Texte intégral
Q - Bonsoir, Jean-Baptiste Lemoyne.
R - Bonsoir.
Q - Secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, Jean-Baptiste Lemoyne, vous avez participé chez Edouard Philippe à une réunion autour de Brexit. Franchement, la France n'est pas prête ?
R - Au contraire la France, elle se prépare depuis longtemps. Vous le savez, nous avons adopté une loi, en janvier 2019, avec toute une série d'ordonnances derrière, pour qu'en matière de transport, en matière de circulation, de biens et des personnes, on se prépare. Je crois que l'Union européenne et la France sont prêtes. On ne peut peut-être pas en dire autant du côté d'Outre-Manche.
Q - Vous voulez dire quoi, les Britanniques, eux, en revanche, ils sont à la rue.
R - Ce que je sais, c'est que nous, nous avons recruté 600 douaniers supplémentaires pour pouvoir assurer un certain nombre de contrôles qui, de fait, vont se mettre en place.
Q - Leurs syndicats disent qu'ils vont en supporter toute la charge, les douaniers français.
R - 600 douaniers supplémentaires, cela veut dire qu'on a mis des moyens, des moyens humains, des moyens financiers. Nous avons également recruté près de 200 vétérinaires parce que pour tous les biens qui ont trait à l'agroalimentaire c'est important. Et par ailleurs, nous continuons à accompagner les entreprises. Il y a près de 20.000 entreprises françaises qui exportent vers le Royaume-Uni.
Q - Elles vont souffrir, ces entreprises, elles vont souffrir.
R - On fait tout pour que, pour notre part, cela se passe le mieux possible, mais naturellement le Brexit, depuis toujours, ce n'est pas une bonne nouvelle. Ce n'est pas une bonne nouvelle pour l'Europe, ce n'est une bonne nouvelle pour le Royaume-Uni. Et un Brexit sans accord au 31 octobre, ce sera encore plus dur pour le Royaume-Uni.
Q - Vous avez vu le speaker de la Chambre des communes à Londres qui démissionne. Boris Johnson qui est face à un Parlement qui lui est hostile. C'est une catastrophe ?
R - Ce qu'on voit c'est que le fog londonien a tendance à s'épaissir et face à cela c'est notre devoir d'être prêts, de pouvoir faire un certain nombre de tests.
Q - Est-ce que vous comprenez ce qui se passe à Londres, au fait ?
R - En réalité, les Britanniques nous ont dit ce qu'ils ne voulaient pas, mais on a du mal à voir ce qu'ils veulent exactement. Vous le savez, Boris Johnson avait promis un certain nombre de propositions, mais pour l'instant on a du mal à les discerner. Face à cette incertitude londonienne, nous, nous sommes solides sur nos appuis. Nous créons un contexte pour accompagner les particuliers et les entreprises et d'ailleurs j'en profite : je veux dire aux auditeurs, s'ils sont concernés de près ou de loin, en tant que particuliers ou entrepreneurs de ne pas hésiter à visiter le site brexit.gouv.fr parce que c'est un site d'information qui leur permet...
Q - Un site internet et tout est réglé selon vous. Tout va bien ?
R - L'information c'est important, nous le faisons également auprès des Français établis au Royaume-Uni. Vous le savez, il y en a près de quatre à cinq cent mille et donc notre consulat, notre ambassade font énormément de réunions. Il y a besoin d'être prêt.
Q - Les Britanniques partent le 31 octobre, Jean-Baptiste Lemoyne ? Vous le savez ou pas ?
R - C'est la date qui a été retenue par le Conseil européen et pour l'instant aucun élément ne permet d'aller sur un autre schéma. Donc nous nous préparons à cette date, qui est une date importante, également importante pour les Européens, parce que l'Europe est un peu à la croisée des chemins. Elle a besoin pour cette nouvelle mandature qui s'ouvre de conduire un certain nombre de projets pour rassurer ses citoyens sur la force du projet européen et sur le fait que l'Europe, elle protège ses citoyens.
Q - Jean-Baptiste Lemoyne, quand nous aurons divorcé, quid des migrants, notamment ceux qui sont retenus à Calais ? Pour le coup, vous allez les laisser partir finalement. Il n'y aura plus d'accord.
R - On voit que dans de nombreux domaines, vous parlez de l'immigration, mais on peut parler aussi de la défense, de la lutte contre le terrorisme, du commerce...
Q - Parlons des migrants.
R - Sur tous ces sujets, il y aura besoin de construire à l'avenir un cadre de coopération qui soit étroit parce que...
Q - Vous voulez dire que pour l'instant on ne sait pas ce qui va se passer de ces milliers de migrants qui sont toujours retenus selon les accords avec la Grande-Bretagne à Calais ?
R - Non, ce que je veux dire c'est que dans tous les domaines, il va falloir construire après le Brexit une relation proche parce qu'on voit bien que tous ces sujets ne peuvent pas être réglés, soit tous seuls entre les Européens, soit les Britanniques tous seuls. Donc, on va avoir besoin, à l'avenir, une fois que ce moment compliqué du Brexit sera passé, de travailler à une relation qui reste étroite.
On aura beaucoup de choses à faire le 1er novembre. Que ce soit les douaniers, que ce soit les policiers. Toutes les forces vont être mobilisées, seront sur le pont. Les migrants seront un des sujets majeurs, mais il y en a d'autres, je pense à la lutte contre le terrorisme, je pense à la défense, je pense aux relations commerciales. Sur tous ces sujets-là, il faudra s'atteler à construire une relation avec le Royaume-Uni, parce que, certes, ils ne seront plus dans l'Union européenne mais il y a besoin de garder un lien. Regardez, les étudiants, il y a tellement d'échanges entre nos deux pays. Je peux vous dire qu'aujourd'hui, Frédérique Vidal l'a dit ce matin, 90 % des étudiants Erasmus en moins pour l'Angleterre, ce n'est pas rien, cela veut dire que le Royaume-Uni perd en attractivité aussi.
Q - Jean-Baptiste Lemoyne, votre ministre de tutelle, Jean-Yves Le Drian, en visite officielle à Moscou, évoquant le conflit à l'est de l'Ukraine, a déclaré ceci à propos de la Russie : " Le moment est venu, le moment est propice pour travailler à réduire la défiance entre la Russie et l'Europe qui devraient être des partenaires sur le plan stratégique et économique et qui devraient être d'autant plus des partenaires parce qu'il y a beaucoup de liens qui nous unissent ". Ça y est, Poutine est redevenu notre ami.
R - Le chef de l'Etat a eu des discussions extrêmement constructives avec le président Poutine le 19 août à Brégançon et, il s'agit d'essayer de construire de la confiance. On l'a vu, avec la Russie, il y a besoin d'échanger, de dialoguer sur de nombreux enjeux géopolitiques majeurs, parce qu'on le voit, ils sont présents, partie prenante à de nombreux sujets globaux, géopolitiques.
Q - Vous marchez sur des oeufs quand on vous pose la question quand même. Parce que finalement François Hollande avait tourné le dos, suite à l'invasion de la Crimée. Aujourd'hui, tout cela est terminé, on tourne la page, on passe à autre chose.
R - Attendez. Tout ça, il faut aussi que des actes soient posés par les Russes. On a vu que par exemple s'agissant de l'Ukraine il y avait eu un échange important de prisonniers, important sur le nombre et sur le symbole d'ailleurs. Donc, on espère qu'ainsi, sur un certain nombre de dossiers, la confiance pourra renaître parce que, le président l'a dit, L'Europe c'est une grande idée qui réunit finalement de Lisbonne à Vladivostok et on a besoin de construire ensemble une architecture de sécurité européenne.
Q - Marine Le Pen a dit à Hénin-Beaumont hier, elle s'est félicitée d'avoir réussi à convaincre Emmanuel Macron dans cette histoire. Réponse ?
R - Je crois qu'elle s'illusionne. Emmanuel Macron n'a pas besoin, des bons conseils, en l'occurrence, de x ou y. C'est un dirigeant international aujourd'hui qui a acquis un leadership particulièrement important. On l'a vu au G7, à Biarritz, et donc, sur tous ces sujets-là, la France est à l'initiative.
Q - Merci à vous, Jean-Baptiste Lemoyne d'avoir été l'invité du 18.50 France Info.
R – Merci.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 septembre 2019