Texte intégral
Q - Quels seraient les leviers intérieurs et extérieurs du redressement de la compétitivité de l'agriculture française ?
DG. Pour conquérir de nouveaux marchés, gagner en compétitivité est un levier mais parvenir à constituer des filières françaises réunies autour d'une ambition commune est également primordial. L'enjeu premier est celui de la compétitivité hors-prix, la qualité et la différenciation de nos produits. C'est d'ailleurs l'objectif des plans de transformation, voulus par le Président de la République à la fin des EGA, afin de donner de la visibilité et des ambitions à des filières au sein des interprofessions. L'État sera présent pour accompagner cette montée en gamme de nos filières, par exemple à travers le GPI mobilisant 5 milliards d'euros d'investissements.
Mais je ne néglige pas l'importance de la compétitivité-prix dans le cadre d'une économie de marché mondialisée. Il faut redonner des marges de manoeuvre à nos entreprises agricoles pour qu'elles puissent investir dans la transition agro-écologique et se développer à l'international. C'est aussi une question de résilience. Sur ce point, des efforts majeurs ont été faits par le gouvernement dans la loi de finance pour 2019 : création de la dotation pour l'épargne de précaution jusqu'à 150 000 euros, transformation du CICE en baisse de cotisations sociales pérennes y compris pour les coopératives.
C'est plusieurs centaines de millions d'euros de baisse de charge pour la compétitivité de nos entreprises.
Q - Une harmonisation de la réglementation européenne (fiscalité, salaires, PAC…) est-elle possible ?
DG. Il y a un engagement fort du Président de la République à vouloir construire une Europe qui protège ses citoyens.
Cela passe nécessairement par une plus grande harmonisation de la réglementation européenne. C'est pourquoi la France défend l'idée que soit mis en place un socle de droits sociaux européens, en définissant des standards minimums en matière de droits à la formation, de couverture santé, d'assurance chômage ou de salaire minimum. Il faut toutefois tenir compte également des situations différentes de nos voisins européens.
La prochaine PAC a également un rôle à jouer pour la mise en place de nouvelles règles du jeu entre les Etats-membres. C'est ce que je porte dans la négociation actuelle : une PAC qui continue à exercer ses missions de régulation, à un moment où les aléas augmentent ; une PAC qui soutient les territoires ruraux, notamment les plus fragiles ou les plus éloignés ; une PAC qui repose sur un socle commun renforcé et ambitieux notamment sur l'environnement et la rémunération des services environnementaux pour tous les agriculteurs de l'Union.
Q - Comment concilier la compétitivité de notre agriculture sur les territoires et l'ouverture commerciale souhaitée par l'UE ?
DG. L'ouverture commerciale est aussi bénéfique pour notre agriculture : elle permet d'exporter notre savoir-faire et notre culture à travers nos produits. D'ailleurs, l'agriculture et l'agroalimentaire sont un des rares postes excédentaires dans notre balance commerciale. Il ne faut pas l'oublier. Toutefois, nous ne sommes pas naïfs. C'est pourquoi la France souhaite intégrer dans les négociations commerciales des conditions de concurrence équitable, où les dimensions environnementales, sociales, sanitaires liées aux conditions de production sont pleinement prises en compte. Je veux une politique commerciale européenne qui respecte nos choix collectifs, et qui bénéficie à nos agriculteurs et à nos territoires.
Q - Dans ce contexte, qu'attendez-vous du rôle des Chambres d'agriculture ?
DG. L'agriculture française est à un tournant, qui dépasse la seule question de la compétitivité. C'est celui de la transition agro-écologique. Cette transition implique de mener plusieurs chantiers en même temps.
Les Chambres d'agriculture, grâce à leur présence dans les territoires, ont un rôle fondamental à jouer pour accompagner les agriculteurs face à ces transformations sans précédent. Elles ont aussi un rôle d'information, un rôle d'accompagnement des nouvelles générations et un rôle de conseil stratégique et technique. Elles peuvent répondre à ces attentes des agriculteurs à travers une action efficace et modernisée qui s'appuie sur les projets portés par les agriculteurs. Ces sujets seront clairement posés par le contrat d'objectif que nous allons négocier avec la nouvelle assemblée qui s'installera après les élections.
https://chambres-agriculture.fr, le 28 février 2019