Texte intégral
CAROLINE ROUX
Bonjour Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
Bonjour Caroline ROUX.
CAROLINE ROUX
Nous allons parler des baisses d'impôts, mais d'abord un mot sur l'INSEE qui vient de communiquer les résultats de la croissance française pour le premier trimestre, plus 0,3 %, est-ce que la France s'en sort bien ?
BRUNO LE MAIRE
Elle s'en sort bien par rapport à ses partenaires européens. Elle s'en sort bien par rapport à 2018, on faisait 0,2 au 1er trimestre 2018, on fait 0,3 au 1er trimestre 2019. Il y a des éléments qui sont positifs, l'investissement, c'est un élément très important, la demande, la consommation des ménages parce que nous avons rendu du pouvoir d'achat aux ménages français. Et puis il y a un facteur qui est préoccupant, c'est les exportations, c'est la preuve qu'il faut que nous continuons à gagner en compétitivité, à poursuivre la transformation économique du pays et c'est surtout la preuve que la première menace qui pèse sur la croissance mondiale, ce sont les tensions commerciales et le ralentissement du commerce mondial.
CAROLINE ROUX
Est-ce que ce chiffre-là vous incite à modifier la hausse de la projection de la croissance… à la hausse pardon, les projections la croissance pour cette année 2019 ?
BRUNO LE MAIRE.
Non, il n'y a aucune modification de projection, en revanche ça m'incite encore plus à accélérer la transformation économique du pays pour que nous soyons plus compétitifs et qu'il y ait plus de prospérité pour les Français.
CAROLINE ROUX
Alors vous allez d'abord commencer par les baisses d'impôts, c'est ce qu'a annoncé le président de la République, le Premier ministre à l'issue du séminaire hier a annoncé des arbitrages sur les impôts au mois de juin, pourtant vous avait déjà évoqué 5 milliards de baisse d'impôts pour 15 millions de Français, selon Gérald DARMANIN, ce serait une baisse de 10 %, est-ce que ça, c'est arbitré ?
BRUNO LE MAIRE
Pour qu'il y ait des arbitrages, il faut effectivement qu'il y ait des propositions. Donc nous avons déjà proposé avec Gérald DARMANIN que l'intégralité de la baisse de 5 milliards d'euros soit dès le 1er janvier 2020 pour tous les contribuables qui seront concernés. Je proposerai également au Premier ministre que cette baisse de 5 milliards se concentre sur la première tranche d'impôt sur le revenu, la tranche à 14 % avec à la fois une baisse de ce taux de 14 % et puis une simplification de certaines modalités puisque vous avez certains effets de seuil dans cette tranche, qui fait que vous pouvez gagner 100 euros supplémentaires et devoir en payer 40 au Trésor public, c'est tout à fait excessif. L'objectif c'est quoi ? C'est que les 12 millions de personnes qui sont dans cette tranche à 14 %, 12 millions de foyers fiscaux puissent avoir une baisse moyenne d'impôt sur le revenu de l'ordre de 350 euros, avec derrière un objectif politique que le travail continue à payer davantage, c'est une réponse très claire à tous les gilets jaunes que nous avons vus qui disent il faut que nous puissions vivre dignement de notre travail.
CAROLINE ROUX
La première tranche d'impôt et non pas celle à 30 %, ça veut dire que vous ciblez les classes moyennes inférieures, vous considérez que ce sont eux qui ont le plus souffert ?
BRUNO LE MAIRE
Enfin j'écoute tout simplement, comme le fait le président de la République, comme le fait le Premier ministre, les Français et je vois dans ma circonscription ce que c'est que de vivre avec 1800, 2000 euros par mois quand on habite dans l'Eure, qu'on doit prendre son véhicule, que le prix de l'essence a augmenté, c'est pour ces personnes-là que c'est le plus difficile. C'est pour ces personnes-là que payer l'impôt sur le revenu est le plus compliqué. Donc je souhaite que nous concentrions de cette baisse sur la première tranche à 14 % en baissant significativement le taux, avec un gain moyen, c'est ce que je proposerai au Premier ministre…
CAROLINE ROUX
Significativement c'est combien ?
BRUNO LE MAIRE
… de l'ordre de 350 euros. Ça nous verrons, nous allons travailler dessus avec Gérald DARMANIN, nous ferons les propositions. Ca ne veut pas dire que la tranche à 30 % ne sera pas concernée, elle doit également être concernée par cette baisse d'impôts proposée…
CAROLINE ROUX
Dans une moindre mesure ?
BRUNO LE MAIRE
Dans une mesure moindre parce que je pense que la situation est moins difficile, mais il faut malgré tout qu'ils puissent également bénéficier de cette baisse d'impôts pour un gain moyen de l'ordre de 180 euros par foyer fiscal. Vous voyez 350 euros de gain moyen pour la première tranche, 180 euros de gain moyen pour la deuxième tranche, ce sont les objectifs que je proposerai sur lesquels nous voulons travailler. Mais derrière ce n'est pas uniquement une question comptable, c'est une vraie question politique, le travail doit continuer à payer dans notre pays et c'est en cohérence par rapport à tout ce que nous avons déjà décidé, la suppression des cotisations assurance maladie- assurance chômage, l'augmentation de la prime d'activité, au bout du compte ça permet à chaque Français de se dire mais dans le fond mon travail va enfin me permettre de vivre dignement.
CAROLINE ROUX
Vous parlez de politique, vous avez déclaré à plusieurs reprises que les baisses d'impôts, parce que c'était vos convictions, ce sont vos conviction, seraient financées par des économies sur la dépense publique. Est-ce que ce sera le cas et par quelles économies ?
BRUNO LE MAIRE
Ca doit être le cas, là aussi c'est une vraie question de cohérence politique, que le travail paye, élément totalement structurant de notre politique économique, mais également financer les baisses d'impôts par de la baisse de la dépense publique, sinon qu'est-ce qu'on fait ? On crée de la dette et dans le fond c'est nos enfants qui vont payer à notre place, ce ne serait pas responsable.
CAROLINE ROUX
Comment ?
BRUNO LE MAIRE
D'abord en regardant ce qui peut être fait comme économies sur les opérateurs publics et je commencerai par là parce que j'estime que sur tous les opérateurs publics, il y a des économies qui peuvent être faites. Regardez ce que nous avons fait avec les chambres de commerce et d'industrie et je salue au passage la responsabilité de ces chambres de commerce. Nous allons sur 5 années économiser un demi milliard d'euros sur les chambres de commerce et d'industrie en leur permettant de se réinventer, en modifiant le statut des personnels et en leur permettant de se financer…
CAROLINE ROUX
Donc les opérateurs publics et…
BRUNO LE MAIRE
Vous voyez qu'on peut faire sur un seul opérateur public…
CAROLINE ROUX
Non, mais parce qu'un quart de la dépense publique, c'est la masse salariale de la fonction publique, vous le savez.
BRUNO LE MAIRE
… un demi-milliard d'euros d'économies.
CAROLINE ROUX
Vous le savez mieux que personne. Comment baisser la dépense publique quand on renonce par exemple à la suppression des 120.000 postes de fonctionnaires et je le rappelle le quart de la dépense publique, c'est la masse salariale de la fonction publique, donc…
BRUNO LE MAIRE
Je précise que le président de la République a dit que nous verrions si c'est possible ou pas, donc nous allons regarder si c'est possible ou si ce n'est pas possible, on ne va pas s'enfermer dans ce choix là. En revanche je le redis…
CAROLINE ROUX
C'est-à-dire que vous, vous n'abandonnez pas ?
BRUNO LE MAIRE
Sur les opérateurs publics, nous pouvons faire des économies et c'est ce que nous allons regarder avec Gérald DARMANIN, nous regarderons chaque opérateur public et nous regarderons s'ils peuvent être plus efficace avec une dépense publique qui soit moins importante.
CAROLINE ROUX
Les opérateurs publics, ça suffira pour financer ?
BRUNO LE MAIRE
Non, mais… j'entends beaucoup dire, il faut baisser les niches fiscales pour les entreprises, c'est une partie du financement, mais simplement une partie du financement. Nous n'allons pas financer l'intégralité des 5 milliards de baisses d'impôts sur le revenu en augmentant les prélèvements sur les entreprises, ce serait totalement incohérent.
CAROLINE ROUX
Mais certains éléments seront augmentés sur les entreprises, vous le confirmer ce matin, parce qu'on a l'impression du coup que vous allez distribuer du pouvoir d'achat aux Français en prenant un peu… en augmentant les impôts des entreprises ?
BRUNO LE MAIRE
C'est justement ce que je veux éviter, je ne veux pas qu'il y ait d'un côté 5 milliards de baisses d'impôts pour les ménages et puis de l'autre côté, 5 milliards d'augmentations des impôts pour les entreprises, ce serait totalement incohérent, ça doit être un ensemble de solutions comme le président de la République l'a dit très clairement dans sa conférence de presse.
CAROLINE ROUX
Mais ils devront faire un effort, les chefs d'entreprise, les entreprises d'une manière générale ?
BRUNO LE MAIRE
Les opérateurs publics, les niches fiscales pour les entreprises qui ne sont pas efficace, c'est-à-dire celles qui ne créent pas des emplois…
CAROLINE ROUX
Lesquelles ?
BRUNO LE MAIRE
Les niches fiscales, c'est vous, c'est moi, c'est tous les contribuables qui les paient. Donc soit ça permet de créer des emplois et dans ce cas-là, on les préservera, soit comme l'a dit le Premier ministre hier, ça permet d'aider l'innovation, la recherche et on les conservera, soit on s'aperçoit que dans le fond c'est de l'argent qui ne sert pas à créer de l'emploi et de l'activité et dans ce cas-là nous les supprimons. Et nous le ferons, je le dis, parce que j'entends parfois dire c'est déjà décidé, non, je vais recevoir les représentants patronaux, les représentants des organisations professionnelles, j'associerai les parlementaires concernés des commissions concernées à ces discussions et nous rendrons fin juin notre copie.
CAROLINE ROUX
J'ai deux questions très simples, à combien va s'élever le montant des annonces ? Des annonces faites par le président de la République à la fois en décembre et celles qu'il vient de faire ?
BRUNO LE MAIRE.
Au total on est… 17 milliards d'euros environ, 10 milliards qui ont été annoncés en décembre, 5 milliards de baisse d'impôts sur le revenu, plus ce qui va être fait notamment sur l'intéressement et sur les petites retraites.
CAROLINE ROUX
Autre question très simple, faut-il un projet de loi de finances rectificatif avant l'automne comme le réclame une partie de la droite ?
BRUNO LE MAIRE
Non, on a le projet de loi de finances, le calendrier il a été donné très clairement hier par le Premier ministre, juin les arbitrages définitifs sur l'impôt sur le revenu et sur le financement, le projet de loi de finances et la baisse des impôts dès 2020. On va faire ça avec méthode dans la concertation et avec une philosophie politique qui est très simple, le travail qui paye et des entreprises qui doivent rester compétitive.
CAROLINE ROUX
Un sujet autre que les impôts qui concerne vraiment les gens qui vous regardent ce matin, les prix des carburants, est-ce que vous réfléchissez à un plafonnement des prix pour modérer la fiscalité en cas de hausse des tarifs ? En gros quels sont les leviers dont vous disposez à Bercy pour faire en sorte que cette hausse des carburants soit plus digeste d'une certaine manière pour les Français ?
BRUNO LE MAIRE
Le premier levier, c'est d'abord que le travail paye davantage et le deuxième, c'est d'accélérer la transition énergétique parce qu'on le voit bien, nous avons dit à plusieurs reprises que rester dépendant des prix du pétrole, c'est totalement irresponsable parce que personne ne les maîtrise.
CAROLINE ROUX
Pas de plafonnement des prix ?
BRUNO LE MAIRE
Ce n'est pas aujourd'hui sur votre table de travail, en revanche que le travail paye plus, qu'on accélère la transition énergétique et qu'on permette à chacun d'être moins dépendant des prix du pétrole qui pèsent sur le portefeuille de chacun.
CAROLINE ROUX
Merci beaucoup Bruno LE MAIRE.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 mai 2019