Texte intégral
CECILE DE MENIBUS
C'est « Le petit déjeuner politique » de Sibeth NDIAYE, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre et porte-parole du gouvernement.
PATRICK ROGER
Bonjour Sibeth NDIAYE.
SIBETH NDIAYE
Bonjour.
PATRICK ROGER
Alors, avant de voir le conflit autour des notes du bac, on a appris ce matin qu'une nouvelle femme vient de tomber sous les coups de son conjoint, elle était enceinte, c'était déjà signalé à la police. Est-ce qu'il ne faut pas accélérer, là, cette fois, la mise en place des mesures contre les maris violents ? On pense par exemple aux bracelets électroniques qui ont été évoqués.
SIBETH NDIAYE
Alors oui, effectivement, c'est à chaque fois un drame, et chaque décès est un décès de trop. Il y a à la fois le besoin de parler beaucoup de ces féminicides, et je suis très heureuse, même si c'est évidemment à chaque fois qu'il y a des drames, je suis moi très heureuse que l'on ait ce décompte qui nous rappelle à chaque fois qu'une femme tombe sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint, que c'est un sujet qui reste criant dans la société.
PATRICK ROGER
Oui, mais enfin c'est terrible ! C'est terrible parce que ce sont des drames, Sibeth NDIAYE.
SIBETH NDIAYE
Ce sont bien sûr des drames, et en fait si vous n'en parlez pas, vous tuez une deuxième fois les victimes. Parce qu'en parler, c'est ce qui va permettre de faire en sorte que la société condamne, n'accepte plus. Pendant très longtemps on a parlé de drame passionnel, pendant très longtemps on a nié la réalité du fait qu'il y avait quelque chose de particulier quand un homme tuait ou battait sa femme ou son ex-femme. Ça c'est la première chose. Après, donc c'est important d'en parler, parce que c'est un changement global de mentalité dans la société. Ensuite, la deuxième chose, on a fait des choses, on a augmenté les crédits aux associations, on a mis en place une plate-forme de déclarations, pour faire en sorte que les victimes potentielles ne soient pas confrontées à ce que ça peut représenter de difficultés d'être en face de quelqu'un et de devoir décrire, par le menu, les sévices qu'on a pu subir. Et puis Nicole BELLOUBET a fait cette annonce en lien avec Marlène SCHIAPPA, sur le bracelet électronique du conjoint violent, qui est une mesure d'éloignement en quelque sorte. En fait, on a dans notre loi la possibilité de l'utiliser depuis fort longtemps, malheureusement c'est dans un cadre qui est trop restrictif, là il faudrait qu'on puisse l'ouvrir, notamment quand on a des ordonnances de protection qui ont été prononcées, et donc la ministre va faire en sorte que cette loi soit modifiée, de manière à ce que l'on puisse élargir le cadre qui utilise ça. Après il y a aussi des professionnels qui vous disent que ça maintient un lien entre la victime et l'agresseur, et que psychologiquement ça peut être difficile. Donc à chaque fois, s'il y avait une baguette magique pour arrêter les féminicides, quelqu'un l'aurait bien utilisée.
PATRICK ROGER
Sauf que c'est terrible, parce que c'est grosso modo tous les 3 jours, une femme tous les 3 jours qui tombe sous les coups de son mari. Donc on va continuer en fait d'égrainer, malheureusement, ces chiffres à chaque fois ?
SIBETH NDIAYE
Je pense qu'on est dans une situation où d'abord il y a une plus grande dénonciation des faits, de manière plus précoce. Ça c'est important parce que sans doute que ces dénonciations qui ont lieu maintenant, ça évite les féministes de dans 2 ans, de dans 3 ans, et donc c'est pour ça que j'insiste sur cette prise de conscience, en quelque sorte, globale dans la société, parce qu'elle permet d'être attentif, d'être dans une forme de vigilance collective qui fait que moi aujourd'hui, je vous le dis, quand j'entends une dispute un peu fort chez mes voisins, je suis en alerte.
PATRICK ROGER
Alors voilà, c'est ça, il doit y avoir aussi une alerte de la part de la famille, du voisinage, souvent on n'a pas envie de se mêler…
SIBETH NDIAYE
Des affaires des autres.
PATRICK ROGER
Non mais des affaires des autres, quoi, et donc là il y a un appel, que vous lancez en quelque sorte.
SIBETH NDIAYE
Oui, je vous le dis, il y a quelques années, ça m'est arrivé d'entendre une dispute très forte, d'entendre des choses qui tombent dans un appartement, et juste d'aller sonner en demandant « est-ce que tout va bien ? ».
PATRICK ROGER
Venons-en maintenant, Sibeth NDIAYE, maintenant…
SIBETH NDIAYE
Ça change beaucoup.
PATRICK ROGER
Eh bien oui, évidemment. Venons-en maintenant à ce bras-de-fer entre les profs et Jean-Michel BLANQUER autour de la rétention des notes du bac. On voit ce matin que des enseignants maintiennent leur mouvement, le ministre promet que tous les élèves auront leurs notes demain, jour des résultats. Est-ce que c'est une certitude d'ailleurs ça ?
SIBETH NDIAYE
Eh bien le ministre a mis en place un dispositif, qui fait en sorte que tous les élèves aient leurs notes demain. Pourquoi ? D'abord parce qu'on a renforcé les correcteurs, on a renforcé ceux qui peuvent potentiellement saisir des notes dans les différents logiciels, et donc on a mis tout en oeuvre pour ne pas empêcher des gamins qui bûchent depuis des mois et des mois, de pouvoir passer cet examen et d'en avoir les résultats. Et puis il a pris une décision qui je crois est très courageuse, qui est de permettre, d'ouvrir la possibilité qu'on prenne en compte les notes de toute l'année, quand on a une note manquante dans une matière. C'est une décision, honnêtement, ce n'est pas facile à prendre, parce que ça pose plein de questions…
PATRICK ROGER
Ah ben bien sûr !
SIBETH NDIAYE
Ça pose évidemment plein de questions…
PATRICK ROGER
On peut s'être planté pendant toute l'année et puis avoir finalement réussi à l'épreuve finale.
SIBETH NDIAYE
Bien sûr. Evidemment les jurys auront de la souplesse pour apprécier ces faits-là, dès lors qu'on aura la note de la copie, mais en même temps on ne peut pas regarder des mômes qui ont 17 ans, 18 ans, 19 ans, dans les yeux, leur dire : vous avez travaillé toute l'année, ce n'était pas facile. Le bac, moi je me rappelle le l'angoisse terrible que c'était, j'étais dans un état catastrophique au moment de le passer et après pour avoir les résultats. On ne peut pas les regarder et leur dire : des gens qui ont décidé de faire grève – je respecte le droit de grève, j'ai aucun sujet là-dessus – mais la grève on peut la faire au mois de mars. La grève on peut la faire à d'autres moments, et il y a quelque chose qui a une forme d'injustice vis-à-vis de ceux qui ont bûché pour passer cet examen.
PATRICK ROGER
Sibeth NDIAYE, il faut sanctionner alors les professeurs grévistes ? Qu'on retire les jours de grève leurs salaires ?
SIBETH NDIAYE
Alors, attendez, ça c'est un truc syndical de base : quand on fait la grève, on a un engagement, et cet engagement il se traduit par le fait qu'on ne travaille pas, et donc par des retenues sur salaire. Après, je pense qu'il faut toujours essayer d'être dans le dialogue, je crois que le ministre de l'Education nationale, sur les sujets qui posent problème aujourd'hui, notamment la réforme du bac, il a mené des concertations depuis plus d'un an, et on a une réforme qui s'applique de manière échelonnée. Donc on peut voir, année après année, entre d'ici à 2021, 2022, ce qui ne va pas, on peut le corriger et on peut l'ajuster.
PATRICK ROGER
Ce n'est pas de l'entêtement, là pour l'instant.
SIBETH NDIAYE
Non, il n'y a pas d'entêtement. On peut avoir un désaccord…
PATRICK ROGER
Mais il faut être ferme sur les réformes, c'est ce que vous dites.
SIBETH NDIAYE
On peut avoir un désaccord, considérer que des profs considèrent qu'ils ne sont pas d'accord avec cette réforme. A un moment donné ils n'ont pas été élus par les citoyens au suffrage universel et donc à un moment donné il faut aussi qu'on puisse avancer, évidemment dans le dialogue…
PATRICK ROGER
Ça rejoint tous les mouvements de contestation du moment, et face à ça le gouvernement annonce toujours sa fermeté.
SIBETH NDIAYE
Je crois qu'il ne s'agit pas d'être dans une position qui consisterait à dire : eux contre nous. Moi je ne crois pas du tout à ça, je crois très profondément à une société du dialogue, et une société du dialogue et de la démocratie sociale. Le dialogue et la démocratie sociale ça ne peut pas non plus vouloir dire l'immobilisme, et donc il faut qu'on ait des instances, et ces instances ce sont les organisations syndicales représentatives dans lesquelles il y a des discussions. On pose une réforme…
PATRICK ROGER
Ah ben c'est bien ça de le reconnaître, parce qu'à un moment donné on avait cru comprendre que le président Emmanuel MACRON se passait des corps intermédiaires.
SIBETH NDIAYE
Non, là je ne suis pas du tout d'accord avec vous. Il ne s'agit pas de se passer des corps intermédiaires, il s'agit que chacun agisse à la place qui est la sienne, et donc la pas et syndicats, c'est une place dans laquelle il y a de la revendication, mais aussi une place dans laquelle on veut transformer la société. Moi j'ai toujours été, quand j'ai fait du syndicalisme étudiant, j'ai toujours considéré que le syndicalisme qui ne s'attachait qu'à la lutte n'était pas un bon syndicalisme. Et donc il faut un syndicalisme de transformation sociale, en tout cas c'est …
PATRICK ROGER
Constructif, quoi, aussi.
SIBETH NDIAYE
Ce n'est pas une question d'être constructif pour dire : je suis prêt à faire des concessions avec le gouvernement. Moi je ne me place pas du tout dans cette optique-là, je dis simplement que quand on défend les intérêts matériels et moraux des travailleurs ou de ceux qu'on souhaite représenter, eh bien en fait le gouvernement fait des concessions, de la même manière que les organisations syndicales font des concessions, et on peut s'apporter mutuellement.
PATRICK ROGER
Sibeth NDIAYE, plusieurs questions encore ce matin aussi dans l'actualité. Alors, certains Français vont-ils perdre des APL, les allocations au logement, en 2020 ? La question se pose de nouveau avec la réforme qui est toujours en cours. Qu'en est-il exactement ?
SIBETH NDIAYE
Alors je vais dire une première chose pour que les fake news arrêtent de se balader. On ne modifie pas le barème des APL. Donc le montant qui permet de bénéficier d'une APL, n'est en aucun cas modifié. Ça c'est la première chose. La deuxième chose c'est qu'on fait en sorte qu'au moment… L'APL ce n'est pas un système de cotisation, aujourd'hui pour pouvoir bénéficier d'une APL, on regarde vos revenus d'il y a 2 ans. Ce qu'on dit simplement, c'est que désormais on regardera vos revenus actuels, pour déterminer le montant d'une prestation sociale, qui n'est pas le fruit d'une cotisation, d'une forme de salaire différé, et donc en fait on fait quelque chose qui je crois sera plus juste, parce que quand vous avez un changement de situation immédiat, vous pouvez immédiatement bénéficier d'une hausse des APL si vos revenus ont diminué.
PATRICK ROGER
Bon, donc voilà, la réforme est en cours. Et pour quand, pour janvier ?
SIBETH NDIAYE
Pour le début, à mon avis pour le versement…
PATRICK ROGER
Janvier 2020 ?
SIBETH NDIAYE
Pour le versement des APL, janvier ou février 2020. On a des difficultés sur les systèmes informatiques, et donc on prend le temps pour être certain qu'au moment de la bascule il n'y ait pas de difficultés pour les allocataires.
PATRICK ROGER
Autre dossier un peu chaud en ce moment, au niveau national mais aussi européen, les traités de libre-échange, feu vert donné hier du gouvernement pour le CETA, l'accord avec le Canada. Est-ce que la voie est ouverte du coup pour le Mercosur avec les pays d'Amérique latine ? Parce qu'au sein de la majorité ça grince notamment Jean-Baptiste MOREAU, qui est un conseiller agriculture, qui n'est pas forcément d'accord avec le Mercosur et la position d'Emmanuel MACRON, qui lui veut des garanties.
SIBETH NDIAYE
Il y avait dès le départ, si je prends l'exemple du CETA que nous allons ratifier, beaucoup de réticences, beaucoup de peurs. En partie, ces réticences et ces peurs étaient justifiées, et donc ce qu'on a souhaité faire, c'est avoir une méthode, une méthode qu'on va appliquer systématiquement. Notre méthode elle est basée sur quatre piliers. On dit d'abord : il faut systématiquement qu'il y ait des normes sanitaires et environnementales. La deuxième chose, on dit qu'il faut qu'il y ait de la transparence. Cette transparence elle est acquise quand vous avez des comités d'experts indépendants, qui viennent regarder le traité qu'on vous propose, qui nous disent : ça, ça, va, ça, ça va pas, compte tenu de ce qu'est notre économie. Qui nous disent : il y a des fragilités dans telle ou telle filière et donc on peut aller plus loin. Il y a aussi un enjeu de vérification, parce qu'un accord commercial, les deux parties s'engagent à faire des choses, en l'occurrence si je prends le cas du Mercosur, le Brésil, qui n'était pas très enclin à le faire au départ, s'est engagé à rester dans l'accord climatique de Paris. Cet accord implique de la reforestation pour 12 millions d'hectares dans la forêt amazonienne. C'est donc quelque chose dont il faudra vérifier la mise en place effective, la mise en oeuvre effective. Et donc il faut qu'on soit dans une situation où on ne se dit pas derechef, un accord commercial c'est mauvais par essence, parce que dans ce cas-là en fait on parle, on ne commerce plus avec personne, en France on ne s'habille plus, parce que les habits sont importés, et surtout nos filières agricoles, je veux dire ; ça veut dire que nos céréaliers, comme ils produisent en excès par rapport à ce dont on a besoin, il faut qu'ils exportent !
PATRICK ROGER
Ils ont raison d'avoir des craintes en fait, actuellement, et ce que vous leur dites c'est qu'on va vérifier qu'il y ait bien toutes les garanties, sinon on ne signera pas alors.
SIBETH NDIAYE
Exactement. Et donc cette vérification et cette ratification, ça va prendre du temps, donc il faut savoir raison garder, un accord commercial n'est pas mauvais par nature, il est mauvais en fonction de son contenu. On a eu des craintes avec le CETA, on les a levées, on a eu un certain nombre de garanties, et le résultat est là, notre balance commerciale avec le Canada elle s'est améliorée de 400 millions d'euros en un an.
PATRICK ROGER
Bon. Eh bien Sibeth NDIAYE, on va suivre. La proposition de loi sur la haine sur Internet, contre la haine sur Internet, est-ce qu'elle menace un peu la liberté d'expression ? Certains quand même se posent la question. Est-ce que ça ne pas aller trop loin ?
SIBETH NDIAYE
Alors pardon, mais moi quand je me fais insulter dans la rue ou quand on se fait casser la gueule dans la rue, en raison de son appartenance à une race, enfin pardon, d'une ethnie particulière, quand on a une couleur particulière, ou quand on est homosexuel, pardon, on porte plainte. Donc je ne vois pas, au nom de quoi sous prétexte que c'est sur un écran, on n'aurait pas les mêmes droits dans la vie « in real life », dans la vie réelle, que quand on est sur Internet. Donc il est normal que l'on sanctionne et que, d'abord que l'on signale et deuxièmement que l'on sanctionne systématiquement tous les faits. Et pardon, dans la rue, quand on tape quelqu'un, même quand on a une cagoule, eh bien on essaie de trouver votre identité. Eh bien c'est la même chose sur Internet. Il n'y a pas d'espace de non-droit, en fait.
PATRICK ROGER
Oui, alors, selon la LICRA, la loi rate un peu sa cible, parce qu'elle ne sanctionne pas par exemple les contenus négationnistes, la diffamation raciale, ça ne fait pas partie totalement en fait des discours de haine…
SIBETH NDIAYE
Alors ça, c'est les discussions.
PATRICK ROGER
Qui sont en cours.
SIBETH NDIAYE
La proposition de loi elle est en cours de discussion en ce moment à l'Assemblée nationale, donc on va voir les ajustements qui sont possibles ou qui sont souhaitables. Je crois que le cadre qui est posé aujourd'hui dans cette loi est un bon cadre, mais évidemment il y a une discussion parlementaire.
PATRICK ROGER
Oui, bon, mais il faut aller plus loin, c'est ce que vous dites.
SIBETH NDIAYE
Non je ne dis pas nécessairement qu'il faut aller plus loin, moi je n'ai pas la connaissance fine, pardon, juridique, des sujets, je dis simplement que comme à chaque fois qu'il y a une loi qui est en discussion au Parlement, cette loi peut faire l'objet d'amendements, sans pour autant que je me dise qu'il faille aller dans ce sens-là.
PATRICK ROGER
Oui. Sibeth NDIAYE, autre sujet toujours sensible, vous vous êtes déjà exprimée, l'affaire des femmes en burkini à Grenoble. Alors, le maire de Grenoble, de la ville, appelle Emmanuel MACRON à siffler la fin de la partie. Est-ce que le président va se prononcer ? Vous, vous avez parlé de mesures d'hygiène. Ce n'est pas que cela quand même.
SIBETH NDIAYE
Alors, je dis deux choses. Je dis : il y a une première chose qui est que l'on a des règles. C'est déjà bien si on arrive à les faire respecter. Ces règles nous disent quoi ? Elles nous disent que dans une piscine on a des tenues qui sont adaptées, que ces normes sur nos tenues elles sont définies en fonction de questions d'hygiène et de questions de sécurité. Ça s'est établi, et donc vous monsieur, par exemple, vous ne pouvez pas aller avec un boxer dans une piscine, vous devez avoir un slip de bain. Ça c'est la vie c'est comme ça.
PATRICK ROGER
Eh bien oui. Je respecte.
SIBETH NDIAYE
C'est pour des questions de normes. Et ce n'est pas parce que vous êtes catholique ou juif ou musulman, qu'on vous impose cela.
PATRICK ROGER
Bien sûr.
SIBETH NDIAYE
Et donc, ça c'est la première chose à bien comprendre. Après, il y a un deuxième débat, qui est un débat politique. Ce débat politique il est mené…
PATRICK ROGER
Républicain, disent certains.
SIBETH NDIAYE
Non. Ce débat politique il est mené par une petite minorité d'activistes, communautaristes, qui essaient d'imposer une vision de la société dans laquelle tout est religieux. Ça je m'y refuse profondément et je refuse, je refuse…
PATRICK ROGER
Donc vous condamnez, alors, ça.
SIBETH NDIAYE
Je condamne évidemment…
PATRICK ROGER
Ces femmes en burkini à la piscine de Grenoble.
SIBETH NDIAYE
Je condamne évidemment les associations à caractère communautaire qui essaient, dans notre société, qui est une société laïque, d'imposer, d'imposer un débat qui n'a pas lieu d'être. Il n'y a pas des dizaines de milliers de nos compatriotes, de culture musulmane ou de religion musulmane, qui réclament de se baigner en burkini dans des piscines, ça n'est pas vrai.
PATRICK ROGER
Bon. Vous les condamnez, c'est très clair. Un mot sur la bataille pour la mairie de Paris. Mounir MAHJOUBI le dit ce matin dans Le Parisien, il apporte son soutien à Cédric VILLANI. Vous, vous êtes affichée en photo toujours avec Benjamin GRIVEAUX. Vous êtes toujours derrière Benjamin GRIVEAUX ?
SIBETH NDIAYE
Oui, bien sûr, je crois que Benjamin c'est quelqu'un qui a, à la fois une expérience d'élu de terrain, puisqu'il a été en Saône-et-Loire, région dont il est originaire, c'est quelqu'un qui a envie de faire beaucoup pour Paris et donc pour moi c'est le meilleur candidat. Après, la République En Marche à une commission nationale d'investiture, tous les candidats qui veulent compétir…
PATRICK ROGER
Il est temps que ça se termine, quoi, cette campagne, non ?
SIBETH NDIAYE
Eh bien écoutez, non, je ne crois pas, parce que je pense qu'au contraire il faut savoir prendre le temps qu'il faut pour pouvoir trouver le meilleur candidat, c'est-ce qu'on est en train de faire.
PATRICK ROGER
Et le meilleur c'est Benjamin GRIVEAUX, pour vous.
SIBETH NDIAYE
En tout cas, de mon point de vue…
PATRICK ROGER
Cédric VILLANI, c'est quand même un bon candidat ou pas, si jamais il devait avoir l'investiture ?
SIBETH NDIAYE
Cédric VILLANI, c'est quelqu'un que je trouve extrêmement brillant, c'est un député qui a su s'investir sur des sujets que je trouve vraiment intéressants, en particulier sur la reconnaissance des harkis, et donc évidemment je salue à la fois son investissement et son intelligence, après, une campagne municipale c'est aussi le sentiment que vous pouvez avoir, moi je suis Parisienne, c'est le sentiment que vous pouvez avoir de l'adéquation entre une ville et un homme ou une femme, je me sens plutôt pour Benjamin GRIVEAUX.
PATRICK ROGER
Il y a quasiment 3 ans jour pour jour, Sibeth NDIAYE, c'était le premier vrai rassemblement d'Emmanuel MACRON à la Mutualité, il n'était pas encore officiellement candidat, vous étiez à ses côtés, vous pensiez qu'un jour vous seriez devenue ministre justement ?
SIBETH NDIAYE
Ah non pas du tout, et d'ailleurs ce n'est même pas le sujet d'Emmanuel MACRON, c'est juste le sujet de ma vie à moi…
PATRICK ROGER
Oui, mais enfin liée à Emmanuel MACRON.
SIBETH NDIAYE
Alors, évidemment, non non mais quand je vous dis « je n'aurais jamais imaginé devenir un jour ministre », c'est parce que je n'aurais jamais imaginé qu'on me ferait confiance à ce point pour devenir ministre et que quelqu'un estimerait un jour que j'en ai les capacités. Je suis très heureuse qu'Edouard PHILIPPE y ait pensé en tout cas.
PATRICK ROGER
Le mot de la fin avec Cécile de MENIBUS.
CECILE DE MENIBUS
Eh bien vous me faites une belle transition Patrick ROGER, puisque vous avez dit que vous étiez une femme plutôt de l'ombre, à la base, là vous passez à la lumière, et de plein fouet. On commence à voir des photos de votre conjoint dans la Presse. Est-ce qu'il y a des choses ou des traits de votre caractère, ou des choses que vous avez dû gommer, au travers de cette fonction ?
SIBETH NDIAYE
Non…
CECILE DE MENIBUS
Parce qu'on vous savait un peu « grande gueule » et assez cash. Est-ce que vous vous êtes un peu assagie ?
SIBETH NDIAYE
Non, je ne crois pas.
CECILE DE MENIBUS
Non ?
SIBETH NDIAYE
Ce à quoi je tiens, parce que je crois très fort dans les symboles républicains, je pense que quand on est ministre de la République, on doit avoir une attitude qui fait honneur à la République. Et donc évidemment vous avez cette attitude qui est, j'allais dire, qui doit être conforme à ce que sont…
CECILE DE MENIBUS
Plus posée peut-être.
SIBETH NDIAYE
Les valeurs de la République ? Ce n'est pas une question d'être plus posée, c'est simplement que dans la manière dont vous répondez aux gens quand ils vous interpellent dans la rue, vous portez en vous une part de l'autorité de l'Etat, et donc vous devez avoir en permanence à l'esprit que vous incarnez l'Etat aux yeux des Français. Et donc ça c'est peut-être la seule chose que j'ai changée, après mon caractère, ma spontanéité, ma vivacité, et parfois mes coups de colère, je les garde.
PATRICK ROGER
Ah, les coups de colère aussi.
CECILE DE MENIBUS
Vous vous mettez la pression ? Vous vous mettez la pression, tous les matins ?
SIBETH NDIAYE
Enormément.
CECILE DE MENIBUS
Ah oui ?
SIBETH NDIAYE
Enormément.
CECILE DE MENIBUS
Vous êtes votre premier juge.
SIBETH NDIAYE
Je pense qu'avant de venir ici…
PATRICK ROGER
Mais là ça va, vous êtes décontractée, là.
SIBETH NDIAYE
Sans doute parce que ça ne se voit pas.
CECILE DE MENIBUS
Elle joue bien la comédie.
SIBETH NDIAYE
Sans doute parce que je joue bien la comédie et que mon coeur qui est aujourd'hui en ce moment à 170 pulsations/minute parce que je parle à la radio, ça ne se voit pas à l'extérieur…
CECILE DE MENIBUS
Non, pas du tout.
SIBETH NDIAYE
Mais ce matin, depuis 05h00 je me suis réveillée et j'ai feuilleté des pages et des pages sur Sud-Radio, parce que j'étais très stressée, comme à chaque fois.
CECILE DE MENIBUS
Merci beaucoup.
PATRICK ROGER
Merci Sibeth NDIAYE, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre et porte-parole du gouvernement, d'avoir été l'invitée ce matin de Sud Radio.
SIBETH NDIAYE
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 juillet 2019