Texte intégral
FRANÇOIS DESPLANS
Jean-Michel BLANQUER, le ministre de l'Education nationale, avant de prendre la route du lycée d'Arsonval ce matin à Joué-lès-Tours, il est avec nous, dans nos studios en direct et on l'en remercie, bonjour Jean-Michel BLANQUER.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bonjour. Merci de l'invitation.
FRANÇOIS DESPLANS
Deux jours de visite chez nous en Indre-et-Loire, c'est parce que vous adorez la Touraine ou parce que vous avez beaucoup de choses à voir et beaucoup de choses à dire ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
C'est les deux à la fois. Vous savez, j'ai un attachement particulier pour la Touraine, j'ai enseigné ici, j'ai été maître de conférences à l'université de Tours.
FRANÇOIS DESPLANS
Ça vous rappelle des souvenirs.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Donc ça me rappelle des bons souvenirs, mais ce n'est évidemment pas la seule raison pour laquelle je viens, mais c'est vrai que j'ai toujours beaucoup de plaisir, je crois que c'est cinquième fois que je viens depuis que je suis ministre, mais aussi parce que j'aime bien venir pendant des séjours un peu approfondis, là je suis là pendant deux jours, avec toute mon équipe, d'ailleurs on se répartis sur le territoire pour voir différentes expériences, les analyser et puis aussi encourager toutes les initiatives de très bonne qualité que je vois ici, que ce soit à l'école primaire, au collège ou au lycée.
FRANÇOIS DESPLANS
On parlera développement durable, on parlera plan pauvreté évidemment, beaucoup de choses à dire, à commencer par la réforme du bac Monsieur le Ministre. Plusieurs lycées d'Indre-et-Loire menacent de boycotter les épreuves du bac blanc, qui vont se dérouler dans les prochaines semaines, pour dénoncer le grand flou qui règne sur les premières épreuves du contrôle continu en classe de 1ère, qui sont elles attendues dès le mois de janvier. Quel sujet choisir, quelle organisation à mettre en place, bref, pouvez-vous ce matin, Monsieur le Ministre, clarifier tout cela et rassurer les enseignants, qui sont un petit peu perdus ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
En réalité les choses sont assez claires. Bon, les grands principes sont clairs depuis assez longtemps, depuis 1,5 an maintenant que la que la réforme est affichée, et puis après les modalités, elles se définissent évidemment progressivement, ce qui est normal pour des choses qui sont très nouvelles…
FRANÇOIS DESPLANS
Mais ça se rapproche, on est en janvier…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Mais elles sont définies, aujourd'hui c'est défini. Vous savez, parfois les mêmes qui protestent sont ceux qui m'ont demandé de faire un comité de suivi du baccalauréat pour progressivement élaborer les détails, si vous voulez, élaborer les … c'est exactement ce qu'on a fait. On a fait un comité de suivi, où il y a les organisations syndicales, y compris celles qui disent ce que vous venez de dire, et donc c'est justement avec eux qu'on a élaboré les règles, donc ça prend forcément un peu plus de temps, puisque justement il y a une concertation sur ça. Et puis désormais elles sont connues, elles ont fait l'objet de textes, et ça aura lieu en juin, en janvier pardon, de façon tout à fait normale, sans…
FRANÇOIS DESPLANS
Donc tout est clair, les sujets vont être connus quand ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Il y a la Banque nationale de sujets qui est ouverte à partir du 1er décembre, donc dans quelques jours, et il des épreuves ont lieu en janvier. Donc, non, encore une fois, ce n'est pas la première fois. A chaque étape il y a des voix qui montent pour créer de l'inquiétude, c'était la même chose à la rentrée avec le sujet des emplois du temps, en réalité ça s'est très bien passé. Interrogez les élèves de 1ère, c'est évidemment les premiers satisfaits de cette réforme, ils ont eu beaucoup plus de choix, beaucoup plus de liberté pour prendre des enseignements de spécialités, ils sont beaucoup plus passionnés par ce qu'ils sont en train de faire, donc ils approfondissent davantage, donc ils vont hausser leur niveau, et en plus ils vont travailler plus en continu puisqu'il y a 40 % de leur note finale qui relève du contrôle continu.
FRANÇOIS DESPLANS
Mais menacer de boycotter les épreuves du bac blanc, dans les prochaines semaines, ça ne vous inquiète pas, c'est juste une menace qui ne va pas être mise à exécution ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, je pense. De toute façon, on n'appelle plus ça bac blanc justement, puisque c'est un contrôle continu, ce n'est pas blanc, c'est un bac, enfin c'est une épreuve de contrôle continu, et cette épreuve de contrôle continue, oui, elle sera passée, ça fait partie d'ailleurs des obligations normales de tous les acteurs de l'Education nationale que de faire ce travail.
FRANÇOIS DESPLANS
Jean-Michel BLANQUER, des enseignants inquiets aussi par rapport à la réforme des retraites, et cette question, elle est simple : vont-ils voir leur pension baisser oui ou non, avec cette réforme qui se prépare par le gouvernement ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, j'ai été très clair, et d'ailleurs le président de la République et le Premier ministre aussi. La réforme des retraites, chacun le comprend, c'est une réforme générale, qui vaut pour tous les corps de métier, pour arriver à quelque chose de plus juste entre les Français, c'est-à-dire un système de points, beaucoup plus simple et beaucoup plus juste, c'est évidemment quelque chose qui va très en profondeur, qui va prendre du temps, à la fois à s'élaborer et ensuite à se mettre oeuvre, mais on fixe des principes en amont, et notamment en a fixé comme principe que les professeurs ne devaient pas y perdre. Donc c'est vrai que l'application aveugle des principes de la réforme pourrait faire perdre les professeurs, mais on en est complètement conscients, donc nous travaillons actuellement, là aussi, avec les organisations syndicales d'ailleurs, pour que, à la fois les améliorations de rémunération dans l'intervalle, et tout un travail permet qu'ils n'y perdent pas.
FRANÇOIS DESPLANS
Parce que, aujourd'hui, leur pension est calculée sur la base des 6 derniers mois de leur activité…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Six dernières années.
FRANÇOIS DESPLANS
Six dernières années, pardon, avec la réforme c'est toute la carrière de l'enseignant qui va compter pour calculer cette pension, donc forcément ce sera moins bénéfique.
JEAN-MICHEL BLANQUER
A priori oui, bien sûr, mais c'est justement ce que je viens de vous dire. C'est-à-dire, ce que vous venez de dire là, la règle que vous venez d'énoncer, vaudra pour tous les Français, c'est-à-dire on sort de systèmes spécifiques d'un métier à l'autre…
FRANÇOIS DESPLANS
Ce sera la même règle pour tout le monde.
JEAN-MICHEL BLANQUER
La même règle pour tout le monde, c'est de prendre en compte toute la carrière, donc c'est pour ça que c'est un système juste, et en même temps…
FRANÇOIS DESPLANS
Mais du coup pour les fonctionnaires ça sera…
JEAN-MICHEL BLANQUER
Pour certains fonctionnaires, pas tous, pour les professeurs ça pourrait représenter une perte parce que c'est en fin de carrière qu'on améliore plus sensiblement sa rémunération, donc ça nous oblige, dans l'intervalle, à travailler sur ce qui se passe en début de carrière, à faire des calculs, pour arriver à ce que la totalité de la carrière ne soit pas de désavantageuse pour le professeur. Donc, la réforme des retraites est aussi l'opportunité de faire des améliorations en matière de rémunération, qui ont trop attendu, parce que c'est vrai que, notamment en début de carrière, et notamment dans le 1er degré, il y a des salaires qui ne sont pas à la hauteur de ce qu'ils devraient être.
FRANÇOIS DESPLANS
Donc aujourd'hui vous dites que les salaires des enseignants vont être augmentés.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Notre stratégie, sur une base pluriannuelle, parce qu'il y a 1 million de personnels à l'Education nationale, donc ce n'est pas quelque chose de simple, mais oui, c'est d'arriver à une amélioration des rémunérations au fil des années, de façon à ce que…
FRANÇOIS DESPLANS
De combien, on le sait ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non. Vous savez, c'est un travail très précis et très technique, c'est pour ça que j'ai monté un Observatoire des rémunérations, parce qu'il y a des situations très différentes. En gros, c'est ce que je vous disais, c'est notamment les débuts de carrière qui sont pas assez bien payés aujourd'hui, donc il y a tout un travail que nous faisons actuellement, et qui est évidemment un travail aussi de finances publiques, puisque tout ceci coûte de l'argent, et donc ça doit se planifier à long terme, mais en tout cas on a déjà de premières améliorations en 2020, et l'objectif c'est d'en avoir d'autres ensuite.
FRANÇOIS DESPLANS
Jean-Michel BLANQUER, invité de France Bleu Touraine, vous avez consacré la matinée d'hier à la ruralité, avec deux visites de collèges, notamment à Richelieu, puis au Grand-Pressigny, cet après-midi vous serez à Pernay dans une école primaire. Vous avez dit, cette semaine, lors du Congrès des maires de France, « nous mettons plus de moyens dans la ruralité que dans la ville », pardon, mais ce n'était pas l'impression qu'on avait depuis le début du quinquennat, avec notamment le dédoublement des classes qui concernait surtout les quartiers prioritaires en ville.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Alors, de façon structurelle on met plus dans la ruralité que dans la ville, si vous regardez…
FRANÇOIS DESPLANS
Ça veut dire quoi ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Ça veut dire que, par exemple, en Lozère vous avez 14 élèves par classe, de la petite section jusqu'au CM2, tout simplement parce qu'on tient compte des réalités rurales et qu'on a donc un meilleur taux d'encadrement en réalité, et d'ailleurs l'école primaire rurale réussit mieux que l'école primaire, en moyenne, en général, en France.
FRANÇOIS DESPLANS
Et c'est le même cas chez nous en Indre-et-Loire, en Touraine ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Et c'est la même chose en Indre-et-Loire où… et tant mieux d'ailleurs, enfin je ne dis pas ça pour le regretter ou quoi que ce soit, je dis ça pour que, dans l'esprit public, dans l'esprit de chacun d'entre nous, il n'y ait pas l'idée que le rural serait désavantagé par rapport à l'urbain.
FRANÇOIS DESPLANS
C'est ce que disaient les syndicats ces dernières années.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, mais ce n'est pas le cas. De toute façon, que se passe-t-il en ce moment en France ? il y a moins d'enfants chaque année, ce qui est d'ailleurs un problème, le fait est qu'il y a environ 50.000 enfants de moins depuis 4, 5 ans, par an, qui naissent, que d'habitude, donc il y a moins d'élèves à l'école primaire, et pour autant nous créons des postes à l'école primaire, non seulement pour faire la mesure de dédoublement, qui est une mesure saluée par tous, et qui parfois se passe aussi en milieu rural, et nous le verrons d'ailleurs aujourd'hui, donc non seulement pour faire le dédoublement, mais aussi pour soutenir l'école rurale. C'est d'ailleurs pour ça que le président de la République s'est engagé à ce qu'on ne ferme plus une seule école rurale en France sans l'accord du maire. et donc, oui nous voulons une bienveillance pour l'école rurale, et nous voulons aussi que cette école rurale soit dynamique, attractive, et c'est beaucoup ce que je souligne, aussi bien hier, qu'aujourd'hui, en Indre-et-Loire, parce que vous avez des écoles primaires rurales ultra dynamiques, avec par exemple des enseignements de langues très dynamiques, ou bien des choses que j'ai soulignées depuis hier.
FRANÇOIS DESPLANS
Le plan pauvreté, il concernera aussi des écoles rurales ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr.
FRANÇOIS DESPLANS
Vous allez visiter une école dans la ville, à Tours, quartier Sanitas, l'école Pierre et Marie Curie, est-ce que des écoles rurales vont pouvoir en bénéficier ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, bien sûr. Notre action sociale doit concerner autant la ville que la campagne, c'est évident, quand on fait par exemple les petits-déjeuners gratuits, c'est pour la ville, mais c'est aussi pour la campagne, c'est aussi un rôle vis-à-vis de la parentalité, puisqu'aujourd'hui on doit beaucoup plus associer les parents aux responsabilités de la coéducation, l'Education nationale n'assume pas toute les dimensions éducatives, et ceci passe par à la fois de l'action sociale, mais aussi toute une série de manières de faire qui vont se développer en milieu urbain, comme en milieu rural.
FRANÇOIS DESPLANS
Jean-Michel BLANQUER, vous avez entendu votre président de la République, Emmanuel MACRON, qui a dit hier, en visite à Amiens, aux étudiants, « ne me dites pas qu'on est foutu en 2050 », il parlait de la planète et de notre climat. Vous diriez la même chose, vous, on n'est pas foutu en 2050 ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Bien sûr, je dirais la même chose, et d'ailleurs c'est ce que j'ai dit beaucoup hier, j'étais en compagnie de Yann ARTHUS-BERTRAND…
FRANÇOIS DESPLANS
A Montlouis et Amboise.
JEAN-MICHEL BLANQUER
A Montlouis et Amboise, pour distribuer les posters sur les objectifs de développement durable, et, vous le savez, nous faisons beaucoup, là en ce moment, en matière d'environnement à l'école…
FRANÇOIS DESPLANS
Yann ARTHUS-BERTRAND dit que l'école est en avance par rapport au reste de la société, c'est vrai ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Oui, d'abord parce qu'on fait beaucoup de choses, aussi parce que les élèves eux-mêmes, spontanément sont très sensibilisés à cela, et moi, ce que je souhaite, c'est qu'on tienne un discours à la jeunesse sur ce sujet, comme sur d'autres, qui soit un discours positif sur l'avenir si vous voulez. Il y en a un peu assez des discours gris et pessimistes, des discours presque de fin du monde qu'il y a parfois, alors même que c'est aussi une génération qui a des outils, technologiques et autres, pour agir plus que le pouvaient les générations précédentes. Et donc, mon but c'est de leur montrer de manière concrète comment agir sur les questions d'environnement. on a défini, avec les lycéens, 8 catégories d'actions, que nous mettons maintenant en oeuvre, on a élu des éco-délégués dans toutes les classes de France, ça fait 250.000 éco-délégués, vous avez 60.000 implantations scolaires en France, si on est bon dans la vie quotidienne, dans le fait de moins utiliser les plastiques, dans le fait de bien trier les déchets, dans le fait de moins dépenser d'énergie, dans le fait de nettoyer autour de nous, d'éviter la pollution, dans le fait de développer des potagers dans les écoles primaires, développer les ruches, les nichoirs à oiseaux, bref, toutes ces actions ultra concrètes, que les élèves adorent faire en plus, eh bien on va avoir un impact assez considérable, et surtout on va développer des générations d'acteurs de l'environnement qui vont avoir une approche positive et une sorte de renouveau du rapport à la nature dont nous avons besoin.
FRANÇOIS DESPLANS
Et sécher les cours le vendredi pour défendre la planète, ça peut être la 9e action ou pas ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Non, parce que moi ce que je dis aux élèves, je l'ai encore dit hier, c'est dans ce monde dans lequel nous rentrons, nous sommes en train de changer de civilisation à bien des égards, notamment ultra technologiques, mais aussi une civilisation où il faut réinventer le rapport à la nature de manière positive. Dans cette civilisation on a besoin d'être tous très éduqués, de savoir beaucoup de choses, beaucoup de ces élèves vont avoir des métiers en rapport avec l'environnement, quel que soit leur niveau d'études, sur l'énergie, le bâtiment, l'alimentation, et donc on doit avoir cette nouvelle alliance avec la nature, qui suppose du savoir et du savoir-faire, d'où l'importance aussi des lycées professionnels, des lycées agricoles, etc. Et pour cela, les enjeux d'environnement doivent être synonymes de travail, et donc il faut travailler, je serais un drôle, un bizarre ministre de l'Education nationale si je disais que c'est bien de ne pas aller en cours. En revanche, quand il y a eu la mobilisation en mars, j'avais proposé aux lycéens qu'on fasse des commissions pour réfléchir, il ne s'agit pas seulement de dire, il faut agir, c'est ce qui s'est passé, nous avons tous été fidèles à cet engagement, puisque maintenant cette action qu'on a eu ensemble débouche sur 8 catégories de mesures dont je vous parlais à l'instant.
FRANÇOIS DESPLANS
Une toute dernière question, politique Jean-Michel BLANQUER. Vous avez vu ce sondage paru dans Le Figaro ce matin, François BAROIN serait plus compétent et plus proche des Français qu'Emmanuel MACRON. C'est un grand ami à vous, on le sait, François DESPLANS, 2022 vous serez derrière François BAROIN ou Emmanuel MACRON ?
JEAN-MICHEL BLANQUER
Je travaille avec Emmanuel MACRON, je soutiens totalement ce que fait Emmanuel MACRON, nous sommes une équipe, et j'ai évidemment vocation à être fidèle à tout cela, et par ailleurs il est connu que je suis ami d'enfance avec François, et je sais, comme ça vous arrive, vous savez, dans une famille, vous adorez votre cousin mais vous n'êtes pas d'accord avec lui pendant le repas du dimanche sur des aspects politiques, eh bien ça peut arriver à tout le monde, et voilà. Mais par ailleurs on a aussi des points de convergence avec François, bien sûr.
FRANÇOIS DESPLANS
Merci, merci beaucoup Jean-Michel BLANQUER, ministre de l'Education nationale, d'avoir été notre invité en direct sur France Bleu Touraine, vous êtes attendu dans quelques minutes au lycée d'Arsonval à Joué-lès-Tours, puis au Campus des métiers pour parler de la réforme de la voie professionnelle. Merci d'avoir été notre invité sur France Bleu Touraine.
JEAN-MICHEL BLANQUER
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 22 novembre 2019