Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Jean-Baptiste DJEBBARI.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bonjour.
MARC FAUVELLE
Le cours du pétrole brut a bondi hier de près de 15 % sur les marchés, c'est la plus forte hausse constatée depuis trente ans. Est-ce qu'on est au bord d'un choc pétrolier ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il a bondi des suites effectivement de l'attaque de dépôts pétroliers en Arabie Saoudite, et effectivement, il a tendu encore plus la relation entre l'Iran et l'Arabie Saoudite, ce qui a fait monter le prix du pétrole à un niveau qui, certes, a bondi en une journée, mais qui reste sensiblement le niveau de mai dernier, je rappelle, 66 dollars environ le prix du baril de brut, je rappelle qu'à la même époque, l'année dernière, le prix était autour de 86 dollars, donc il faut, certes, regarder ce sujet de façon extrêmement vigilante, mais il ne faut pas non plus créer ce vent de panique, les solutions sont…
MARC FAUVELLE
On ne s'inquiète pas pour l'instant ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
On est très vigilant sur la situation géopolitique, et vous savez notamment que le président a beaucoup oeuvré, les accords de Vienne en 2015, c'était le président précédent, l'action diplomatique d'Emmanuel MACRON au cours du G7 de Biarritz, et puis, nous sommes évidemment vigilants dans l'information que nous avons à faire aux consommateurs, nous appelons les pétroliers à la modération sur l'augmentation des prix, il y a des comparateurs de prix qui permettent aux usagers de se renseigner, et vous savez que d'une manière générale, la politique environnementale que nous menons vise à sortir de cette dépendance aux énergies fossiles, et c'est bien comme ça qu'on arrivera…
MARC FAUVELLE
Vous appelez les pétroliers à la modération des prix, c'est-à-dire que vous avez un doute sur le fait qu'ils sont peut-être en train d'augmenter leurs marges ces derniers jours ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument. Je n'ai pas un doute, mais pédagogie vaut parfois de bonnes garanties, et donc, oui, nous appelons les pétroliers à cette modération-là, en sachant que d'ailleurs, ce matin, Donald TRUMP a eu des propos qui confinent un peu à la désescalade, une désescalade qui est souhaitable, et donc, nous sommes, d'une manière générale, très vigilants sur le sujet.
RENAUD DELY
Si on constate, ces jours prochains, une hausse des prix de l'essence à la pompe, est-ce que le gouvernement prendra des mesures compensatoires éventuellement pour justement compenser ces effets de hausse ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, vous avez une mesure qui a été prise l'année dernière, qui était le gel de la taxe carbone sur les prix des carburants, qui – comme vous le savez – avait été un des irritants principaux de la crise des gilets jaunes. Et je vous le dis, la meilleure réponse, la meilleure politique publique en la matière, c'est la sortie des énergies fossiles, et nous avons voté une loi, il y a deux jours, dans l'hémicycle, sur les mobilités…
RENAUD DELY
Ça, ça va prendre du temps, dans l'urgence…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ça va prendre du temps…
RENAUD DELY
Dans l'urgence, est-ce que le gouvernement peut envisager d'alléger d'autres taxes sur les carburants ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Encore une fois, je rappelle qu'on est au niveau du prix du pétrole de mai dernier, et qu'en l'état, nous ne sommes pas dans une crise telle que nous l'avons connue en 2008 avec des prix qui touchaient ou qui avoisinaient les 150 dollars. Aujourd'hui, nous sommes…
RENAUD DELY
Il n'y a pas de risque de choc pétrolier pour vous ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Nous sommes vigilants, mais si la situation géopolitique, on va dire, s'amortit un tout petit peu, il n'y aura pas de crise telle que celle que nous avons pu connaître…
MARC FAUVELLE
Jean-Baptiste DJEBBARI, vous recevez après-demain, avec votre ministre de tutelle, Elisabeth BORNE, les transporteurs routiers qui s'inquiètent, eux, d'une autre mesure, qui avait été annoncée, déjà, il y a plusieurs mois, c'est l'augmentation des taxes sur le gazole, est-ce que vous êtes prêt à faire un geste pour eux, ou est-ce que c'est la double peine ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, ils s'inquiètent effectivement de l'augmentation de 2 centimes par litre du prix du gasoil, mesure sur laquelle, j'ai annoncé, il y a quelques jours, que nous ferons en sorte de la répercuter en pied de facture, alors, c'est un peu compliqué, mais ça consiste à la neutralité pour eux, ce sont les chargeurs qui paieront ces 2 centimes par litre, et ça me paraît être une mesure qui conforte les routiers dans leur compétitivité…
MARC FAUVELLE
Pardon, j'essaie de comprendre les chargeurs vont répercuter, c'est-à-dire ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est-à-dire que, aujourd'hui, les routiers, effectivement, la mesure telle qu'annoncée, implique une augmentation de 2 centimes par litre sur le prix du gazole à la pompe, et que cette mesure sera répercutée, ces 2 centimes, cette augmentation sera répercutée en pied de facture, c'est-à-dire que les routiers, les transporteurs routiers ne la subiront pas, c'est le client qui la paiera. C'est une mesure qui est attendue par les routiers, et j'ajoute qu'en fait, la grogne des routiers actuelle est le fruit de plusieurs mesures ou de plusieurs dispositifs qui sont venus se superposer, et que l'idée de la réunion que nous aurons jeudi avec eux, c'est bien de poser l'ensemble de ces mesures sur la table, et à la fois, effectivement, d'apporter la juste contribution des routiers sur le plan du dommage environnemental, ça, c'est les mesures dont nous avons parlé, et puis, de préserver quand même leur compétitivité, qui est retrouvée depuis quelques mois, quelques années, maintenant, et qu'il s'agit de préserver.
RENAUD DELY
Mais on se souvient, évidemment, que la question des carburants, de l'envol du prix carburant avait été à l'origine du mouvement des gilets jaunes à l'automne dernier, pour vous, il n'y a pas de risque d'une répétition, d'un mouvement de mécontentement cet automne ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je crois que, d'abord…
RENAUD DELY
Vous écartez cette hypothèse…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je n'écarte pas l'hypothèse, mais vous savez, la peur est plutôt mauvaise conseillère en politique, moi, les routiers, ils commencent à retrouver des marges, ils ont besoin de travailler, besoin de rouler, ils veulent de la stabilité et de la visibilité. Les routiers, ils sont tout à fait prêts à faire la transition écologique, d'abord, ils la font déjà, mais ils veulent de la stabilité fiscale et sociale, et c'est ça que nous allons tenter de leur apporter jeudi…
RENAUD DELY
Justement, vous évoquez la transition écologique, Jean-Baptiste DJEBBARI, la nécessité de sortir des énergies fossiles, le président délégué du MEDEF, Patrick MARTIN, était l'invité de France Info ce matin, et voilà l'appel qu'il lance à l'Etat.
PATRICK MARTIN, PRESIDENT DELEGUE DU MEDEF
Il faut que la transition écologique, qu'on attend tous, qui est indispensable, soit financée sainement, ça n'est pas en chargeant les entreprises qu'elle doit être financée, c'est-à-dire que c'est l'Etat qui doit faire des économies.
RENAUD DELY
Qu'il ne faut pas charger les entreprises, vous dit le MEDEF, les entreprises, aujourd'hui, à vos yeux, en font suffisamment justement pour financer la transition écologique ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En tout cas, il ne peut pas nous faire le procès avec le gouvernement qui n'a pas allégé la fiscalité des entreprises, c'est l'action du gouvernement depuis des mois. Sur les ménages
RENAUD DELY
Oui, le MEDEF ne peut pas vous faire de reproches…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais, nous avons baissé de plus de 20 milliards d'euros la pression fiscale sur les ménages, sur les entreprises, c'est un fait objectif, et après, la transition écologique, puisque je vous parlais de la loi Mobilité, que nous avons votée, il y a quelques jours, elle est financée, c'est 13,4 milliards pour le champ des transports qui me concerne, et c'est d'ailleurs une des premières fois qu'une loi est financée, et d'ailleurs, je salue l'action d'Elisabeth BORNE sur le sujet. Donc, nous, nous avons une action résolue, la transition écologique, ce n'est pas demain, c'est maintenant, ce sont des sujets très, très concrets, sur les zones à faible émission, sur le verdissement des flottes, qui impliquent les entreprises, il faut qu'elles doivent être parties prenantes…
RENAUD DELY
Il faut qu'elles mettent la main à la poche davantage ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il faut qu'elles soient effectivement moteur dans cette transition, par exemple sur le sujet du verdissement des flottes, vous savez qu'un véhicule sur deux est acheté pour les besoins des flottes d'entreprise, c'est donc là qu'on a vraiment le levier pour verdir les véhicules qui après sont des véhicules sur le marché de l'occasion, et vous voyez, comme ça, comment on peut dessiner un cercle vertueux.
MARC FAUVELLE
Un mot sur la situation à AIGLE AZUR, l'entreprise a été placée en liquidation judiciaire hier, il y a plus d'un millier de salariés qui s'inquiètent, les repreneurs ont encore quelques heures pour affiner leurs offres, est-ce que vous savez combien d'emplois au final seront sauvés et combien resteront sur le carreau ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, en tout cas, l'offre combinée d'AIR FRANCE et du groupe DUBREUIL préserve à peu près 80 % des emplois français, et vous savez par ailleurs que…
MARC FAUVELLE
Ce qui laisse plus de 200 personnes, 2 à 300 pour l'instant…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En l'état, et que le juge donc, qui a prononcé hier la liquidation avec poursuite d'activité jusqu'au 27 septembre prochain, a aussi donné 48 heures aux différents pétitionnaires pour améliorer leur offre. Il y a 4 ou 5 offres qui ont été présentées, il y a une offre d'EASYJET, il y a d'autres offres qui sont aussi en compétition, et donc, moi, j'espère que les offres seront améliorées, y compris sur le plan de la préservation de l'emploi.
MARC FAUVELLE
Est-ce que l'Etat, qui est actionnaire d'AIR FRANCE, met la pression en ce moment sur la compagnie pour qu'elle améliore son offre ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
L'Etat a une discussion exigeante avec AIR FRANCE…
MARC FAUVELLE
Ça veut dire oui…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et vous savez qu'AIR FRANCE est en pleine transformation, est en pleine consolidation, et que l'Etat accompagne, notamment avec les services de Bercy, la restructuration industrielle d'AIGLE AZUR, en tout cas, de ce que deviendra AIGLE AZUR après cette liquidation. Et oui, l'Etat est extrêmement mobilisé sur le sujet.
RENAUD DELY
Et l'objectif, c'est qu'AIR FRANCE reprenne tous les emplois ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
L'objectif, c'est qu'AIR FRANCE, en tout cas, l'offre qui serait l'offre de reprise ou l'offre en liquidation, reprenne le maximum d'emplois dans la mesure…
RENAUD DELY
Le maximum, pas forcément l'intégralité…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Dans la mesure où cela est rationnel sur le plan économique, vous savez bien qu'il y a des redondances notamment sur les fonctions dites support, et qu'on peut comprendre qu'il faut accompagner ces salariés qui resteraient effectivement sur le côté de l'offre, mais qu'en revanche, nous poussons pour que le maximum d'emplois français soient préservés…
RENAUD DELY
Le maximum, c'est combien pour vous ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je l'ai dit, nous, nous visons 90 % des emplois, les offres actuelles sont environ à 80 % nous continuons à maintenir cette pression positive.
MARC FAUVELLE
On va parler de la réforme des retraites, si vous voulez bien, dans quelques instants, avec la grève de la semaine dernière qui a été particulièrement suivie dans les transports en commun franciliens, mais d'abord un coup d'oeil à l'actualité à 8h40, avec Lauriane DELANOË.
/// Flash info ///
MARC FAUVELLE
Toujours avec le secrétaire d'Etat aux Transports, Jean-Baptiste DJEBBARI. Est-ce que vous avez été surpris par la mobilisation particulièrement importante vendredi dernier, à la RATP ? 95, 98 % de grévistes dans certains secteurs.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, elle était attendue, et moi je me suis rendu vendredi matin devant la maison de la RATP…
MARC FAUVELLE
Attendue, très forte.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Attendue, c'était une mobilisation forte, mais attendue, prévue par la Direction de la RATP, qui avait d'ailleurs mis en place un plan de transport alternatif, qui a plutôt bien fonctionné. Mais c'est sûr qu'il y a…
MARC FAUVELLE
Vous trouvez que le plan de transport alternatif a bien fonctionné à la RATP ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Dans la mesure où la journée a été dégradée, mais les métros ont pu rouler sur la ligne 1 et 14…
MARC FAUVELLE
10 lignes entièrement fermées.
RENAUD DELY
Deux lignes automatiques, il faut préciser, les ligne 1 et 14 sont automatiques.
MARC FAUVELLE
Pardon d'être technique pour les non Franciliens qui nous écoutent, mais on ne peut pas dire que le dispositif alternatif ait bien fonctionné.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En tout cas, le niveau de service qui avait été anticipé…
MARC FAUVELLE
Oui, les lignes automatiques ont roulé.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, lignes 4, 7, 8, 9 ont un peu roulé pendant les périodes de pointe, et puis par exemple le vélo a été plébiscité dans Paris…
MARC FAUVELLE
Le vélo qui n'est pas, à ma connaissance, du ressort exclusif de la RATP.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Pas du ressort exclusif, mais…
MARC FAUVELLE
Beaucoup de gens à vélo, mais…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais la RATP a fait un gros effort sur les mobilités qu'on dit douces, et ce plan là a plutôt bien fonctionné, même si effectivement la journée était très perturbée, ça a engendré beaucoup de bouchons, bref, vous avez raison, c'était une journée compliquée pour les Franciliens.
MARC FAUVELLE
Vous ne l'avez pas pris comme un avertissement assez fort ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais moi je suis allé discuter avec les agents de la RATP, devant le siège de la RATP, pendant à peu près une heure, pour essayer de nouer le dialogue avec eux. Les agents de la RATP, aujourd'hui ils sont anxieux de l'évolution de leur régime de retraite, et quand je lis les tracts syndicaux, je comprends leur anxiété. Et donc moi j'ai essayé d'abord de leur expliquer que ce qui a été écrit sur les tracts, n'était pas le projet du gouvernement.
MARC FAUVELLE
Alors, qu'est ce qui est inexact dans leurs revendications ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Eux, si vous voulez, ils ont fait un copier-coller du rapport Delevoye, en disant : « Voilà, vous agents de la RATP, dans 10 ans ou dans 20 ans ou dans 30 ans, vous gagnerez, vous travaillerez 10 ans de plus et vous gagnerez, en tout cas votre pension sera de 30 % inférieure à ce qu'elle est aujourd'hui. Ce n'est évidemment pas le projet du gouvernement, et c'est très anxiogène, et ça je le comprends.
RENAUD DELY
Le rapport Delevoye, ce n'est pas le projet du gouvernement, clairement.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, c'est une base de travail, et le projet du gouvernement c'est celui qui va être construit avec les syndicats, avec les agents, et c'est ce que je leur ai dit. D'abord on a le temps, vous savez que les droits acquis jusqu'en 2025, restent absolument sédimentées dans le bloc social, et qu'à compter de 2025 jusqu'en 2040 nous allons construire cette transition avec eux, et je crois que ce discours d'ouverture a été perçu…
RENAUD DELY
On peut peut-être comprendre qu'ils soient un petit peu angoissés, comme vous dites, puisque vous dites que le rapport Delevoye ce n'est pas le projet du gouvernement…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est une base de travail.
RENAUD DELY
Mais Jean-Paul DELEVOYE vient d'être nommé, lui, Haut-commissaire au sein du gouvernement pour s'occuper de cette réforme.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et je rappelle que c'est une base de travail qui pose les critères…
RENAUD DELY
Il va être amené, Jean-Paul DELEVOYE, excusez-moi, à revoir en fait ses propositions de la mi-juillet, il faut qu'il les abandonne.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
On parle beaucoup des régimes spéciaux, mais je rappelle quand même que le rapport Delevoye pose une base de travail pour 80 % des Français qui ne sont pas aujourd'hui dans des régimes spéciaux, et que par ailleurs le sujet de faire converger les régimes spéciaux dans un temps long, avec un régime universel, était à la fois une promesse de campagne d'Emmanuel MACRON, c'est un objet d'équité sociale, fort, parce que je pense que le fait d'avoir une retraite, une pension décente quand on a travaillé toute sa vie en équité, c'est au coeur finalement du contrat social français et qu'on a le temps, nous ne sommes pas sous contrainte financière et nous ne sommes pas sous contrainte de temps pour construire ce système universel des recettes... des retraites, pardon, qui encore une fois est attendu.
MARC FAUVELLE
Mais la disparition des régimes spéciaux, elle est toujours d'actualité. Sur ce point-là, les agents de la RATP ont raison de s'inquiéter.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
La convergence des régimes spéciaux dans le régime universel, est évidemment sur la table. Après, le Premier ministre l'a dit, et il a raison, nous prendrons en compte la dimension de la pénibilité, de la dangerosité, les contraintes particulières des métiers.
RENAUD DELY
Il y a hier, dans les rues de Paris, toute une série de corporations justement concernées par cette convergence que vous évoquiez à l'instant, des régimes spéciaux... des régimes particuliers vers un régime unique, qui étaient dans la rue pour protester, notamment les avocats, les infirmières. Votre corporation, d'ailleurs vous êtes pilote de ligne de profession, les pilotes de ligne étaient dans la rue hier…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
J'ai cotisé…
RENAUD DELY
Est-ce que vous comprenez leur mécontentement ? Ils disent, ils ont le sentiment en fait de se faire piquer en quelque sorte leur régime de retraite qui est à l'équilibre, voire bénéficiaire, par l'Etat.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
D'abord il y a des sujets qui sont très différents, entre les avocats par exemple qui ont aujourd'hui plutôt des taux de cotisations qui sont bas, et les pilotes et avec des taux de cotisations très élevés. Ils ont des réserves en général, c'est…
RENAUD DELY
Les pilotes, ils ont raison de protester ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, ils ont des réserves, je le disais, importantes, et ils craignent aussi, souvent, que l'Etat s'empare des réserves pour financer le système général.
RENAUD DELY
C'est ce qui va se produire, non ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
L'engagement a été clair sur le sujet. Ceux qui ont bien géré des régimes et des régimes qui sont excédentaires sur leur réserve, leur réserve sera utilisée pour la corporation, pour le dire comme ça. En revanche, tous ces régimes-là ont le même problème, à terme, le problème démographique. Aujourd'hui il est intéressant de partir à la retraite quand vous êtes pilote ou avocat, de partir à la retraite maintenant, dans 20, 30 ans, les jeunes avocats ou les jeunes pilotes, sont dans la même situation que beaucoup de jeunes Français, c'est-à-dire face à des régimes de retraite qui sont déséquilibrés sur le plan financier. Et c'est donc ça qu'on doit construire ensemble. L'équité, effectivement adresser le sujet des corporations qui ont bien géré, qui disposent de réserves, et puis la lisibilité, et l'équilibre financer, notamment pour les générations à venir, c'est ça le sujet.
RENAUD DELY
Mais il n'y a pas un caractère un petit peu dogmatique de cette réforme, de vouloir absolument passer toutes les professions sous la toise et justement de supprimer tous les caractères particuliers, et y compris des régimes autonomes, encore une fois à l'équilibre ou bénéficiaires aujourd'hui ? Il n'y a pas un côté un petit peu idéologique et dogmatique de la réforme ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Pas sous la toise, le sujet c'est que nous allons discuter, secteur par secteur, et dans mon secteur j'ai un certain nombre de régimes spéciaux RATP, SNCF, les pilotes, les contrôleurs, vous l'avez dit, donc nous allons prendre le temps de la discussion pour voir comment on fait converger tout ça, vers un régime universel qui est équitable. Mais vous savez, quand on parle du fond générationnel de la chose, c'est-à-dire de, quand on parle à des pilotes ou à des avocats, de savoir s'ils pensent que leurs enfants auront un régime de retraite décent ou une retraite décente à horizon 20, 30, 40 ans, tous ont un doute sur le sujet. Donc ça veut dire que, au fond, la fragilité du système de retraite français, a perception, elle est partagée.
RENAUD DELY
Ils ont un doute aussi sur les propositions du gouvernement, c'est ça que je veux dire.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et donc la perception elle est partagée. Et donc la construction d'un régime qui soit équilibré sur le plan financier et qui soit équitable pour la société, elle est quand même, je crois, au fond de moi, à la fois du contrat français, est partagée par la majorité de la population.
MARC FAUVELLE
La SNCF, Jean-Baptiste DJEBBARI, on devrait connaître dans les heures ou les jours qui viennent le nom de l'homme ou de la femme qui succédera à Guillaume PEPY. Vous savez qui c'est, vous ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
J'ai participé à la réflexion autour du président de la République, je lui ai donné mon avis, et c'est bien lui qui proposera le candidat pressenti dans le timing qui lui appartient.
MARC FAUVELLE
Vous lui avez donné une short-liste ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En tout cas je lui ai donné, puisque j'avais eu l'occasion de bien connaître l'entreprise publique au gré de la réforme ferroviaire, que j'avais menée côté Parlement il y a un an, je lui ai donné mon sentiment, et effectivement vous savez que la SNCF aujourd'hui est vraiment face à des défis qui sont majeurs, l'ouverture à la concurrence, la régénération des petites lignes…
MARC FAUVELLE
Donc il faut quelqu'un de l'intérieur de l'entreprise, quelqu'un qui connaît bien l'entreprise ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je crois qu'il faut quelqu'un qui connaît bien l'entreprise…
MARC FAUVELLE
Quelqu'un qui serait déjà en poste, par exemple le patron de Réseau SNCF Patrick JEANTET ? C'est le nom qui revient le plus.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais tous les noms qui ont circulé, sincèrement ce sont des noms de valeur, des candidats de valeur, donc moi je ne me prononce pas sur le nom, mais je pense que c'est un gros groupe la SNCF, c'est 150 000 cheminots, c'est 300 ,000 personnes c'est un groupe mondial, et effectivement le temps va vite et les enjeux sont maintenant, la transformation sociale de la reprise est majeure, avec des métiers qui changent très, très vite, et il faut quelqu'un qui soit en capacité d'agir tout de suite.
MARC FAUVELLE
Et qui soit capable de rassurer les cheminots aussi.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
C'est très important, vous savez qu'il y a là aussi beaucoup d'anxiété sur la concurrence. La SNCF peut très bien y réussir, mais il faut le préparer avec quelqu'un effectivement qui donne confiance ou qui ouvre une nouvelle page pour cette belle entreprise publique.
MARC FAUVELLE
Est-ce que dans la feuille de route que vous fixerez au nouveau président de la SNCF, il y aura de ne pas fermer de petites gares ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors d'abord, il y a tout ce sujet, vous avez raison, c'est un beau sujet, les gares liées aux Maisons France services, aux tiers lieux…
MARC FAUVELLE
C'est un beau sujet et puis c'est surtout un sujet d'inquiétude pour beaucoup de monde.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
... c'est un sujet de territoire, c'est un sujet effectivement qui quelque part a matérialisé au moment de la crise des Gilets jaunes, une forme de recul de l'Etat. Il y a des projets qui sont très intéressants au sein de la SNCF, qui s'appellent « 1001 gares », qui permettent de redynamiser l'ensemble de ces points au bénéfice des populations. Donc un des enjeux se sera effectivement de faire vivre les gares…
MARC FAUVELLE
Sans en fermer ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors en les faisant évoluer parfois. Vous avez les points d'arrêt qui ont fermé, des gares qui ont d'ores et déjà fermé, mais qui peuvent être reconverties en tiers lieux, en maisons d'accueil du public, et je crois que ce sujet…
RENAUD DELY
Donc il y aura des fermetures de gares. Il y aura des fermetures de gares.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il y a des lignes, vous savez il y a des lignes qui sont arrêtés. Il ne faut pas être démagogique sur le sujet. Des petites lignes aujourd'hui sont à l'arrêt. Donc dire moratoire, c'est se faire plaisir ici dans un studio parisien, mais ce n'est pas la réalité de ce qui est ressenti sur notre territoire. En revanche, dire que les gares…
RENAUD DELY
Le moratoire, c'est ce qu'avait annoncé le Premier ministre au moment du mouvement des Gilets jaunes.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
... que les gares peuvent être des points où on fait converger les services et les transports, et savoir comment on redynamise les petites gares dans les territoires, c'est un beau sujet pour le nouveau patron de la SNCF, et c'est un sujet sur lequel nous serons évidemment très attentifs.
MARC FAUVELLE
Vous restez avec nous, Jean-Baptiste DJEBBARI, secrétaire d'Etat aux Transports. On va parler des décrocheurs dans un instant, on parlera également des lois bioéthiques avec l'église qui prend position, et puis on parlera, si on a le temps, un tout petit peu de votre autre passion, à côté des transports, c'est le rugby, si vous voulez bien, je crois qu'il y a un événement qui arrive dans quelques jours. D'abord un tour de l'info à 08h50 avec Laurianne DELANOË.
/// Flash info ///
Jean-Baptiste DJEBBARI, hier, des militants qui avaient décroché le portrait d'Emmanuel MACRON dans une mairie à Lyon ont été relaxés par un tribunal, c'est une décision inédite ; les juges ont retenu – je cite –l'état de nécessité au regard de l'urgence climatique, comment vous réagissez ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi, je suis d'accord sur l'état de nécessité au regard de l'urgence climatique, et je suis un peu étonné de la décision du juge, que je ne vais pas commenter, il y aura d'autres instances, l'appel, la cassation, mais en droit, effectivement, cela paraît un peu étonnant pour le citoyen que je suis.
MARC FAUVELLE
Vous pensez qu'il y a un juge qui a essayé de se faire plaisir ou de vous adresser un message ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je ne me prononcerai pas. Mais la deuxième partie de la phrase sur l'urgence climatique, j'en conviens, en revanche, effectivement, la décision en elle-même me paraît quelque peu interrogée…
MARC FAUVELLE
Surprenante.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Surprenante, mais encore une fois, le droit, vous savez, il y a des instances, il y a des niveaux de juridictions…
MARC FAUVELLE
Il y a un appel qui a été fait…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il y aura un appel, il y aura une cassation qui en droit dira des choses similaires ou peut-être d'autres choses.
RENAUD DELY
Vous redoutez que cette décision fasse école, qu'elle incite d'autres militants à agir de même ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais que cela, quelque part, fasse résonance avec l'inquiétude des Français, des jeunes, que, quelque part, elle répercute ce sentiment de devoir agir de façon plus rapide en faveur du climat contre le dérèglement climatique, si vous voulez, je crois que c'est une prise de conscience sociétale qui est utile, qu'en revanche, on utilise les procédures qui sont prévues pour faire passer ces messages-là ne me paraît pas tout à fait être de bon aloi en République, mais encore une fois, c'est un avis personnel, et le doit dira le droit à l'occasion des instances futures.
MARC FAUVELLE
Sur la question des lois bioéthiques et de la PMA, le président de la Conférence des évêques de France a appelé hier soir les citoyens, je le cite, inquiets à manifester le 6 octobre prochain aux côtés donc de certains élus de droite, d'extrême droite et de la Manif pour tous, est-ce que l'Eglise est dans son rôle dans ce débat-là ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais l'Eglise a le droit d'avoir cette position qui d'ailleurs est finalement constante depuis de nombreuses années sur ces sujets-là, moi, j'observe que la société veut ces avancées sociétales, et que la société est certainement très en avance encore aujourd'hui sur l'Eglise, sur ces positions-là. Donc ce débat sur la bioéthique, sur la PMA a été très bien mené, de façon d'ailleurs très ouverte à l'Assemblée nationale, avec une association de l'opposition, ce texte, il est prêt, il est, je crois, une attente des Français, et j'observe avec attention ce que dira l'Eglise, et tout autre partenaire du débat public, mais la volonté de la majorité présidentielle et du gouvernement sur le sujet est intacte.
RENAUD DELY
Vous redoutez l'ampleur de la mobilisation contre ce texte, on se souvient évidemment des manifestations contre le mariage pour tous en 2013, est-ce que vous redoutez une répétition de…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, c'est la démocratie, je crois que trois quarts des Français sont en accord avec ce que contient ce projet de loi bioéthique, et que c'est une demande sociétale que d'avancer sur ces sujets…
MARC FAUVELLE
On a appris hier, Jean-Baptiste DJEBBARI, qu'Emmanuel MACRON mesure et évalue régulièrement et attentivement l'action de ses ministres à l'aide d'une petite application, qui est française au passage, vous être fliqué, vous, vous êtes exempté en tant que nouveau ministre ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Ecoutez, si cette application, c'est une version améliorée d'un tableau Excel, alors je crois qu'on peut se rasséréner sur le sujet, on est effectivement évalué sur ce qu'on appelle des objets de la vie quotidienne, par exemple, sur mon champ, c'est le plan vélo, c'est les zones à faible émission, c'est la prime à la conversion…
MARC FAUVELLE
… A la RATP…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, oui, c'est l'objet plus positif que ce que vous citez. Donc évidemment qu'on est dans une dynamique de délivrer de l'action positive en faveur des Français, et que cette action, elle doit être évaluée, ça me paraît tout à fait normal…
MARC FAUVELLE
Quand il vous a embauché, Emmanuel MACRON, il vous l'avait dit, ça ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais, il n'y a pas d'embauche en République, il y a eu un entretien…
MARC FAUVELLE
… A un moment à l'Elysée ou ailleurs…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Nous avons parlé, effectivement, des…
MARC FAUVELLE
Il vous a dit : j'attends des résultats et vous serez noté ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Il a dit évidemment qu'il attendait des résultats sur ces objets de la vie quotidienne, parce que, ce qui compte, c'est que la politique se transforme ou se traduise en effet concret pour les Français, et il a dit qu'effectivement, il engageait ses ministres, ses secrétaires d'Etat à être résolument dans l'action et qu'il évaluerait ces actions, il l'a dit effectivement notamment la semaine dernière à l'occasion du Conseil des ministres.
RENAUD DELY
Justement, vous avez été nommé il y a deux semaines au gouvernement, ça veut dire que vous êtes encore en période d'essai aujourd'hui ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Je crois que la période d'essai est à peu près permanente en politique, si vous voulez mon avis.
MARC FAUVELLE
Vous connaissez votre note ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais ça a peu d'importance, cela n'a que peu d'importance, et moi, ce qui m'importe, c'est, d'abord, une action utile, c'est un champ passionnant, les transports, c'est la vie quotidienne, c'est au croisement de plein de transformations : numérique, environnementale, et j'essaierai d'y être un agent utile de la République.
RENAUD DELY
Et pourtant, Jean-Baptiste DJEBBARI, vous avez un vrai regret aujourd'hui, c'est de pas être au Japon puisque le XV parlementaire doit rencontrer aujourd'hui les All Blacks, la Nouvelle-Zélande, XV parlementaire au sein duquel vous jouez au poste de demi d'ouverture ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument, qui a gagné d'ailleurs contre les Anglais 29-7, il y a deux jours et qui affronte – et j'ai une pensée pour lui – les All Blacks de la Nouvelle-Zélande aujourd'hui.
RENAUD DELY
Vous préféreriez être là-bas en fait ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, alors, je suis très content et honoré d'avoir été nommé, mais je suis de très près leurs aventures, d'autant qu'ils ont un match capital aujourd'hui qui les mènera peut-être en finale dans quelques jours.
MARC FAUVELLE
Quand on est demi ouverture, on est – pardonnez ma méconnaissance du rugby – ni à droite ni à gauche ?
RENAUD DELY
Voilà, on est au centre…
MARC FAUVELLE
C'est ça, ce qui est la meilleure position pour…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
On est l'animateur des lignes arrière, mais vous savez que personne n'est planqué au rugby, et que, comme la politique, c‘est un sport collectif de combat.
MARC FAUVELLE
Il nous reste dix secondes. Un pronostic pour les Bleus à la Coupe du monde, la vraie, pas celle des parlementaires, sans vous faites insulte ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Alors, l'honnêteté me pousse à la prudence, mais l'Equipe de France réussit en général toujours assez bien en Coupe du monde.
MARC FAUVELLE
Vous pensez que le discours motivant d'Emmanuel MACRON, il y a quelques jours…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Aura un effet capital, je n'en doute pas…
MARC FAUVELLE
Aura un effet capital, je n'en attendais pas moins de vous comme réponse…
RENAUD DELY
Mais vous êtes pessimiste ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, non, quand j'observe les All Blacks, les Sud-Africains jouer, je me dis qu'ils sont d'un niveau un tout petit peu plus supérieur, mais évidemment, en tant que Français, j'ai l'optimisme chevillé au corps.
MARC FAUVELLE
Merci à vous Jean-Baptiste DJEBBARI, secrétaire d'Etat aux Transports, invité ce matin de France Info.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 26 septembre 2019