Déclaration de M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, sur la filière céréalière, à Compiègne le 14 février 2019.

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Circonstance : Congrès des céréaliers intitulée "Les céréaliers au cœur des nouveaux enjeux", à Compiègne le 14 février 2019

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les élus,
Madame la Présidente de la FNSEA
Mesdames, Messieurs les Présidents et Directeurs
Mesdames, Messieurs, chers agriculteurs,


Je suis très heureux de pouvoir clôturer votre congrès. Ces deux derniers jours vous avez encore une fois fait la preuve de votre capacité à vous mobiliser et à anticiper l'avenir.

Votre filière est connue pour avoir su historiquement créer de la valeur ajoutée en mobilisant l'ensemble des maillons vers des choix stratégiques et en mettant en commun des moyens d'investissement sans équivalents.

Votre filière évoque un « changement de paradigme » qui correspond à une volonté de faire évoluer l'offre afin d'apporter une meilleure réponse aux attentes des clients. C'est essentiel pour faire face aux différents enjeux.

J'ai bien entendu, Président, votre souhait d'accompagnement. Je peux vous assurer que le Ministère de l'Agriculture sera présent à vos côtés pour réussir cette transition et lutter contre l'agribashing.

Je l'ai déjà dit mais j'insiste sur la nécessité de travailler en partenariat. Je ne veux pas être le ministre qui dit non ou qui empêche, je veux être le ministre qui oeuvre, avec vous, pour la réussite collective de l'agriculture française.

C'est par la coconstruction que nous arriverons à réussir ce changement de paradigme et la transition agro-écologique. Et face aux défis, c'est essentiel de travailler ensemble.

L'Etat répondra présent comme il l'a toujours fait.

[SUR LES ENJEUX DE LA FILIERE]

La transition dans laquelle vous êtes engagés doit répondre à trois défis majeurs.

Le premier défi est lié à la résilience des exploitations. Le changement climatique se fait déjà sentir. Les aléas climatiques et économiques se feront de plus en plus présents.

En 2018, vous avez été affectés par des événements climatiques extrêmes, au printemps avec d'intenses précipitations puis à l'été avec une sécheresse prononcée dans plusieurs régions. Ces épisodes ont pu avoir un impact sur les productions de grandes cultures.

Dès l'été, nous avons mis en place des mesures exceptionnelles pour venir en complément des assurances privées : dérogations à la réglementation sur les SIE, exonération de TFNB, avance PAC exceptionnelles.

Ces évènements exceptionnels doivent nous inciter à mieux protéger les exploitations. Le premier niveau c'est l'épargne de précaution. Le nouveau dispositif mis en place cette année permettra d'épargner jusqu'à 150 000 € et de les mobiliser en cas de besoin.

Le deuxième niveau c'est celui de l'assurance climatique. Le taux de pénétration est en augmentation dans les grandes cultures mais restent encore trop faible (34%).

En ce qui concerne l'assurance récolte, 650 M€ sont dédiés à cette politique pour 2015-2020. En 2019, les taux de subvention seront maintenus à 65 et 45%. Ce dispositif sera amené à être amélioré dans le cadre de la réforme de la PAC.

Le second défi est celui de la durabilité. Pour un secteur économique comme le vôtre, la durabilité relève moins de la contrainte que du choix stratégique. Les États généraux de l'alimentation ont révélé à quel point la demande sociale est forte sur ces sujets. Je tiens sur ce volet à saluer les initiatives prises par l'interprofession par exemple en matière d'investissement dans le stockage et la logistique ou de suppression des insecticides de stockage.

Votre plan stratégique que vous venez d'adopter doit aussi être saluer. L'engagement massif dans la HVE est une transformation majeure et fondamentale. Je la soutiens totalement.

Le troisième défi concerne la compétitivité de votre filière. C'est un défi qui fait écho aux deux premiers. Vous mentionnez Président les charges nouvelles de la transition écologique. C'est vrai mais il ne faut pas non plus oublier les baisses de charges du PLF 2019 avec plus de 100 millions en moins pour les exploitations.

Toujours sur le plan fiscal, la suppression de la taxe sur les farines et celle de la taxe sur les céréales représentent un allègement de l'ordre de 85 Meuro. L'Etat se substituera à la filière et compensera ce manque à gagner pour France Agrimer.

La loi de finances a permis de réviser le dispositif fiscal à l'incorporation de biocarburants : l'objectif d'incorporation dans l'essence a été augmenté à 7,9% et l'éthanol issu de résidus sucriers et amidonniers a été partiellement déplafonné.

Cette consolidation de la filière bioéconomie est importante à un moment où les débouchés vont continuer à croître en synergie avec les besoins alimentaires.

C'est aussi par la qualité que nous parviendrons à résister au développement des nouveaux pays céréaliers.

[LOI EGA ET GPI]

J'en viens à présent à la Loi EGA. Elle comprend des outils qui doivent aider à accompagner ces transitions et à renforcer votre force collective.

L'un des principaux résultats des EGA était le constat d'un déficit du poids de l'amont agricole dans les négociations commerciales au sein des filières. Des outils ont été mis en place pour redonner un pouvoir de négociation aux producteurs.

En particulier le fait pour les interprofessions de diffuser des indicateurs. Sur ce sujet, je sais qu'au sein de votre filière, ce travail n'est pas jugé prioritaire dans la mesure où le marché suit les cours mondiaux. Toutefois, ce travail prend tout son sens dans le cadre des démarches de montée en gamme et de segmentation qui créent de la valeur ajoutée qui devra être équitablement répartie.

Au-delà de la Loi, l'État s'emploie à déployer un volet agricole du Grand Plan d'investissement à hauteur de 5 milliards d'euros. Ce plan comprend un axe de transformation de l'amont agricole, mais il prévoit aussi un axe important destiné à améliorer la compétitivité de l'aval à travers la montée en gamme.

Un troisième axe vient appuyer la structuration des filières, et des projets intéressants pour vos filières ont été déposés dans le cadre de l'appel à manifestation d'intérêt. Cet outil peut être particulièrement intéressant pour les zones intermédiaires.

[SUR LA PAC]

Avant de conclure je voudrais vous parler de la PAC2020. Vous avez mentionnez, Président, le maintien d'un premier pilier fort et d'une PAC harmonisée.

Cette réforme doit donc être l'occasion de se donner les moyens de soutenir davantage la transition de notre agriculture.

Pour le moment, il ne s‘agit pas encore pour nous de définir précisément ce que sera le contenu de tel ou tel dispositif de la future PAC ; ce travail s'ouvrira en avril 2019.

Je souhaiterais rappeler les priorités de la France dans la négociation européenne.

- Il s'agit d'abord de défendre une PAC COMMUNE ET FORTE, au service d'une Europe forte.

Cela nécessite un budget à la hauteur des enjeux et des nombreux objectifs assignés à la PAC.
Cette volonté implique également de limiter au maximum les mécanismes facultatifs pour les Etats-membres.

Ces points sont loin de faire consensus entre les Etats-membres à ce stade, mais la France est déterminée à ne pas relâcher ses efforts.

- La France défend une PAC qui ACCOMPAGNE LES FILIERES DANS LEUR STRUCTURATION et DANS LA TRANSITION AGROECOLOGIQUE.

L'éco-scheme (éco-programme) que soutient la France, doit être obligatoire pour tous les Etats membres et facultatif pour les agriculteurs. Il doit permettre de rémunérer les services rendus par l'agriculture et rester suffisamment souple pour intégrer des soutiens aux agriculteurs engagés dans des démarches de certification comme l'agriculture biologique ou pourquoi pas la HVE.

- la France soutient l'idée que la PAC doit PROTEGER les agriculteurs contre les RISQUES climatiques, sanitaires et économiques, mais aussi les TERRITOIRES les plus fragiles et les plus éloignés, cette protection étant un élément central de notre solidarité nationale.

La France, face aux aléas, défend en premier lieu le maintien du filet de sécurité que constituent les soutiens directs au revenu des agriculteurs.

En parallèle, il est devenu essentiel de rendre les outils de gestion des crises plus réactifs, dans un contexte de volatilité accrue et forts de l'expérience de la dernière crise laitière en particulier.

Je voudrais m'attarder quelques instants sur cette question de la gouvernance, du nouveau modèle de mise en oeuvre qui nous est proposé par la Commission, et de la simplification qui, loin d'être un simple argument technique, est devenue un véritable impératif politique.

Nous en sommes tous conscients, la situation actuelle n'est pas optimale. Nous en sommes tous comptables aussi, chacun dans les responsabilités qui l'ont concerné dans l'élaboration de la programmation actuelle.

[CONCLUSION]

Voilà donc, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, la contribution que je souhaitais apporter.

Les défis qui ont été évoqués invitent au changement. Ils vous engagent dans une transition. A travers les négociations de la politique agricole européenne, à travers le projet de loi et le grand plan d'investissement, à travers le plan de filière, c'est dans cette transition que les pouvoirs publics comptent vous accompagner.

Je voulais par ma présence vous rappeler la détermination du Président de la République et du Gouvernement pour aller de l'avant sur ces sujets, avec la conviction que les secteurs agricole et agroalimentaire restent des atouts majeurs pour notre pays.


Je vous remercie


source http://agpb.fr, le 29 mars 2019