Texte intégral
NIKOS ALIAGAS
Le ministre de la Ville et du Logement, Julien DENORMANDIE, est votre invité, David DOUKHAN. Messieurs, c'est à vous.
DAVID DOUKHAN
Bonjour Julien DENORMANDIE.
JULIEN DENORMANDIE
Bonjour.
DAVID DOUKHAN
La présidente de la région Ile-de-France, ce matin, dans Le Figaro, lance un cri d'alarme, elle dit que la situation dans les banlieues est explosive, que les émeutes de 2005 pourraient repartir à tout moment, et elle accuse le gouvernement, votre gouvernement, de regarder ailleurs.
JULIEN DENORMANDIE
Non, je crois que le gouvernement est pleinement mobilisé. Déjà je ne partage pas ce terme de situation explosive. Vous savez, dans les quartiers prioritaires de la ville, il y a des situations qui sont difficiles, il y a beaucoup d'habitants, beaucoup de nos concitoyens, qui se sentent empêchés. Pourquoi ? Parce qu'ils n'ont pas accès aux mêmes services publics, que ce soit les services de sécurité, les services d'école, les services de santé, et au final, ils vivent un taux de chômage qui est incroyablement plus élevé que sur le reste du territoire. Ils se sentent tout simplement empêchés, et le gouvernement, le ministre de la Ville et du Logement que je suis, on est pleinement mobilisé pour permettre justement cette réussite républicaine. On a accru considérablement les efforts sur l'éducation, sur la formation, sur l'accès à l'emploi, et on le fait avec beaucoup de détermination.
DAVID DOUKHAN
C'est intéressant, parce que vous dites que vous ne partagez pas cette vision, vous ne partagez pas cette vision qui est prônée par la présidente de la région Ile-de-France. Vous dites : il n'y a pas de situation explosive. Vous êtes certain que les émeutes, telles qu'on a pu les connaître en 2005, ne peuvent pas se reproduire ?
JULIEN DENORMANDIE
Mais je dis qu'il faut arrêter la stigmatisation à chaque fois. Est-ce que la situation est difficile ? Oui elle est difficile, mais arrêtons de toujours stigmatiser. On est surtout face à des habitants, nos concitoyens, qui aujourd'hui, par exemple lorsque vous êtes jeune, que vous avez fait des études, eh bien vous êtes discriminé à l'embauche, c'est ça la réalité dans laquelle on vit, parce que sur votre CV il y a une adresse, qui est une adresse d'un quartier prioritaire de la ville, vous avez de deux fois moins de chances, deux fois moins d'avoir accès à un entretien d'embauche. Et ça, ça n'est pas acceptable, et donc le gouvernement, on prend des mesures très fortes. Au moment où je vous parle, par exemple, il y a le plus grand testing jamais réalisé, pour déterminer si oui ou non il y a de la discrimination dans les entreprises.
DAVID DOUKHAN
Sur l'adresse, sur les noms…
JULIEN DENORMANDIE
Sur l'adresse, sur les noms. On est en train de le finaliser, on aura les résultats dans les toutes prochaines semaines. Mais c'est aussi l'éducation.
DAVID DOUKHAN
Excusez-moi, Monsieur le Ministre, mais vous dites : attention à la stigmatisation, il n'y a pas de délinquance, il n'y a pas de quartiers qui sont verrouillés par des trafiquants de drogue ? Ça n'existe pas dans les quartiers ?
JULIEN DENORMANDIE
Il y a deux politiques qu'on fait. Une politique de réussite républicaine qui vise à dire à tous les jeunes de nos quartiers, c'est un jeune sur six dans notre pays qui vit dans les quartiers, c'est : vous avez fait ces efforts pour vous former, pour avoir accès à des études, eh bien à la fin il faut que vous puissiez avoir accès à un boulot, alors que la discrimination par exemple perdure. Donc c'est tout ce qu'on fait sur le testing que je viens d'évoquer ou sur la formation. On met 2 milliards d'euros destinés à ces jeunes pour la formation. Et puis de l'autre côté, il y a la question effectivement de la sécurité.
DAVID DOUKHAN
Ah ben voilà.
JULIEN DENORMANDIE
Mais vous savez, la première des libertés c'est la sécurité, et ceux qui pâtissent de l'insécurité, c'est d'abord ceux qui vivent dans les quartiers, et là qu'est-ce qu'on fait ?
DAVID DOUKHAN
Les populations les plus démunies, les plus faibles.
JULIEN DENORMANDIE
Exactement.
DAVID DOUKHAN
Il y a un problème immédiat, il y a un problème immédiat qui est que chaque week-end, les BAC, les CRS sont mobilisés sur le maintien de l'ordre, pour le plus grand bonheur des trafiquants et des délinquants.
JULIEN DENORMANDIE
Qu'est-ce qu'on fait vis-à-vis de ça, cette question de sécurité ? Eh bien c'est la politique de reconquête républicaine portée par le ministre de l'Intérieur.
DAVID DOUKHAN
Oui, elle avait été présentée par Gérard COLLOMB, ne la reprenons pas depuis le début !
JULIEN DENORMANDIE
Oui, mais enfin si, parce que…
DAVID DOUKHAN
Je vous pose une question précise sur les Gilets jaunes, qui entraînent un déploiement des forces, chaque week-end…
JULIEN DENORMANDIE
Mais vous savez, la question des forces de l'ordre, ce quinquennat augmente de 10 000 le nombre de policiers et de gendarmes, de 10 000…
DAVID DOUKHAN
Augmentera.
JULIEN DENORMANDIE
D'ici 2020, c'est 1 300 qui seront dédiés à ces quartiers. Le quinquennat de monsieur SARKOZY auquel appartenait madame PECRESSE, il a réduit de 10 000 le nombre de forces de police et de gendarmes, de 10 000, on fait strictement l'inverse, donc oui nous avons une politique qui n'est pas une politiques stigmatisante, qui vise à dire à tous ces jeunes de quartiers : eh bien oui, la promesse républicaine c'est que vous puissiez être maître de votre destin. Et donc on fait cette politique de réussite, en fondant tous nos efforts sur l'éducation, la formation, l'accès à l'emploi, et de l'autre côté, on a cette fermeté vis-à-vis de la sécurité, avec cette reconquête républicaine, et 10 000 forces de l'ordre dont 1 300 dans les quartiers, qui sont déployées.
DAVID DOUKHAN
Je vais essayer de vous faire répondre à la question : est-ce que les manifestations qui se déroulent chaque samedi, doivent s'arrêter, pour que les policiers puissent se consacrer à leur tâche naturelle qui est celle de combattre la délinquance, notamment dans ces quartiers-là ?
JULIEN DENORMANDIE
Evidemment, mais elles doivent s'arrêter pour autre chose aussi, elles doivent s'arrêter parce qu'aujourd'hui on doit passer de ces ronds-points et de ces manifestations, avec l'ensemble des images insupportables que l'on vit samedi après samedi, au débat, à se mettre autour de la table, à faire des propositions, à construire ensemble ce qui sera l'issue du Grand débat, c'est-à-dire cette société de demain qu'on appelle de nos voeux. Et donc oui, moi j'appelle toutes celles et ceux qui manifestent, à arrêter de manifester pour rentrer dans le Grand débat. Mais ça n'est pas qu'une question de redéploiement des forces de l'ordre, c'est surtout une question de saisir cette opportunité.
DAVID DOUKHAN
De dialoguer.
JULIEN DENORMANDIE
Le Grand débat c'est quelque chose d'inédit dans cette Vème République.
DAVID DOUKHAN
On change de sujet, Julien DENORMANDIE, vous étiez la semaine dernière en maraude avec le président de la République, on l'a découvert hier, parce que des photos ont été publiées par la photographe officielle de l'Elysée, vous aussi vous aviez d'ailleurs publié des photos sur votre compte Twitter. Plusieurs responsables d'opposition, de nombreux internautes, ont accusé Emmanuel MACRON de s'offrir une opération de com sur le dos de la misère. Est-ce que vous pouvez répondre à cela ?
JULIEN DENORMANDIE
Je trouve ça absolument incroyable comme polémique, c'est la fausse polémique à l'état pur. Qu'est-ce qu'on a comme situation ? On a un président de la République qui fait le choix d'aller en maraude, de passer d'abord 2 heures à peu près, avec les équipes du SAMU social, j'étais avec lui, les personnes qui répondent au 115, pour échanger sur les difficultés du quotidien, parce que la situation est très difficile, et ensuite d'aller pendant 2 heures dans les camions du SAMU social, à la rencontre des plus démunis, des plus désespérés, qui dorment aujourd'hui dans la rue. Et là on l'accuse de quoi le président de la République ? De faire un coup de com, parce qu'il n'avait pas invité des journalistes ? Parce qu'il n'y a eu que quelques photos qui sont parues de son déplacement ? Mais franchement, franchement, on a juste un président de la République qui décide d'aller sur le terrain, d'échanger avec les écoutants du Samu social, les équipes du SAMU social, et d'aller à la rencontre.
DAVID DOUKHAN
On vous a entendu…
JULIEN DENORMANDIE
Moi je crois qu'il n'y a absolument aucun lieu de polémiquer et que c'est de la fausse polémique à l'état pur.
DAVID DOUKHAN
C'était une démarche sincère, vous en témoignez ce matin en tout cas. Un point précis, s'il vous plaît, répondez brièvement, je sais que vous faites toutes les deux semaines un point avec les préfets sur cette question des sans domicile fixe, vous faites le point avec eux sur l'hébergement, avez-vous des chiffres récents à nous communiquer sur ce sujet ?
JULIEN DENORMANDIE
Aujourd'hui on est dans une situation qui reste très difficile, puisqu'il y a des milliers de personnes qui dorment toujours à la rue, pourtant fait un effort sans précédent.
DAVID DOUKHAN
Combien, combien Julien DENORMANDIE ?
JULIEN DENORMANDIE
Au moment où je vous parle c'est 150 000 places qui sont ouvertes, 150 000 qui seront ouvertes ce soir, et depuis le 1er novembre…
DAVID DOUKHAN
Mais combien sont encore à la rue ?
JULIEN DENORMANDIE
Depuis le 1er novembre, c'est 15 000 places supplémentaires. Combien ils sont à la rue ? C'est plusieurs milliers. La mairie de Paris a organisé une…
DAVID DOUKHAN
Un décompte.
JULIEN DENORMANDIE
Un décompte, et 2 000 bénévoles, que je salue, y ont participé, et font état encore de plus de 3 000 personnes à Paris dans les alentours, qui dorment à la rue malheureusement, et donc ça implique quoi ? Eh bien ça implique que le gouvernement, le ministre de la Ville et du Logement que je suis, eh bien on continue les efforts pour ouvrir de plus en plus de places, 15 000 places supplémentaires depuis le 1er novembre, et puis surtout on essaie de sortir toutes ces personnes de l'hébergement d'urgence, pour leur donner un vrai logement, c'est la politique du logement d'abord, qu'on déploie avec beaucoup de détermination, avec notamment des associations comme la Fondation Abbé Pierre.
DAVID DOUKHAN
On va parler des élections européennes. C'est les grandes manoeuvres dans votre parti la République En Marche, et on entend le nom d'Agnès BUZYN, le nom de Nathalie LOISEAU, des ministres, moi ça me surprend toujours parce que la dernière fois que j'ai regardé, il y a la loi bioéthique, le plan pauvreté, la réforme des retraites, le chantier de la dépendance, tout ça c'est du ressort d'Agnès BUZYN, la ministre de la Santé, ces sujets-là ne mériteraient-t-ils pas une ministre concentré à 100 % ?
JULIEN DENORMANDIE
Mais la ministre est concentrée à 100 %.
DAVID DOUKHAN
Ah j'ai l'impression qu'elle pense aux européennes, c'est ce que laisse entendre son entourage.
JULIEN DENORMANDIE
Non non, je vous assure. La ministre est concentrée à 100 %, aujourd'hui c'est un peu comme en amont des Mercatos, c'est-à-dire que tout le monde y va de son commentaire, en se demandant : mais qui va être la tête de liste ? Je peux vous dire que je connais très bien Agnès BUZYN, j'étais encore avec elle hier soir, elle est à 100 %, mais comme l'ensemble des ministres, comme Madame LOISEAU dont le nom circule, que vous avez mentionnée…
DAVID DOUKHAN
Oui, Nathalie LOISEAU, qui est madame Brexit, c'est madame Brexit dans le gouvernement, c'est pareil.
JULIEN DENORMANDIE
Aujourd'hui, tout le monde y est de son petit commentaire, en disant : qui va être tête de liste…
DAVID DOUKHAN
Ce sont des sujets lourds.
JULIEN DENORMANDIE
Laissons le parti, la République En Marche, déterminer sa tête de liste, mais je peux vous assurer, tous les ministres sont pleinement à la tâche.
DAVID DOUKHAN
C'est le président qui décidera la tête de liste, pas le parti.
JULIEN DENORMANDIE
C'est le parti la République En Marche.
NIKOS ALIAGAS
Merci.
DAVID DOUKHAN
Merci à vous Julien DENORMANDIE d'avoir été notre invité sur Europe 1.
source : Service d'information du Gouvernement, le 27 février 2019