Interview de Mme Sibeth Ndiaye, secrétaire d’Etat, porte-parole du Gouvernement, à France Inter le 29 mai 2019, les négociations pour l'attribution des différents postes clés de l'UE et la stratégie industrielle.

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Intervenant(s) : 
  • Sibeth Ndiaye - Secrétaire d'Etat, porte-parole du gouvernement

Média : France Inter

Texte intégral

NICOLAS DEMORAND
Et avec Léa SALAME, nous recevons ce matin la porte-parole du gouvernement dans le grand entretien du 7-9, celle-ci dialoguera avec vous, la porte-parole, dans une dizaine de minutes au 01 45 24 7000, sur les réseaux sociaux et l'application France-Inter. Sibeth NDIAYE, bonjour.

SIBETH NDIAYE
Bonjour.

NICOLAS DEMORAND
Toujours dans le sillage des élections européennes, le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union hier soir à Bruxelles, l'enjeu, on le connaît c'est le vaste mouvement d'attribution des différents postes clés de l'UE et on l'a bien compris le président de la République a été clair, la France à travers le groupe des libéraux renforcés par les députés LREM entend peser et pèsera. Adieu les règles et les usages du bipartisme, est-ce que le président de la République entend « disrupter » comme on dit maintenant la vie politique européenne après l'avoir fait dans la vie politique française ?

SIBETH NDIAYE
Alors je voudrais d'abord vous dire que je ne suis pas complètement d'accord avec ce que vous avez dit, la manière de présenter les choses. Je ne suis pas certaine qu'aujourd'hui le plus important ce soit de savoir qui on homme à quel poste, pour moi le plus important pour cette nouvelle commission qui s'annonce, c'est de déterminer finalement quelles sont les priorités d'actions, que cette Commission aura à gérer dans les années à venir et parmi ces priorités d'actions, la France a indiqué que les questions d'urgence écologique, de changement climatique, que le fait de créer un nouveau modèle social et économique, de rétablir la souveraineté européenne étaient les piliers de notre action.

NICOLAS DEMORAND
Et pour ça, il faut les meilleurs a dit le président de la République.

SIBETH NDIAYE
Et pour ça effectivement…

NICOLAS DEMORAND
Donc on n'est pas très loin en fait.

SIBETH NDIAYE
Et pour ça il faut effectivement des gens qui soient capables d'incarner ce que sera l'Union européenne, à la fois pour sa place dans le monde mais aussi pour la capacité à mettre en oeuvre ces différentes priorités. Et donc il est naturel et normal que compte tenu du score que la liste Renaissance a obtenu en France, qui quelque part renforce le président de la République dans les négociations européennes, qu'il soit en quelque sorte au centre de ces négociations et que la voix de la France compte à nouveau.

LEA SALAME
Jean-Yves LE DRIAN hier à ce micro disait qu'avec la recomposition du Parlement, la procédure classique qui aurait vu autrefois le candidat du PPE Manfred WEBER accéder naturellement à ce poste n'avait plus cours, est-ce que ce matin vous nous dites que la candidature de Manfred WEBER est à vos yeux caduque ?

SIBETH NDIAYE
Je crois que cette candidature n'a pas lieu d'être, tout simplement pourquoi, parce que jusqu'à maintenant nous avions deux partis, d'un côté le PPE qui a incarné la droite européenne, de l'autre côté S&D qui incarnait, on va dire, la social-démocratie, la gauche européenne. Ces deux partis se sont partagé le pouvoir à peu près depuis que l'Union européenne est l'Union européenne et que nous avons un Parlement européen. Et ils avaient chacun ce qu'on appelle le système du Spitzenkandidat, chacune des deux formations disant mon candidat pour la Commission européenne mon candidat pour la Commission est untel ou unetelle.

LEA SALAME
Et celui qui arrivait en tête, gagnait.

SIBETH NDIAYE
Celui qui arrivait en tête gagnait, simplement il n'y avait pas de listes transnationales. Donc au final il y avait des accords d'appareils entre partis politiques, voire même plutôt entre chefs d'Etat au niveau européen sans que ça ne reflète aucune dynamique démocratique.

LEA SALAME
Mais c'est ce que j'allais vous dire Angela MERKEL l'a redit encore pour elle le candidat naturel est Manfred WEBER et elle continue à le soutenir, donc est-ce qu'on va jusqu'au bras de fer avec la chancelière allemande ?

SIBETH NDIAYE
C'est d'abord il n'est pas question de bras de fer, il est question de discussions franches et on a déjà eu d'ailleurs la polémique il y a quelques semaines, est-ce que il y a des confrontations entre la France et l'Allemagne ? Non il y a un dialogue franc, chacun a des positions et puis ensuite on va rechercher des compromis, c'est ça l'art d'être européen, c'est de chercher des compromis entre des gens qui ne s'entendent pas toujours.

LEA SALAME
Mais est-ce que vous sentez qu'Angela MERKEL a envie de faire un compromis sur cette question-là ?

SIBETH NDIAYE
Nous, on a envie d'avancer …

LEA SALAME
Vous oui, mais elle ?

SIBETH NDIAYE
On a envie et donc on espère que l'ensemble de nos partenaires européens, puisque ce n'est pas uniquement l'Allemagne qui a voix au chapitre mais tous les pays européens qui auront voix au chapitre, on espère vraiment trouver un compromis sur quelqu'un qui incarne sur la base que je vous disais nos objectifs, qui incarne le renouveau et le renouvellement.

NICOLAS DEMORAND
Justement Jean Yves LE DRIAN avouait à ce micro hier qu'à titre personnel il l'aimait bien Michel BARNIER. Est-ce à dire vu qu'il est quand même ministre de l'Europe et des affaires étrangères que Michel BARNIER est le candidat de la France ?

SIBETH NDIAYE
A ce stade nous n'avons pas de candidat, nous avons d'abord la volonté de faire en sorte que cet agenda de la Commission soit partagé par l'ensemble des pays européens. Ensuite il convient dans les semaines qui viennent d'avoir des négociations. Il y a un certain nombre de postes qui doivent être attribués au sein de l'Union européenne et nous aurons des discussions avec tous nos partenaires et je le répète avec tous nos partenaires pour déterminer qui est le meilleur candidat, à quel poste.

LEA SALAME
Il y a un nom qui circule, c'est celui de Margrethe VESTAGER, sauf qu'elle a un problème, Margrethe VESTAGER, c'est qu'elle appartient, alors certes c'est une femme et elle est libérale comme le parti auquel vous allez appartenir, mais qu'elle appartient à un pays, le Danemark, elle vient d'un pays, le Danemark qui n'est pas membre de la zone euro, est-ce que c'est un problème pour vous qu'elle soit présidente de la Commission européenne ?

SIBETH NDIAYE
Moi, je crois que le parcours de Margrethe VESTAGER a montré dans le mandat précédent que c'était une femme qui avait beaucoup de conviction. On peut ne pas aller partager, d'ailleurs la France ne les a pas systématiquement partagé, je vous rappelle la fusion avortée entre ALSTOM et SIEMENS, ce qui est bien la preuve qu'on peut avoir des désaccords tout en reconnaissant qu'il y a un parcours et des convictions qui sont de beaux parcours et de belles convictions. Pour autant, et je le répète, au stade où nous en sommes nous ne sommes pas dans la promotion de tel ou tel candidat, il y a de très bons profils qui existe au niveau européen…

LEA SALAME
Mais le fait qu'elle appartienne au Danemark qui n'est pas un pays de la zone euro, ça ne vous pose pas un problème ? Ça ne pose pas un problème à la France.

SIBETH NDIAYE
Ça peut être une difficulté évidemment après, l'Union européenne ne se résume pas à la zone euro et le parcours qu'elle a eu démontre aussi qu'elle a su au-delà de la zone euro avoir des décisions qui sont des décisions importantes et fortes.

NICOLAS DEMORAND
Encore un mot de la situation européenne après les élections, vous avez vous-même tendu la main, Sibeth NDIAYE, aux écologistes en espérant peut-être travailler ensemble au Parlement européen. Yannick JADOT ne semble pas très chaud, vous êtes déçue ?

SIBETH NDIAYE
Alors les écologistes au niveau européen ne se résument pas Yannick JADOT et de la même manière qu'au sein du PPE ou du au sein de S&D vous avez des différences et des sensibilités différentes qui s'expriment, au sein des Verts européens, il y a aussi…

NICOLAS DEMORAND
Donc il y aurait d'autres écologistes qui pourraient prendre la main tendue.

SIBETH NDIAYE
On est dans une situation aujourd'hui de recomposition inédite au niveau européen et on voit bien que ce qui a traversé la France en fait en vérité traverse les pays de l'Union européenne et même au-delà, traverse les pays du monde. Cette recomposition-là qui est à l'oeuvre, il s'agit aujourd'hui de voir ce qu'elle va donner et moi je crois qu'il est très important que chacun des députés européens agisse en conscience et en fonction de ses convictions et pas forcément en fonction de carcan partisan.

LEA SALAME
Quand on écoute les ministres et les membres de la majorité depuis dimanche soir, il y a une couleur qui revient absolument partout, vous la portez sur votre robe d'ailleurs aujourd'hui, c'est le vert, verdir absolument notre action, vous avez commencé votre première phrase en parlant de l'urgence écologique, soudainement ça devient une un impératif absolu, après les résultats des élections. Qu'est-ce que vous allez faire concrètement en France, parce qu'on voit les réunionites etc…, mais concrètement qu'est-ce que vous allez faire pour verdir votre action, pour accélérer la transition écologique, est-ce que vous avez des annonces à nous faire concrètes ?

SIBETH NDIAYE
Alors je n'ai pas de nouvelles annonces à vous faire évidemment ce matin à votre micro, ce que je veux vous dire d'abord c'est que la question de la transition écologique, c'est une question qui traverse depuis de nombreuses années le débat public. Ce qu'a montré ces élections européennes, c'est que d'abord tous les partis se saisissaient de cette question et je crois que ceux qui ont été les premiers écologistes, qui ont été les pionniers y compris en termes de parti devrait être très heureux qu'ils aient réussi à déployer ce débat dans la société, ça c'est le premier élément.

LEA SALAME
Il me semble qu'ils le sont.

SIBETH NDIAYE
Je n'ai pas tout le temps cette impression, j'ai l'impression qu'ils ont un peu envie de capter l'écologie pour eux tout seuls, or l'écologie aujourd'hui c'est un débat qui est un débat qui est dans notre société, ça c'est le premier élément. Le deuxième élément, c'est que s'il est important de comprendre que depuis, les deux années qui viennent de s'écouler dans ce quinquennat le gouvernement n'a pas été inactif en matière d'écologie. On n'est jamais satisfait de ce qu'on fait en matière d'écologie parce qu'on considère toujours et c'est vrai que c'est un combat quotidien et un combat de long terme, qu'on pourrait toujours faire mieux. Et c'est le rôle des organisations non-gouvernementales que de dire voilà quel est l'objectif ultime à atteindre et donc il n'est pas satisfaisant que cet objectif ne soient pas d'ores et déjà atteint.

LEA SALAME
J'entends, mais qu'est-ce que vous répondez à tous ces jeunes qui ont manifesté pour le climat, tous ces jeunes qui sont allés aux urnes pour voter écolo notamment ? Là vous avez en fait au-delà des mots est-ce qu'il va y avoir des choses, est-ce qu'il va y avoir des initiatives, est-ce que… je ne sais pas est-ce que vous allez aller plus loin sur les primes pour acheter un véhicule électrique ?

NICOLAS DEMORAND
Sur l'isolement des logements.

LEA SALAME
Oui sur l'isolement des logements, est-ce que vous allez annoncer des choses ou ça va être juste oui…

SIBETH NDIAYE
Il y a beaucoup de choses qui ont été déjà annoncées. Il y a beaucoup de choses qui sont en cours. Il y a une annonce par exemple que nous avons faite, il faut regarder comment cette politique écologique que nous menons au niveau français et que nous souhaitons défendre au niveau européen s'articule. On fait le constat du réchauffement climatique, on décide donc, on considère donc qu'il faut diminuer les émissions de gaz à effet de serre et donc il faut réduire la dépendance aux énergies fossiles et pour ce faire on a pris une décision qui est la fermeture de centrales à charbon. Ces centrales à charbon on les a pas éteintes du jour au lendemain, on se donne plusieurs années pourquoi ? Parce qu'il faut aller voir les gens à Gardanne, à Saint-Avold pour leur dire, écoutez demain vous n'aurez plus d'emplois, c'est des transitions qui sont des transitions difficiles. Et quand on a une économie qui pendant des années s'était habituée au gaspillage, s'était habituée à considérer qu'on avait des ressources illimitées, le changement compris de modèle économique prend du temps y compris parce que ça concerne des gens en vrai.

NICOLAS DEMORAND
Deux questions rapides, le projet de mine Montagne d'or en Guyane est-il définitivement abandonné, ça ne se fera jamais, jamais, jamais ?

SIBETH NDIAYE
C'est incroyable que la question nous soit systématiquement posée, ce qui montre bien d'ailleurs que sans doute on met en doute trop souvent notre sincérité. Hier à l'Assemblée nationale …

NICOLAS DEMORAND
Brune POIRSON l'a confirmé.

SIBETH NDIAYE
Brune POIRSON l'a confirmé.

NICOLAS DEMORAND
Donc la ligne est claire.

SIBETH NDIAYE
Donc je ne peux pas vous dire autre chose que ce que Brune POIRSON a confirmé, évidement il y a des questions juridiques qui vont se poser parce qu'il y avait des permis d'exploration, c'est-à-dire des permis qui permettent de lancer en fait le projet qui avait été accordé. Aujourd'hui force est de constater que les exigences environnementales qui sont celles de notre société ne correspondent plus à ce projet et donc il faut que ce projet s'arrête et il faut que ce soit fait en bon ordre, y compris d'un point de vue juridique.

NICOLAS DEMORAND
Est-ce que le projet de loi bioéthique sera bien présenté avant l'été comme l'a promis Edouard PHILIPPE ou est-ce qu'il va être repoussé ?

SIBETH NDIAYE
Moi, j'ai tendance à toujours croire le Premier ministre et donc…

NICOLAS DEMORAND
Donc vous confirmez.

SIBETH NDIAYE
… s'il dit qu'il sera présenté, tout à fait, il sera présenté.

NICOLAS DEMORAND
Avec la PMA au milieu.

SIBETH NDIAYE
Exactement.

LEA SALAME
Sibeth NDIAYE, vous parliez à l'instant des emplois menacés dans les centrales à charbon qui vont fermer, les salariés de GENERAL ELECTRIC de Belfort sont sous le choc ce matin, 1.000 postes supprimés à Belfort, une cinquantaine à Boulogne, sur le dossier GENERAL ELECTRIC, que s'engage à faire le gouvernement, est-ce qu'il va bouger ou laisser faire ?

SIBETH NDIAYE
Alors il faut d'abord regarder la raison pour laquelle on est dans la situation dans laquelle on est aujourd'hui. Le site de Belfort en particulier est un site qui produit de la turbine à gaz, il y a une dizaine d'années il produisait une centaine de turbines par an, l'année dernière il y en a produit un peu moins d'une trentaine, l'équilibre économique pour que le site fonctionne bien est d'une quarantaine de turbines par an. Je ne crois pas que l'entreprise ait décidé d'arrêter par elle-même de produire des turbines, alors qu'il existerait, je mets au conditionnel, une demande forte de turbines par ailleurs. Et on revient sur le sujet de la transition écologique, il se trouve que les turbines à gaz utilisent une énergie qui est une énergie fossile, dès lors que l'économie mondiale et aussi l'économie française engagent une transition écologique, on produit nécessairement moins de turbines à gaz. Et donc la question à laquelle est confrontée cette entreprise…

LEA SALAME
Donc vous justifiez d'une certaine manière la suppression des emplois ?

SIBETH NDIAYE
Non, j'explique juste…

LEA SALAME
Vous expliquez le contexte et donc vous dites, on ne peut pas faire grand-chose, mais il y a moins de commandes de turbines à gaz…

SIBETH NDIAYE
Je ne dis pas qu'on ne peut rien faire, je dis que sur le sujet du gaz, l'évolution de la société et la transition écologique explique la situation de l'entreprise. Est-ce que pour autant ça veut dire qu'on va laisser les salariés dans la panade en aucun cas, en aucun cas parce qu'il y a d'ores eu comme une promesse de GE n'avait pas été respectée un fonds d'une cinquantaine de millions d'euros qui va permettre de la revitalisation économique qui a été abondé par GE et évidemment on sera très exigeant sur les conditions dans lesquelles s'il y avait des disparitions d'emplois, dans les conditions dans lesquelles les salariés seraient accompagnés. Et en fait faire de la politique industrielle française de manière intelligente, c'est ça, c'est regarder ce qui ait une situation économique, c'est voir ce qu'on peut y faire et quand on ne peut pas faire évoluer ou changer cette situation économique, c'est accompagner les gens pour leur rebond. Moi ce qui m'importe ce sont les gens.

LEA SALAME
Il y a 4 ans un homme qui s'appelle Emmanuel MACRON et qui était ministre de l'Economie, qui gérait ce dossier-là et qui a donc présidé à la vente de la branche énergie d'ALSTOM à GENERAL ELECTRIC, c'était il y a 4 ans, il avait dit, justement c'est une politique, c'est une vente qui est sérieuse et qui va dans le bon sens et il avait obtenu de l'Américain qu'il crée 1000 emplois en France d'ici 3 ans, finalement il n'a pas créer 1000 emplois, il n'a pas respecté sa promesse et aujourd'hui on apprend qu'il les détruit. Est-ce que c'était une erreur de vendre la branche énergie d'ALSTOM aux Américains ?

SIBETH NDIAYE
A l'époque il y avait une cohérence d'ensemble, GENERAL ELECTRIC est installé en France, c'est un employeur important en France puisque ce sont 16000 emplois, GENERAL ELECTRIC, c'est un milliard d'investissements dans ces activités françaises, dans les 3 dernières années, donc on voit bien que c'est un acteur économique important pour la France. A l'époque il y avait, on considérait que le marché mondial, donc on parle de 2015, on considérait que le marché mondial du gaz était encore suffisamment porteur pour qu'il y ait un intérêt à réaliser cette vente, c'est le premier élément. Et puis on se rappelle aussi que le site d'ALSTOM dont on parle, était en bien mauvaise posture à l'époque et notre préoccupation était justement de faire en sorte qu'il y ait un projet industriel et du travail pour les salariés qui était sur place.

LEA SALAME
Donc ce n'était une erreur de vendre.

SIBETH NDIAYE
Je ne crois pas que c'était une erreur, il faut voir que GE a des activités dans le gaz en France depuis une vingtaine d'années, donc le fait qu'on ait vendu ou pas, ou rattaché les activités ALSTOM gaz ne change rien à l'activité gaz générale, je crois que c'était une bonne chose à l'époque simplement la conjoncture mondiale a évolué.

NICOLAS DEMORAND
Autre sujet industriel, le projet de mariage entre RENAULT et FIAT-CHRYSLER, il semble acquis ce mariage. Comment garantir Sibeth NDIAYE que dans 10 ans FIAT-RENAULT ne sera pas une entreprise gigantesque évidemment mais sous contrôle italien ?

SIBETH NDIAYE
Alors pour ça, il faut voir plusieurs choses, la première c'est la raison pour laquelle ces deux entreprises, ces deux groupes d'importance mondiale font ce choix de se rapprocher. Il y a dans les années à venir et je reviens sur la transition écologique, il y a un certain nombre de mutations que l'industrie automobile va devoir faire, la batterie électrique pour le véhicule électrique, le véhicule autonome, le véhicule connecté. Ça, ça ne représente pas des centaines de millions, pas des milliards, des dizaines de milliards d'investissements pour être non seulement à la pointe de la technologie mais être capable de déployer à l'échelle mondiale les véhicules correspondant. Aujourd'hui on sait que RENAULT tout seul ou que FIAT-CHRYSLER tout seul, ne peuvent pas mettre en place ces investissements. Donc il y a une logique industrielle à ce que les deux entreprises se rapprochent.

LEA SALAME
Oui mais comment on fait pour garantir ?

SIBETH NDIAYE
Il y a évidemment des exigences que le gouvernement français, qui est un actionnaire de long terme pérenne au sein de RENAULT…

NICOLAS DEMORAND
Est-ce qu'il va être dilué l'Etat français ?

SIBETH NDIAYE
De fait, c'est mathématique, dès lors que vous faites une alliance entre égaux 50/50, quand nous on détient je crois à peu près…

NICOLAS DEMORAND
7,5.

SIBETH NDIAYE
On détient à peu près le double, on doit détenir un peu moins de 20 % donc si vous faites une alliance 50/50 forcément mécaniquement votre part diminue. Mais il ne faut pas oublier que d'ores et déjà aujourd'hui le groupe RENAULT a des actionnaires y compris des actionnaires français de long terme qui sont des actionnaires qui sont solides et ça c'est important pour l'avenir.

NICOLAS DEMORAND
Donc RENAULT pourrait passer sous pavillon italien à terme.

SIBETH NDIAYE
Donc on a à faire… mais de la même manière, vous savez les Italiens, ils peuvent se dire mais on n'a pas du tout envie de voir RENAULT arriver dans l'affaire parce que derrière RENAULT, il y a NISSAN, donc il y a un constructeur japonais, donc on n'a pas envie de passer à l'inverse et je pense que la discussion dans la matinale équivalente à celle de France Inter peut-être pour un autre ministre ou un autre porte-parole, elle peut être inversée. C'est normal qu'il y ait des craintes parce que ce changement-là, cette mutation-là, cette réunion possible qui n'est pas encore faite, on est au stade des fiançailles pour reprendre les termes du ministre de l'Economie, on va évidemment y aller avec des exigences.

LEA SALAME
Vous êtes allé sur ALSTOM, il y a 4 ans avec des exigences, les Américains ne les ont pas respectées, aujourd'hui vous allez avec les Italiens avec des exigences, peut-être que dans 5 ans ils ne vont pas les respecter.

SIBETH NDIAYE
Il ne s'agit pas de dire est-ce que… pourquoi est-ce que les exigences n'ont pas été respectées sur GE, tout simplement parce qu'il n'y avait pas le marché qui permettait de faire en sorte qu'il y ait des embauches. On ne va pas forcer une entreprise à embaucher des gens dès lors qu'elle n'a pas de débouché industriel.

LEA SALAME
Parce qu'elle avait pris un engagement.

SIBETH NDIAYE
Elle avait pris un engagement sur la base d'un business plan. D'ailleurs on le voit avec une autre entreprise qui est Whirlpool et sa reprise, on voit qu'on peut avoir à un moment donné des projets industriels qui n'arrivent pas à se concrétiser, donc à ce moment-là on ne va pas dire aux entreprises, vous embauchez quand même les gens parce que ça met en danger le reste des personnes qui sont dans l'entreprise.

LEA SALAME
160 emplois en jeu pour Whirlpool, que va faire le gouvernement, le gouvernement va faire quelque chose ou ne peut rien faire ?

SIBETH NDIAYE
Mais bien sûr on va faire les choses, il y a un accompagnement d'ores et déjà dans le cadre… aujourd'hui l'entreprise est placée sous protection judiciaire du tribunal de commerce et donc il convient et je veux le rappeler sur Whirlpool, l'Etat a versé 2,5 millions d'euros au titre de la revitalisation du site, l'entreprise Whirlpool qui a quitté le site a versé de mémoire un peu moins d'une dizaine de millions d'euros. Et donc on ne peut pas dire que le site a été abandonné, aujourd'hui force est de constater que le business plan, les produits innovants que l'entrepreneur, repreneur souhaitait mettre en place ne peuvent pas se mettre en place, il n'y a pas de débouchés commerciaux, les débouchés industriels n'ont pas été au rendez-vous. Et donc on accompagne les salariés qui ont été énormément formé ces derniers mois et ces dernières années pour pouvoir justement réaliser cette transition et cette reprise pour qu'ils puissent retrouver un emploi soit sur le site lui-même soit ailleurs dans le bassin d'emploi…

NICOLAS DEMORAND
Un petit mot avant de donner la parole aux auditeurs d'Inter, est-ce que vous jouez la montre sur le référendum ADP, quand on va sur le site dédié du ministère de l'Intérieur, j'y suis allé ce matin on lit actuellement aucune proposition n'est ouverte à la collecte de soutien, donc il n'y a pas de référendum en cours, quand est-ce que le processus va être enclenché ?

SIBETH NDIAYE
Alors là vous me posez une colle parce que je ne sais pas juridiquement où on en est de la procédure, ce que je sais c'est que le ministère de l'Intérieur sous l'autorité de Christophe CASTANER a tout fait pour que d'un point de vue technique les choses soient prêtes dès lors que le Conseil constitutionnel et je rappelle que le ministère de l'Intérieur agit sur mandat du Conseil constitutionnel qui est donc l'autorité organisatrice de ce référendum. Donc là vous me posez une colle, je ne peux pas vous dire quand est-ce que ça va démarrer mais évidemment le processus va démarrer et il n'appartient pas au gouvernement de déterminer à quelle date, mais je crois bien que c'est au Conseil constitutionnel.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 7 juin 2019