Interview de Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, avec BFMTV le 15 février 2019, sur le Grand débat national et sur la politique de l'environnement.

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Intervenant(s) : 
  • Emmanuelle Wargon - Secrétaire d'Etat auprès du ministre de la transition écologique et solidaire

Média : BFM TV

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invitée ce matin, Emmanuelle WARGON, secrétaire d'Etat à la Transition écologique. Bonjour.

EMMANUELLE WARGON
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous, vous êtes chargée avec Sébastien LECORNU du déroulement, de faire vivre le Grand débat public et d'en suivre l'évolution. Où en est-on des contributions au Grand débat ?

EMMANUELLE WARGON
Alors on est à près de 900 000 contributions sur le site. Hier soir je crois qu'on était à 860 000. On a aussi plus de 6 000 réunions, parce que c'est important de regarder à la fois les contributions individuelles, et là où les gens débattent. Et 6 000 réunions c'est considérable, on en a dans toute la France, la moitié a eu lieu à peu près, l'autre moitié est encore devant nous.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais alors, comment allez-vous faire maintenant ? Parce que vous allez recevoir, vous parlez de 860 000 de contributions, vous allez recevoir 2 millions de contributions, Comment allez-vous faire ?

EMMANUELLE WARGON
D'abord on espère bien, si on arrive à dépasser le million c'est très bien etc. Comment on va faire ? En fait ça y est on sait comment on va faire, on a d'ailleurs communiqué cette semaine pour le raconter. On a trouvé les acteurs qui vont nous aider à traiter tout ça, en fait c'est très simple…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les acteurs c'est qui ?

EMMANUELLE WARGON
Sur le site internet, un prestataire de gouvernement, un grand institut de sondages s'appelle OpinionWay, c'est eux qui vont nous aider à traiter à la fois les réponses aux questions qui sont fermées, les fameux questionnaires, puis toutes les propositions, et puis on va traiter tous les cahiers citoyens, tous les cahiers qui sont en mairie, et on va traiter tous les courriers. Et pour faire ça, on a deux acteurs qui vont nous aider : la BNF, la Bibliothèque Nationale de France, qui va nous faire le classement, la numérisation, l'indexation et l'archivage, parce que c'est important qu'on archive, c'est une matière qui est précieuse, et ensuite un consortium avec Roland BERGER, une Civic Tech, c'est-à-dire une entreprise spécialisée dans l'analyse des contributions citoyennes, qui s'appelle Bluenove, et un petit cabinet complémentaires sur les arbres de la connaissance, qui va nous traiter tout ça et qui va nous permettre d'avoir l'analyse de ce qu'on a dans cette matière.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et ça va coûter combien ça ? Vous avez chiffré le coût ?

EMMANUELLE WARGON
On est en train de chiffrer, on n'a pas le total du chiffrage, on rendra le chiffre public quand ce sera fait.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais c'est-à-dire, vous avez déjà une idée quand même. Non ?

EMMANUELLE WARGON
On n'a pas encore vraiment le chiffre.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que vous vous êtes engagé sans chiffrer.

EMMANUELLE WARGON
On n'est pas engagé sans chiffrer, mais on a aussi des conférences régionales citoyennes qui arrivent, on n'a pas encore le coût de tout ça…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça j'imagine, mais quoi, ça va coûter, je ne sais pas…

EMMANUELLE WARGON
Quelques millions.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Quelques millions d'euros. Moins de 10 millions d'euros.

EMMANUELLE WARGON
Je ne peux pas vous dire complètement. Quelques millions mais surtout on rendra le budget public.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon vous rendrez le... Oui mais ça c'est très important.

EMMANUELLE WARGON
On rendra tout public, toutes ces données on les rendra publiques.

JEAN-JACQUES BOURDIN
A propos de ce Grand débat, Emmanuel MACRON rencontre des maires, rencontre des Français, régulièrement une ou deux fois par semaine, j'ai vu que Laurent WAUQUIEZ saisissait le CSA, rattrapage du temps de parole pour les autres formations politiques. Il a raison ?

EMMANUELLE WARGON
D'abord c'est le rôle du CSA, donc très bien, le CSA se prononcera, mais surtout le président rencontre des maires et aussi dans certains cas des réunions avec des Français.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est en campagne électorale pour les élections européennes.

EMMANUELLE WARGON
Quand le président rencontre des maires, il s'adresse aux élus de terrain, ces élus de terrain sont parfois dans la majorité, parfois dans l'opposition, on lui a beaucoup reproché d'être trop loin des élus, d'être trop loin de la proximité, il le fait.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il a raison, d'ailleurs, non, il a raison.

EMMANUELLE WARGON
En tout cas je pense que c'est important cette reconnexion. Cette reconnexion avec les élus de terrain elle est importante, elle est appréciée, enfin moi j'ai participé à beaucoup de rencontres, elle est appréciée, et ces échanges sont des échanges sans complaisance.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui non mais on est bien d'accord, mais ces échanges sont filmés, sont diffusés par toutes les chaînes d'information, on voit des reportages partout, c'est vrai que, est-ce que vous comprenez l'opposition qui proteste en disant : le président de la République est en train d'utiliser ce grand débat pour faire sa promotion et défendre ses idées dans la perspective de l'élection européenne ?

EMMANUELLE WARGON
Non mais chacun est dans son rôle, après les médias sont libres, c'est eux qui décident, qui retransmettent, et puis on a un CSA qui est là pour ça. Saisissons le CSA, c'est très bien.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais sur le terrain politique ça ne vous choque pas ? Non ? C'est normal que le président de la République soit…

EMMANUELLE WARGON
C'est normal que le président de la République s'adresse aux Français.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Qu'allez-vous faire après ? Qu'allez-vous faire de toutes ces propositions ? D'abord ça va s'arrêter quand précisément, ce Grand débat ?

EMMANUELLE WARGON
Alors, au mois de mars on a des conférences régionales citoyennes, j'en dis juste un mot parce que c'est un moment important, 100 citoyens, 100 Français tirés au sort par régions, deux week-ends de débats, les week-ends du 15/16 mars et du 22/23 mars, où on commence à travailler à partir de la première restitution de toute cette matière. Ensuite un débat dans chacune des assemblées, probablement début avril à l'Assemblée nationale et au Sénat, et après tout ça…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc après il y aura des débats citoyens, donc on est bien d'accord, dans combien de... partout en France ?

EMMANUELLE WARGON
19 conférences régionales citoyennes, une dans chaque région, en métropole et en Outre-mer et une dédiée aux jeunes, parce que c'est important que les jeunes s'expriment, donc on fera un tirage au sort que de 16/25 ans, donc 19 conférences, les 15/16 mars, 22 /23 mars.

JEAN-JACQUES BOURDIN
19 conférences. Et ensuite deux grands débats à l'Assemblée nationale.

EMMANUELLE WARGON
Et au Sénat.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et au Sénat. Avec un vote ?

EMMANUELLE WARGON
Probablement non, plutôt un débat sans vote.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Un débat sans vote. Et ensuite ?

EMMANUELLE WARGON
Et ensuite, ensuite un après avec plusieurs temps très probablement, des décisions immédiates qui seront annoncées par le président, par le gouvernement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Tout de suite après ces deux débats, Assemblée et Sénat.

EMMANUELLE WARGON
Il y aura, je ne peux pas vous donner des éléments très précis sur le calendrier, au jour près, et puis c'est le calendrier qui appartient au président.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais on a envie de savoir. D'accord, mais les Français ont envie de savoir.

EMMANUELLE WARGON
Très bien, mais dès qu'on peut vous dire comment ça avance, on le fait, on essaie d'être transparent dans toute cette procédure, dans tout se déroulé, on sait, le président l'a dit, dans le mois qui suit la fin du débat, il rendra compte aux Français. Dans son rendu compte aux français ce sera à la fois ce qui s'est passé…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il va rendre compte aux Français. Vous ne savez pas comment, nous verrons comment, peu importe la forme, il va rendre compte aux Français, très bien, il va faire la synthèse quoi, si j'ai bien compris.

EMMANUELLE WARGON
Je reprends si vous me laissez 30 secondes pour le faire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que moi je suis, j'en suis au deux débats Assemblée, Sénat, sans vote, on est bien d'accord.

EMMANUELLE WARGON
Jusque-là on est on est d'accord.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Début avril on est bien d'accord. Là des textes de loi seront proposés ou pas ?

EMMANUELLE WARGON
C'est ce que j'essaie de vous dire. A la fin, quand on saura ce qui a été dit par les Français, quand on aura rendu compte de la richesse de cette matière, il y aura probablement à la fois des décisions immédiates, des orientations, des sujets complémentaires, et très probablement un travail qui va continuer sur comment on continue dans une démocratie directe, avec la démocratie participative. Donc ce que je vous dis, c'est qu'il y aura un mélange de décisions immédiates, de sujets qui vont continuer à avancer.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les décisions immédiates ce seront des projets de loi ?

EMMANUELLE WARGON
Ça n'est pas défini encore.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Des décrets ?

EMMANUELLE WARGON
Mais la question c'est plus, c'est autant le contenu que la forme, ça dépendra des sujets.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, je vous dis ça parce que la réponse, parce que les questions sont tellement nombreuses, parce que l'attente est tellement forte, Emmanuelle WARGON, que vous devez apporter des réponses, et que les réponses devront être immédiate, pardon, après tous ces débats, après la synthèse de ce que vous disent les Français, vous devrez apporter des réponses !

EMMANUELLE WARGON
Mais d'abord je voudrais vous dire que je crois qu'on est tous très conscients de la responsabilité qu'on a pris, en s'adressant directement aux Français.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais elle est grande.

EMMANUELLE WARGON
C'est une responsabilité grande, importante, les Français ont accepté de débattre, participent, ça crée des attentes, ces attentes sont là et elles nous obligent, je voudrais vraiment le dire. Ensuite je ne peux pas vous répondre sur projet de loi ou décret ou autre chose…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je ne vous demande pas quel projet de loi, je vous demande, est-ce que…

EMMANUELLE WARGON
... parce que ça va dépendre des sujets.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non mais ça, oui, ça j'ai bien compris, je ne vous demande pas sur quels sujets il y aura des projets de loi, je vous demande s'il y aura des décisions prises par le pouvoir en place, après les deux débats qui en fait marquent la fin de ce grand débat national à l'Assemblée nationale et au Sénat ?

EMMANUELLE WARGON
Oui, il y aura des décisions, le président l'a dit, il l'a dit, ce sera un acte 2 du quinquennat, il a dit il y aura un avant et un après, il a dit on changera notre manière de gouverner.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, il y aura donc des décisions à ce moment-là en avril.

EMMANUELLE WARGON
Il y aura des décisions, certaines seront peut-être applicables tout de suite, d'autres auront peut-être besoin d'un texte de loi, d'autres seront peut-être présentées sous forme référendaire, nous n'en savons rien, ça n'est pas décidé.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, ça n'est pas décidé, donc référendum peut-être.

EMMANUELLE WARGON
Tout est ouvert.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, si j'ai bien compris, compte tenu du calendrier, référendum avec les européennes, ça paraît compromis.

EMMANUELLE WARGON
Les européennes, c'est aussi un moment démocratique important, personnellement je pense qu'il faut laisser la place à ce moment démocratique, qu'il lui-même a beaucoup de valeurs.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, pas de référendum bon, on est bien d'accord. Demain des manifestations encore de Gilets... Est-ce que les Gilets jaunes maintenant, compte tenu de l'évolution de ce débat, compte tenu de l'évolution des manifestations des Gilets jaunes, est-ce qu'il faut maintenant laisser la place au débat et arrêter de manifester ?

EMMANUELLE WARGON
Le droit de manifestation c'est un droit en France.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais le droit, on est bien d'accord, mais il y a un droit…

EMMANUELLE WARGON
Mais ce n'est pas le gouvernement qui décide si les gens manifestent ou pas, les gens ont le droit de manifester. Ce qu'il faut arrêter c'est les violences, et ça c'est vraiment indispensable, le maintien de l'ordre est indispensable, les forces de police sont mobilisées tous les week-ends, bien sûr on a tous envie que ça cesse, on a tous envie de passer à autre chose, on a tous envie que le débat joue son rôle, et qu'ensuite les décisions puissent être prises et appliquées.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, on en est à 8 400 interpellations depuis le début, 8 400, des milliers de blessés à la fois manifestants, gendarmes, policiers. Il faut que ça s'arrête.

EMMANUELLE WARGON
Mais je pense que tout le monde est très frappé par la violence qui se manifeste de tous ces week-ends. Cette violence elle arrive, elle déferle tous les week-ends dans les grandes villes, il faut que ça s'arrête, on est d'accord.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut que ça s'arrête. Tiens, à ce propos, est-ce que vous avez vu que le Parlement européen condamne à une très large majorité l'utilisation du LBD. Vous avez vu ça ?

EMMANUELLE WARGON
Il y a eu une résolution du Parlement européen qui ne vise pas particulièrement la situation française, qui est générale.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, qui est générale, oui oui mais en Europe, qui dit en Europe on ne doit pas utiliser de LBD. Vous êtes européenne, Emmanuel MACRON est un pro-européen à fond.

EMMANUELLE WARGON
Oui, je suis très pro-européenne, il y a plein de sujets qui doivent se régler au niveau européen. C'est un équilibre, pour l'instant les forces de l'ordre sont attaquées tous les week-ends, et elles cherchent le meilleur moyen pour maintenir l'ordre dans des conditions difficiles.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous allons parler d'environnement…

EMMANUELLE WARGON
C'est très bien.

JEAN-JACQUES BOURDIN
... Emmanuelle WARGON, comment faire, comment faire, comment défendre notre environnement, les questions environnementales, sans dépenser d'argent ? Je veux dire par là, les finances publiques sont à sec, on est bien d'accord, on ne peut pas faire d'effort supplémentaire, le déficit public est déjà trop important. Non ?

EMMANUELLE WARGON
Alors la transition écologique, je suis d'accord avec vous, elle a besoin d'argent. Elle a besoin d'argent public et privé. Public parce que ce sont des investissements, à la fois des investissements d'Etat mais aussi les collectivités territoriales, c'était dit dans la partie précédente de l'émission et c'est très vrai, ça se règle beaucoup par des actions sur les territoires, et d'argent privé parce que c'est l'investissement mondial, 'investissement bancaire, l'investissement financier, qui doit arrêter de financer ce qui est polluant, et qui doit aller vers l'économie de demain.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais pourquoi est-ce qu'il n'y a pas d'adhésion collective à la défense de l'environnement ? Il y a une somme de comportements, mais c'est vrai pour le citoyen, c'est vrai pour l'entreprise individuelle, mais il n'y a pas d'adhésion collective.

EMMANUELLE WARGON
Il y a une adhésion je crois, et d'ailleurs elle monte, quand on voit l'affaire du siècle avec 2 millions de personnes qui ont signé une pétition, quand on voit les manifestations, les marches des lycéens, quand on voit le manifeste de tous ces étudiants qui disent, on a près de 30 000 étudiants en France qui disent : eh bien quand même, on est sensibilisé à la question environnementale, on ne va pas aller bosser pour n'importe quelle entreprise, une entreprise qui ne met pas qu'elle et ses actes en conformité avec son discours. C'est quand même encourageant, c'est bien une sollicitation, c'est bien une prise de comptes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Le 15 mars il y aura tous ces jeunes qui vont... est-ce que vous appelez à défiler le 15 mars ? Vous avez vu les jeunes, à l'initiative de ce qui se passe dans les pays du Nord ou en Belgique ?

EMMANUELLE WARGON
Moi je trouve ça bien que les jeunes se mobilisent, parce que les jeunes sont aussi notre conscience sur ce sujet, c'est aussi pour ça qu'on voudrait que les jeunes se mobilisent dans le grand débat, d'ailleurs la transition écologique est aussi un thème du débat, et c'est bien, parce que c'est la société qu'on prépare pour demain, pour après-demain, et bien sûr pour les jeunes. Mais l'écologie ce sont des choix et l'écologie ça consiste à dire, alors que d'habitude on oppose l'économique et le social, en gros, eh bien en réalité il y a une dimension supplémentaire, et elle est encore plus importante que les deux autres, il faut qu'elle fasse synthèse avec les deux autres, et c'est la transformation juste pour pouvoir continuer à vivre sur cette planète, pour essayer d'éviter le réchauffement climatique et pour préserver la nature.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais ça c'est le discours…

EMMANUELLE WARGON
Ça ce sont des choix difficiles.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais Emmanuelle WARGON, c'est le discours, des Gilets jaunes descendent dans la rue, que faites-vous ? Vous supprimez la taxe carbone sur les carburants. Eh bien oui, oui, donc vous ne défendez pas, vous n'avez pas défendus l'environnement !

EMMANUELLE WARGON
Alors, pardon mais la défense de l'environnement ça n'est pas que la fiscalité environnementale, la défense de l'environnement c'est d'abord les actions qu'on mène, mais si vous voulez dire un mot sur la fiscalité, vous avez raison c'est important. Là, dans le grand débat, se posent en gros toutes les questions fiscales. Moi j'ai écouté vos auditeurs et la première partie de l'émission avec intérêt, il y a des gens qui veulent monter des impôts, il y a des gens qui veulent baisser les impôts, il y a des gens qui veulent des impôts plus progressifs, il y a des gens qui veulent des impôts moins progressifs, et à l'intérieur de ça, la fiscalité carbone…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a même des gens qui veulent un bouclier fiscal. C'est très libéral.

EMMANUELLE WARGON
La fiscalité carbone est importante, parce que c'est une composante et cette…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire que la taxe pas carbone va revenir avant la fin du quinquennat, sur les carburants ?

EMMANUELLE WARGON
Donc ça veut dire, moi je vais vous donner mon point de vue sur le sujet. Deux choses. La première, on doit arrêter d'augmenter globalement les impôts. Ça s'il y a bien un message, je pense qu'on a tous entendu, qui est né de la crise des Gilets jaunes mais qui est un message ancien, qui est globalement la pression fiscale elle est déjà très élevée. La pression fiscale sur les ménages mais même la pression fiscale sur les entreprises. Donc si on imagine un nouvel impôt, c'est un nouvel impôt à la place, et si ce nouvel impôt arrive ou si on continue, la question est aussi dans les dépenses, quelle est la place des dépenses pour la transition écologique. Et bien sûr mon ministère avec François de RUGY, avec Brune POIRSON, on se bat pour que la place des dépenses qui permettent de faire la transition écologique, soient significatives, qu'on puisse soutenir le pouvoir d'achat des ménages qui n'ont pas le choix. La question qui nous a été posée c'était autour de la voiture, quand 40 % des ménages, des gens me disent « Je prends ma voiture tous les jours pour aller travailler, pour l'instant je n'ai pas le choix », on voit bien que la question c'est comment est-ce qu'on rend les choix possibles ? Et donc quand les choix sont possibles, ça devient des choix individuels.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais parce que l'argent de la taxe carbone ne va pas à la défense de l'environnement ! Voilà pourquoi !

EMMANUELLE WARGON
Si on réintroduit…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Où est le problème ?

EMMANUELLE WARGON
Si on réintroduisait…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Emmanuelle WARGON, vous le savez bien !

EMMANUELLE WARGON
Si on réintroduisait…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est vrai ou c'est faux ce que je dis ? Est-ce que c'est vrai ou faux ?

EMMANUELLE WARGON
En progression l'année dernière, la progression de la taxe carbone allait à des mesures d'accompagnement, en prime à la conversion, en chèque énergie…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Emmanuelle WARGON, en progression ? Pourquoi est-ce que toute la taxe carbone qui est faite pour défendre notre environnement, ne va pas à l'aide, à ceux qui en ont besoin pour qu'on adhère justement à ces dépenses de l'environnement ?

EMMANUELLE WARGON
Mais c'est bien toutes ces questions qui sont sur la table. A mon avis, sur la table il y a à la fois, globalement la fiscalité, donc c'est une question pour tout le gouvernement, pas seulement la taxe carbone, toute la fiscalité et toutes les dépenses. Comment est-ce qu'on priorise, comment est-ce qu'on fait pour que le financement de la transition écologique ça soit suffisamment fort dans le budget de l'Etat pour qu'on puisse accompagner, pour qu'on puisse porter les individus, les citoyens et trouver les solutions ensemble ? Ça coûte de l'argent, je suis d'accord avec vous. Quand on vous investit dans la méthanisation, on est à la fois en train de développer de l'énergie verte et on est à la fois en train de trouver une solution pour les agriculteurs. Mais rien n'est facile, même la méthanisation, elle n'est pas toujours acceptée localement, donc c'est aussi un débat qu'on doit avoir collectivement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous avez raison, c'est une décision collective. Donc je termine avec la taxe carbone sur les carburants, la hausse prévue le 1er janvier qui a été supprimée, annulée, est-ce qu'elle est reportée ?

EMMANUELLE WARGON
Elle 'a été annulée, il n'y aura pas de nouvelle hausse de taxe carbone, tant qu'on n'a pas un nouveau budget global et des choix faits sur la base de ce qui sera dit dans le Grand débat.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Très bien. Bon. Je voudrais qu'on regarde ensemble les propositions de nos auditeurs sur l'environnement.

EMMANUELLE WARGON
Très bien.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Indexation du prix des loyers sur la qualité de l'isolation et la vétusté du logement. C'est une bonne idée ça ?

EMMANUELLE WARGON
Je trouve que la question posée est une très bonne question, parce que l'on est très en retard sur la rénovation, on a des objectifs de rénovation, et on ne les tient pas pour l'instant. Alors il y a plein de raisons pour lesquelles on ne les tient pas, il y a des aides, donc c'est pas un secteur dans lequel il n'y a pas d'argent, il y a de l'argent public, il y a plein d'aide de l'Etat, il y a aussi de l'argent privé des fournisseurs d'électricité, par un mécanisme qui s'appelle les certificats d'économie d'énergie, mais on a des cas, en particulier les propriétaires bailleurs, donc les gens qui louent leur logement, pour lesquels on a un problème de mécanismes économiques, parce que quand vous êtes propriétaire bailleur et que vous faites des travaux d'isolation, ça vous coûte en tant que propriétaire et ça rapporte à votre locataire, et du coup il y a une question de savoir comment est-ce que c'est positif pour tout le monde ? Je ne suis pas sûre que l'indexation des loyers soit la bonne solution, mais la question de savoir comment…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais enfin, le ravalement est obligatoire, d'un immeuble. Mais pourquoi est-ce qu'on ne rend pas obligatoire, l'isolation d'un logement qu'on met en location ?

EMMANUELLE WARGON
Ce qu'on a dit pour l'instant, c'est qu'on ne voulait pas aller à une obligation de plus, parce qu'on cherche aussi à développer le logement, on cherche à avoir plus de constructions de logements, plus de logements mis en location. A chaque fois qu'on rajoute des obligations, ça rend le marché moins fluide et plus difficile. Donc on a dit jusqu'à présent : on va essayer de trouver des mécanismes d'incitation et on a dit aussi, si ces mécanismes ne marchent pas, on ira vers des obligations.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Taxation des carburants maritimes et aériens.

EMMANUELLE WARGON
Alors l'aérien, c'est une compétence communautaire, comme vous savez, on en revient à l'Europe, mais les Néerlandais viennent de mettre sur la table une proposition, et la France la soutient, donc on va regarder, je pense que c'est une question…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Proposition pour taxer l'aérien ?

EMMANUELLE WARGON
Proposition pour taxer les carburants.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les carburants. Mise en place d'une vignette poids lourds.

EMMANUELLE WARGON
Alors ça c'est le sujet précédent de l'écotaxe qui revient.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ben oui.

EMMANUELLE WARGON
C'est vrai que la contribution des poids lourds à l'entretien des routes et le rôle des poids-lourds sur la pollution, mais vous voyez, c'est aussi la passion française pour la fiscalité, c'est-à-dire tous ces sujets environnementaux ont fini par parler de taxes, je ne sais pas si la taxe est à chaque fois la bonne réponse. On a aussi besoin de se calmer sur la fiscalité.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors une incitation, tiens, une TVA progressive en fonction du type de véhicules, plus propres ou moins propres, c'est-à-dire que si vous achetez…

EMMANUELLE WARGON
C'est ce qu'on fait sur le bonus-malus, déjà ce n'est pas de la TVA mais on a commencé à le faire sur le bonus-malus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur le bonus-malus, parce que la vignette c'était bien, c'est ce que me disait Jean-Marc JANCOVICI tout à l'heure, il me disait : « Mais la vignette c'était bien ».

EMMANUELLE WARGON
Moi je ne me souviens pas que les gens aimaient tellement la vignette automobile quand il avait la vignette automobile, vous vous souvenez sûrement c'était l'un des impôts les plus impopulaires.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Rendre la taxe d'enlèvement des ordures ménagères proportionnelle au poids des poubelles.

EMMANUELLE WARGON
Ça je trouve ça intéressant, parce que si on veut une incitation au tri, alors ça veut dire que les gens qui font des efforts, qui font vraiment le tri de façon sérieuse, ont une forme de reconnaissance et de retour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça existe déjà dans certaines communes.

EMMANUELLE WARGON
Ça existe dans certaines communes, ça existe dans certains pays, là aussi c'est une question de temps, c'est-à-dire est-ce qu'on commence par ça, c'est-à-dire on pénalise ceux qui n'ont pas vraiment commencé, est-ce qu'on incite d'abord au tri et on le fait plus tard ?

JEAN-JACQUES BOURDIN
On encourage ceux qui le font.

EMMANUELLE WARGON
En tout cas, je trouve que la différenciation en fonction de, est-ce qu'on trie, est-ce qu'on ne trie pas, est plutôt une idée intéressante.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce qu'au lieu de pénaliser, encourageons. On est bien d'accord.

EMMANUELLE WARGON
Oui. Quand on dit modulation, ça veut dire que ceux qui font bien, paient moins, ceux qui ne font pas paient plus. Il y a ceux qui ne font pas, il y a ceux qui ne savent pas, ceux qui ne peuvent pas, donc c'est toujours le même débat.

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question sur le prix de l'électricité, Emmanuelle WARGON, parce que 5,9 %, propose la CRE, la Commission de Régulation, le gouvernement dit non, on est bien d'accord ?

EMMANUELLE WARGON
On est bien d'accord.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Report au printemps, donc au printemps on augmentera.

EMMANUELLE WARGON
La CRE est dans son rôle, il y a un mécanisme de régulation qui est d'ailleurs législatif, qui dit : le prix de l'électricité augmente en fonction du coût de production de l'électricité. Le gouvernement a pris un engagement au moment de la crise en disant : pas d'augmentation cet hiver. Après il y a une question de savoir comment est-ce que le prix de l'électricité doit évoluer…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc ça augmentera au printemps.

EMMANUELLE WARGON
Pour l'instant ça n'augmente pas, c'est tout ce que je peux dire à ce stade. Je ne sais pas quelle sera la décision finale.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Vous ne pouvez pas ne pas augmenter le prix de l'électricité. Le gouvernement ne peut pas ? Vous savez bien.

EMMANUELLE WARGON
Ce sera probablement difficile de ne pas augmenter.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Emmanuelle WARGON…

EMMANUELLE WARGON
Merci à vous !

JEAN-JACQUES BOURDIN
... d'avoir la franchise reconnaître les choses.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 février 2019