours il était sous une pression médiatique assez forte, et qu'il a pensé que cette pression médiatique pouvait entraver l'action qu'il entendait mener au sein du gouvernement dans le périmètre important dont on vient de parler, qui est le périmètre de la transition écologique, et donc c'est une décision avec laquelle, sur laquelle il a beaucoup échangé avec le président de la République et le Premier ministre, c'est une décision courageuse, parce que c'est une décision qui était une décision avec l'idée de ce que ça pouvait aider le collectif, et donc c'est pour…
FREDERIC METEZEAU
Il ne voulait pas ralentir le gouvernement en quelque sorte.
MARC FESNEAU
Non mais vous voyez bien, quand vous êtes dans ces situations-là, quand ce déferlement arrive, vous êtes dans l'incapacité même tout simplement parfois de vous déplacer, parce qu'à chaque fois vous êtes tous la contrainte, ou des questions qui vous sont posées, ou sous la contrainte de la population qui parfois est assez véhémente sur ces sujets-là, et donc il a préféré, à la fois laisser continuer les inspections qui avaient lieu, et on aura les résultats dans la semaine, et par ailleurs pouvoir libérer le gouvernement, d'une certaine façon, de cette contrainte, et qui faisait peser sur sa propre action. En fait, il l'a fait au service général, cette affaire-là.
FREDERIC METEZEAU
Est-ce que ça voudrait dire qu'il pourrait revenir s'il était, je mets des guillemets bien sûr, blanchi ?
MARC FESNEAU
Mais je n'en sais rien, c'est à lui qu'il faudra poser la question. François de RUGY a 46 ans, il a une carrière déjà importante d'engagement au service de l'écologie, je suis sûr qu'il trouvera les voies et moyens de toute façon de faire entendre sa voix, on verra sous quels voies et moyens, laissons là aussi, le temps médiatique n'est pas le temps des inspections, laissons faire les instructions…
FREDERIC METEZEAU
N'est pas le temps des enquêtes internes.
MARC FESNEAU
Et on verra les enquêtes internes et après on discutera de tout ça.
FREDERIC METEZEAU
C'est des enquêtes internes, ça veut dire que les enquêtes sur les dîners à l'Assemblée nationale sont menées par l'Assemblée nationale, et celles sur les travaux de l'appartement ministériel sont menées par les services du gouvernement. Ça reste toujours des contrôles internes, il n'y a pas de contrôles extérieurs, comme n'importe quelle dépense dans les entreprises ou les…
MARC FESNEAU
Mais, dans la plupart des entreprises, vous regarderez d'ailleurs, il y a d'abord des contrôles internes, la plupart des entreprises sont dotées de contrôles internes.
FREDERIC METEZEAU
Ça commence par là, mais après…
MARC FESNEAU
Ça commence par là et si on voit qu'il y a des choses, après on élargit le champ. Donc laissons faire… si vous faites la comparaison avec les entreprises, dans la plupart des entreprises il y a des audits et des contrôles internes, c'est des corps d'inspection particuliers qui regardent…
FREDERIC METEZEAU
Et ensuite c'est disposition du Fisc.
MARC FESNEAU
Et ensuite c'est à disposition, et s'il y a besoin, et s'il y a des choses qui nécessitent des compléments d'informations ou des compléments d'inspection, ils sont faits à l'extérieur et je trouve que c'est une bonne chose que ça soit fait comme ça.
FREDERIC METEZEAU
Mais pour l'utilisation d'argent public dans le cadre d'institutions nationales, il ne vaudrait mieux pas directement que ce soit une enquête…
MARC FESNEAU
Mais vous remarquerez que sur les sujets qui ont été évoquées, personne n'a jamais évoqué que les dépenses qui avaient été affectées soient contraires à la loi et donc…
FREDERIC METEZEAU
Absolument pas, non non.
MARC FESNEAU
Donc c'est à ce moment-là qu'éventuellement la justice pourrait être saisie. A ce stade et pour l'instant, manifestement ça n'est pas le cas.
FREDERIC METEZEAU
Marc FESNEAU, la loi bioéthique sera présentée mercredi en Conseil des ministres. Il y a beaucoup beaucoup de projets, ça concerne le don d'organes, ça concerne aussi la PMA pour toutes les femmes, ça veut dire femmes en couple ou célibataires. Vous êtes membre du MoDem, on va dire qui est l'héritier de la Démocratie chrétienne, bien implanté dans l'Ouest, est-ce que vos députés qui pourraient être sensibles à cette question, voteront pour ce projet de loi ? Est-ce qu'ils auront liberté de vote ?
MARC FESNEAU
Alors d'abord Frédéric METEZEAU, vous avez raison de rappeler que ce texte il comporte des tas de sujets et pas seulement la question de la PMA pour toutes, et que donc c'est un débat nourri qui sera celui de l'Assemblée nationale. Première chose, c'est qu'il faut laisser faire le débat et que chacun puisse exprimer ce qu'il pense, en conscience du texte qui sera présenté. Attendons que le texte soit présenté, attendons donc que les débats aient lieu. Et par ailleurs pour répondre à votre deuxième question, bien évidemment dans ce groupe, parce que c'est la philosophie du groupe et de ce que nous portons, la liberté de vote sera de mise, mais je crois que l'essentiel du groupe votera ce texte bioéthique, laissons faire les débats, mais en tout cas que la majorité du groupe votera ce texte bioéthique, parce qu'il est conforme, d'abord aux engagements que nous avions pris, et conforme à la philosophie que nous portons.
FREDERIC METEZEAU
On l'a dit, vous appartenez au MoDem, c'est le deuxième pilier de la majorité. C'est facile d'être le partenaire de la République En Marche, qui a une énorme majorité, qui est un parti on va dire assez dominant tout de même, assez verticale ? Vous n'avez pas la même culture politique du tout.
MARC FESNEAU
Mais quand vous êtes sur vos convictions et vos convictions depuis un certain nombre d'années autour de François BAYROU, reconnaissons que nous avons une forme de continuité dans ce que nous avons porté depuis la création du MoDem, et finalement même avant la création du MoDem, quand c'était encore l'UDF, c'est assez facile de pouvoir exprimer et d'être ce qu'on est quand on a une pensée politique est une histoire assez longue. Moi je ne vois pas de difficulté particulière. Après quand vous êtes un grand groupe un grand parti, avec un autre qui est plus modeste en taille, évidemment il y a toujours une tentation et je me dis toujours que si j'étais dans la même situation il y aurait cette tentation-là, mais à nous de faire entendre à la fois notre voix et ce qui est notre spécificité, et la voix dans le cadre d'un partenariat que je crois solide.
FREDERIC METEZEAU
Parce qu'ils ne sont pas toujours très gentils les camarades d'En Marche…
MARC FESNEAU
Oh, ce n'est pas une question de gentillesse, mais…
FREDERIC METEZEAU
Ils veulent investir par exemple des candidats aux municipales, contre des maires sortants qui dirigent avec le MoDem, c'est le cas à Bordeaux, il a même failli y avoir une liste République En Marche à Pau chez François BAYROU.
MARC FESNEAU
Oui mais je crois que le deuxième point était assez anecdotique et que c'était contre les instances nationales. C'est assez symbolique aussi…
FREDERIC METEZEAU
A Bordeaux par exemple.
MARC FESNEAU
Moi je pense que c'est… La volonté qui est la nôtre ce n'est pas contre nous en tant que telle, la question bordelaise, c'est la question d'avoir un maire sortant dont il nous semble que le bilan est bon, même si c'est les pour l'essentiel le bilan d'Alain JUPPE, et par ailleurs qu'il a fait des signes qui montraient plutôt la volonté de travailler avec le gouvernement. Et donc nous, nous sommes, avec d'autres, y compris à la République En Marche, les garants du fait que cette majorité doit continuer de s'élargir et d'ouvrir ses bras à ceux qui ont envie de travailler localement, dans la même philosophie que celle qui a été portée en 2017, c'est-à-dire de ne pas se cantonner au droite/gauche mais au dépassement du droite/gauche, et c'est à cette ligne-là qu'on essayera de se tenir pour notre part.
FREDERIC METEZEAU
Marc FESNEAU, ministre des Relations avec le Parlement, merci d'être venu ce matin sur France Inter.
MARC FESNEAU
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 juillet 2019