Texte intégral
ELIZABETH MARTICHOUX
Merci beaucoup d'être sur RTL ce matin. Bonjour Jacqueline GOURAULT.
JACQUELINE GOURAULT
Bonjour.
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous étiez à l'Assemblée hier, vous avez écouté et entendu même, j'imagine, Christian JACOB le patron des députés LR, qui s'est livré à un réquisitoire en règle contre Emmanuel MACRON qui, dit-il, a perdu le respect des Français. Ce n'est plus d'un débat dont le pays aurait besoin, mais d'une nouvelle élection ; c'est le jeu classique de l'opposition ?
JACQUELINE GOURAULT
Oui, c'est le jeu classique, mais au-delà de ça, pour quelqu'un qui se réclame héritier d'une famille politique Gaulliste, je trouve que ça manque un peu de respect des institutions de la 5ème République. On ne joue pas comme ça, d'une manière un peu… comment dire… à peine respectueuse vis-à-vis du président de la République et du Premier ministre. Il y a des institutions, elles fonctionnent, il y a eu un grand débat, une grande consultation qui a été finalement une grande réussite, tout le monde s'interrogeait au début, je crois que, oui, enfin, on gagnerait dans la vie politique française à se respecter un peu plus les uns les autres…
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, mais est-ce que quand même, Emmanuel MACRON ne joue pas un peu avec les nerfs des Français et des élus en faisant durer ce grand débat, je disais tout à l'heure, il n'en finit pas d'en finir, ça commence à être un peu long, non, même pour vous ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien, non, parce que, quand vous dites ça, en fait, que le calendrier annoncé est respecté, c'est-à-dire que ça devait se terminer le 15 mars en ce qui concerne les réunions sur le terrain, c'est ce qui a été fait, et le président de la République avait dit qu'il s'adresserait mi-avril aux Français. Alors ça peut sembler long, je vous concède cela, mais en réalité, parce que, parce qu'il y a une attente, mais il ne faut pas être impatient, l'impatience, c'est quelque chose qui peut se comprendre, si je puis dire, puisque les gens attendent une annonce, mais en réalité, on respecte le calendrier.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, et quand est-ce qu'il va s'exprimer donc ?
JACQUELINE GOURAULT
Je ne le sais pas précisément…
ELIZABETH MARTICHOUX
Il avait dit mi-avril, ce sera la semaine prochaine ?
JACQUELINE GOURAULT
Je ne connais pas la date exacte, donc je ne peux pas vous le dire.
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais vous souhaitez que ça aille vite maintenant, vous aussi ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien, je pense que le président de la République le sait lui-même.
ELIZABETH MARTICHOUX
Bon, écoutez, en tout cas, vous lui transmettrez nos attentes, en attendant, il y a
un autre…
JACQUELINE GOURAULT
Je lui dirai.
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, mais, parce qu'il y a une forme d'effervescence, d'ailleurs, il y a un autre front qui s'est ouvert hier au Parlement avec ses 218 élus de droite et de gauche qui ont réussi un coup politique quand même en s'unissant pour réclamer la tenue d'un référendum sur AEROPORTS DE PARIS dans le cadre du référendum d'initiative partagée parlementaire, donc, ce n'est pas encore fini, il faut évidemment aussi que le Conseil constitutionnel soit d'accord, et 4 millions et demi de signatures de Français, mais quand même, mais quand même, ils ont réussi un coup politique ?
JACQUELINE GOURAULT
D'abord, c'est amusant parce qu'on a rappelé tout au long du grand débat que cet instrument n'avait jamais été utilisé, qu'il existait dans le cadre, vous savez, du RIC, qui était réclamé, et au fond, je me suis dit en entendant ça : au moins, le grand débat aura été utile, au moins pour cela, puisque ça a permis aux parlementaires de se saisir de cet instrument, si je puis dire. Alors ceci dit, c'est quand même assez rigolo, c'est un drôle d'attelage…
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais ça vous fait rire…
JACQUELINE GOURAULT
C'est assez rigolo sur le fond, parce que, d'abord, moi, je me souviens quand monsieur VILLEPIN avait nationalisé (sic), pas nationalisé, privatisé – pardon – les autoroutes…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous vous en souvenez au MoDem, parce que François BAYROU est un chancre…
JACQUELINE GOURAULT
On s'en souvient, vous vous rappelez le combat de François BAYROU sur le sujet…
ELIZABETH MARTICHOUX
Qui est votre patron politique…
JACQUELINE GOURAULT
Les socialistes qui crient très fort et qui eux-mêmes ont privatisé des aéroports, il y a peu de temps, Toulouse, Nice, je crois, Lyon peut-être, je n'ai plus la liste en tête exactement, mais je crois que c'est là. Tout cela est assez est assez rigolo, et que LR fasse un front uni avec LFI, je dois dire que je ne savais pas que je verrai ça dans ma vie politique.
ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord, mais c'est, vous dites : le mariage de la carpe et du lapin, mais le projet de privatisation, il peut être définitivement voté demain comme si de rien n'était ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien, écoutez, la procédure parlementaire continue bien évidemment, et puis, il y aura la procédure parlementaire suite à ces signatures, il faut que ça soit validé…
ELIZABETH MARTICHOUX
Par le Conseil constitutionnel…
JACQUELINE GOURAULT
Par le Conseil constitutionnel, et puis, ensuite, il faut recueillir 10 % du corps électoral français…
ELIZABETH MARTICHOUX
Vous, vous êtes totalement convaincue par cette privatisation ? On rappelait que le MoDem, effectivement…
JACQUELINE GOURAULT
Mais je crois que la situation n'est pas tout à fait la même, quand les autoroutes ont été privatisées, la situation économique, je vais dire ça comme cela, globalement, était très bonne, c'est-à-dire, derrière, il y avait le cash qui tombait immédiatement, là, pour AEROPORTS DE PARIS, ça n'est pas exactement la même situation, il y a beaucoup d'investissements à faire pour remettre…
ELIZABETH MARTICHOUX
Mais ils vont être faits avant la privatisation, de toute façon, six milliards d'euros, avant la privatisation…
JACQUELINE GOURAULT
Il y aura d'autres investissements à faire, voilà.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et vous dites que la puissance publique n'a pas la trésorerie nécessaire pour assurer la modernisation des aéroports ; il vaut mieux le livrer au privé ?
JACQUELINE GOURAULT
Je dis que je suis solidaire de la décision…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ça, vous en êtes convaincue ?
JACQUELINE GOURAULT
Je suis solidaire de la décision du gouvernement…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ce n'est pas très enthousiasmant…
JACQUELINE GOURAULT
Pourquoi ce n'est pas très enthousiasmant ?
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, mais c'est une façon de formuler un peu tiède, on va dire.
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien, écoutez, je ne sais pas, je peux le dire autrement, mais en tout cas, je suis solidaire du gouvernement pour bien sûr cette décision.
ELIZABETH MARTICHOUX
Jacqueline GOURAULT, vous avez été sénatrice. La fronde est venue du Sénat, si Emmanuel MACRON n'avait pas menacé dans sa lettre aux Français de supprimer le Sénat, est-ce que vous pensez que ce serait arrivé ?
JACQUELINE GOURAULT
Non, il n'a pas…
ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que ce n'est pas lui qui a…
JACQUELINE GOURAULT
D'abord, il n'a pas menacé de supprimer le Sénat…
ELIZABETH MARTICHOUX
Il a évoqué l'idée de transformer la Haute Assemblée en posant la question aux Français.
JACQUELINE GOURAULT
Oui, alors écoutez, c'est une question dont j'entends parler depuis que je suis sénateur, et notamment ceux – et ça revient dans les discussions, je l'entends – qui pensent que le Sénat pourrait ressembler davantage au Bundesrat, c'est-à-dire faire une Assemblée des grands élus français, comme c'est en Allemagne et qui devrait s'occuper en gros des textes territoriaux. C'est quelque chose dont j'entends parler depuis très longtemps et qui revient sur le tapis…
ELIZABETH MARTICHOUX
Non, mais Emmanuel MACRON l'a formulé, il a demandé aux Français : est-ce qu'à votre avis, cette Chambre Haute, ce Sénat, il va sortir intact du grand débat ou est-ce que Emmanuel MACRON…
JACQUELINE GOURAULT
En ce qui me concerne, je suis très attachée au bicamérisme, dans toutes les grandes démocraties, presque toutes, il y a deux Assemblées, et moi, je pense que les deux Assemblées sont nécessaires pour la bonne démarche démocratique de notre pays.
ELIZABETH MARTICHOUX
Bon, donc vous vous n'êtes pas fana d'un affaiblissement du Sénat, c'est ce qu'on a compris. Jacqueline GOURAULT, est-ce qu'il faut un nouveau temps de décentralisation, on n'a pas très bien compris parce que vous, vous avez dit : si on sort avec un meccano institutionnel qui joue avec la répartition des pouvoirs entre les collectivités locales et l'Etat, ce n'est pas ce qu'attendent les Français, et Emmanuel MACRON, lui, il a dit : il faut un nouveau temps de décentralisation ; qui a raison ?
JACQUELINE GOURAULT
Vous savez, j'étais avec Emmanuel MACRON dans l'avion pour la Corse quand l'article est paru dans Le Monde, et vous savez que je travaille main dans la main avec le président de la République et avec le Premier ministre…
ELIZABETH MARTICHOUX
Là, attendez, excusez-moi, je suis perdue, l'article sur ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien, l'article dans Le Monde dont vous faites allusion…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ah, non, je ne fais pas allusion à ça, je fais allusion à vos déclarations, elles ont peut-être été synthétisées, c'est ça, dans le journal Le Monde ?
JACQUELINE GOURAULT
Non, mais c'est dans Le Monde, c'est à partir du Monde…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ah, pardon, c'est votre interview dans Le Monde ?
JACQUELINE GOURAULT
Oui, c'est à partir du Monde.
ELIZABETH MARTICHOUX
Ah oui. Pardon. Parenthèses fermées.
JACQUELINE GOURAULT
Voilà, très bien. Ce que je veux dire très précisément, c'est que quand vous alliez dans les réunions, parce que, moi, j'allais dans les réunions des grands débats, les gens ne vous parlent pas de décentralisation ou n'utilisent pas le mot décentralisation, ce dont ils vous parlent, c'est de proximité, de service public, de démographie médicale, etc., c'est cela qu'il faut dire. Le mot décentralisation est un mot utilisé par les élus, par les associations d'élus, et donc bien entendu, ça peut se traduire par une décentralisation, mais ce que j'ai voulu dire, c'est que quand on s'adresse aux Français, il ne faut pas faire du meccano institutionnel, il faut parler de ce qu'ils ressentent eux et de leur priorités et de leurs besoins.
ELIZABETH MARTICHOUX
Et en un mot, qu'est-ce que l'Etat peut encore décentraliser, en un mot par exemple ?
JACQUELINE GOURAULT
C'est à discuter avec les associations d'élus, mais la décentralisation, et si vous permettez, j'en parle suffisamment avec le président de la République, la France est déjà décentralisée, et le président de la République dit souvent aussi : il faut faire aussi le point sur ce qui a été décentralisé pour savoir si tout marche bien, et puis, après, il y a des choses qui sont encore dans les mains de l'Etat qui éventuellement pourraient être décentralisées, je ne sais pas, je vais vous dire, les petites lignes de chemin de fer pourraient être décentralisées aux régions, je vous le dis, qui, déjà, gèrent une partie de cette mission, c'est un exemple…
ELIZABETH MARTICHOUX
C'est un bon exemple puisque les Français sont effectivement attachés au maintien notamment des filières ferroviaires. Il nous reste très peu de temps, une question aussi qui vous intéresse, hier, Christian JACOB, toujours lui, disait : la proportionnelle, ce n'est pas ce dont la France a besoin, il faut de la proportionnelle, et à quel niveau, en un mot ?
JACQUELINE GOURAULT
D'abord, les Français réclament de la proportionnelle, deuxièmement, j'appartiens à une famille politique qui a toujours demandé une dose de proportionnelle…
ELIZABETH MARTICHOUX
Laquelle, laquelle voudriez-vous ?
JACQUELINE GOURAULT
Quelle dose de proportionnelle ?
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, laquelle voudriez-vous…
JACQUELINE GOURAULT
En bien, peu importe le chiffre, ce qui est important…
ELIZABETH MARTICHOUX
Ah ben non !
JACQUELINE GOURAULT
Mais, ce qui est important, c'est que tout le monde soit représenté, que tous les Français se sentent représentés dans les…
ELIZABETH MARTICHOUX
On était parti sur 15 %, vous souhaitez qu'à la fin du grand débat, ce soit plus que 15 % ?
JACQUELINE GOURAULT
C'est le minimum 15 %.
ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, et le maximum, ça pourrait être… ?
JACQUELINE GOURAULT
Enfin, je ne veux pas rentrer dans des chiffres, non, je ne veux pas rentrer dans des chiffres, parce que ça dépend aussi, je vais vous dire…
ELIZABETH MARTICHOUX
Le terrain, ça peut être 30 % ? 30 %…
JACQUELINE GOURAULT
Je vais vous dire, ça dépend aussi du nombre de parlementaires, et là aussi, on était parti à 30 % de baisse du nombre de parlementaires. Et si ça change, parce que ça aussi, ça peut bouger, ça change le pourcentage de proportionnelle.
ELIZABETH MARTICHOUX
Donc le meccano, là aussi, n'est pas encore totalement stabilisé. Emmanuel MACRON réfléchit sans doute, Jacqueline GOURAULT ? Oui ? Encore ?
JACQUELINE GOURAULT
Je pense que le président de la République et le Premier ministre sont en train d'affiner leur décision.
ELIZABETH MARTICHOUX
Tout n'est pas arbitré. Merci beaucoup, Jacqueline GOURAULT, d'avoir été ce matin avec nous sur RTL.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 avril 2019