Texte intégral
GUILLAUME DURAND
Bonjour et bienvenu Jean-Baptiste DJEBBARI.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bonjour.
GUILLAUME DURAND
C'est la première fois que vous venez ici. Vous êtes pilote de formation, vous avez 37 ans, vous êtes chargé des transports, et dieu sait que les sujets ne manquent pas ce matin. C'était comment cette réunion d'hier, quand on la perçoit comme ministre ? C'était une explication, un acte de câlinothérapie ou le rappel quand même que le gouvernement travaille et que les maires n'y comprennent pas grand-chose ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi j'ai reçu les maires de la Haute-Vienne le soir, donc après…
GUILLAUME DURAND
Parce que c'est votre circonscription.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Absolument. Au ministère, pour avoir cet échange et pour voir comment, eux, avaient perçu ce discours. Et ce que j'en tire, c'est deux choses. D'abord, il y a eu une recomposition politique majeure, et cette recomposition elle a forcément un impact sur la relation entre le président, l'exécutif et les maires. Et la recomposition elle est massive. Si je prends simplement exemple de la Haute-Vienne, qui a vécu sous un système socialiste pendant 108 ans, la mairie a été perdue en 2014, les trois députés sont aujourd'hui En Marche, et donc l'ensemble de la classe politique, l'ensemble des dirigeants politiques, ont dû se recomposer dans leur rapport les uns aux autres. Et puis il y a eu ce qui s'est passé ces 18 derniers mois, la crise des Gilets jaunes, les Grands débats qui ont forcément, quelque part, qui nous ont mis dans le même bateau, et qui nous ont obligés à nous rapprocher et à trouver des voies de…
GUILLAUME DURAND
Et vous avez même dit, enfin expliqué à un moment, où vous aviez été, pour ce Grand débat, un moment en prison, et que c'était violent ce qui vous était reproché.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Moi j'ai fait cinq Grands débats, et il y avait beaucoup de conflictualité, c'est sûr, et notamment sur les Grands débats qui duraient 2 heures, 2 heures 30, vous aviez 45 premières minutes, où vous étiez…
GUILLAUME DURAND
Tendu.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non, mais en tout cas mis en cause sur le plan personnel. Oui, c'était vraiment tendu, bien sûr que c'était tendu. Mis en cause sur le plan personnel, parce que je crois qu'il y avait une colère qui s'exprimait vis-à-vis de la classe politique, vis-à-vis des politiques qui étaient, et pour le coup, de façon totalement excessive, supposés commettre toutes les atrocités, être coupables de tous les maux. Et il y avait ce moment où on devait sortir de cette conflictualité un peu mortifère, pour arriver au moment, au temps du débat. Et nous avons réussi à le faire, et je crois qu'aujourd'hui il faut à la fois recomposer la façon dont on fait de la politique dans les territoires, entre le gouvernement, les députés, les maires qui sont évidemment les piliers de cette démocratie, de notre système démocratique, et puis il faut, et je crois que le président a vraiment raison de le dire, il faut essayer de tendre vers l'action, et le temps de l'action c'est maintenant, et le temps du bilan viendra, et je crois que nous aurons un bilan dans les territoires, mais pas que, et également évidemment au niveau national, un bilan tout à fait important.
GUILLAUME DURAND
Nous sommes en direct avec Jean-Baptiste DJEBBARI. Vous savez que finalement il y a trois manières de s'exprimer : il y a les élections, vous avez rappelé, donc, législatives, ou récemment les européennes. Il y a effectivement la rue, et puis il y a ce degré de représentation que représente justement le Grand débat. Arrive le 5 décembre, vous lisez les journaux au gouvernement comme nous tous les matins, et comme tous ceux qui vous écoutent, avec cette espèce d'inquiétude terrible, ce matin dans les gares, vous avez des gens qui sont en train de préparer, au fond les usagers, c'est votre métier les Transports, c'est votre poste au gouvernement, à l'idée que la grève peut être massive, qu'elle va peut-être même durer. Vous avez rencontré les syndicats des transports, vous allez les revoir, et dans un contexte qui est quand même très particulier, puisqu'on attend peut-être que, d'un jour à l'autre, on leur annonce qu'on va annoncer à un âge pivot sur les retraites. Donc…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Bon, d'abord, je fais plus que lire les journaux, effectivement je rencontre les syndicats et nous avons depuis le 1er octobre eu un certain nombre de réunions avec les syndicats de la SNCF et de la RATP notamment, qui sont, qui seront au coeur de la journée du 5. Et puis je suis allé voir les agents directement. La semaine dernière j'ai passé un après-midi entier à la RATP, pour discuter avec les gens de la maintenance, avec les gens du métro, du RER, des bus…
GUILLAUME DURAND
Et vous les sentez comment ? Parce que c'est ça…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, bien sûr, mais ce qui est intéressant c'est que, au fond, d'abord eux sont tout à fait dans le débat que nous avons lancé, ils sont d'ailleurs parfois beaucoup plus inquiets, par exemple à la RATP, de l'ouverture à la concurrence, que du système des retraites, et je pense qu'il faut aussi avoir ça en tête. Ils ont besoin d'informations, ils me l'ont dit, « nous n'avons pas d'information, pas assez », et donc je crois qu'il faut avoir…
GUILLAUME DURAND
Mais pour ce qui est de l'âge pivot, on ne sait toujours rien. Parce que c'est vrai que c'est tombé il y a quelques jours maintenant, donc…
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Oui, et donc je leur ai expliqué ce que nous discutions avec les syndicats, les modalités de la transition que nous construisions, je leur ai expliqué aussi le contexte global dans lequel la réforme se déroulait, les exigences d'équité vis-à-vis notamment des jeunes générations. Bref, tout ça ils le comprennent. Eux veulent des réponses très concrètes sur leur niveau de pension, la durée du temps de travail, c'est ces sujets très concrets que nous…
GUILLAUME DURAND
Mais pardonnez-moi de vous poser la question franchement, Jean-Baptiste DJEBBARI, est-ce que par exemple quand vous rencontrez les gens de la SNCF, vous allez clairement leur dire, ou vous leur avez déjà dit : « Les régimes spéciaux, c'est terminé, et ce sera 64 ans pour tout le monde ». Est-ce que vous leur avez dit ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
En tout cas, je leur ai dit que les régimes spéciaux, en tant que tels, étaient terminés, que nous allions construire un régime universel et que nous allions faire converger l'ensemble des régimes spéciaux vers ce régime universel à bon rythme.
GUILLAUME DURAND
Et les 64 ans ?
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Et vous savez, vous parlez à des jeunes, notamment à la RATP j'avais des jeunes de 30, 35 ans, qui ont commencé il y a 5, 6 ans à la RATP, et qui, même à la RATP, ont un doute sur le système de retraite, sa viabilité, sa soutenabilité financière, etc. etc. Donc vous parlez à des gens qui sont intelligents et qui ont bien compris que depuis 30 ans dans ce pays, on mettait des pansements sur un système qui dysfonctionne, et qui ont bien compris, parce qu'ils sont dans des familles, parce qu'ils habitent dans la grande couronne en Ile-de-France, que ce système, aujourd'hui, il est assez inéquitable, assez peu lisible, peu équilibré, et qu'il faut construire autre chose.
GUILLAUME DURAND
Mais je comprends que vous ne leur avez pas franchement dit que c'était les 64 ans, d'ailleurs on attend la décision du gouvernement, mais surtout vous savez que des syndicats ils sont divisés là-dessus, enfin l'ensemble du mouvement. D'abord, il y a une partie qui est assez inorganisée, du côté des Gilets jaunes, il y a des syndicats qui sont réformistes et qui essaient de comprendre, et puis il y a les syndicats qui veulent mettre le feu aux poudres.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Mais vous savez que sur les 64 ans, d'abord il y a une forme d'hypocrisie, c'est qu'aujourd'hui quand vous regardez les salariés du privé, en définitive ils ne partent pas à 62, mais beaucoup plus, à 63 ans et demi et c'est 64 ans à horizon de 2025. D'abord, le système est hypocrite, parce que les gens partent plus tard que l'âge légal de 62 ans, pour partir à la retraite, et que sur les régimes spéciaux, nous avons dit, et depuis le début, que nous prendrions en compte les contraintes de service, le travail de nuit, la pénibilité, la dangerosité. Et c'est ça que nous construisons actuellement avec les syndicats. Donc il n'y a pas... tout est sur la table si vous voulez. Et qu'ils aient des contraintes, qu'ils aient des contraintes réelles d'exploitation, le travail de nuit c'est une réalité, et ça, nous le prenons en compte.
GUILLAUME DURAND
Donc vous ne craignez pas pour le 5 décembre, une sorte de, comment peut-on dire, d'explosion généralisée, quoi.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Non mais mon travail, ce n'est pas de craindre l'explosion généralisée, c'est de travailler avec les syndicats, c'est d'essayer de faire baisser les niveaux de tension à l'intérieure les boîtes, et de construire les solutions de l'avenir.
GUILLAUME DURAND
Dernier point, il est important, c'est cette affaire de pont. Alors, on sait tous maintenant que le camion c'était 50 tonnes, il est au fond de l'eau maintenant, 50 tonnes c'est plus du double de ce qui était autorisé. Alors, les gens se demandent si ce genre de cas se multiplie un peu partout en France, que la circulation des camions est extrêmement dense, et si tout ça a été vérifié ? Pardonnez-moi de vous demander de répondre brièvement, parce que nous avons terminé.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Brièvement. Tout ça a été vérifié, il y a eu une inspection en 2017, par le CEREMA, qui est un organisme d'Etat, qui n'a pas trouvé de défauts structurels sur le pont, une inspection des services départementaux en 2018, et effectivement ce pont était dimensionné pour 19 tonnes, et le camion semble-t-il faisait entre 45 et 50 tonnes, tout chargé. Il y a un sujet, il y a un sujet notamment des informations dans les GPS, qui aujourd'hui conduit certains conducteurs à prendre des itinéraires secondaires, pour ne pas aller sur les autoroutes, et gagner un peu de temps. Nous avons voté une loi hier, qui permet, qui impose de nouvelles contraintes sur ce sujet. Je vois que nous sommes au rendez-vous, tant sur l'aspect sécurité des ponts, j'aurai un débat au Sénat un peu plus tard dans la journée, que sur l'aspect de la bonne information des transporteurs, des usagers, au sens général.
GUILLAUME DURAND
Jean-Baptiste DJEBBARI, donc, qui est secrétaire d'Etat chargé des questions de transport au gouvernement, était sur l'antenne de Radio Classique ce matin. Merci beaucoup.
JEAN-BAPTISTE DJEBBARI
Merci.
GUILLAUME DURAND
Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 22 novembre 2019