Texte intégral
Merci Enzo. Mesdames et Messieurs, je suis vraiment très heureux d'être à Rome aujourd'hui dans le cadre de la relation privilégiée que nous avons avec l'Italie. Je suis aussi heureux de la qualité de l'échange que nous venons d'avoir, Enzo et moi, sur de nombreux sujets. Nous avons, vous le savez, traversé, dans le cadre de nos relations, une période un peu difficile. Je considère qu'aujourd'hui ces difficultés sont derrière nous. Et l'état d'esprit de convergence sur de nombreux sujets, que nous avons pu constater tout à l'heure entre nous deux, le démontre. D'ailleurs, honnêtement, nous n'avions jamais arrêté de nous parler. C'est important de le faire ici à Rome, sur beaucoup de sujets. Nous avons évidemment particulièrement échangé sur la Libye.
Mais, avant cela, je voulais remercier les autorités italiennes, Enzo en particulier, le Premier ministre Conte, le président de la République, de leur solidarité et des messages d'empathie qu'ils nous ont fait parvenir au moment de ce sinistre dramatique de Notre-Dame de Paris. Vous avez vous-mêmes connu des sinistres sur des bâtiments religieux. Vous savez le traumatisme que cela peut constituer pour nos populations et l'importance que représente Notre-Dame de Paris dans l'histoire, dans la culture et dans l'imaginaire français, et le message a été apprécié, beaucoup.
Sur la Libye, en complément, deux ou trois points : d'abord et surtout, il n'y a pas de progrès possible en Libye sans une entente franco-italienne solide. Et il n'y a pas de sortie possible en Libye si elle n'est pas politique. Et donc, partageant ce constat - nous l'avons d'ailleurs toujours partagé puisque c'est dans cet esprit que nous nous étions retrouvés à Paris à la réunion de l'Elysée en mai 2018, c'est dans cet esprit que nous nous sommes retrouvés à Palerme à l'invitation du président Conte en novembre de l'année dernière, c'est dans cet esprit que s'est tenue la réunion d'Abou Dabi, lors de laquelle il a failli y avoir un accord entre Sarraj et Haftar qui malheureusement n'a pas été constaté après - nous étions en phase.
Et c'est dans cet esprit aussi que nos directeurs politiques et quelques autres se réuniront à Rome, dans quelques jours, pour évoquer le processus politique indispensable. Comme il y a la situation que l'on connaît, nous avons souhaité nous voir. On avait eu l'occasion d'échanger avec Enzo, sur ce sujet, lors du G7 qui s'est tenu à Dinard, dans ma région, en Bretagne, il y a quelques jours. Nous avions d'ailleurs été à l'origine, tous les deux, d'un communiqué qui a été validé par les membres du G7, qui a été validé à l'unanimité et qui disait la même chose : cessez-le-feu, processus politique, élections. Tout cela sous l'égide du représentant du secrétaire général des Nations unies, M. Salamé. Etant donnée la situation, j'ai pensé qu'il fallait que l'on puisse se voir rapidement pour partager notre point de vue et renforcer notre cohésion sur ce sujet. Les populations civiles pâtissent de cette situation. Les efforts internationaux de paix se trouvent fragilisés. Il faut donc que, sans délai, le dialogue reprenne, et le dialogue ne peut reprendre que s'il y a un cessez-le-feu immédiat. Nous allons prendre les initiatives nécessaires pour agir auprès de l'ensemble des protagonistes pour que l'on puisse sortir de cette crise, qui peut devenir dangereuse, sur laquelle il importe aujourd'hui de mettre un coup d'arrêt dès à présent.
Sur les autres sujets que nous avons évoqués et notamment les enjeux européens, je constate avec intérêt que nous avons sur le cadre financier pluriannuel une posture commune, à la fois sur les ressources nouvelles, à la fois sur la bonne articulation des politiques anciennes et des politiques nouvelles, à la fois sur la vigilance sur la politique de cohésion et la politique agricole commune, à la fois sur la nécessité de la convergence sociale, environnementale. Cette constatation est tout à fait enthousiasmante pour l'avenir. Elle nous permettra, je crois, de bien travailler ensemble sur cet enjeu qui va intervenir après les échéances du mois de mai. Mais les chefs d'Etat et de gouvernement vont se réunir avant, puisqu'à Sibiu, le 9 mai, ils seront amenés à évoquer ces sujets. Donc il était opportun que l'on puisse constater ensemble nos accords sur les grandes lignes indispensables à la mise en oeuvre du cadre financier pluriannuel.
Enfin, sur les sujets bilatéraux, on sait qu'il y a des sujets qui attendent et des sujets qui vont plus vite. C'est le lot de toute discussion bilatérale. Mais je dois me réjouir du bon état d'esprit et, vraiment, de discussions de confiance. Je crois que c'est le terme que je peux utiliser pour qualifier ce qui a eu lieu ensemble, pendant le moment que nous avons partagé. Nous nous voyons très souvent. Nous nous sommes vus à Dinard. Nous nous voyons à Rome. Nous nous verrons à Bruxelles dans très peu de temps. Cette relation est forte et étroite et les nuages se sont dissipés.
Q - Question sur l'implication des Etats-Unis adressée au ministre Moavero. Après la réponse du ministre italien, le ministre est intervenu :
R - Je vais compléter, donner mon point de vue. Il rejoint celui d'Enzo. Je constate que c'est l'instabilité qui crée le lit du terrorisme. Et plus l'instabilité est forte et plus le terrorisme trouve des chemins pour se développer. Donc il importe d'abord de retrouver la stabilité. Et pour retrouver la stabilité, il faut d'abord le cessez-le-feu et un processus politique dont les deux protagonistes n'étaient pas loin, puisqu'à Abou Dabi, ils s'étaient mis d'accord. Puisqu'à Palerme, quand on s'était vus, je me souviens d'un moment où on n'était vraiment pas loin d'un accord. Donc c'est possible à condition d'avoir la volonté politique et que l'explication ne se fasse pas par les armes.
Q - La France est accusée, régulièrement, malgré la déclaration de la présidence hier, de soutenir le camp Haftar. Qu'en est-il et quel type de message passez-vous au camp Haftar ?
R - Sur les déclarations des uns et des autres, les suspicions des uns et des autres, je pense que nous avons répondu très clairement. Il n'y pas de solution militaire dans cette crise. Il faut que les acteurs puissent trouver les voies d'un dialogue politique qui permettra la mise en oeuvre d'élections. C'est tout à fait déterminant. Et comme je l'ai dit tout à l'heure, il n'y aura pas de progrès possible sans une entente franco-italienne solide. Il faut le faire vite, parce que les ingrédients d'une détérioration sont là, par l'affrontement armé, par cette forme de guerre de position, et par l'arrivée d'autres éléments plus radicaux qui pourraient renforcer encore davantage l'instabilité. Donc notre message est clair. Il y aura ici, mais je pense qu'Enzo pourra le dire mieux que moi, une réunion dans quelques jours à Rome, où, je l'espère, les directeurs politiques de nos pays avec les directeurs des pays concernés pourront envisager les initiatives nécessaires. Ce sera la semaine prochaine.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 avril 2019